Liturgie : un motu proprio inefficace ? (12/03/2011)
Le mouvement « Paix Liturgique », militant pour la liberté d’usage de la forme extraordinaire de la messe romaine, vient de rendre publique la lettre par laquelle il attire l’attention du cardinal Bertone, Secrétaire d’Etat du pape, sur l’une des déficiences majeures du « Motu proprio Summorum Pontificum » (7 juillet 2007) de Benoît XVI réglant les modalités de cet « usus antiquior » de la messe (et des autres sacrements).
Le grand reproche est que, dans le domaine de la célébration publique du culte selon la forme dite extraordinaire, le « motu proprio » semble n’être qu’exhortatif.
La disposition principale de ce texte se trouve dans l’article 5 § 1, qui invite à instaurer dans les paroisses une coexistence harmonieuse entre les deux formes du rite : « Dans les paroisses où il existe un groupe stable de fidèles attachés à la tradition liturgique antérieure, le curé accueillera volontiers leur demande de célébrer la messe selon le rite du Missel romain édité en 1962 ».
Mais, en fait, cette disposition est généralement considérée comme purement incitative.
Un recours est certes prévu si le curé refuse au groupe de fidèles qui la demande la célébration publique de la messe traditionnelle : ce groupe peut en informer l’évêque, et si l’évêque ne pourvoit pas à la demande, le groupe peut en référer à la Commission Pontificale « Ecclesia Dei » (art. 7).
Et puis quoi ? Depuis plus de trois années d’existence, l’application de « Summorum Pontificum » a été marquée par une très grande quantité de refus (il fallait s’y attendre) suivis d’informations à l’évêque puis de recours sans effet à la Commission Pontificale.
Autrement dit :
- - un droit des fidèles du Christ laïcs, d’ordre liturgique, est affirmé (usage d’un missel jamais abrogé – art. 1 – dont un groupe de fidèles peut demander l’usage paroissial public – art. 5, § 1) ;
- - une Commission Pontificale liée à un Dicastère de la Curie Romaine, et aujourd’hui présidée par le cardinal Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi, est déclarée compétente pour faire respecter ce droit (art. 12) ;
- - un recours auprès de cette Commission est prévu pour faire respecter ce droit lorsqu’il n’est pas satisfait (art. 7) ;
- - mais le moyen juridictionnel pour faire appliquer le droit des fidèles n'est pas donné à l’organisme compétent qui reçoit le recours au nom du Saint Siège. Plus exactement, ce moyen n’est pas explicité, car en bonne logique juridique il ne peut pas ne pas exister. Sauf à inviter les demandeurs déboutés par le curé et par l’évêque à se pourvoir devant les tribunaux ecclésiastiques.
La supplique adressée au cardinal Bertone porte donc sur la précision suivante : indiquer expressément à l’article 7 que lorsque le groupe de fidèles, dont le droit n’est satisfait ni par le curé ni par l’évêque, a introduit un recours auprès de la Commission Pontificale « Ecclesia Dei » la Commission a le pouvoir de faire prendre au curé toutes dispositions pour satisfaire ce droit.
Ce qui aurait pu paraître a priori implicite ne l’est apparemment pas jusqu’ici …
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Commentaires
Comme le souligne un correspondant du blog "osservatore vaticano",
avec Summorum Pontificum, un véritable droit à l’usus antiquior a été reconnu mais, comme le disent aussi les signataires de cet appel au Cardinal Bertone, la commission ED n’a toujours pas de pouvoirs pour faire appliquer ce droit. Ou plutôt, elle a des pouvoirs non spécifiés, selon un dispositif non spécifié. C’est là toute la question soulevée par cet appel.
Oui, une clarification s'impose.
Écrit par : Tchantchès | 15/03/2011