Pourquoi la Lybie ? Pourquoi pas la Côte d'Ivoire ? (22/03/2011)

Alors que tant de pays connaissent des situations dramatiques marquées par la guerre civile (la Côte d'Ivoire), l'oppression politique (la plupart des pays arabes), la répression aveugle (la Syrie, le Bahrein...), on peut se poser la question de savoir ce qui vaut à la Lybie le privilège d'une intervention musclée de la "communauté internationale" pour y restaurer la démocratie... Le commentaire de Régis Soubrouillard reproduit ci-dessous développe cette question avec beaucoup de pertinence :

"Imparable à première vue: si l’on est favorable au droit d’ingérence, il ne doit souffrir aucune exception. La Libye certes, mais pourquoi pas la Tchétchénie, la Côte d’Ivoire, le Yémen, Bahreïn, l’Arabie Saoudite, la Corée du Nord. Tous les pays arabes et tous les Etats africains -qui se font très discrets dans leur pseudo-soutien à ce qui ressemble de plus en plus à une opération occidentale- encore sous le joug d’une dictature. Et la Chine, si le cœur vous en dit…

Le conseiller pour la sécurité de Barack Obama y est allé de ses explications estimant que les situations en Libye et à Bahreïn « n’étaient pas comparables.  Manama (NDLR : la capitale de Bahreïn) est un allié de longue date des Etats-Unis. La magnitude de la violence en Libye, où il y avait un dirigeant qui était en train de mener une campagne militaire de facto contre son propre peuple, excédait celle des situations dans d'autres pays du Moyen-Orient » a expliqué Ben Rhodes.


Théâtre de graves violences la semaine dernière entre le pouvoir et des manifestants conduits par les chiites, un chef de l'opposition a affirmé que 100 personnes étaient toujours portées disparues depuis le début de la contestation le 14 février, au cours de laquelle 16 personnes, 12 protestataires et 4 policiers, ont été tuées et des centaines blessées. Pour taper sur sa population et mater ses révolutions, mieux vaut donc quand même être un allié des USA avec quelques barils de pétrole à refourguer à la première puissance mondiale.
 
Démonstration par l’absurde que les « expéditions démocratico-médiatiques destinées à faire avancer la démocratie au son du canon » selon l’expression du philosophe Marcel Gauchet, relèvent plus de l’arbitraire que d'un quelconque « droit » qui s'imposerait à tous. Tout engagement de la communauté internationale dans une action démocratique est le résultat d’un savant dosage aux ingrédients le plus souvent mystérieux. Depuis le Kosovo, la guerre d’Irak et encore plus l’Afghanistan, tout ce qui pouvait être « démocratisé » facilement l’a été. Toute intervention de la communauté internationale est aujourd’hui la promesse contraignante d’un engagement coûteux humainement et économiquement, sur une longue période. Un coût de moins en moins accepté par les opinions occidentales. D'où des opérations loin d’être toujours populaires quand elles se prolongent et d’autant plus délicates à négocier politiquement et diplomatiquement. Le tout sans garantie véritable de résultats. L'ingérence démocratique, très en vogue sous Reagan et Bush reprend du poil de la bête. Si elle se justifie dans les cas extrêmes de guerre civile ou de génocide, les bombardements de modèles politiques démocratiques prêts à l'emploi n'ont jamais fait la preuve de leur efficacité.
source : Marianne2.fr
...et pendant ce temps-là, « la Côte-d’Ivoire sombre dans la guerre civile » déclarent à l’Agence Fides des sources de l’Eglise locale qui désirent conserver l’anonymat pour raisons de sécurité. « Les combats à Abidjan, la capitale administrative et économique du pays, sont à l’ordre du jour. Des zones entières de la ville sont le théâtre de violences, en particulier Abobo et Yopougon, où les civils ont soit choisi de fuir soit se trouvent bloqués à leur domicile » affirment nos sources.
« A Abobo, dans la journée d’hier, un projectile d’arme lourde est tombé dans les environs d’un couvent de Clarisses. Heureusement, les religieuses se trouvaient dans la chapelle pour prier et n’ont pas été touchées mais le couvent a tout de même subi des dommages » indiquent les sources de Fides. « Les responsables religieux de Côte-d’Ivoire cherchent actuellement une médiation mais il semble difficile de joindre les deux parties. Les difficultés de communication créent en outre un obstacle au processus d’élaboration d’une position commune de la part des représentants religieux » concluent les sources de Fides.
Selon des nouvelles provenant de la presse locale, le Parti du Président sortant, Laurent Gbagbo, a invité ses jeunes militants à s’enrôler en masse dans les forces armées. Les miliciens des Forces nouvelles, les anciens rebelles qui soutiennent le Président élu Alassane Ouattara, sont passés à l’attaque dans l’ouest du pays alors qu’ils poursuivent leur offensive à Abidjan en direction du quartier de Cocody où sont concentrés les palais du pouvoir.
Le gouvernement du Nigeria a critiqué les « contradictions » de la communauté internationale qui concentre son attention sur la Libye au détriment de la Côte-d’Ivoire désormais au bord d’une véritable guerre civile. (L.M.) (Agence Fides 22/03/2011)

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