Une nouveauté juridique : la justice pâtissière (21/04/2011)

3790036388.jpgLes « entartages » à répétition du primat de Belgique, Mgr André- Joseph Léonard, lors d’un office religieux à Bruxelles le 1er novembre 2010, puis à Louvain-la-Neuve au cours d’un débat contradictoire avec le professeur Jean Bricmont sur le thème des rapports entre la science et la foi demeureront-ils impunis, sous le regard bovin (ou complice) de la société civile ?

M. Omer-Mutien Houziaux,  ancien maître de conférence à l’Université de Liège, nous communique le  billet d’humeur qu’il avait alors adressé à « La Libre Belgique » mais que celle-ci n’a pas daigné prendre en considération. Voici donc le texte refusé par le journal « pluraliste » de la capitale :

« En matière de « justice pâtissière », le sieur Noël Godin et ses « brigades internationales » peuvent exhiber, depuis très longtemps, un palmarès peu banal, tant par le nombre que par la qualité des personnes gratifiées de crème chantilly. Que des autorités judiciaires soient si rarement intervenues – et de manière souvent très clémente – pour mettre un terme à ces peu glorieux agissements laisserait à penser que l’entarteur en chef et ses sbires jouissent de protections en haut lieu. Derniers exploits : les agressions pâtissières subies par Mgr Léonard, primat de Belgique, d’abord lors d’un office religieux (Bruxelles, Toussaint 2010) et, par quatre fois, à l’occasion d’un débat organisé à Louvain-la-Neuve (5-4-2010) sur le thème « Foi et Science ». Avec une souriante complaisance et sur le ton de l’anecdote, ces incidents ont été rapportés par diverses voies médiatiques.

Questions. Aux entarteurs d’abord. Ne croyez-vous pas qu’il y ait quelque lâcheté à vous en prendre à un prélat qui semble appliquer à la lettre (et de façon trop irénique selon beaucoup) la consigne christique de « tendre l’autre joue » ? Agiriez-vous de même avec le chef spirituel d’une autre religion, au demeurant en soi respectable, mais dont certains adeptes se sont forgé une solide réputation en matière de rétorsions parfois violentes ? Vous pourriez aussi offrir vos protestations pâtissières à un dignitaire de la pensée laïque… – Aux témoins ensuite. Que l’on partage ou non les prises de position d’un orateur  en diverses matières sensibles relève de la liberté de conscience. Mais que, lors d’une paisible réunion, et malgré une évidente supériorité numérique, les auditeurs – et, au premier chef, les organisateurs – n’empêchent pas trois ou quatre agitateurs d’ « argumenter » de la façon que l’on sait, cela dépasse l’entendement. D’ailleurs, puisque la rencontre à laquelle ils assistaient a été perturbée, les préjudiciés ne seraient-ils pas fondés à porter plainte auprès des autorités civiles compétentes ? Après tout, à leur égard aussi, les perturbateurs ont manqué de respect.– Aux autorités civiles enfin. Nos bourgmestres, nos ministres, nos élus ont-ils le droit de fermer les yeux sur des atteintes à la tranquillité d’une séance publique ? La liberté d’expression ne serait-elle légitime que lorsqu’elle obéit au « politiquement correct » de citoyens formatés, décérébrés? Faudra-t-il qu’une personne au cœur fragile succombe à un infarctus pour que la Justice tempère les ardeurs belliqueuses de quelques hurluberlus ?  Dans le cas qui nous occupe ici, il convient encore de souligner qu’en s’en prenant à une haute autorité religieuse, c’est toute une communauté qu’on insulte, lui contestant une liberté pourtant garantie par toutes les lois en vigueur  dans les pays non dictatoriaux. Serait-ce que depuis 1968, il serait interdit d’interdire ? Serait-ce que l’outrage à une personne jugée « réac » est autorisé, pour cause de délit d’opinion ? Et que le laxisme judiciaire aille jusqu’à tolérer l’intolérable[1] ? Mesdames et Messieurs les responsables, à vos responsabilités !

Mutien-Omer Houziaux, Esneux. »

La grossièreté des « arguments » employés par les dévôts de la morale sécularisée se passe évidemment de commentaires. Reste que si l’obscurantisme a changé de camp, la loi pénale demeure tout de même: elle continue de protéger la liberté individuelle et celle de la religion : elle réprime les actes de violence commis sur les personnes en général (pour les coups volontaires : huit jours à six mois et amende de vingt-six  à cent [euros], ou une de ces peines seulement. En cas de préméditation, un mois à un an et  une amende de cinquante à deux cents [euros]. Art. 398 du CP)  ainsi que les désordres et outrages touchant à l’exercice et aux objets du culte (huit jours à six mois et d'une amende de vingt-six [euros] à cent [euros], ou une de ces peines seulement, art.143 et 144 CP) ou à la  personne de ses ministres « dans l’exercice de leur ministère » (emprisonnement de deux mois à deux ans et d'une amende de cinquante à cinq cents [euros] art 145 CP)

Comme la justice pénale est inquisitoire, il n’est, en principe, nul besoin d’une plainte ou d’une constitution de partie civile émanant des fidèles dont le culte a été perturbé ou du pasteur outragé dans l’exercice de son ministère, pour poursuivre les contrevenants. En pratique, il est douteux que la justice belge  soit prompte à faire, motu proprio, son office contre les récidivistes de ce genre  d’attentat. Pourtant, si les dispositions légales d’ordre public veulent encore dire quelque chose, une condamnation de deux mois à deux ans de prison, même avec sursis, cela pourrait toujours faire réfléchir les monomaniaques de l’incivilité. Il n’est jamais trop tard pour bien faire.



[1] Je ne suis pas juriste, mentionne M. Houziaux au bas de son article, mais tout de même. Dans le cas d’une perturbation du culte (Toussaint 2010), l’article 143 du Code pénal belge semble assez explicite : « Ceux qui, par des troubles ou des désordres, auront empêché, retardé ou interrompu les exercices d'un culte qui se pratiquent dans un lieu destiné ou servant habituellement au culte ou dans les cérémonies publiques de ce culte, seront punis d'un emprisonnement de huit jours à trois mois et d'une amende de vingt-six [euros] à cinq cents [euros] <L 2000-06-26/42, art. 2, En vigueur : 01-01-2002> » (Internet). M.O.H.

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