Les dinosaures se rebiffent (02/03/2012)
Lu sur le site Chiesa de Sandro Magister (extraits) :
« La revue internationale de théologie "Concilium" a consacré son dernier numéro à un thème plus que jamais actuel : "Économie et religion".
Dans leur éditorial qui sert d’introduction, les deux responsables de ce numéro, le Brésilien Luiz Carlos Susin et le Néerlandais Erik Borgman, se fixent un objectif très ambitieux. Après l'"économie du salut" définie par Eusèbe de Césarée et l' "économie comme salut" théorisée par Max Weber, il faut aujourd’hui – écrivent-ils – un "salut de l'économie".(…)
Parmi les neuf textes - dus au même nombre d’auteurs - qui composent ce numéro de "Concilium", il en est un qui analyse la doctrine sociale de l’Église telle qu’elle est contenue dans ceux de ses documents qui font le plus autorité.
L'auteur de ce texte-là, Johan Verstraeten (photo), Belge, enseigne à l'Université Catholique de Louvain (ndlr : K.U.L.) et il est membre du comité de rédaction de la revue "Business Ethics" et de celui du "Journal of Catholic Social Thought".
Il a intitulé son essai : "Repenser l'économie : une question d’amour ou de justice ? Le cas du 'Compendium de la doctrine sociale de l’Église et l'encyclique 'Caritas in veritate'".
Le jugement que l'auteur porte sur les deux documents cités dans ce titre est négatif. Alors que dans le passé – explique-t-il en introduction – l’Église avait maintenu un certain équilibre entre les éloges et les critiques qu’elle faisait du système capitaliste, allant jusqu’à manifester "de la sympathie pour une économie de marché socialement correcte, avec une préférence pour le modèle rhénan par rapport au capitalisme de type anglo-saxon", aujourd’hui cet équilibre s’est rompu. Et le virage en faveur du marché est imputé au pape actuel qui, dans sa dernière encyclique, "sous-évalue les aspects structurels et institutionnels de la pauvreté et du sous-développement".
Mais est-ce vrai ? (…) Le professeur Stefano Ceccanti, sénateur du Parti démocrate et enseignant de droit public comparé à l'Université "La Sapienza" de Rome analyse : (…) : Verstraeten attaque le magistère de l’Église - tout particulièrement le "Compendium de la doctrine sociale de l’Église" publié en 2006 et l'encyclique de Benoît XVI "Caritas in veritate" publiée en 2009. (…)
L'auteur considère que (…) le "Compendium" aurait le tort d’avoir repris le schéma de l'instruction "Libertatis conscientia" sur la théologie de la libération, publiée en 1986 par celui qui était alors le cardinal Joseph Ratzinger (…). En effet, qu’exprimerait ce schéma ? Une mentalité selon laquelle "l'éthique sociale catholique, en ce qui concerne les questions économiques", se réduit à "une matière d’actions individuelles ou intersubjectives", alors que la nécessité du changement des "structures injustes" serait reléguée à une place marginale. En d’autres termes (…), l'auteur accuse Benoît XVI d’être "polyarchique", c’est-à-dire de n’attribuer qu’un rôle partiel à la politique, à côté d’autres pouvoirs.(…)
Dans "Caritas in veritate" – concède Verstraeten – on trouve ici où là quelques ouvertures plus importantes aux "politiques sociales de l’État" par rapport au "Compendium", mais cela n’empêche pas – accuse-t-il – l'encyclique de "rester plutôt critique en ce qui concerne l’État" et au contraire de compter davantage sur le principe de subsidiarité.
La stratégie du courant critique incarné par Verstraeten est toujours la même et elle fonctionne en deux temps. La première étape consiste à prendre ses distances avec une lecture (…) qui perçoit la politique comme une sphère sociale parmi d’autres, sans primautés ni hiérarchies, sur le même plan que l'économie. La seconde étape consiste à prendre ses distances avec l'évolution du magistère social de l’Église, soit sous la forme de la critique explicite, soit sous celle, plus subtile, qui consiste à feindre d’en ignorer l'évident développement, en se limitant éventuellement à une lecture schématique qui unit les encycliques "Quadragesimo anno" (1931) et "Populorum progressio" (1967).
La conclusion logique de Verstraeten est que "aussi bien le 'Compendium' que 'Caritas in veritate' ont besoin d’être révisés" en recentrant le tout sur des "institutions justes", pivot d’une économie fondée sur la 'iustitia in veritate'" (…)A vrai dire, les opinions de Verstraeten et de ceux qui pensent comme lui apparaissent comme théologiquement marquées par un "conservatisme de gauche" qui n’a pas encore tenu compte de la chute du Mur de Berlin et de sa leçon antimonarchique, contre la prédominance de l’État et de la politique. Voir ici :"Concilium" critique le pape: il est du côté des capitalistes
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Commentaires
Vous avez dit K.U.L. ? Tiens, c`est bizarre.
Écrit par : Chapeau | 04/03/2012