Syrie : quand prudence et circonspection s'imposent (23/04/2012)

Nous sommes un peu étonnés de voir un célèbre journaliste catholique reprendre à son compte, sur son blog, les déclarations de la Mère Agnès-Mariam de la Croix sur la situation en Syrie. Les positions inconditionnellement favorables au régime de Bachar el-Hassad de cette religieuse qui attise les tensions sont à prendre avec un minimum de précautions et sont loin de refléter le sentiment de l'ensemble des chrétiens syriens. Elles risquent en outre, en amalgamant la défense de la minorité chrétienne avec le soutien au régime, de compromettre les chrétiens qui sont ainsi désignés comme des partisans inconditionnels d'el-Hassad. Cela ne signifie pas que ces propos de la Mère Agnès-Mariam soient mensongers ou dénués d'intérêt mais ils doivent être lus et entendus avec la circonspection qui s'impose parce qu'ils semblent ne pas tendre à l'objectivité et alimenter une logique de guerre civile.

Plus crédibles sans doute, ces informations transmises par l'agence Fides :

Montée en puissance du militantisme islamique au sein de l'opposition syrienne

De « Journée de la dignité » à « Vendredi des Armées de l’islam » : de ces titres, choisis pour les manifestations de l’opposition syrienne, il est possible d’appréhender la montée en puissance du militantisme islamique, wahhabite et salafiste, dans les rangs des rebelles syriens. Comme cela a déjà été le cas dans les expériences du Printemps arabe au Yémen, les dissidents ont choisi de donner un titre, variant à chaque fois, aux manifestations de protestation organisées chaque vendredi. La première journée de protestation publique, en mars 2011, celle qui inaugura la révolte, fut appelée « Journée de la dignité » et elle indiquait le désir de renaissance, de dignité, de droits et de démocratie existant chez les révolutionnaires.

Un an après le début des soulèvements populaires, ainsi que l’affirment des sources de Fides en Syrie, le militantisme islamique prend toujours davantage pied. En ce qui concerne le choix du titre de la manifestation du 13 avril dernier, réalisé par l’intermédiaire d’un sondage sur le réseau social Facebook, au nombre des quelques 30.000 réponses de militants, le titre le plus voté a longtemps été « Vendredi des armées de l’islam, salut de la Syrie ». Il s’agit d’un signal clair de la croissance de l’idéologie islamique, croissance qui préoccupe toutes les minorités religieuses, chrétiens compris. C’est seulement « au photo-finish » et grâce à l’intervention des responsables du Conseil de la Révolution syrienne que la manifestation a finalement été intitulée : « Une révolution pour tous les syriens ».

« Cette affaire et les acclamations réservées aux armées de l’islam de la part de tant de militants constituent un signe évident du fait que l’opposition syrienne est divisée et que l’âme islamique wahhabite et salafiste, encouragée par des forces extérieures, prend pied » commente, alarmée, une source de Fides au sein de la communauté chrétienne en Syrie. « Le danger est que le fondamentalisme islamique, encouragé par des pays étrangers, s’empare de la révolution syrienne. Ce serait alors la fin des minorités ethniques et religieuses qui souffrent déjà beaucoup en Syrie, mais aussi la fin du pluralisme culturel et religieux qui caractérise la nation syrienne ». (PA) (Agence Fides 21/04/2012)

De même, ces autres informations :

Les chrétiens, cibles de bandes armées privées de tout contrôle

 

Qusayr (Agence Fides) – Des bandes de miliciens islamiques, sans contrôle, sévissent dans le cadre du conflit en cours en Syrie, tuant des civils innocents et prenant pour cibles les chrétiens. C’est ce que confirment des sources directes de l’Agence Fides dans différentes localités de Syrie, sources qui lancent une alerte en ce qui concerne la poursuite de ce qu’il est convenu d’appeler la « révolution syrienne ».

La situation est tragique dans la ville de Qusayr, dans le nord de la Syrie, au sein du district de Homs. Des bandes de miliciens provenant des rangs de l’opposition syrienne ont totalement détruit toute une rue chrétienne, non loin de l’église catholique. Le Curé s’est enfui et « il n’est pas même possible d’ensevelir les cadavres » remarque une source de Fides.

De terribles vengeances sont mises en œuvre contre ceux qui tentent de dénoncer cette situation : le chrétien André Arbache, père de famille de 30 ans, a été enlevé en janvier dernier parce que son frère a dénoncé ouvertement à la télévision les violences perpétrées par les bandes armées. André a été contraint à s’engager dans l’Armée de libération syrienne. Voici deux jours, son cadavre a été retrouvé à Qusayr, décapité et abandonné, mangé par les chiens.

Les chrétiens sont victimes d’enlèvements. Trois fidèles enlevés, Sate Semaan, Oussama Semaan et Assaad Nakhlé, ont été libérés après le paiement d’une forte rançon. Des épisodes semblables ont également été enregistrés à Yabrud et Deir Atieh, dans les environs de Qara. « Personne ne sait exactement qui sont ces miliciens. Nous savons seulement qu’ils n’ont aucune hiérarchie et sont divisés en bandes armées qui cherchent de l’argent et n’hésitent pas à se rendre coupables de violences et de vols à l’encontre des civils » continue la source de Fides.

« Des nouvelles terribles circulent faisant mention du massacre de familles entières alors que certains instiguent à une guerre confessionnelle » poursuit-elle. La chaîne de télévision salafiste Channel TV Safa Cheikh Arour a invité l’Armée de libération syrienne « à attaquer les chrétiens infidèles » à Saydnaya et à Maaloula et à « poursuivre les chrétiens, alliés du régime ». Dans des localités telles que Qalamoun, la coexistence entre les différentes communautés, garantie jusqu’à hier, est fortement menacée et certains extrémistes invitent à « interrompre tout rapport avec les chrétiens ». (PA) (Agence Fides 21/04/2012)

Voir encore ce témoignage d'un jésuite à Homs

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