Le Goncourt a couronné "le Sermon sur la Chute de Rome" de Ferrari (08/11/2012)

Je n'ai pas les compétences pour émettre un avis autorisé sur ce roman que j'ai lu avec des sentiments mélangés. L'écriture m'a semblé ample et belle mais le propos fondamentalement pessimiste. J'ai eu l'impression que saint Augustin n'avait été convoqué par l'auteur que pour y voir son propos disqualifié car il n'y a pas d'autre horizon dans ce livre que le tragique de nos destinées et où les promesses n'existent que pour ne pas être tenues. Je me trouvais renvoyé à une vision désespérée et desespérante d'un homme abandonné "seul et sans excuses". Je ne peux que faire miennes ces réflexions de Astrid de Larminat (Le Figaro) dans son compte-rendu du livre de Jérôme Ferrari (les "gras" sont de belgicatho) :

"Ce roman très corse est aussi universel que la tragédie grecque. Les paysages, abrupts, originels, paradisiaques, invitent à un questionnement radical. L'auteur écrit une langue torturée, mais emportée par la grâce. Il cherche une réponse à ses questions métaphysiques dans «les grondements du fleuve dont on entendait couler les flots invisibles tout au fond du précipice encaissé qui déchirait la montagne comme une plaie profonde, un sillon tracé par le doigt de Dieu tout au début du monde». Mais le paysage et son créateur restent muets.

Jérôme Ferrari encadre sa méditation sur le sens de l'histoire par des références, malheureusement trop hâtives, aux Sermons sur la chute de Rome de saint Augustin. Certes, le rapprochement entre le Ve siècle qui vit l'effondrement d'une civilisation et le nôtre se justifie. On sent que l'auteur cherche dans le fameux pessimisme augustinien sur la nature humaine un écho au sien. Mais ce Corse est trop imprégné des puissances païennes de son île pour faire droit à l'espérance chrétienne de l'évêque d'Hippone. Dès lors, le sentiment qui prédomine est que le destin est aveugle et l'histoire sans fin. Celle qu'il conte pourtant est sauvée de l'absurde par quelques personnages féminins, effacés, mais insistants, clignotants comme des sentinelles, sur l'âme desquelles les malheurs glissent sans laisser de sales traces noires."

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