Cachez ces différences… (16/02/2013)

La « Libre » ex Belgique, postchrétienne et pluraliste, nous a habitués à la juxtaposition des thèses contradictoires et le temps n’est plus où le monde catholique donnait une image cohérente des principes moraux défendus par le magistère de l’Eglise. A ce propos,  M. Mutien-Omer Houziaux, ancien maître de conférence à l’Université de Liège, nous livre ici la réflexion qu’il a fait parvenir à la rédaction de « La Libre » :   

« V’là qu’ils s’arrêtent entre eux maintenant, ça doit pas marcher ben fort ! On aura reconnu une des boutades qui foisonnent dans le scénario de La grande vadrouille. Rappelons, si besoin est en cette période où l’on célèbre le talent de Louis de Funès, les circonstances dans lesquelles ces paroles sont prononcées. Les fugitifs Stanislas et Augustin déguisés en militaires allemands, se font coffrer par des soldats du Führer. Un pêcheur observe l’arrestation, d’où son constat goguenard : V’là qu’ils… Au vu de certaines passes d’armes qu’accueille un même quotidien à propos du « mariage » homosexuel, on devine le profil politico-philosophique de ceux qui, dans nos démocraties avancées, joueraient le rôle du pêcheur. Que le sénateur Mahoux aille porter au Parlement français la bonne nouvelle des vertus de l’homoparentalité, qui s’en étonnera ? Il est dans la ligne du parti et du laïcisme militant. Mais on peut se demander si l’Université catholique de Louvain ne serait pas atteinte de schizophrénie quand œuvrent  en son sein deux philosophes défendant, sur un sujet sociétal majeur, des thèses diamétralement opposées (M. Ghins, « Quel bilan pour le mariage homosexuel en Belgique ? », LLB, 13-01-2013 et J. Leclercq, « Cachez cet homosexuel… et son T-shirt », LLB 07-02-2013).

N’en déplaise à M. Jean Leclercq, qu’on croirait préposé à la distribution de T-shirts d’un certain modèle, les arguments avancés par son docte confrère, philosophe et physicien, sont tout autre chose que des « pétitions de principes » ou des « arguments d’autorité » (comme il l’a écrit dans plus d’un article de LLB). Sans vouloir me livrer ici à une exégèse des thèses avancées par les uns et les autres, je voudrais, en deux mots, souligner une incohérence dans l’argumentaire des (p)artisans d’un changement radical de paradigme sociologique : la conception même de la famille. On sait que, selon l’air de ce temps, il est bon d’affirmer que « la vérité est plurielle ». Il est cependant  des domaines éthiques où l’on ne devrait pas transiger. Ainsi en va-t-il du droit naturel de l’enfant, qui ne peut, dans une société civilisée, être mis en balance avec un droit « légalisé » à l’enfant, ce qui, à la limite, réifie celui-ci, le faisant passer du statut de sujet à celui d’objet. On transgresse gravement la Convention relative aux droits de l’enfant (ONU, 1989) quand on donne aux mots famille et parent des acceptions manifestement étrangères au cadre sémantique général et donc à l’esprit de ladite Convention. Il est d’ailleurs patent que des falsifications lexicales actuellement à l’œuvre conduisent à transgresser l’article 7.1  du texte onusien. Cet article dispose que  dès la naissance, l’enfant a « dans la mesure du possible, le droit de connaître ses parents et d'être élevé par eux ». Et l’article suivant indique clairement que les relations familiales définissent l’identité de l’enfant.

Longtemps, et à juste raison, les homosexuels ont revendiqué le « droit à la différence ». L’exercice de ce droit n’entraînerait-il pas des conséquences naturelles ? Ne se trouve-t-on pas ici dans une confusion (volontaire) entre identité et égalité ?  L’homme et la femme sont égaux en droit et en dignité, mais toutes les contorsions sémantiques ne parviendront jamais à les déclarer identiques en matière de parentalité, quoi que fassent les idéologues du « gender ». Le slogan « le mariage pour tous !» est littéralement incompréhensible… sauf si l’on donne au mot mariage un sens qu’il n’a jamais eu et qui supposerait une indifférenciation des sexes. Bientôt, on réclamera « un utérus pour tous » et, partant, « des gynécologues pour tous«, ou encore « des attributs masculins pour tous » et, partant, « des andrologues pour tous ». Et pourquoi pas « l’hermaphrodisme pour tous » ? En l’espèce, cette dernière utopie annulerait la distinction entre identité et égalité.

Dans son Exégèse des lieux communs, Léon Bloy observe : « Plus on est semblable à tout le monde, plus on est comme il faut. C’est le sacre de la multitude. » Il est des sacres qu’il faut avoir le courage de refuser : la pensée libre est à ce prix. »

Mutien-Omer Houziaux, Auteur de À contretemps, Regards politiquement incorrects. Essai. Mols-DDB, 2010.

Références :

Quel bilan pour le mariage homosexuel en Belgique ?

Cachez cet homosexuel...

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