Mgr Maroy : « et si la Belgique se penchait sur la RDC ? » (10/03/2013)

Lu sur le site des médias catholiques belges :

De passage en Belgique, Mgr François-Xavier Maroy, archevêque de Bukavu à l’Est du Congo, souhaite que la Belgique intervienne militairement au Congo. Il pèse à peine ses mots : « Pourquoi ne pas participer à une mission de paix en tant qu’ancien colonisateur ? Que d’autre fait la France au Mali ? »

Originaire de la capitale du Kivu, Mgr François-Xavier Maroy Rusengo sait bien que le siège d’archevêque de Bukavu qu’il occupe n’est pas des plus stables. Il est déjà le troisième successeur du jésuite Christophe Munzihirwa Mwene Ngabo, assassiné en octobre 1996. Par ailleurs, il a aussi la charge, en tant qu’administrateur, du diocèse d’Uvira, depuis la nomination de Mgr Jean-Pierre Tafunga Mbayo au siège archiépiscopal de Lubumbashi.

L’espoir d’Addis-Abeba

L’Est de la République Démocratique du Congo (RDC) reste une région en proie à la guerre et aux violences. Depuis plusieurs semaines, les rebelles du M23, soutenus par le Rwanda et l’Ouganda, négocient avec les autorités congolaises. Le 24 février dernier, un accord-cadre a été signé à Addis-Abeba, en Ethiopie, par onze pays africains sous l’égide des Nations Unies. Avalisé par le Conseil de sécurité de l’ONU, cet accord-cadre – dans lequel le président congolais Joseph Kabila promet d’accélérer sa réforme du secteur de la sécurité et de poursuivre les réformes démocratiques – prévoit aussi que les pays voisins s’engagent pour leur part à ne pas aider ni soutenir de mouvement rebelle en RDC. Dans les jours qui ont suivi l’accord, le M23, qui tient en échec l’armée congolaise depuis près d’un an, a éclaté en deux factions. Son chef militaire, le général Sultani Makenga, partisan d’une normalisation des rapports avec Kinshasa, a destitué de ses fonctions le président politique Jean-Marie Runiga, qui voulait reprendre la guerre, estimant ne pas pouvoir faire confiance à Kinshasa. Les partisans des deux hommes se sont tirés dessus, faisant plusieurs dizaines de morts des deux côtés. Runiga, accusé de collaborer avec le général mutin Bosco Ntaganda, recherché par la Cour pénale internationale pour crimes de guerre et crimes contre l’humanité, serait maintenant réfugié dans le parc des Virunga avec 500 partisans, selon le M23 et une source militaire occidentale.

Pour l’archevêque de Bukavu, il reste à espérer que l’accord soit appliqué et respecter. « Notre région vit sous les tensions et les conflits armés continus depuis presque deux décennies », explique-t-il. « Ceux qui sont nés il y a vingt ans, ne savent  plus ce que veut dire la paix ». Bien-sûr donc que l’accord d’Addis Abeba est un élément d’espoir pour la population. Un accord de paix n’apporte pas d’office la paix, mais sans accord…  ? Reste à espérer maintenant que les tous les signataires d’Addis Abeba sont sincères ».

Mgr Maroy insiste sur le travail de soutien de la paix effectué par l’Eglise au Congo : « Les évêques se prononcent, les prêtres prêchent, il y a des Commissions Justice & Paix dans chaque village, nous essayons tous les jours de consoler et soulager les victimes de la violence. Pour un chrétien, la paix n’est pas qu’un rêve, c’est une promesse du Seigneur (Jean 14,27). Il répondra à notre prière pour la paix, cela est sûr, mais Il ne répondra pas sans nous ! ».

La Belgique, trait d’union

L’archevêque de Bukavu ne demande pas de prier uniquement pour le Congo, mais aussi pour les pays voisins : « Car quand la case du voisin brûle, la vôtre est également en danger. »

Quid pour l’engagement de la Belgique dans le processus de paix dans les Région des Grands Lacs ? « Si la Belgique n’est pas père du Congo, elle est peut-être sa mère. En tous cas, en tant que parents, les Belges doivent se porter garant pour leurs enfants », répond Mgr Maroy.

Le prélat demande-t-il dès lors à notre pays d’investir davantage dans les troupes de paix sur le territoire ? « Pourquoi pas ? Que la Belgique choisisse elle-même comment elle peut le plus nous aider. Je l’ai déjà suggéré à votre ministre des Affaires Etrangères quand il était au Kivu : votre pays est sans doutes le mieux placé pour réunir le Congo, le Burundi et le Rwanda autour d’une table et amener les trois pays à une véritable réconciliation. »

Benoit Lannoo »

Ici : Et si la Belgique se penchait sur la RDC ?

La Belgique a créé le Congo dans un vaste élan qui connut son apogée après la seconde guerre mondiale puis, aux premiers signes graves (5 janvier 1959) des temps nouveaux qu’il lui incombait de gérer, s’en est retirée (30 juin 1960) dans une précipitation irresponsable et les héritiers des naufrageurs de l’indépendance n’ont rien appris ni oublié depuis un demi-siècle. Pour beaucoup de Belges, le Congo n’est pas une terre étrangère : nombre d’entre eux la connaissent même encore très concrètement et la considère avec une empathie parfois nostalgique. Mais comment dépasser la distance creusée par les drames de la période postcoloniale ? L’image du guêpier demeure et elle n’est pas fausse

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