L'ONU intoxiquée par des statistiques faussées (18/03/2013)

Friday-Fax-Header-French.jpgAnalyse: Des statistiques faussées aux fondements des politiques onusiennes

NEW YORK, 15 mars (C-FAM) Alors que négociations de la 57ème Commission sur la Condition de la femme (Csw) s'intensifiaient, certaines données statistiques sur la violence à l'égard des femmes faisaient leur apparition dans les salles de conférence et étaient répétées par les médias. Ces données ont été par le passé l'instrument de la promotion de l'avortement. Pourtant, elles trahissent une mauvaise interprétation des faits. Leur auteur, une militante de l'IVG, fait partie de la délégation des États Unis à la CSW.

L'AFP rapportait le 5 mars, au deuxième jour de la commission, que la CSW avait beaucoup parlé d'un rapport de la Banque mondiale, selon lequel le nombre de femmes entre 15 et 44 ans décédant de mort violentes serait supérieur au nombre de décès résultant des effets cumulés de la malaria, du VIH, du cancer, d'accidents et de la guerre". Cette statistique a été utilisée par de nombreuses agences de l'ONU et apparaît dans la liste des ressources officielles de l'Onu mises à disposition des intervenants.  Le 13 mars, elle était citée dans un édito du New York Times  qui critiquait le Saint Siège et ses alliés pour leur barrage contre l'appel de la CSW en faveur de l'accès des femmes à l'avortement dans le monde entier.

Cette donnée statistique a été utilisée sous de nombreuses formes depuis sa première apparition dans un article d'Adrienne Germain, militante des premiers jours et qui fait aujourd'hui partie de la délégation américaine à la Commission de l'Onu.

Dans un tableau figurant dans l'article, Mme Germain et ses collègues comparent les chiffres de la violence domestique et des viols aux chiffres cumulés d'autres causes de souffrances pour les femmes en âge de procréer. Les auteurs reconnaissent pourtant dans une note de bas de page que cette comparaison est utilisée "à des fins  d'illustration" uniquement, puisque la violence domestique est analysée et classifiée différemment que les autres données mentionnées dans le tableau.

Le choix du cancer et de la malaria est lui aussi trompeur. Des données de l'étude de l'OMS de 2010 sur la charge mondiale de la morbidité révèlent que la plupart des dommages causés par ces maladies touchent les femmes en dehors de la tranche d'âge 15-44 ans. La comparaison au VIH est aussi incorrecte, et semble avoir été fabriquée de toute pièce par le reporter de l'AFP. Son inclusion est particulièrement troublante, alors que le VIH est passé du 33eme rang des causes de décès de 1990 au 5ème rang en 2010. Les données sur la charge mondiale de morbidité sont utilisées par la recherche en santé publique pour quantifier les effets combinés du handicap, de la mauvaise santé et de la mortalité précoce.

En plus d'être fondée sur une comparaison erronée, et exagérée par les rapports de la presse, cette donnée statistique est basée sur un rapport de la Banque mondiale datant de 1993, avant même la Conférence sur la Population et le Développement (CIPD). Elle ne tient pas compte des efforts accomplis par les États membres et l'ONU pour combattre la violence à l'égard des femmes.

Dans l'article de 1994 d'où cette statistique est tirée, les auteurs déplorent le fait que la définition de la violence à l'égard des femmes de l'ONU "exclue les législations, politiques et inégalités structurelles qui pourraient être qualifiées de violences à l'égard des femmes (les législations prohibant l'avortement, les politiques d'ajustement structurel)". Mme Germain, l'une des rédactrices, travaille pour Population Council, la Fondation Ford, et la Coalition Internationale pour la santé des femmes, pour promouvoir l'accès à l'avortement dans le monde entier en faisant abroger les législations protectrices des femmes et des enfants-à-naître.

Lors d'un événement organisé dans le cadre de la CSW, Saraswathi Menon, directrice de la Division politique d'ONU Femmes, a exprimé ses inquiétudes face au manque de statistiques fiables. "Lorsque les priorités ne sont pas mises sur des questions importantes, il est facile de les ignorer dans des débats internationaux". "Les mauvaises données sont vraiment pires que l'absence de données", a ajouté l'épidémiologiste Henriette Jansen.

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