Mardi de Pâques : Rabbouni! (02/04/2024)

Evangile du jour selon saint Jean, chapitre 20, vv. 11-18

Marie Madeleine restait là dehors, à pleurer devant le tombeau. Elle se penche vers l'intérieur, tout en larmes, et, à l'endroit où le corps de Jésus avait été déposé, elle aperçoit deux anges vêtus de blanc, assis l'un à la tête et l'autre aux pieds. Ils lui demandent : « Femme, pourquoi pleures-tu ? » Elle leur répond : « On a enlevé le Seigneur mon Maître, et je ne sais pas où on l'a mis. »
Tout en disant cela, elle se retourne et aperçoit Jésus qui était là, mais elle ne savait pas que c'était Jésus. Jésus lui demande : « Femme, pourquoi pleures-tu ? Qui cherches-tu ? » Le prenant pour le gardien, elle lui répond : « Si c'est toi qui l'as emporté, dis-moi où tu l'as mis, et moi, j'irai le reprendre. »
Jésus lui dit alors : « Marie ! » Elle se tourne vers lui et lui dit : « Rabbouni ! » ce qui veut dire : « Maître » dans la langue des Juifs. Jésus reprend : « Cesse de me tenir, je ne suis pas encore monté vers le Père. Va plutôt trouver mes frères pour leur dire que je monte vers mon Père et votre Père, vers mon Dieu et votre Dieu. »
Marie Madeleine s'en va donc annoncer aux disciples : « J'ai vu le Seigneur, et voilà ce qu'il m'a dit. »

Homélie (homelies.fr - Archive 2007)

Marie est revenue au tombeau, elle pleure. Quel bel enseignement pour nous en cette octave pascale. La joie de la résurrection est si proche d’elle, et elle ne voit rien. La rencontre du ressuscité est à sa portée, mais elle reste aveuglée et accablée par ses soucis.

Pourtant le Seigneur est touché par son amour, il entend le cri de sa détresse. Il redouble d’attentions envers elle : ce sont deux anges qui lui sont envoyés pour lui faire entendre la Bonne Nouvelle de la résurrection. Passionnée, entêtée, Marie n’entend rien. Au point qu’elle se coupe du réel. « On a enlevé le Seigneur mon Maître, et je ne sais pas où on l'a mis. » Elle n’a pas évolué depuis dimanche matin où elle serinait déjà sa conclusion. Rien ne semble pouvoir la rejoindre dans son obstination à retrouver le corps disparu de Jésus.

Le doux reproche des anges n’ébranle pas sa déception. Cette rencontre se révèle assez décevante pour le lecteur, presque saugrenue. Comment peut-on ne pas voir ces deux anges, placés bien en vue à l’endroit du corps qu’elle cherche et dont elle scrute l’absence ? En préférant poursuivre obstinément ses propres objectifs, en restant rivée sur sa propre interprétation de la portée réelle des événements.

Dehors, elle rencontre quelqu’un qu’elle prend pour un jardinier. Elle est tellement égarée dans son monde de douleur, qu’elle n’imagine pas une seconde que cet inconnu puisse ignorer son tracas : « dis-moi où tu l’as mis ! » lance-t-elle sans voir qu’il pourrait être nécessaire d’expliquer de quoi elle parle…

A celle qui eut le courage et l’amour de le suivre jusqu’à sa mort, de s’occuper de sa dépouille, de le pleurer avec une souffrance qui fit vaciller son âme, Jésus offre une nouvelle naissance. Il appelle Marie Madeleine à quitter définitivement les rivages morbides du royaume de la mort et l’interpelle : « Marie ! ».

Marie se retourne. Ce retournement fait un redoublement avec le précédent (« elle se retourne et aperçoit Jésus »), et montre le bouleversement intérieur qui s’opère à l’appel de son nom. Marie peut enfin entendre le Maître qui lui ordonne de quitter les désirs violents qui la retiennent prisonnière de ses larmes. Il l’invite à entrer enfin dans le dessein de Dieu. Chacune de ses larmes peut devenir luminaire pascal. Mais Jésus, qui la ressuscite jusque dans son nom, la met aussi en garde : « Ne me retiens pas », le seul désir qui doit l’habiter désormais est celui de faire la volonté du Père. Elle doit renoncer à sa volonté de capturer Dieu, de l’enfermer dans les bras de ses propres projets, de ses propres affections, pour accueillir la mission qui la rendra libre.

« Va plutôt trouver mes frères pour leur dire ». En même temps qu’il appelle à la vie, Jésus envoie. L’appel à accomplir notre mission particulière est exactement contemporain de notre appel à la vie dans l’Esprit. Notre vocation surnaturelle fait partie du nom dont Dieu nous appelle. Au matin de la résurrection, Dieu nous appelle et nous oriente vers lui.

Ce matin, puissions-nous entendre l’appel du Ressuscité à le rencontrer personnellement, puissions-nous entendre la voix du Bon Berger nous orienter vers l’astre de nos âmes, puissions-nous entendre en nous la source de l’Esprit qui jaillit à nouveau et pour toujours, qui murmure « va vers le Père » et qui nous pousse vers nos frères.

Frère Dominique

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