La mort de Mimoun, un champion du sport et de la foi (29/06/2013)

De La Croix :

Alain Mimoun, légende de l'athlétisme français, est décédé dans la soirée de jeudi 27 juin, à l'âge de 92 ans.

Né le 1er janvier 1921 à El Telagh, en Algérie, Ali Mimoun Ould Kacha eut dès sa plus tendre enfance écrivait-il, le coeur « qui s'enflammait pour ce beau pays de France ».

Ayant découvert la course à pied lors de son service militaire effectué chez les tirailleurs algériens, le jeune homme dut d'abord traverser les épreuves de la Seconde guerre mondiale avant de s'exercer sur un stade.

Sous le feu des canons allemands en 1944 à Monte Cassino (Italie), sa jambe gauche martyrisée par plusieurs éclats d'obus fut sauvée par un chirurgien inspiré. Pour le soldat Mimoun, c'était déjà un signe de Dieu.

La paix revenue, l'aspirant-athlète se lève tôt pour s'entraîner et se couche tard pour travailler au bar du Racing Club de France, club dont il porte le maillot.

DERRIÈRE LA LOCOMOTIVE ZATOPEK

En 1947, à 26 ans, il remporte le premier de ses 29 titres nationaux. Un an plus tard, aux Jeux de Londres, il se classe deuxième du 10.000 m derrière la locomotive tchèque Emil Zatopek. En 1952, aux JO de Helsinki, le petit Français doit encore se contenter de médailles d'argent, sur 5000 et 10.000 m.

Alain a 35 ans quand arrivent les Jeux de Melbourne, les premiers organisés dans les Antipodes. Et toujours ce rêve de voir « enfin monter le drapeau au mât du milieu ». En Australie, quand il termine seulement 12e du 10.000 m, loin du Soviétique Vladimir Kuts, prototype de l'homme nouveau, on croit que tout est fini.

Mais l'athlète d'origine algérienne a bien caché son jeu. En fait, il s'est préparé pour le marathon, quasiment incognito. « Il s'entraînait trois fois par jour (pour un total quotidien de 35 km) et ce n'était sûrement pas pour le 10.000 m. Même s'il m'avait dit qu'il ne disputerait pas le marathon », avait expliqué en 2006, lors d'un entretien avec l'AFP, son épouse Germaine, Corrézienne de Tulle.

« Avant de partir pour Melbourne, j'avais effectué ma dernière préparation à Bugeat, une région magnifique où on trouve les mêmes essences que dans mon village natal du Tellag, dans le sud-Oranais », s'était souvenu le quadruple médaillé olympique.

MA FILLE EST NÉE LA VEILLE

En Australie, les signes ne trompent pas, une fois de plus. « Tu penses, pour mon premier marathon, j'ai le dossard 13. Et puis, ma fille qui est née la veille de la course, le dernier pèlerinage à Lisieux. D'ailleurs, je suis un miraculé. J'avais pris 7 kilos. Mais il me semblait qu'il y avait encore une petite flamme intérieure. Et un bienfaiteur de l'athlétisme m'avait dit "T'es pas fini". Il m'avait emmené à Lisieux. Là, devant les reliques de sainte Thérèse, j'avais été pris de tremblements. »

Le jour de la course, un soleil implacable a repris possession de Melbourne jusqu'alors grelottante. Mimoun est à son aise dans la touffeur. Zatopek s'y consume. Le Français se retrouve seul en tête à mi-course. Il lui reste 20 kilomètres comme chemin de croix et d'exaltation.

« Le coup de marteau, ça a été autour du 30e km. Les 5 minutes les plus durs, plus difficiles que tout le marathon. Je m'insultais, "fainéant, tu ne vas pas lâcher maintenant". Je pensais à ma mère, à ma femme, à ma fille qui venait de naître », racontait Alain.

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