Un dossier de « l’Homme Nouveau » sur les traductions liturgiques (09/12/2013)
La dernière livraison de « L’Homme Nouveau » consacre un dossier à la question des traductions liturgiques. Le Président de « Pro Liturgia », Denis Crouan, a été interrogé à ce sujet. Quelques extraits :
L’Homme Nouveau : Pourquoi fallait-il refaire les traductions liturgiques, notamment celle de la Bible utilisée dans le Missel romain ?
Denis Crouan : A vrai dire, la réponse à cette question a été donnée par le Pape Jean-Paul II dans sa Lettre « Vicesimus quintus annus » publiée en décembre 1988 à l’occasion du 25e anniversaire de la Constitution « Sacrosanctum Concilium » sur la Liturgie. Le Souverain Pontife indiquait que la nécessité de l’après-Concile avait conduit les Conférences épiscopales à donner et à utiliser des traductions provisoires qui avaient été approuvées « ad interim ». Et Jean-Paul II ajoutait qu’il était temps de « remédier à certaines faiblesses ou inexactitudes » de ces traductions, afin de pouvoir « publier enfin des livres liturgiques dans un état pouvant être considéré comme acquis durablement et dans une présentation qui soit digne des mystères célébrés. » (…).
L’H.N. : Comment peut-on éviter de faire subir aux fidèles des changements dans la liturgie alors que la langue est normalement évolutive ?
D.C. : Je pense que pour répondre à cette question délicate et complexe, il faut voir qu’une langue employée en liturgie - je parle ici aussi bien du français que des autres langues vernaculaires - doit avoir trois qualités : la rigueur, la simplicité (ce qui n’est pas la banalité mais doit être entendu au sens du mot latin « simplex », c’est-à-dire « sans plis », sans tournures tarabiscotées), la poésie. J’ajouterai même une quatrième qualité : le sens de la formulation conférant une certaine musicalité aux phrases. Moyennant quoi, on pourrait espérer une certaine stabilité de ce que j’appellerais du « français liturgique ».
L’H.N. : A côté des traductions et des révisions, n’est-il pas nécessaire d’offrir aux fidèles et aux prêtres une véritable formation sur ce qu’est la liturgie ?
D.C. : C’est certain : on touche là au point essentiel. Cette formation a été expressément demandée par Vatican II : la Constitution conciliaire sur la Liturgie commence même par ça ! Malheureusement, jusqu’ici, cette formation n’a guère été donnée. Je ne crois pas donner un « scoop » en disant qu’elle a été refusée dans les séminaires diocésains et qu’elle n’est toujours pas donnée aux membres des « équipes liturgiques » paroissiales ou interparoissiales. Bien entendu, quand je parle de « formation », je ne parle pas des « sessions de recyclage » où l’on apprend à faire un bouquet, à confectionner des banderoles ou à chanter le dernier refrain à la mode ; je parle bien de « formation » au sens où l’entend le Concile qui rappelle que « l’enseignement de la liturgie dans les séminaires et les maisons d’études des religieux doit être placé parmi les disciplines nécessaires et majeures et doit être dispensé dans sa perspective théologique et historique aussi bien que spirituelle, pastorale et juridique, tandis que les prêtres devront apprendre à observer les lois liturgiques... » Il faut bien reconnaître que nous demeurons très loin de tout cela ! (…)
L’H.N. : Derrière cet état de fait, n’y a-t-il pas aussi une crise de la transmission de la foi, notamment au plan de l’enseignement catéchétique ?
D.C. : Il y a incontestablement une crise de la transmission de la foi qui a des répercussions sur la liturgie. Dans beaucoup d’ouvrages de catéchèse, on a présenté la foi comme devant relever de sentiments socio-humanitaires et on a invité à remplacer la liturgie par des « auto-célébrations » de l’ « être ensemble ».
Ce problème du lien entre « catéchisme transmission de la foi » et « liturgie célébration de la foi » existe toujours. Il suffit de voir, dans les paroisses qui se prévalent du Concile, ce que les « mamans catéchistes » font faire aux jeunes : des découpages qu’il faut coller sur des panneaux disposés près de l’autel, des rondes au moment du « Notre Père »... Et tout ça avec l’aval de célébrants qui transforment la liturgie en un moment où la désacralisation et la « déritualisation » bat son plein. A cela, il faut ajouter un nombre grandissant de jeunes qui font leur première communion ou leur profession de foi sans avoir jamais entendu parler du « Credo » et sans même savoir prier le « Notre Père » ou le « Je vous salue Marie »... Tout ça est absolument contre-productif sur le plan de l’éducation à la foi catholique. Voilà aussi pourquoi il urgent que les catéchistes - dont le dévouement n’est pas à remettre en cause - puissent bénéficier d’une solide formation liturgique leur permettant de comprendre que la messe est une « célébration de la foi » qui n’a en aucun cas à être transformée en terrain d’expériences catéchétiques.
Réf. sur le site web de Pro Liturgia : La dernière livraison de « L’Homme Nouveau » consacre un dossier à la question des traductions liturgiques.
Benoît XVI, avant et pendant son court pontificat, a voulu lancer -tant par ses écrits et ses actes que par sa manière même de célébrer- un mouvement qui restaure dans l’Eglise romaine le sens véritable de la liturgie. Vox clamantis in deserto ? JPSC
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