Voici un an jour pour jour : l’abdication de Benoît XVI (11/02/2014)

PHO9155a5ae-926b-11e3-aa70-d6dbafe3c95b-805x453 (1).jpgUn acte longuement prémédité, explique Jean-Marie Guénois dans le « Figaro » :

 Un an après le geste historique de renonciation posé le 11 février 2013 par Benoît XVI, il apparaît que cet acte fut longuement prémédité. Il est même aujourd'hui évident que le «oui» que Joseph Ratzinger prononça, le 19 avril 2005, devant ses confrères cardinaux qui venaient de l'élire dans la chapelle Sixtine pour remplacer le géant Jean-Paul II était déjà lié à la perspective inouïe de se démettre de cette charge le jour où elle deviendrait trop lourde. Ainsi, avant d'être élu pape, Joseph Ratzinger confia à Mgr Pasquale Macchi, l'ancien secrétaire de Paul VI - un pape qui avait aussi pensé démissionner: «Voilà une chose très sage que chaque pape devrait faire».

Il est par ailleurs certain - même si des thèses contraires insistantes circulent - que Benoît XVI n'est pas parti sous la pression de l'affaire Vatileaks (publication, de février à mai 2012, de documents réservés issus de son bureau). Le lent dénouement de cette crise - le procès, puis le pardon accordé par Benoît XVI à son majordome, Paolo Gabriele, le 22 décembre 2012 - a même retardé l'annonce de son départ, qui aurait pu intervenir avant la fin 2012. Benoît XVI a tenu à laisser un dossier propre et réglé.

Le 11 février 2013, donc, en fin de matinée, Benoît XVI annonce en latin devant les cardinaux: «Je suis parvenu à la certitude que mes forces, en raison de l'avancement de mon âge, ne sont plus aptes à exercer adéquatement le ministère pétrinien.» L'argument central invoqué, l'usure physique et psychologique, une motivation objective, était nécessaire pour que cette renonciation soit considérée comme libre et exempte de toute pression extérieure. Sans cela, elle n'aurait pas été recevable aux yeux des critères du droit canonique, qui insistent sur la totale liberté et l'absence de contraintes. Mais, dans le contexte immédiat de l'affaire Vatileaks, cette argumentation fondée sur la santé a toutefois laissé penser que le fragile Benoît XVI fuyait devant une curie romaine devenue ingérable.

Une décision prise dans le courant de l'année 2012

Certes, Benoît XVI, 87 ans le 16 avril prochain, était effectivement épuisé. Il avait connu plusieurs malaises, l'un dans les jardins du Vatican début 2012 et l'autre lors du voyage au Mexique et au Brésil en mars. Il s'était même légèrement blessé à la tête. Le médecin du Pape lui avait alors formellement déconseillé de renouveler un voyage aussi long.

Cet avertissement médical, la lourde perspective des JMJ de Rio, programmée en juillet 2013 - Benoît XVI avait peur de ne pas faire face physiquement -, l'appui, enfin, de son frère et fidèle conseiller, le poussant à remettre sa charge s'il le sentait nécessaire, l'ont décidé - dans le courant de l'année 2012 - à passer à l'acte. Des circonstances qui expliquent ce choix, mais qui ne disent toutefois pas pourquoi ce pape mûrissait depuis longtemps cette idée.

Avec le recul, trois facteurs principaux ont joué: le premier est le compagnonnage avec Jean-Paul II. Joseph Ratzinger, plus encore que le secrétaire d'État, à l'époque le cardinal Sodano, fut «le» grand conseiller du pape polonais. L'homme de confiance absolu. Une proximité qui lui fit voir de très près, lors des huit dernières années de l'emprise de la maladie, qu'un pape profondément diminué n'était pas forcément une bonne solution. Un cardinal Ratzinger qui fut consulté par Jean-Paul II sur la possibilité de sa propre démission et qui répondit par l'affirmative, mais le pape ne le suivit pas.

 Jamais Joseph Ratzinger n'avait envisagé succéder à Jean-Paul II

Deuxième facteur, l'état d'esprit de son élection. Jamais Joseph Ratzinger, qui ne pensait qu'à une chose, partir en retraite en Bavière après la mort de Jean-Paul II, n'a envisagé de lui succéder. S'il accepta la charge - l'annonce lui fit l'effet d'une «guillotine» -, c'est dans un pur esprit de service pour l'Église et elle seule. Le déroulement de son pontificat l'atteste d'ailleurs, car l'homme disparut totalement derrière sa fonction. Quant à sortir par renonciation, conforme à cet état d'esprit, il en donna des signaux précis: dès juillet 2010 en allant prier sur la tombe de Célestin V, le fameux pape démissionnaire. Puis en novembre 2010, dans un livre interview avec Peter Seewald. Vatileaks - l'une des multiples épreuves de ce pontificat agité - était loin.

Dernier facteur, le moins connu, est sa confiance totale en Dieu, véritable clé de sa renonciation, comme Benoît XVI l'a révélé le 27 février lors de sa dernière audience: «J'ai toujours su que la barque de l'Église n'est pas la mienne, n'est pas la nôtre, mais est la sienne. Et le Seigneur ne la laisse pas couler ; c'est Lui qui la conduit. (…) Cela a été et est une certitude, que rien ne peut troubler.»

Réf : Renonciation de Benoît XVI: un acte longuement prémédité

Autre pays, autres mœurs : sous la plume de Christian Laporte, la « Libre Belgique » titre grossièrement : « Ratzinger a réussi à se faire oublier ». JPSC

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