"Al-Sissi a amélioré la situation des chrétiens d'Egypte" (07/08/2015)

Lu sur le site de l’hebdomadaire « La Vie » (extrait) :

image (9).jpg"Inauguré aujourd'hui en grande pompe, avec le Président de la République français François Hollande en invité d'honneur, le nouveau Canal de Suez est le projet monumental d'un seul homme : le président égyptien Abdel Fattah Al-Sissi. Arrivé au pouvoir il y a un an après la destitution par l'armée du frère musulman Mohamed Morsi en 2013, son ambition est de redresser l'économie et redonner son prestige mondial à une Egypte déliquescente. Pour Monseigneur Michel Chafik, Recteur de la Mission copte catholique de Notre Dame d'Egypte à Paris, le maréchal Al-Sissi n'est pas un nouveau chef militaire à la Hosni Moubarak, le dictateur déchu à la suite de la révolution de 2011. Selon lui, le nouveau régime, pourtant accusé d'autoritarisme et de brutalité, a insufflé l'espoir dans le cœur des chrétiens et de tous les Egyptiens.

Les coptes ont souffert des conséquences de la révolution, en particulier de l'arrivée au pouvoir des Frères musulmans. Soutiennent-ils aujourd'hui le régime du maréchal Al-Sissi ?

D'abord, nous sommes des Égyptiens avant d'être des coptes, des citoyens avant d'être des chrétiens. Ensuite, quand on regarde les turbulences dans le monde arabe, on se réjouit évidemment d'avoir Al-Sissi comme dirigeant. C'est un homme charismatique qui a sauvé le pays et a amélioré la situation des chrétiens. Moi-même qui participe peu aux élections, j'ai voté pour lui. A chaque changement de régime, la question des coptes était négligée. Pas avec Al-Sissi. On peut dire qu'il a ravivé l'histoire des chrétiens d'Égypte. Il a rappelé que le pays a accueilli la Vierge Marie, saint Joseph et Aïssa (Jésus, en arabe), que les coptes ont défendu notre patrie contre les Romains et les Grecs. Il a insisté sur leur très ancienne présence : le mot « copte » signifie d'ailleurs Égyptien en grec ancien. Il a donné une liberté de parole sans précédent à l'Église et a fait plusieurs promesses comme la réparation obligatoire des églises détruites.

Les chrétiens sont-ils, malgré ce tournant idéologique, encore mal considérés dans la société égyptienne ?

La situation est incontestablement meilleure qu'avant. Mais il reste des difficultés, en particulier dans les zones reculées. À Al-Minya (en Moyenne-Egypte) par exemple, un chrétien a été kidnappé et ne sera libéré qu'en échange d'une rançon. Les personnes victimes de ces actes sont systématiquement des chrétiens.

Comment expliquez-vous que la coexistence entre chrétiens et musulmans soit si sensible en Égypte ?

Nous avons vécu ensemble durant des siècles. On a partagé les joies et les peines de notre pays. Quand j'étais enfant, je jouais dehors avec d'autres garçons. On ne se demandait jamais qui était musulman, qui était chrétien. Michel ou Mohamed, c'était pareil. C'est un esprit de haine qui est venu avec les pétrodollars des monarchies du Golfe. Un esprit nouveau que ne connaissait pas l'Égypte. Et Hosni Moubarak (l'ancien président déchu à la suite de la révolution de 2011) a permis aux Frères musulmans d'envahir la société avec son idéologie. Il a laissé faire, pourvu qu'ils ne touchent pas à sa personne et à sa famille. Résultat : aujourd'hui, on a même des salafistes qui ont la même idéologie que Daesh.

Le maréchal Al-Sissi mène justement une lutte brutale contre les Frères musulmans. Parler d'autoritarisme vous semble-t-il justifié ?

Nous n'avons pas encore effacé l'idéologie des Frères musulmans qui imprègne la société égyptienne depuis soixante-dix ans. Combien de désastres ! Combien de personnes tuées ! Combien d'Églises brûlées ! Nous avons vécu avec les Frères musulmans. Nous, nous les connaissons. S'il l'on n'emploie pas ces manières pour les contrer, ce sera impossible de gérer l'Égypte, comme c'est le cas pour les autres États arabes d'ailleurs. Al-Sissi a promis que l'armée serait là pour protéger le pays. Et il faut dire qu'elle reste la seule institution correctement organisée en Égypte. Et puis la démocratie, c'est toute une éducation.

Que fait le maréchal Al-Sissi sur cet aspect de la lutte contre les extrémistes ?

Lors d'un discours à Al-Azhar, la grande université égyptienne du sunnisme, le maréchal Al-Sissi a solennellement demandé aux imams de changer la compréhension de l'islam. Il a même affirmé que l'islam avait besoin d'une révolution. Ce n'est pas rien ! Il les a invité à enseigner l'islam de paix et de tolérance et pas cet islam de haine et de vengeance qui vient du Qatar et de l'Arabie Saoudite. Avec la Turquie, ces pays jouent un double jeu. Si on a un énorme désordre dans la région, c'est parce que l'Égypte a perdu sa place de leader du monde arabe. L'Arabie Saoudite l'a prise. Et voilà le désastre : des islamistes partout, même en Europe qui a laissé faire au nom du pétrole.

Aujourd'hui, le maréchal Al-Sissi présente son grand projet du nouveau Canal de Suez censé relancer l'économie égyptienne. Quelle est la situation du pays dans ce domaine ?

L'économie, c'est le gros problème : beaucoup trop de chômage et de pauvreté, la crise sociale touche tout le monde, chrétiens comme musulmans. Nous devons travailler main dans la main pour rebâtir le pays. Le projet du nouveau Canal de Suez c'est aussi un appel au retour des investisseurs, et pas seulement des investisseurs arabes. Il faut que les Européens reviennent car, avec les pays du Golfe, les investissements économiques s'accompagnent toujours d'une exportation de leurs idéologies politique et religieuse (…).

Ref. "Al-Sissi a amélioré la situation des chrétiens d'Egypte"

JPSC

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