Ce que deviennent nos églises désertées (18/12/2020)

De Marie-Eve Rebts sur le site du Soir :

Plusieurs projets pour transformer des églises

Moins fréquentés ou parfois désaffectés, certains couvents ou églises trouvent une nouvelle vie grâce au logement. Ces reconversions sont encore peu nombreuses en Belgique mais plusieurs projets sont en cours.

Après avoir été un célèbre lieu de pèlerinage durant plusieurs siècles, Chèvremont est devenu bien calme ces dernières années. La basilique Notre-Dame et son couvent érigés au XIXe siècle n’attirent plus les foules et seuls trois membres de la communauté des carmes déchaux occupaient encore ce site de près de 2000 m2 en 2016. L’ASBL propriétaire des lieux s’est donc résolue à mettre en vente les bâtiments, qui ont été acquis en 2020 par trois partenaires actifs dans l’immobilier : les groupes Eckelmans et Socatra ainsi que Inside Development. D’ici 2024, ceux-ci transformeront Chèvremont en une septantaine de logements.

D’autres édifices religieux ont connu le même sort ces dernières années, comme le couvent des Sœurs Clarisses à Malonne ou la chapelle des Récollectines à Herve. Selon le rapport 2019 de l’Eglise catholique de Belgique, pas moins de 31 églises ont été désaffectées en 2018. Si ces bâtiments changent de fonction, c’est parce que la pratique du culte catholique a fortement chuté ces dernières décennies, et que les édifices religieux sont (trop) nombreux : Bruxelles compte par exemple autant d’églises que Paris ! De plus, les coûts d’entretien de ces bâtiments sont élevés, ce qui pousse les communes ou fabriques d’église qui en sont propriétaires à consentir à de nouvelles affectations, voire des mises en vente. Le logement n’est toutefois pas l’option prioritaire. « A Bruxelles, lorsqu’une église ne convient plus ou n’est plus assez occupée, on privilégie d’abord les communautés catholiques d’origines étrangères ou, si ce n’est pas possible, on peut les ouvrir à d’autres chrétiens », explique Thierry Claessens, adjoint de l’évêque auxiliaire de Bruxelles pour les questions temporelles. « Ensuite, il reste la solution d’une réaffectation “profane”. L’église St-Vincent-de-Paul à Anderlecht a, par exemple, été transformée en école, mais les projets aboutis sont encore peu nombreux à Bruxelles. Les directives sont en tout cas de privilégier les usages qui servent la ville car, même désacralisées, les églises ne deviennent pas des bâtiments neutres. »

Une solution financièrement viable

Bien que désormais mieux tolérées, les reconversions de ces bâtiments suscitent en effet toujours des controverses tant au sein des communautés locales que des autorités et acteurs concernés. « Ces dossiers impliquent beaucoup d’intervenants avec des intérêts parfois différents et il faut trouver un équilibre, même si l’on se retrouve souvent confronté au principe de la réalité financière », souligne Thierry Claessens. « Il est cependant difficile d’imaginer un plan d’ensemble pour la reconversion des églises car chaque cas est particulier au niveau de sa situation, son état, son aspect patrimonial… »

Ainsi tous les bâtiments religieux ne sont pas forcément adaptés à une transformation en logements. « Les églises encadrées par d’autres habitations et qui possèdent peu de fenêtres se prêtent mal au résidentiel », illustre Carlos de Meester, CEO d’Inside Development, société de promotion immobilière spécialisée dans les reconversions d’immeubles. « Il en va de même lorsque les bâtiments sont complètement classés. »

Bien qu’elles ne soient pas toujours possibles, les transformations d’églises en logements représentent parfois la solution la plus viable d’un point de vue énergétique et/ou financier. C’est par exemple le cas pour l’église Saint-Hubert de Watermael-Boitsfort, dont Inside Development va assurer la reconversion : « Il fallait environ 5 millions d’euros rien que pour rénover l’extérieur », souligne Carlos de Meester. « Ce n’est donc pas rentable d’investir de telles sommes pour une utilisation publique. Et même dans le cas d’une transformation résidentielle, il faut être attentifs à créer suffisamment d’unités afin que les charges de copropriété ne deviennent pas trop coûteuses.»

Malgré ces défis, il n’est pas rare que les logements implantés dans d’anciens bâtiments religieux s’avèrent un peu moins chers au mètre carré car il est souvent difficile d’y éviter les espaces perdus. En règle générale, ces projets atypiques génèrent des avis tranchés parmi les acheteurs, mais cela n’empêche pas leur commercialisation. A Schaerbeek, les 16 appartements terminés récemment par Inside Development au sein du couvent la Vierge Fidèle ont par exemple tous été vendus bien avant la fin du chantier.

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