Témoignage : comment Marie s'est relevée d'un avortement (24/02/2021)

Du site de La Nef (mis en ligne le 18 février 2021):

Avortement : comment je me suis relevée !

J’ai fait tuer mon premier enfant. Voilà comment, quatorze années après cet avortement qui a bouleversé ma vie, je résume froidement la situation.

Je m’appelle Marie, j’ai maintenant 34 ans et rares sont les jours qui passent sans que je ne revive cet horrible moment.

J’avais vingt ans, j’étais étudiante et amoureuse de mon compagnon depuis 6 mois. Je suis tombée enceinte car ce désir était enfoui en moi. Mais je n’ai pas accepté la réalité. Sur mes carnets, j’écrivais : « il n’y a pas de vie en moi, seulement un amas de cellules. » Aujourd’hui, je ne comprends toujours pas comment j’ai pu penser et écrire une telle absurdité.

Les formalités administratives se sont enchaînées très vite. À l’époque, quelques jours de réflexion m’ont été laissés, mais mon immaturité, mon ignorance des conséquences que cet avortement allait entraîner et le fait que je n’avais pas réussi à en parler à mes parents, n’ont fait que me précipiter vers cet acte irréversible.

Toutes mes cellules se souviennent du comprimé à avaler avant l’opération. Mon corps n’oublie pas l’intrusion violente d’un outil, l’aspiration absurde de ce que j’avais de plus cher. Mon cœur s’est emballé si vite que j’ai poussé un cri strident : la peur de mourir me tenaillait. Mais ce n’est pas moi qui mourais.

À la sortie de l’hôpital, des larmes coulèrent et un soulagement m’envahit. Je me disais que la tempête était passée. Mais c’était sans compter sur la mémoire de mon corps, et sur mon esprit qui chercherait le pardon, avec rage, pendant des années.

Par la suite, cinq années s’écoulèrent dans l’insouciance de la jeunesse. Puis vient le jour où je tombais de nouveau enceinte, grossesse « socialement » désirée cette fois. J’avais 25 ans et j’étais toujours avec le même homme. La joie m’envahit quelques secondes puis elle laissa place à la peur. Une peur stressante, qui m’oppressait, serrait mon estomac. La nuit je cauchemardais en poursuivant quelqu’un avec un couteau que je finissais par tuer. Je me réveillai en sursaut, trempée de culpabilité. J’avais peur de cette vie qui grandissait en moi. Neuf semaines plus tard, emportée par une douloureuse couleur rouge, je perdais cette minuscule promesse : c’était comme si mon corps se souvenait. Mais de quoi ? Je ne comprenais pas. Pourquoi cette fausse couche ? Ma conscience fermait encore les yeux pour me préserver de la folie qui pourrait me submerger. Mais mon inconscient, lui, se souvenait.

Un an plus tard, j’étais encore enceinte. L’angoisse grandit en même temps que les semaines passèrent. Un sentiment étrange se nicha en moi : mon corps refusait de protéger ce petit être à cause du traumatisme qu’il avait déjà subi par le passé. Cette troisième grossesse se termina comme la deuxième, autour de neuf semaines, par une fausse couche.

Mon corps me suppliait de m’excuser auprès de lui. Et auprès de cet enfant, je cherchais désespérément un pardon. Comprendre le sens de cet acte passé m’obsédait. J’étais coupable car j’avais ôté la vie à un tout-petit, le mien !

De ma vie, je n’avais jamais été ouverte à la grâce divine. J’étais comme imperméable au fait religieux. Pourtant lors d’un enterrement, le Ciel s’ouvrit pour moi. Un crucifix m’attira ; il me fit entrevoir une paix qui pourrait se poser sur mon cœur. Quelques semaines plus tard, je cheminais vers le baptême. On me parla de la confession. La miséricorde de Dieu, son infinie bonté. Je le savais désormais : ma libération était là. Recevoir le pardon était la seule façon de me libérer de cette culpabilité oppressante qui m’empêchait d’avancer. Je la méritais, cette souffrance, mais j’avais besoin du pardon de notre Seigneur. Ma faute était immense et irréparable mais j’étais devenue fille de Dieu. Même si j’avais reçu le baptême, j’ai ressenti le besoin de confesser mon avortement. Ma première confession a été comme une porte ouverte sur la lumière, une longue caresse du Christ remplie de larmes de peine et de joie. J’ai pu poser mon fardeau et Il l’a pris sur Lui. Jamais je n’oublierai la paix qui m’envahit ce jour-là. Une joie profonde d’avoir été pardonnée et d’être comme réintégrée et légitimée dans la vie.

Parfois, je me dis que seul un tel acte pouvait me rapprocher de Dieu, tellement mon univers était éloigné de la foi. Est-ce que notre Seigneur aurait pu permettre ce passage dans ma vie afin que j’ouvre les yeux sur Sa vie ? Est-ce que la vocation de Christophe (c’est le nom que j’ai donné à mon premier petit) était de me rapprocher du Christ ? À l’instant où j’écris, mes lèvres murmurent : Gloire à Dieu !

Marie

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