Ce qu'est la Sainte Trinité (30/05/2021)

De Madeleine-Marie Humpers sur cathobel.be (archive du 11 mai 2018) :

Qu’est-ce que la Trinité?

C'est la fête de la Sainte Trinité. Un mystère central, au cœur de la foi catholique. Mais qu’est-ce que la Trinité?

La Trinité est un mystère qui porte sur ce que Dieu est et non sur ce qu’Il fait. Le mystère de la Trinité fait aussi l’objet d’un énoncé, le dogme trinitaire. Il s’agit d’une affirmation fondamentale, fixée au cours des siècles par les Conciles sur base de la Révélation contenue dans les Saintes Ecritures. Le dogme trinitaire affirme qu’il n’y a qu’un seul Dieu en trois Personnes. Les Trois Personnes de la Saint Trinité, le Père, le Fils et le Saint Esprit, sont le seul et unique Dieu. Le Père est Dieu, le Fils est Dieu et le Saint Esprit est Dieu mais le Père n’est pas le Fils, le Fils n’est pas le Saint Esprit et le Saint Esprit n’est pas le Père. Il y a unité de nature mais distinction des personnes.

La Trinité en tant que mystère

En tant que mystère, la Trinité n’est pas entièrement compréhensible mais rien dans l’affirmation du dogme trinitaire n’est contraire à la raison. La Trinité dépasse la raison mais ne constitue pas une « contradiction logique », comme l’explique le théologien , enseignant à l’Université de Boston (USA) et converti du protestantisme au catholicisme:  « La doctrine de la Trinité dépasse la raison humaine, mais ne la contredit pas. La raison humaine […] ne pourra jamais la comprendre entièrement […] Celle-ci n’est pas une contradiction logique. Elle dit que Dieu est un par nature et trois en tant que Personnes, mais elle ne dit pas que Dieu est à la fois une Personne et trois Personnes ou une nature en trois natures, ce qui serait une contradiction dénuée de sens ».

La Trinité dépasse la raison. C’est pourquoi la raison ne peut ni prouver la vérité de la Trinité, ni la réfuter. Il n’est pas possible de démontrer la Trinité.

La foi en la Trinité

Ce n’est pas donc pas la raison qui permet d’adhérer à la Trinité. Pour la raison, la doctrine trinitaire est forcément étrange, surprenante. « Nous ne devrions pas être surpris que le vrai Dieu nous surprenneMais accepter d’être surpris et de ne pas tout comprendre n’implique pas une confiance aveugle en tant qu’elle ne se fonderait sur rien », ajoute Peter Kreeft. Qu’est-ce qui permet alors d’adhérer à la Trinité?

Premièrement, le choix de s’appuyer avec confiance sur la Révélation. Les données de la Révélation induisent la doctrine trinitaire. La Trinité est une réalité et cette réalité est révélée explicitement dans la Bible. Cependant elle n’y est pas désignée comme telle, autrement dit on n’y trouve pas le mot « Trinité ». L’énoncé explicite de la doctrine de la Trinité constitue le dogme trinitaire. Le dogme trinitaire rend compte de la vérité de la Trinité, selon le même principe qu’une théorie scientifique explique l’ensemble de différentes données. Toute théorie scientifique est un modèle explicatif de faits observés. La doctrine trinitaire s’apparente donc à un modèle explicatif, tandis que la Trinité en tant que vérité, existe indépendamment du dogme. L’affirmation des trois Personnes divines distinctes et de leur unité est présente dans les Ecritures et il est donc juste d’avoir foi en la doctrine trinitaire qui se fonde entièrement sur les données de la Révélation. Comme le fait remarquer le théologien dominicain , spécialiste de la théologie de Saint Thomas d’Aquin: « ce sera la confiance en une attestation qui dispense de chercher des preuves démonstratives ».

La confiance en la doctrine trinitaire se fonde donc sur la Révélation. Mais au niveau de la vie du croyant, elle repose également sur la recherche profonde de la charité et sur la piété vécue intérieurement. Dans De Trinitate, Saint Augustin affirme: « La connaissance de la Trinité est moins le fruit de la recherche extérieure que de la piété et de la charité ». La Trinité est intimement liée à l’amour.

La Trinité dans les Saintes Ecritures

« C’est dans le Nouveau Testament, affirme le Père Sineux, que Jésus-Christ, le Verbe de Dieu, nous apporte la révélation claire et précise de la distinction des trois Personnes en Dieu et de leur unité de nature ». Différents passages du Nouveau Testament font référence aux trois Personnes de la Trinité en les distinguant clairement: « La Vierge Marie apprend, au jour de l’Annonciation, que « l’Esprit Saint viendra en elle et qu’elle mettra au monde le Fils de Dieu ».  Joseph connaît de même par un Ange que sa virginale épouse enfantera un Fils « né du Saint-Esprit » et à qui « on donnera le nom d’Emmanuel : Dieu avec nous » [Luc 1]. Au seuil de sa vie publique, quand Jésus reçoit le baptême de Jean-Baptiste, le Père Céleste fait entendre ces paroles : « Celui-ci est mon Fils bien-aimé en qui je me suis complu » ; et l’Esprit-Saint se montre sous la forme d’une colombe.

Sur le Thabor, même déclaration du Père : « Ecoutez-le » [Mt 17, 5]. Et tous les enseignements de Jésus tendent à faire connaître son Père et l’union étroite du Père et du Fils. Jésus révèle aussi l’Esprit-Saint. Avant de monter au Ciel, il annonce à ses Apôtres que son Père leur enverra le Saint-Esprit pour les consoler et les éclairer.

Enfin Jésus, avant de quitter ses Apôtres leur communique son autorité et les investit de leur mission par ces solennelles paroles : « Allez, enseignez toutes les nations, les baptisant au nom du Père et du Fils et du Saint-Esprit » [Mt 28, 19] ».

Ensuite, de nombreux passages bibliques manifestent l’unité des trois Personnes. « Mon Père et moi, nous sommes uns », déclare Jésus. « Si vous ne voulez pas me croire, croyez à mes œuvres ; et sachez que le Père est en moi et moi dans le Père ». « Seigneur montre-nous le Père ! » lui dit un de ses disciples. Jésus répond : « Philippe, celui qui me voit, voit aussi le Père. Comment peux-tu dire : montre-nous le Père ? Ne crois-tu pas que je suis dans le Père et que le Père est en moi ? » Donc « Tout ce qu’a le Père est à moi ». « Tout ce qui  est à moi est à vous, Père, ce qui est à vous est à moi… » [Jean 13-25]

Quant à l’Esprit de vérité qui procède du Père, Jésus dit qu’Il « [se] recevra de ce qui est à Lui ». Il a donc avec le Père et le Fils une même nature ; Il  est la Vérité, Il est Dieu, comme le Père et le Fils sont Dieu. Donc « Ils sont trois dans le Ciel : le Père, le Verbe et l’Esprit-Saint, et ces trois ne sont qu’un » [Epître de Saint Jean 5, 7] ».

La distinction des trois Personnes divines et leur unité sont donc bien présentes dans les Ecritures.

La Trinité et l’amour

L’amour suppose la relation et la relation suppose la pluralité. « L’amour nécessite deux êtres ou plutôt trois : l’amant, l’aimé et l’acte ou relation d’amour entre eux ». Dieu ne serait pas amour s’Il n’était qu’une monade isolée. Ou bien l’amour serait égocentrisme, et dès lors il ne serait plus lui-même. « La doctrine de la Trinité nous dit aussi la nature de l’amour : celui-ci est altruiste, pas égoïste. Dieu est l’amour de l’autre parce qu’Il a l’altérité en Lui-même : Il est plus d’une Personne », précise encore Peter Kreeft ajoutant: « Si Dieu est Trinité, c’est parce qu’Il est amour ». Et inversement: Dieu est amour parce qu’Il est Trinité. L’unité des trois personnes divines repose sur l’amour et l’amour nécessite une pluralité pour exister.

Cela signifie que la valeur suprême est l’amour et que l’amour est inscrit au plus profond de nous-mêmes. Il est définitoire de la sainteté qui est notre vraie nature: « Parce qu’Il est amour, l’amour est la valeur suprême. Parce que l’amour est la valeur suprême, elle est le sens de notre vie, car nous sommes créés à l’image de  Dieu. Le fait que Dieu soit Trinité est la raison pour laquelle l’amour est le sens de notre vie et pour laquelle rien ne nous rend aussi heureux que l’amour : celui-ci est inscrit dans notre être le plus intime. Nous sommes vraiment heureux quand nous sommes nous-mêmes […] les saints ne sont pas heureux de vivre comme des pécheurs », précise le théologien.

Complétude de Dieu

Dieu contient en Lui-même la pluralité et l’altérité, sans avoir à la chercher au-dehors de Lui. « Dieu est Trinité parce qu’Il est Amour dans sa forme complète », dit aussi Peter Kreeft.

Pour Raphaël Sëineux o.p., dans sa complétude, Dieu est ce mouvement constant par lequel les trois Personnes sont liées en une seule Unité. Ce mouvement émane de Dieu et Dieu est ce mouvement: « Dieu n’a pas seulement en Lui un principe d’action, Il est lui-même son action […] Sa vie n’est que le maintien de son Etre. Il est l’immuable et l’activité tout à la fois », souligne-t-il, en précisant que « pas plus que la pensée, l’Amour n’est en Dieu quelque chose de surajouté […] Tout ce qui est en Lui est substantiel ».

Or on distingue deux types d’actions différentes, deux manières dont l’amour divin peut agir: intérieurement, par la circulation d’amour trinitaire, et extérieurement, par l’action créatrice, poursuit le dominicain: « Les actions en effet son extérieures ou intérieures : extérieures, si elles s’exercent sur d’autres êtres […] intérieures ou immanentes, si elles s’accomplissent en celui qui agit […] Dieu agit de ces deux manières. Son action extérieure, c’est la Création ; son action intérieure, c’est la Trinité ».

L’Unité et la Trinité se concilient dans la notion de Dieu

Dieu est tout entier Père, Fils et Saint Esprit. Dieu ne se divise pas: il n’y a pas trois dieux, mais un seul. Le Catéchisme de l’Eglise catholique le note bien: « Nous ne confessons pas trois dieux, mais un seul Dieu en trois personnes […]. Les personnes divines ne se partagent pas l’unique divinité […] mais chacune d’elles est Dieu tout entier […] « Chacune des trois personnes est cette réalité, c’est-à-dire la substance, l’essence ou la nature divine » (Cc. Latran IV en 1215 : DS 804 » (CEC 253). Pour mieux saisir cette réalité, le Père Sineux propose l’analogie suivante : « Un corps, dans l’espace, ne perd rien de son unité sous prétexte que l’on considère successivement ses trois dimensions : la longueur, la largeur, la hauteur. Distinctions réelles pourtant, mais qui ne désignent qu’une même chose sans la diviser ». Ou encore: « Un triangle équilatéral est toujours identique, quel que soit celui de ses trois côtés que l’on examine : et chacun de ces trois angles s’étend à la surface totale, sans toutefois se confondre avec les deux autres ».

Bien sûr, ce ne sont que des analogies, ajoute le théologien dominicain, de « simples comparaisons bien imparfaites sans doute, mais qui prouvent cependant que si l’un et le multiple peuvent coexister dans les choses, à la condition seulement que l’on veuille bien distinguer les relations, il n’y a pas à être surpris que l’Unité et la Trinité se concilient, quoique d’une façon transcendante et mystérieuse, dans la notion de Dieu ».

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