Maxime Prévot : "notre mouvement n’aura plus de référence au personnalisme chrétien" (12/03/2022)

"Régénéré" ou "dégénéré" ?

Des propos recueillis par Antoine Clevers sur la Libre :

12 mars 2022

"Notre mouvement n’aura plus de référence au personnalisme chrétien"

Le CDH a vécu. À l’issue du congrès organisé ce samedi à Bruxelles, le Centre démocrate humaniste aura laissé sa place à un nouveau mouvement politique, pile 20 ans après avoir lui-même succédé au PSC. Pour Maxime Prévot, président du CDH, le maître-mot du processus de refondation, c’est "régénération". "Six régénérations vont structurer notre philosophie. La régénération du vivant, de la culture, de la prospérité, du pacte social, des libertés, et de la démocratie" , explique-t-il

Le processus de refondation, lancé début 2020, a pris une année de retard à cause du Covid. Il était temps d’atterrir ? On a l’impression qu’un sentiment de lassitude s’installait, non ?

Il y avait un double sentiment. Celui de lassitude pour certains, d’impatience pour d’autres. Mais de curiosité pour tous. Et cette curiosité va pouvoir être satisfaite ce samedi. C’est vrai que la crise sanitaire a chamboulé le calendrier. On a dû se réinventer, utiliser beaucoup plus le virtuel… Mais, à la réflexion, le fait que le processus ait pris deux ans, cela nous a été profitable. On a été plus loin, plus en profondeur. On a organisé 150 activités et débats. On a rassemblé 7500 participants alors que 25000 personnes suivent la page Facebook d’"Il fera beau demain" (le nom donné au processus de refondation, NdlR), c’est plus du double du nombre d’adhérents au CDH. L’objectif de faire une refondation en quittant l’entre-soi et en allant vers les citoyens a marché. Et je pense que le résultat en vaut la peine.

Dans quel état d’esprit êtes-vous ?

Je suis partagé entre l’excitation de voir ce moment arriver, la curiosité de voir la réaction des gens, et le challenge de m’assurer que, jusqu’à la dernière heure, le nom n’aura pas fuité… (rire)

Vous ne nous dévoilerez pas encore le nouveau nom ?

Plus que quelques heures à attendre.

Au moment de lancer le processus, vous aviez promis de bousculer les esprits. Comment cela va-t-il se traduire ?

Le fait de parler de mouvement politique plutôt que de parti, ce n’est pas qu’un changement sémantique. C’est le reflet de l’ADN de notre nouvelle offre politique, qui est en rupture avec le passé, en rupture avec la particratie, et surtout en avance sur les défis futurs. On est dans une période sombre. Guerre, pandémie, une classe moyenne épuisée, des prix qui flambent… On a plus que jamais besoin d’un nouveau projet dans la société. Et ce projet que l’on propose, c’est celui de la régénération. La régénération, c’est une invitation à l’harmonie des éléments, à leur réconciliation plutôt qu’à leur opposition.

Concrètement, qu’est-ce que cela signifie ?

On va être un mouvement largement empreint d’une conscience environnementale, plus que par le passé. Un mouvement qui va faire de la culture un pivot de la politique publique. Un mouvement qui veut régénérer notre prospérité, parce que le bonheur des gens ne se mesure plus par des indicateurs de PIB. On s’inscrit dans une démarche novatrice, on est les premiers à proposer un projet politique qui s’articule autour du concept de régénération.

D’où vient ce concept ?

La régénération fait l’objet de réflexions à travers le monde. L’ambition est de développer un autre modèle de société que celui que l’on connaît et qui arrive en fin de vie. Le philosophe Edgar Morin a appelé à un humanisme régénéré. C’est dans cette veine-là que nous souhaitons nous inscrire. Une démarche dans laquelle on prend soin de l’humain et de la nature, où l’on
cultive sans épuiser, où l’on se ressource.

C’est une démarche fondamentalement chrétienne, non ?

Pas du tout. C’est une démarche fondamentalement ressourçante, et qui ramène à l’essentiel. Ce que les citoyens demandent, ce ne sont pas ces pinaillages incessants entre présidents de parti, mais que l’on soit orienté solution, que l’on soit efficace. Par rapport à la dimension chrétienne, notre mouvement n’aura plus de référence au personnalisme chrétien, contrairement à l’article 1 du CDH. Les valeurs de générosité, de responsabilité, de bienveillance, d’effort, d’initiative, elles, resteront des éléments clés, mais nous n’estimons plus qu’elles ont besoin d’être labellisées par un courant religieux ou philosophique.

Craignez-vous que des gens quittent le mouvement, déçus par sa nouvelle orientation ?

Je ne suis pas dans une posture craintive. S’il doit y avoir des départs, il y en aura. Dont acte. Mais je me sens serein parce que je suis convaincu de la modernité de notre offre politique.

Quelle est l’ambition électorale ?

Je ne me suis pas fixé d’objectif chiffré. Ce qui m’intéresse, c’est d’opérer un  du logiciel politique en Belgique. Mais l’ambition est évidemment de faire mieux en 2024 que ce que le CDH avait pu faire en 2019, même si la comparaison sera difficile puisque ce ne seront plus du tout les mêmes partis.

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