La guerre en Ukraine ou l’accélération de la déconstruction du monde (06/04/2022)

De   sur le site de la revue Conflits :

6 avril 2022

Que nous apprend la guerre en Ukraine ? Que la déconstruction de « l’ordre du monde » s’accélère !

La guerre en Ukraine témoigne de l’accélération de la déconstruction du monde. À l’affrontement ancien entre les Etats-Unis et la Russie, s’ajoutent une guerre économique et une guerre de l’énergie. De nouveaux acteurs montent en force, comme la Chine, l’Iran et la Turquie.

Comme l’écrivait Camus « Mal nommer un objet, c’est ajouter au malheur de ce monde. Et justement la grande misère humaine … c’est le mensonge[i]».  Le suivi de l’actualité sur la guerre en Ukraine ne nous épargne pas dans ce domaine… Joe Biden n’a pas fait dans la nuance à l’égard de Vladimir Poutine en le qualifiant de « boucher » et en insistant pour que son « indignation morale » serve de référence à une nouvelle « guerre juste » contre le mal. Les Russes ne sont pas en reste et entretiennent auprès des opinions publiques l’image d’un « Occident décadent » otage de « néoconservateurs américains affairistes »… Aucun des deux ne sortira gagnant de ce combat sur cette marche des empires régulièrement disputée depuis 1 000 ans entre occidentaux et orientaux[ii]

Nous connaissons tous les vertus du « bouc émissaire » quand nous ne souhaitons pas traiter sur le fond une question vitale. Cette guerre en Ukraine est à ce titre assez éloquente des biais de représentation et des erreurs historiques qui ont été commises depuis 30 ans par toutes les parties prenantes le long de cet « intermarium » européen qui va de la Baltique au Monténégro. Chaque fois des populations sont prises en otage, avec un minimum de 3 à 6 millions de réfugiés, et toutes les atrocités propres aux guerres s’invitent sur nos écrans plasmas… Ce qui change c’est la singularité de la communication avec une virtualisation de plus en plus hystérique des situations sur le plan médiatique. Le « brouillard de la guerre » devient de plus en plus opaque et il devenu difficile, même pour les experts, de prendre un peu de recul sur les évènements[iii]. Que pouvons-nous honnêtement décrypter au-delà le bruit ambiant ? Comment se situent les signaux faibles et les vrais marqueurs en termes de rapports de force? Et que pouvons-nous percevoir des conséquences à terme de ce conflit ?

Personne ne sait véritablement, mais tout le monde commente

Nous dissertons en flux continu sur une réalité pour laquelle nous n’avons pas d’ informations fiables. Pourtant les dossiers sur la nature de ce conflit[iv] et sur les occurrences de risques existent[v]. Il est vraisemblable que tout ce qui est actuellement communiqué sur cette guerre d’Ukraine en termes de chiffrage morbide des victimes, de destructions civiles et d’évaluation de l’attrition des capacités militaires des uns et des autres soit faux. Nous retrouvons les mêmes méthodes qu’en Syrie depuis 2011 avec les comptages douteux de l’Observatoire syrien des Droits de l’Homme[vi] (OSDH), que tout le monde prenait pour une agence onusienne… Ce fut la même chose lors des opérations au Kosovo en 1999 avec les informations officielles, mais erronées qui étaient délivrées par l’OTAN[vii] … De fait chacun y va de son opinion, beaucoup plus que de l’observation de faits vérifiés et authentifiés[viii]. C’est le cas pour les évaluations sur l’échec de la «blitzkrieg » et sur « l’enlisement » de l’armée russe ou sur les « buts de guerre » de Vladimir Poutine, comme si nos experts avaient accès aux bureaux les plus confidentiels de Moscou… Il n’est pas étonnant que les débats sur les réseaux sociaux soient aussi passionnels, voire hystériques. Pour le moment, faute de vrais renseignements, la rumeur, la surenchère et l’outrance sont privilégiées afin de tenir les opinions en état de sidération.

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