Nicaragua : l'évêque de Matagalpa assiégé à son domicile par les forces de l'ordre (09/08/2022)
Au Nicaragua, un évêque est assiégé à son domicile par les forces de l'ordre depuis jeudi
Mgr Alvarez, bloqué chez lui avec 12 autres personnes, prêtres et laïcs, est accusé par la police de tenter «d'organiser des groupes violents» et d'inciter à des «actes de haine» pour déstabiliser le gouvernement du président Daniel Ortega.
Un évêque nicaraguayen, assiégé depuis trois jours par les forces de l'ordre dans son évêché et accusé d'«incitation à la haine», a dénoncé samedi un «emprisonnement à domicile».
«Ils nous ont dit que nous sommes en prison à domicile», a déclaré l'évêque Rolando Alvarez durant la messe qu'il a célébrée samedi depuis son évêché de Matagalpa (130 km au nord-est de Managua), retransmise sur les réseaux sociaux.
Des policiers anti-émeutes bloquent les accès à l'évêché, empêchant l'évêque de se rendre dans sa cathédrale à quelques rues de là pour y célébrer la messe.
Mgr Alvarez, assiégé depuis jeudi avec 12 autres personnes, prêtres et laïcs, est accusé par la police de tenter «d'organiser des groupes violents» et d'inciter à des «actes de haine» pour déstabiliser le gouvernement du président Daniel Ortega.
La police a annoncé vendredi avoir «ouvert une enquête afin de déterminer la responsabilité pénale des personnes impliquées dans ces agissements délictueux». «Les personnes soumises à l'enquête resteront à leur domicile», a encore précisé la police. Plusieurs évêques d'Amérique latine ont apporté leur soutien au prélat, âgé de 55 ans, critique du pouvoir.
«Le siège imposé à des prêtres et à des évêques, l'expulsion de membres d'ordres religieux, les profanations d'églises et la fermeture de radios (au Nicaragua) nous affectent profondément», a déclaré l'évêque péruvien Miguel Cabrejos, président du Conseil épiscopal d'Amérique latine et des Caraïbes (CELAM).
«Sa soutane ne lui accorde pas l'impunité»
Le Vatican n'a pour le moment pas réagi aux événements au Nicaragua. L'évêque de Matagalpa dénonce régulièrement la répression contre les opposants, exige le respect de la «liberté religieuse» et accuse le gouvernement de vouloir une «Église muette», réduite au silence sur les injustices.
«Sa soutane ne lui accorde pas l'impunité», a averti vendredi le député Wilfredo Navarro, du parti sandiniste de Daniel Ortega dans un article publié sur le site internet de la télévision publique Canal 4. Selon lui, l'évêque «a dirigé, avec d'autres curés, la tentative de coup d'État (contre Daniel Ortega) qui a provoqué tant de souffrance et de larmes au Nicaragua» en 2018.
Les relations entre l'Église catholique et le gouvernement de Daniel Ortega sont tendues depuis 2018 lorsque des manifestants qui réclamaient la démission du président nicaraguayen ont trouvé refuge dans des églises.
Le président Ortega a accusé l'Église catholique d'être complice d'une tentative de coup d'État ourdie par Washington. La crise a même mené à l'expulsion en mars du nonce apostolique (ambassadeur du Vatican) Mgr Waldemar Sommertag.
Daniel Ortega, un ex-guérillero sandiniste âgé de 76 ans, a été réélu en novembre 2021 pour un quatrième mandat présidentiel consécutif, lors d'un scrutin d'où étaient absents tous ses adversaires potentiels de poids, ceux-ci ayant été arrêtés ou contraints à l'exil.
Des manifestations qui réclamaient sa démission en 2018 ont été réprimées dans le sang, avec un bilan d'au moins 355 morts, des centaines de personnes emprisonnées et des dizaines de milliers exilées, selon la Commission interaméricaine des droits de l'homme (CIDH).
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