Selon Mgr Gallagher, l’accord Chine-Vatican n’est « pas le meilleur possible » (19/03/2023)

Du site des Missions Etrangères de Paris :

L’accord Chine-Vatican n’est « pas le meilleur possible » selon Mgr Gallagher

18/03/2023

Dans une interview, Mgr Paul Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États de la secrétairerie d’État, est revenu sur l’accord Chine-Vatican sur la nomination des évêques, signé en 2018 pour deux ans et renouvelé en 2020 et 2022. Selon lui, il résulte de près de 30 ans de négociations, « sur trois pontificats ». Mgr Gallagher a reconnu que « le moment n’était pas vraiment propice à la signature de l’accord, pour diverses raisons », mais qu’il allait « toujours être difficile » et que le Saint-Siège a malgré tout décidé d’aller de l’avant.

Des bannières accrochées par une famille chrétienne d’Anyang, au nord de la province chinoise, en 2015 à l’occasion du Nouvel an chinois.

Mgr Paul Gallagher, secrétaire pour les relations avec les États de la secrétairerie d’État du Saint-Siège, a déclaré que l’accord Chine-Vatican sur la nomination des évêques dans le pays communiste n’est « pas le meilleur accord possible » à cause de l’autre partie. Dans une interview accordée à Colm Flynn, journaliste de la chaîne de télévision américaine EWTN, il a reconnu que l’accord avec Pékin pouvait être amélioré, en précisant que des négociations sont en cours dans cet objectif.

L’accord Chine-Vatican a été signé pour la première fois en 2018 pour une durée provisoire de deux ans, avant d’être renouvelé à deux reprises en 2020 et 2022, à chaque fois pour deux ans. L’accord résulte d’une période de négociation d’une trentaine d’années et d’un « long processus qui s’est étalé sur trois pontificats ». « La majeure partie de l’accord avait déjà été convenue et acceptée par le Saint-Siège et les par autorités chinoises à l’époque du pape Benoît XVI », a-t-il ajouté.

Le Vatican et la Chine ont interrompu leurs liens diplomatiques en 1949 quand les communistes ont pris le pouvoir. Depuis, la nomination des évêques catholiques est devenue une cause de tensions entre les deux. Les troubles se sont intensifiés quand le Parti communiste chinois a créé, en 1957, l’Association patriotique des catholiques chinois, une organisation nationale soumise à la juridiction du gouvernement chinois et chargée de contrôler l’Église catholique en Chine.

Le Vatican reste déterminé à poursuivre le dialogue

L’association a commencé en nommant des évêques sans l’accord du Vatican. Les membres du clergé qui ont refusé de suivre les règles et les ordres de l’État ont continué d’être intimidés et harcelés, voire victimes de disparitions forcées ou de détention à domicile. Plusieurs millions de catholiques ont refusé de rejoindre l’Église « patriotique » ou « officielle » en restant fidèles au pape, malgré différents niveaux de persécution d’État. Ils ont fini par être connus comme l’Église « souterraine ».

Selon Mgr Gallagher, avant la signature de l’accord, il y avait un certain malaise au sein du Vatican, étant donné que la Chine n’était prête à aller que jusqu’à un certain point. « Comme l’a dit le cardinal Parolin de nombreuses fois, le moment n’était pas vraiment propice à la signature de l’accord, pour diverses raisons. Il allait toujours être difficile ; il allait toujours être utilisé par le Parti pour accroître la pression sur la communauté catholique, en particulier celle dite ‘clandestine’ », a-t-il expliqué. Le Saint-Siège a malgré tout décidé d’aller de l’avant.

Malgré les difficultés, l’amélioration de l’accord est en cours, a-t-il assuré, en soulignant que le Vatican reste « déterminé à poursuivre le dialogue ». Au fil des années, les deux parties ont acquis « une meilleure compréhension et un plus grand respect » l’un pour l’autre, a-t-il souligné, bien que dans le contexte de la politique intérieure chinoise, les choses ne peuvent progresser que « très lentement », malgré les efforts du Saint-Siège.

Des objectifs fixés à très long terme

Toutefois, le gouvernement chinois, l’Église catholique en Chine et le Vatican ne se fixent pas des objectifs à court terme et ne pensent pas « en mois, ni même en années », a-t-il poursuivi. « Et nous espérons qu’avec le temps, les relations seront bien plus normales, plus fluides et plus fructueuses. »

L’accord, selon les autorités ecclésiales, a pour objectif d’unir les quelque 10 millions de catholiques chinois, qui restent divisés entre deux Églises. Depuis l’accord, ni le Vatican ni la Chine n’ont nommé d’évêques sans l’accord de l’autre partie. Cependant, seuls six évêques ont été nommés depuis 2018, et le Vatican a reconnu plusieurs évêques ordonnés par la Chine sans l’accord du pape. À ce jour, plus de 40 diocèses chinois seraient toujours sans évêque.

Les observateurs estiment qu’à long terme, le Vatican souhaiterait rouvrir des liens diplomatiques officiels avec la Chine. L’accord, dont le contenu n’a jamais été rendu public, a rencontré la ferme opposition de responsables catholiques et de fidèles en Chine et à Hong-Kong, qui sont allés jusqu’à parler de « trahison » de l’Église souterraine. Certaines critiques disent également que l’accord n’aurait pas tenu compte de leurs souffrances subies en étant restés fidèles au Vatican.

Selon certaines organisations de défense des droits de l’homme, l’accord aurait forcé le Vatican à rester silencieux sur de graves violations des droits de l’homme en Chine contre des groupes ethniques et religieux dont les chrétiens et les musulmans Ouïghours, sans compter la lourde répression contre le mouvement démocratique à Hong-Kong ces dernières années. Ainsi, le régime aurait instrumentalisé l’accord afin de forcer le clergé et les fidèles à rejoindre l’Église officielle, en continuant de menacer les catholiques afin de démanteler l’Église souterraine.

(Avec Ucanews)

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