"Aucun pontife romain avant François ne s'était jamais permis d'aller aussi vite dans la création de nouveaux cardinaux pour assurer la pérennité de ses réformes." (10/07/2023)

De Jean-Marie Guénois sur le site du Figaro via Il Sismografo :

Avec sa nouvelle promotion de cardinaux, François pérennise sa ligne réformatrice de l'Église

(Jean-Marie Guénois, Le Figaro) ANALYSE - Le pape a annoncé la création, pour le 30 septembre, de 21 cardinaux dont deux Français, l'évêque d'Ajaccio et l'actuel nonce apostolique aux États-Unis. -- Pour la neuvième fois, en dix ans de pontificat, le pape François a annoncé dimanche une nouvelle promotion de cardinaux. Ils seront 21 à être « créés », selon l'expression, le 30 septembre 2023 au Vatican. Dont deux Français : le nonce apostolique aux États-Unis, Mgr Christophe Pierre, 77 ans, et Mgr François-Xavier Bustillo, 54 ans, un religieux franciscain, évêque d'Ajaccio. La France compte désormais six cardinaux électeurs puisqu'il faut être âgé de moins de 80 ans pour avoir le droit d'élire le pape.

Surtout, la majorité des deux tiers nécessaire pour élire son successeur en cas de conclave aura été choisie par ce pape qui a toujours sélectionné ces hommes parmi des évêques plutôt proches de ses orientations pastorales, même si le choix de Mgr Bustillo, un prélat assez classique, contredit cette tendance lourde. Aucun pontife romain avant François ne s'était jamais permis d'aller aussi vite dans la création de nouveaux cardinaux - presque une promotion par an - pour assurer la pérennité de ses réformes.

D'autant qu'il n'y avait aucune nécessité à en créer de nouveaux cette année, puisque le collège des cardinaux compte désormais 137 cardinaux électeurs de moins de 80 ans alors que le quorum minimum fixé par le règlement est de 120 prélats. Pour mémoire, Jean-Paul II convoqua neuf consistoires - c'est le nom donné à cette cérémonie de création de nouveaux cardinaux – en… 25 ans.

Pour François, nommer des cardinaux proches de sa ligne est une dimension décisive de sa politique de réforme de l'Église puisqu'elle détermine le choix de la ligne de son successeur. Il récuse ainsi toute personnalité divergente, ce que ne faisaient pas ses prédécesseurs qui intégraient toujours des cardinaux qui leur étaient opposés pour tenir compte de la diversité des opinions dans l'Église.

Le cas le plus emblématique de cette politique est la nomination de Mgr Victor Manuel Fernandez, bientôt 62 ans, Argentin et ami très proche du pape. Il est son fils spirituel autant que ce prélat est le mentor théologique de François. Le pape l'a d'ailleurs nommé la semaine dernière, à la prestigieuse fonction de préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la foi, un poste qu'occupa le cardinal Ratzinger sous le pontificat de Jean-Paul II. Mgr Fernandez est aussi derrière beaucoup de textes importants de François dont l'encyclique Amoris Laetitia qui réforma l'accès des personnes divorcées remariées à la communion après le synode sur la famille.

Le livre de Mgr Fernandez sur «l'art du baiser» avait fait scandale en son temps, de même que sa position en faveur de la bénédiction des couples homosexuels inquiète. En 2015, ce théologien très réformateur et sans état d'âme pour la tradition de l'Église, déclarait dans une interview au Corriere della Sera : «les cardinaux eux-mêmes peuvent disparaître, dans le sens où ils ne sont pas essentiels» car «l'Église, c'est le Peuple de Dieu guidé par ses pasteurs».

François a également nommé un autre Argentin, proche de lui, Mgr Angel Sixto Rossi, un jésuite, très engagé sur le plan social. Il a créé à Buenos Aires le Hogar San José qui vient en aide aux personnes de la rue et la Fondation Manos Abiertas (Mains ouvertes) qui apporte une assistance aux personnes les plus pauvres et vulnérables dans 10 villes d'Argentine.

À noter, enfin, dans cette liste, trois noms d'évêques en responsabilité dans des pays très tendus : Mgr Pierbattista Pizzaballa, patriarche latin de Jérusalem, un remarquable franciscain italien qui fait un parcours sans faute en Terre Sainte dans une situation extrêmement complexe. Mgr Stephen Ameyu Martin Mulla, archevêque de Djouba au Soudan du Sud. Et Mgr Stephen Chow Sau-Yan, un jésuite, évêque de Hong Kong qui est l'homme du dialogue actuel avec la Chine, un dossier capital pour le pape François.

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