France : la natalité est au plus bas tandis que l'avortement est au plus haut (29/09/2023)

D' sur le site du Figaro :

Baisse historique des naissances : pourquoi les Français font-ils moins d'enfants ?

28 septembre 2023

Le nombre de naissances en France est au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale

Aux deux tiers de l'année 2023, les naissances ont baissé de 7% par rapport à 2022. Leur nombre est au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale.

2023, année du baby crack ? Chaque nouveau mois qui passe confirme la baisse de la natalité en France. En août, 1896 bébés sont nés en moyenne par jour. Une chute de 8 % par rapport à août 2022, selon les chiffres provisoires publiés par l'Insee jeudi. Aux deux tiers de l'année, on compte déjà « environ 35.000 naissances de moins en 2023 qu'en 2022 », soit « une baisse de 7,2 % ».

« Si on part de l'hypothèse que cette tendance se poursuit, le nombre de naissances pourrait ne pas dépasser la barre des 700.000 en 2023, un seuil symbolique », projette Chloé Tavan, chef de la division enquêtes et études démographiques de l'Insee. « Pour la natalité française, cela s'annonce comme la pire année depuis 1945 », abonde Laurent Chalard, géographe à l'European Centre for International Affairs. L'année dernière, la chute était déjà sensible avec 726.000 nouveau-nés, soit 2,2 % de moins qu'en 2021.

Le nombre de naissances est au plus bas depuis la fin de la Seconde Guerre mondiale, confirme la nouvelle étude de l'Insee portant sur 2022 et le premier semestre 2023. La natalité connaît une baisse presque continue depuis 2011. Si l'on se place dans une perspective plus longue, par rapport « au pic des naissances de l'après-guerre, en 1971 », les naissances « sont en recul de 20,8 % », précise l'Insee. En prenant comme point de comparaison l'année 2010 - où la France vivait encore un « âge d'or » des berceaux - la baisse s'établit à 12,8 %.

Comment analyser cette chute historique de la natalité ? L'Insee indique que « le nombre de femmes en âge d'avoir des enfants est assez stable » et relie donc cette baisse à celle de la fécondité. Son indice, établi à 1,80 enfant par femme en 2022, pourrait encore se réduire en 2023. Il y a dix ans, il s'élevait à près de 2 enfants par femme, avoisinant le seuil de renouvellement des générations.

En 2022, les femmes âgées de 25 à 34 ans, au pic de la fertilité, ont fait moins de bébés. Signe du recul constant de l'âge de la maternité, seules les mères de 40 ans ou plus en ont fait d'avantage« Cette tranche d'âge est la seule pour laquelle les naissances sont plus nombreuses en 2022 », relève l'Insee. L'an dernier, les mères étaient âgées en moyenne de 31,2 ans à l'accouchement. Contre 30 ans en 2012, et 26 ans au milieu des années 1970.

« Les femmes aujourd'hui âgées de 29 à 31 ans - nées au début des années 1990 et proches de l'âge moyen de l'accouchement - sont moins nombreuses actuellement. Ce creux dans la pyramide des âges correspond à plusieurs dizaines de milliers de mères en moins. Cet effet conjoncturel accentue la baisse structurelle de la natalité », souligne le géographe Laurent Chalard, évoquant une « double peine démographique ». D'autres évolutions se reflètent dans les chiffres de la natalité, comme les changements de configurations familiales. En 2022, près des deux tiers de naissances (65 %) ont désormais lieu hors mariage contre la moitié dix ans plus tôt. Le nom du père, lui, est moins souvent donné aux enfants. 79 % des bébés le portent contre 83 % en 2012. Ces mutations ne permettent cependant pas d'expliquer la baisse de la natalité depuis une décennie en France.

« Pourquoi les Français font-ils moins d'enfants et cette tendance va-t-elle se poursuivre ? Même les démographes peinent à s'accorder sur la réponse, souligne Chloé Tavan. C'est une évolution difficile à estimer. Faire un bébé est une décision qui engage sur le long terme et qui dépend donc de la manière dont on se projette dans l'avenir : emploi, sécurité financière, logement, contexte climatique… sans compter des facteurs plus intimes ». La remise en cause de la politique familiale, et son rabotage sous le quinquennat de François Hollande, est citée comme une des premières causes de cette baisse par le démographe Gérard-François Dumont. « La guerre en Ukraine et l'inflation de ces derniers mois semblent venir accentuer ce déclin. Cette baisse s'explique par une somme de facteurs », note Laurent Chalard.

Afin de répondre à cette délicate question, les Associations familiales Catholiques (AFC) ont commandé une enquête à l'IFOP(1) en juillet 2023. Pourquoi les Français qui annoncent vouloir en moyenne 2,39 enfants en font moins qu'ils ne l'avaient imaginé ? « Nous avons cherché à comprendre quels étaient les freins à la natalité dans un contexte de baisse des familles nombreuses, d'augmentation des couples sans enfants et de stabilité du nombre de familles à un ou deux enfants », explique Pascale Morinière, présidente des AFC.

Cette étude, que Le Figaro dévoile, confirme que plus d'un tiers (38 %) des adultes de moins de 50 ans a renoncé à avoir un enfant ou à en avoir un de plus s'ils étaient déjà parents. Les problèmes de mode de garde des jeunes enfants (leur coût ou leur absence) arrivent en premier sur l'ensemble des raisons citées pour 47 % des sondés. Juste devant les difficultés financières ou d'emploi (44 %). Une réponse qui confirme l'importance de la conciliation de la vie familiale et professionnelle.

Il faut écouter les parents qui veulent avoir le choix de garder leur bébé et augmenter l'indemnisation actuelle de 428 euros par mois qui écarte les classes moyennes de ce congé

Pascale Morinière, présidente des AFC

L'impact de la crise climatique, beaucoup commentée dans les médias ces dernières années avec l'émergence des mouvements Gink (« Green Inclination, No Kids », que l'on peut traduire par « Engagement vert, Pas d'enfants ») n'est évoqué qu'en cinquième position. Elle est évoquée par un quart du panel, dans la même proportion que le désaccord avec le conjoint ou les problèmes médicaux. « C'est un facteur de blocage qui a sans doute été surévalué. Ce discours émane avant tout des plus jeunes qui ne sont encore pas prêts à avoir des enfants », note Pascale Morinière des AFC. Réponse inattendue mais pourtant évidente, 39 % des personnes interrogées pointent une « autre raison », principalement le fait d'être célibataire ou sans conjoint. « Un pourcentage qui reflète la montée de la solitude dans notre société », note Pascale Morinière.

Une politique familiale plus généreuse ou plus adaptée aux besoins des familles aurait-elle pu changer la donne ? Près de la moitié des sondés (48 %) qui ont renoncé à faire un enfant estiment que la possibilité de prendre un congé parental aurait modifié leur décision. Entre 2014 et 2021, le nombre de parents qui posent un congé parental a été divisé par deux. « Cet élément déterminant de la politique familiale a été détruit sous François Hollande. Il faut écouter les parents qui veulent avoir le choix de garder leur bébé et augmenter l'indemnisation actuelle de 428 euros par mois qui écarte les classes moyennes de ce congé », interpelle Pascale Morinière. En juillet, la nouvelle ministre des Solidarités Aurore Bergé a préconisé un congé parental mieux indemnisé quitte à raccourcir sa durée. Les sondés, eux, penchent pour un congé parental d'une durée de 6 mois à un an (42 %) ou de 2 ans (34 %) et estiment que l'indemnité mensuelle incitative devrait s'élever à 1141 €.

Tandis que la pratique de l'avortement bat ses records (France Info) :

Le nombre d'avortements en France augmente en 2022, au plus haut depuis 1990

En 2022, le nombre d'avortements pratiqués a atteint sont plus haut niveau depuis 1990, alors que ces dernières années, plusieurs mesures ont simplifié le parcours des femmes qui souhaitent avorter.

Article rédigé par Anne-Laure Dagnet

Radio France
 

Le nombre d'avortement a augmenté en France en 2022, pour atteindre son plus haut niveau depuis 1990. C'est ce que révèle mercredi une étude de la Direction de la recherche, des études, de l'évaluation et des statistiques (Drees). L'année dernière, 234 300 interruptions volontaires de grossesse ont été enregistrées en France, dont 218 400 en métropole.

Un nombre en hausse, après deux années de recul en raison de la pandémie de Covid-19. Il s'agit essentiellement des interruptions volontaires de grossesse médicamenteuses, pratiquées en dehors de l'hôpital.

Plus besoin d'avancer les frais d'examens et d'intervention

Cette hausse des IVG ne s'explique pas seulement par l'allongement du délai pour avorter (qui est passé de 12 à 14 semaines de grossesse début 2022), puisque ces avortements dits "tardifs" ne représentent que 20% des 7 000 IVG supplémentaires recensées en un an. Ces dernières années, d'autres mesures ont en effet simplifié le parcours des femmes qui souhaitent avorter.

Depuis 2021, elles n'ont par exemple plus à avancer les frais des examens et des interventions qui coûtent plusieurs centaines d'euros. Elles peuvent également demander l'anonymat et réaliser tout le processus par téléconsultation, en prenant les médicaments à domicile. La pratique, autorisée lors du premier confinement, a été pérennisée. La Drees note que la baisse du nombre d’IVG en secteur hospitalier se poursuit tandis que la progression hors établissement s’accélère.

Les IVG médicamenteuses se développent

On compte 144 600 avortements en milieu hospitalier en 2022 et 89 600 hors hôpital, qui comprennent les IVG par téléconsultation et celles instrumentales, en centre de santé.

L'étude souligne que ce sont essentiellement les interruptions de grossesse médicamenteuses qui se développent. Elles représentent près de huit IVG sur dix (78%). À titre de comparaison, elles représentaient 68% des avortements en 2019 et 31% en 2000. Pour la moitié (51%), l'IVG médicamenteuse se pratique en établissement hospitalier. Dans 44% des cas, ça se déroule en cabinet libéral et 5% se font en centre de santé et centre de santé sexuelle (ex-centre de planification et d’éducation familiale). Depuis 2020, les critères de l'IVG médicamenteuse ont évolué. Les femmes peuvent à présent les pratiquer jusqu'à neuf semaines de grossesse, au lieu de sept auparavant.

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