Saint Titus Brandsma : une lumière dans l’enfer nazi (26 juillet) (26/07/2025)

D'Arnaud Dumouch sur "1000 raisons de croire" :

Saint Titus Brandsma : lumière dans l’enfer nazi

Prêtre carme et journaliste, homme « doux mais déterminé », Titus Brandsma utilise dès les années 1930 les journaux catholiques pour stigmatiser l’idéologie nazie comme « anti-humaine » et défendre la dignité de chaque personne. Ses écrits se heurtent au Reich, qui craint « ce professeur maléfique ». Arrêté et déporté à Dachau, il est exécuté par injection létale le 26 juillet 1942.


Les raisons d'y croire

  • Après l’invasion des Pays-Bas par Hitler en 1940, le père Titus Brandsma aurait pu sauver sa vie si, comme beaucoup d’autres, il s’était fait discret en attendant que la guerre se passe. Mais il a préféré rester sur place en s’opposant ostensiblement au régime, alors qu’il était tout à fait au courant du sort qui l’attendait.
  • Il s’oppose au nazisme, non par idéologie politique, mais par fidélité à l’Évangile et à la dignité humaine universelle qu’enseigne le Christ. C’est pour cela qu’il refuse de collaborer avec la puissance oppressive qu’est l’Allemagne du IIIe Reich.
  • Son courage à défendre la vérité, même au risque de la mort, est un témoignage puissant. Ce courage face à la mort est alimenté par son espérance en la vie éternelle : « N’ayez pas peur de ceux qui tuent le corps... » ( Mt 10,28 ).
  • L’attitude du père Brandsma dans le camp de Dachau révèle sa capacité de pardon et d’amour envers ses tortionnaires. D’un point de vue humain, cette attitude n’a pas de sens.
  • En particulier, il faut souligner la façon dont il accompagne la petite infirmière chargée de lui injecter le produit létal. Elle raconte : « Il m’a pris la main : "Pauvre jeune fille que tu es, je vais prier pour toi !" » Il a tenu promesse depuis le Ciel et obtenu pour elle des grâces qui lui permettront par la suite de vivre avec le poids de ce qu’on l’avait forcé à faire, et de revenir à la foi catholique. « Le père Titus Brandsma, que je ne connaissais pas, m’a engendré à la grâce. »
  • Le chemin de croix qu’il vécut à Dachau, son épuisement physique, son attitude édifiante et sa mort héroïque manifestent ce qu’il avait à l’intérieur de son âme : tout ce qu’il a enseigné n’était pas simplement parole. Son âme était réellement attachée au Christ plus qu’à sa propre vie.
  • En 1983, en Floride, une religieuse carmélite contracte une forme grave de cancer grave, apparemment incurable. Après qu’elle a prié avec ferveur pour l’intercession de Titus Brandsma, sa guérison est rapportée comme totale et inexplicable du point de vue médical. Ce miracle a conduit à la béatification de Titus Brandsma en 1985.
  • Le second miracle reconnu survient en 2004, lorsqu’un prêtre carmélite américain, frère Michael Driscoll, est atteint d’un mélanome métastatique avancé (stade IV). On lui remet un fragment du costume noir du père Brandsma, qu’il applique quotidiennement sur sa tête : le cancer disparaît complètement et les médecins signalent qu’il s’agit d’une rémission scientifique inexplicable.

En savoir plus

Titus Brandsma naît le 23 février 1881 aux Pays-Bas. Il faut savoir que ce pays, au moment de la Réforme, a basculé en grande partie dans le protestantisme. Titus est donc issu d’une vieille famille catholique, avec cette sensibilité particulière très différente de ce qu’on peut trouver dans le sud de l’Italie. La foi s’exprime de manière discrète et rigoureuse, sans démonstration excessive.

C’est une famille fervente, puisque plusieurs de ses frères et sœurs auront comme lui la vocation religieuse. À l’âge de onze ans, il prend l’initiative, avec l’autorisation de ses parents, de prendre le tramway et de se rendre en ville pour solliciter son admission dans un petit séminaire, afin d’approfondir sa vocation. Les Franciscains auraient souhaité le garder auprès d’eux à sa majorité, mais il choisit une autre communauté religieuse, celle des Carmes, parce qu’il a un grand amour pour sainte Thérèse d’Avila , le docteur mystique du XVIe siècle. Il est déterminé à suivre la voie qu’il a choisie et centre sa recherche théologique sur l’approche de Dieu à travers la contemplation spirituelle. Plus tard, dans ses travaux intellectuels, il publiera une traduction des œuvres de sainte Thérèse d’Avila en néerlandais. À cette époque-là, on le voit entrer dans de grandes discussions avec ses confrères carmes, et les questions disputées aboutissent à de vraies conclusions théologiques.

Il est finalement ordonné prêtre le 17 juin 1905, à vingt-quatre ans, comme le droit canonique l’exige. On l’envoie à Rome, puis, après avoir achevé des études poussées en philosophie et en sociologie, il revient aux Pays-Bas et fonde une école catholique pour les enfants afin de pouvoir communiquer aux 15 % de la population néerlandaise concernée la connaissance de la foi catholique. Il est un éducateur né.

Le temps passe et, quand l’Allemagne, dès 1933, adhère à une idéologie nouvelle, le nazisme, qui élabore une sorte de culte idolâtrique de la race, il informe ses élèves de la gravité de la chose, qu’il qualifie de « néopaganisme », avant même que le pape Pie XI ait publié son encyclique qui condamne le nazisme. Il est repéré par quelques nazis néerlandais qui, plus tard, lorsque le pays sera envahi par Hitler, se souviendront qu’il est un ennemi irréductible du nazisme.

Entre 1938 et 1939, il continue de mettre en garde le peuple néerlandais et il n’hésite pas à donner des conférences en montrant à quel point le nazisme est une abomination pour l’être humain. Il comprend aussi très vite que les Juifs sont en danger.

Le 10 mai 1940, l’Allemagne nazie envahit les Pays-Bas. Il a cinquante-neuf ans et il devient un résistant spirituel et intellectuel. Rien ne peut arrêter son courage. Il avertit, dans les journaux catholiques, que tous ceux qui soutiendront d’une manière ou d’une autre l’idéologie nazie seront considérés comme n’étant plus catholiques.

Influencés par son courage, les évêques néerlandais vont protester contre la déportation des Juifs qui commence aux Pays-Bas. C’est à partir de là qu’Hitler va décider, pour mettre fin aux discours contestataires, de faire déporter, en priorité, non seulement les Juifs de ce pays, mais aussi les prêtres catholiques. Et c’est ainsi que commence pour ce pays le chemin de croix. À la fin de la guerre, il ne subsistera que 5 % de la communauté juive.

En ce qui le concerne, il est arrêté le 19 janvier 1942. Il est transporté à Nimeg, tout de suite emprisonné, puis interrogé. Ensuite, il est déporté au camp de concentration de Dachau. Tant qu’il a la santé, ses codétenus se souviennent de lui comme d’un grand soutien, et témoignent de ses encouragements à rester debout, fidèles à leur foi.

Son chemin de croix s’intensifie et sa santé est bientôt profondément atteinte. Il est transporté vers l’infirmerie du camp de Dachau, où les malades sont exterminés par des piqûres létales. À cette époque-là, il n’y a pas encore d’extermination par le gaz. Le père Titus est parfaitement au courant de ce qui l’attend lorsque l’infirmière s’approche de lui et prépare l’injection. Il discute avec elle et lui donne son chapelet, qu’il a fabriqué dans le camp à partir de deux bouts de bois et d’une ficelle. Il lui dit qu’il lui pardonne son geste, et qu’il faut qu’elle conserve toujours une démarche de prière dans les actes qu’on l’oblige à accomplir. Ce n’est pas obligé, dit-il, de dire un Je vous salue Marie, mais au minimum de confier son âme de pauvre pécheresse à la Vierge Marie. Elle témoigne de tout cela lors de l’enquête de béatification, en novembre 1985.

Auteur :

Agrégé en sciences religieuses en Belgique, Arnaud Dumouch fonde en 2015 avec l’abbé Henri Ganty l’institut Docteur Angélique , qui donne sur Internet la totalité d’une formation diplômante en philosophie et en théologie catholique, dans la ligne de l’herméneutique de la continuité de Benoît XVI.


Au delà

La parole ardente de Titus Brandsma eut un fort impact au sein de l’Église des Pays-Bas. Inspirés par son courage, les évêques néerlandais adoptèrent une position publique ferme en protestant ouvertement contre la déportation des Juifs. Cependant, cette initiative nourrit une réaction brutale des nazis : en représailles, les déportations augmentèrent, y compris celle des Juifs convertis au christianisme, jusque-là épargnés.


Aller plus loin

La vidéo d’Arnaud Dumouch : « Le martyre du saint père Titus Brandsma, qui résista au nazisme par ses mots ».


En complément

  • Titus BrandsmaItinéraire spirituel du Carmel, Parole et Silence, collection « Grands Carmes », 2003.
  • Miguel Arribas, The Price of Truth: Titus Brandsma, Carmelite, Charles Lewis Books2022.
  • Titus Brandsma, Mysticism in Action (collected works), édité par Élisabeth Hense & Joseph Chalmers, Carmelite Media, 2021 : volume d’étude académique en anglais contenant les écrits essentiels (articles, conférences, réflexions spirituelles) du père Brandsma entre 1904 et 1942.
  • Site officiel du projet d’édition critique de l’œuvre de Titus Brandsma, supervisé par l’institut Titus Brandsma et l’université Radboud, à Nimègue.

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