L’avortement divise toujours les Belges (26/03/2012)

De Christian Laporte dans « La Libre » de ce jour :

"Deux manifestations l’ont montré, samedi et dimanche, au centre de Bruxelles. En Belgique, la loi ne devrait pas changer, mais c’est moins sûr ailleurs.

Fin mars 1990, après des années de discussions souvent passionnées pour ne pas dire passionnelles, la Chambre votait la proposition de loi, déjà adoptée par le Sénat, qui dépénalisait partiellement l’avortement en Belgique. L’on pensait que ce vote mettrait un terme définitif aux polémiques, mais c’était compter sans l’objection de conscience très déterminée du roi Baudouin qui estima ne pas pouvoir signer et promulguer des mesures contraires à ses convictions religieuses et aussi morales profondes. L’on sait qu’il demanda cependant au gouvernement Martens de tout mettre en œuvre pour concrétiser l’application de la législation. Et il suspendit son règne le temps que le monde politique s’accorde.

Depuis trois ans, l’anniversaire de la loi sur l’IVG relance le débat fin mars avec la mise sur pied d’une Marche pour la vie (antiavortement) à l’initiative d’un groupe de jeunes, étudiants ou travailleurs issus des deux grandes communautés du pays, mais surtout indépendants de tout parti politique. Elle s’est déroulée dimanche en présence de quelque 4 000 personnes, selon les organisateurs (qui se réfèrent à l’espace occupé en fin de manifestation sur la place Poelaert par rapport aux éditions précédentes). De son côté, la police parlait plutôt de 1 900 personnes qui ont défilé du Mont des Arts au Palais de Justice.

Anthony Burckhardt, le porte-parole des organisateurs, ne cachait pas sa satisfaction à l’issue de l’événement: "Nous manifestions aussi pour assurer - enfin - une meilleure protection juridique de l’enfant à naître, et le nombre croissant de personnes qui nous rejoignent, d’année en année, nous convainquent que nous sommes dans le bon. Car contrairement à la manifestation de samedi, où les centres de planning familial n’avaient pas lésiné sur les moyens pour faire venir du monde, nous n’avons que très peu de moyens. La présence de ces milliers de personnes, venues nous apporter leur soutien, montre que le débat n’est pas clos, tout au contraire. Plus que jamais, chaque vie humaine doit être respectée. Il est quand même impensable que dans la société d’aujourd’hui, des femmes avortent pour des raisons économiques. Il faut privilégier l’adoption et augmenter les moyens d’accompagnement des parents." Un message partagé par la hiérarchie de l’Eglise catholique et notamment par l’évêque de Tournai, Mgr Harpigny, présent sur place contrairement à l’évêque de Gand, Mgr Luc Van Looy, qui avait dû renoncer suite à un accident physique. Les organisateurs avaient aussi le soutien du Grand rabbin de Bruxelles ainsi que du mouvement Action pour la famille.

Samedi, plus de 2 000 personnes avaient défilé - en sens inverse du Palais de Justice vers le Mont des Arts - à l’initiative des militants de différents centres de planning familial et avec le soutien notamment du Centre d’action laïque, du Cercle du libre examen, du Centre Severine ou encore du Conseil des femmes francophones. Julie Laot, représentante des Mutualités socialistes, a expliqué que le droit à l’avortement est loin d’être acquis une fois pour toute. "D’abord, parce que les adversaires de l’IVG n’hésitent plus à manifester devant les centres de planning familial; ensuite, parce que dans un certain nombre de pays, le droit à l’avortement est loin d’être acquis, les lois étant même remises en question." Et de rappeler qu’ "en Europe, l’Irlande, la Pologne, Malte et Chypre interdisent l’avortement. D’autres pays le rendent pratiquement inaccessible. Selon une récente étude de l’Organisation mondiale de la santé (OMS), le nombre d’avortements clandestins tend à progresser dans le monde. Interdire l’avortement ou le rendre inaccessible ne diminue par le nombre d’avortements, cela le rend clandestin et, donc, dangereux en termes de santé publique".  Ici :L’avortement divise toujours les Belges

"En Belgique la loi ne devrait pas changer" estime M. Laporte au vu de l'impact relatif des deux manifestations contradictoires de ce week-end. Pas encore, peut-être, mais il faudra tôt ou tard remettre le dossier politique sur la table.

Tuer un enfant durant sa gestation peut-il jamais être un droit ? Ou un avatar de la contraception ? Les termes de la législation belge poussent à un recours à l’avortement en croissance constante. Il serait grand temps de réévaluer les conséquences d’une loi qui aboutit à la banalisation d’un acte intrinsèquement mauvais dont l’abandon des poursuites ne devrait être admissible que dans certains cas extrêmes, relevant du seul concept de la cause d’excuse.  

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