Gènéthique : Nicolas Tardy-Joubert, vous êtes le nouveau président de la « Marche pour la vie », 45 ans après le vote de la loi Veil, pourquoi faut-il encore marcher « pour la vie » ?
Nicolas Tardy-Joubert : La loi Veil, initialement promue pour 5 ans, a finalement été reconduite et au fil des années, ses verrous ont été levés, les uns après les autres. Jusqu’à l’emblématique notion de « détresse », supprimée en 2014. Ce qui ne lasse pas d’étonner, c’est que fort de ces concessions successives, les conditions ne semblent jamais suffisantes. Aujourd’hui encore, au Parlement, la proposition de loi Gaillot doit être examinée au Sénat à partir du 20 janvier (cf. L’obsession de l’IVG). Elle prévoit d’étendre les possibilités d’avortement de 12 à 14 semaines, et voudrait supprimer la clause de conscience spécifique des médecins et du personnel soignant. La révision de la Loi de Bioéthique arrive en deuxième lecture au Sénat début février, elle contient une disposition qui permettrait un avortement pour détresse psychosociale jusqu’au terme de la grossesse, et la suppression du délai de réflexion pour l’IMG (cf. Extension de l’IMG pour détresse psychosociale : « Une forme d’indignité, pour ne pas dire de barbarie »).
Nous serons donc dans la rue pour nous opposer à ces projets qui menacent la vie à très court terme, et pour demander de mettre en place des politiques de prévention (cf. Avortement en France : l’échec des politiques de prévention). Il est indispensable de réduire la peine et le drame que constituent ces avortements de masse, de protéger la femme qui est trop souvent victime d’une pression sociale, médicale, économique. Ce que nous rappelons avec force c’est que l’avortement est d’abord une violence faite aux femmes et aux enfants à naitre. Nous marchons pour défendre la vie et rappeler que l’engrenage qui conduit à l’avortement n’est pas une fatalité.
G : En France, le nombre d’avortements est stable depuis de nombreuses années, avec toutefois une augmentation depuis 2016 ?
NTJ : Le seul message qui est délivré aujourd’hui en France à travers les lois ou dans les médias pousse à toujours plus d’avortements. Les politiques publiques ne s’attaquent pas aux causes qui conduisent les femmes à avorter. Très souvent, la précarité de leur situation les accule à cet acte qu’elles ne font pas de « gaité de cœur » pour reprendre les mots de Simone Veil. Actuellement, les aides financières pour accompagner les parents, les mères de famille, les femmes enceintes sont trop peu incitatives. Par exemple, tous les actes liés à l’avortement sont pris en charge à 100%, alors que ce n’est pas le cas quand vous voulez mener votre grossesse à terme. Le congé parental est raboté. Il faudrait valoriser la naissance, rassurer, accompagner… Les politiques mises en place ne sont pas du tout à la hauteur des enjeux. Et quand elles existent, elles sont très peu connues et mises en œuvre.