Depuis le 26 mars, les mamans ukrainiennes en Pologne peuvent demander des allocations familiales de la même manière que les parents polonais, à raison de 500 zlotys (environ 110 €) par mois et par enfant mineur. Les réfugiés ukrainiens ont aussi droit à un numéro d’identité polonais (PESEL) qui leur facilite les formalités en Pologne, et ils ont un accès gratuit aux soins de santé et aux transports publics. En outre, le gouvernement polonais propose une allocation de 40 zlotys (environ 11 €) par jour et par réfugié, pendant un maximum de 60 jours (avec effet rétroactif à partir du 24 février), aux familles qui logent des réfugiés ukrainiens, et cette allocation concernerait à ce jour environ 600 000 réfugiés.
Dans une lettre envoyée à la Commission européenne le 13 avril, le premier ministre Mateusz Morawiecki estimait le coût du séjour des réfugiés ukrainiens en Pologne à au moins 11 milliards d’euros sur un an dans l’hypothèse du séjour de 2 millions de réfugiés environ, ce qui correspond à l’estimation basse du nombre de réfugiés ukrainiens présents aujourd’hui en Pologne. Dans cette lettre, Morawiecki rappelait également à Ursula von der Leyen que la Pologne n’avait à ce jour reçu aucun soutien financier de l’UE au titre de l’accueil des réfugiés ukrainiens, ce qui restait vrai deux semaines plus tard. En effet, si la Commission européenne se vante d’avoir débloqué 3,5 milliards d’euros pour l’aide aux réfugiés ukrainiens, dont 560 millions d’euros pour la Pologne, il s’agit en fait d’une réorientation des fonds du programme React-UE qui étaient destinés à soutenir les économies des 27 après les mesures désastreuses pour l’économie prises contre la pandémie de Covid, et donc de fonds qui ont déjà été majoritairement utilisés par la Pologne et dont les 190 millions pas encore utilisés et effectivement réaffectés à l’aide aux réfugiés lui auraient de toute façon été versés l’année prochaine pour d’autres objectifs. Il ne s’agit par conséquent en aucun cas de fonds supplémentaires, mais uniquement d’une réaffectation de 190 millions d’euros pour faire face à cette gigantesque crise des réfugiés dont le coût réel se chiffre en milliards.
Si le soutien de l’UE face à cette crise des vrais réfugiés en reste au stade des intentions et des belles paroles, la Commission continue en revanche de bloquer l’adoption du plan de relance polonais et donc le versement des fonds NextGenerationEU attribués à la Pologne, et elle prélève désormais sur les fonds du budget annuel dus à la Pologne les astreintes journalières décrétées par la CJUE (à la demande de la Commission) et contestées par la Pologne. Ces astreintes concernent en effet, d’une part, la réforme de la justice pour laquelle Varsovie ne reconnaît pas de compétence à l’UE et, d’autre part, le conflit autour de la mine de Turów qui a depuis fait l’objet d’un accord amiable entre la Pologne et la Tchéquie et pour laquelle la Pologne contestait la légalité de la mesure provisoire clairement disproportionnée décidée par la vice-présidente de la CJUE.
Cette politique de sanctions en lieu et place de la fameuse « solidarité européenne » (que l’on exigeait des Polonais et des autres pays du V4 en 2015 pour les contraindre à accueillir des immigrants illégaux qui n’étaient majoritairement pas des réfugiés) est encouragée par le Parlement européen qui a encore adopté le 10 mars dernier une résolution exigeant de la Commission qu’elle entament toutes les procédures possibles pour couper les subventions européennes à la Pologne et la Hongrie.
Pour forcer l’application du principe de solidarité européenne, certains ministres du gouvernement Morawiecki demandent donc aujourd’hui la suspension du versement des cotisations polonaises au budget de l’UE, afin d’utiliser cet argent pour financer l’aide aux réfugiés.
Comme auparavant pour la crise de l’euro, puis la crise des migrants et celle de la pandémie de Covid, l’Union européenne s’avère malheureusement être pour ses membres les plus affectés un poids plutôt qu’une aide dans la crise des réfugiés.