Voici l'opinion d'un prêtre "traditionaliste",
"Que faire de Vatican II, concile inoubliable ? Grosse question.
On peut penser, comme je l'écrivais à l'époque que c'est un Concile caractéristique de la mauvaise conscience qui fleurit durant les 30 Glorieuses. Ce texte assez flou qu'est Gaudium et spes par exemple apparaît comme dépassé parce qu'il correspond à un univers sans crise, sans échéance, sans histoire. La post-histoire qu'aimait tant Philippe Muray, je crois vraiment que nous en sommes sortis, il y a bientôt dix ans, un certain 11 septembre.
Tout cela se défend, mais cette analyse (qui fut la mienne) ne suffit pas, étant donné la solennité de l'événement.
Le cardinal Ratzinger, suite d'ailleurs à un certain Marcel Lefebvre, qui citait lui-même... Jean-Paul II, parle de l'herméneutique de Vatican II : il faut lire le Concile à la lumière de la Tradition. Ou l'on voit toute la différence qui est faite entre Vatican II et... Trente par exemple. Trente et Vatican I SONT la Tradition. Vatican II lui en dépend. Il est tellement long et tellement flou qu'il faut un critère d'interprétation supérieur à sa lettre. L'idée est révolutionnaire puisqu'elle ôte toute autorité propre à Vatican II et ne lui accorde qu'une autorité conjointe.
Et en même temps l'idée ne peut pas être mise en cause par les théologiens les plus "avancés" (Christoph Theobald ou Joseph Moingt) puisque pour eux tout document magistériel, même le concile de Nicée, et tout document scripturaire, même l'Evangile doivent être interprétés. Le thème de l'herméneutique de Vatican II est d'abord une grande habileté stratégique chez Benoît XVI (puisqu'il utilise le langage et les concepts de la théologie "avancée") et ensuite une extraordinaire manière de relativiser tout ce que l'on présentait jusque là comme superdogme.
Dans cette perspective, dans laquelle Vatican II n'est pas normatif mais normé, il me semble parfaitement vrai de dire que le texte du Concile est une matière à laquelle la tradition donne forme, ce qui peut donner l'impression du palimpseste. On s'est, un moment, trompé dans l'interprétation. Gommons et interprétons autrement : c'est le sens de ce coup de gong dans un ciel dit serein qu'est le discours de Benoît XVI le 22 décembre, devant la Curie.
Il me semble que cette perspective est parfaitement cohérente et qu'elle se trouve littéralement dans le discours de Benoît XVI avant et après son élection.
Ai-je tendance à faire de Vatican II une vache sacrée (un totem) inévitable ? il me semble, comme je l'ai dit plus haut, que l'événement Vatican II est inévitable aujourd'hui. On ne peut pas l'oublier. Celui qui évite d'en parler se met en position d'avoir tort. la question n'est pas de savoir s'il faut en parler ou non, mais : comment en parler. Benoît XVI a donné une réponse très explicite, comme nous venons de le voir.
Il est vrai (l'image de la matière qui se cherche une forme le laisse entendre) que l'on peut corriger Vatican II, puisque c'est un Concile normé par la tradition et non pas normatif de la Tradition (comme Trente et Vatican I). Le cardinal Ratzinger ne s'en est pas privé depuis - au moins - 1991 avec le document de sa Congrégation sur le concept de l'Eglise communion, réinterprétant Lumen gentium 23. Il y a d'autres exemples : Dominus Jesus (2000) sur Lumen gentium 7 : L'Eglise catholique subsiste dans l'Eglise du Christ.
Je parle ici de la lettre du Concile. Quant à l'esprit, d'après Benoît XVI ce qu'on a appelé l'esprit du Concile il faut le rejeter et non le corriger. Il le dit explicitement le 22 décembre 2005."
source : http://ab2t.blogspot.com/2011/09/