D'Andrea Gagliarducci sur Korazym.org :
Léon XIV au début de son pontificat ?
L'annonce de la convocation d'un consistoire par le pape Léon XIV les 7 et 8 janvier 2026 n'a pas encore été officialisée par le Bureau de presse du Saint-Siège. Depuis la publication de l'information par le National Catholic Register, de nombreuses confirmations ont toutefois émergé – certaines émanant des cardinaux eux-mêmes – et la lettre circulaire adressée à tous les cardinaux circule largement sur Internet.
Ce consistoire n'aura pas pour objet la création de nouveaux cardinaux. Il y a déjà une douzaine de cardinaux en âge de voter de plus que ne le permet strictement la loi. Le nombre de cardinaux en âge de voter ne descendra pas en dessous de la limite légale de 120 avant fin 2026. Le consistoire des 7 et 8 janvier sera consacré à l'examen de questions importantes pour l'ensemble de l'Église – un examen qui n'a pas eu lieu ces dernières années.
Le pape François a convoqué un consistoire en 2014, lors duquel le cardinal Walter Kasper a prononcé un discours sur la famille qui a suscité de vifs débats. Un autre s'est tenu en 2015, avec plusieurs sessions consacrées à la réforme de la Curie. Enfin, un troisième consistoire a eu lieu en 2022 pour discuter de la réforme de la Curie déjà promulguée.
Le dernier consistoire extraordinaire du pape François – le premier en sept ans – a laissé un goût d'inachevé. Les cardinaux étaient répartis en groupes linguistiques, les interventions prolongées en séance plénière étaient impossibles, et beaucoup ont eu le sentiment que la collégialité – ou synodalité – dont parlait le pape François n'avait pas été véritablement appliquée.
Léon XIV renoue avec les anciennes pratiques. Benoît XVI précédait toujours le consistoire pour la création de nouveaux cardinaux d'une réunion de l'ensemble du Collège des cardinaux. Jean-Paul II a convoqué les cardinaux à plusieurs reprises pour discuter de réformes et de décisions. Paul VI aimait même rencontrer les cardinaux résidant à Rome immédiatement après chaque voyage apostolique, dès son retour, presque avant même d'avoir franchi le seuil des appartements du Palais apostolique.
Il reste à voir quel modèle suivra Léon XIV, mais la convocation d'un consistoire le 7 janvier est un signe significatif. En effet, le 7 janvier est le lendemain de la fin du Jubilé de 2025. Léon XIV a délibérément choisi de laisser traîner les choses pendant le Jubilé et de clore tous les dossiers ouverts du pape François. La publication de l'exhortation Dilexi te, la publication de la note du Dicastère pour la Doctrine de la Foi sur les titres mariaux, la publication prochaine d'un document sur la monogamie préparé par ce même dicastère durant le pontificat de François, et même le prochain voyage apostolique en Turquie et au Liban sont autant de questions laissées en suspens par son prédécesseur.
Certaines décisions du pape François resteront en vigueur l'année prochaine. Par exemple, un voyage en Afrique, actuellement en préparation, dont il rêvait pour l'Année jubilaire. Cependant, la fin du Jubilé marquera aussi, concrètement, la fin de son mandat. Léon XIV a pris le temps de réfléchir à la question et il devrait maintenant annoncer clairement sa position.
Que pourrait-il se passer au consistoire les 7 et 8 janvier ? Le pape souhaitera sans doute écouter. Il le fait toujours. Les nonces apostoliques affirment qu’il tient toujours à être informé en premier lieu de la situation dans le pays où ils exercent leur ministère.
Mais le pape pourrait alors définir son équipe dirigeante. Il pourrait présenter un projet de ce qui deviendrait sa première encyclique. Il pourrait aborder des questions cruciales : l’impact de la période des procès, la crédibilité de l’Église et les réformes nécessaires à la restructuration de la Curie.
Quoi qu'il arrive, ce sera un tournant fondamental. Les paroles du pape Léon XIV et la manière dont il dirige le consistoire nous permettent de comprendre le déroulement de son pontificat. Nous en avons déjà aperçu quelques éléments clés. La semaine dernière, Léon XIV a nommé le père augustin Edward Danian Daleng vice-régent de la Préfecture de la Maison pontificale. Ce poste n'existe pas dans l'organigramme – il pourrait tout au plus y avoir un régent adjoint – mais il témoigne de la volonté du pape de redonner toute sa place à l'institution. Le vice-régent travaillera aux côtés du régent, Mgr Leonardo Sapienza, qui a dirigé la Préfecture ces dernières années. Le pape François, en effet, n'a jamais nommé de préfet pour succéder à l'archevêque Gänswein. Le pape Léon XIV pourrait en nommer un, et l'archevêque Peter Rajic, actuellement nonce apostolique en Italie, serait pressenti pour ce poste.
La nomination d'un vice-régent témoigne de la pratique constante du pape de confier des postes clés à des amis jeunes et de confiance. Il s'agit souvent d'augustins, mais pas nécessairement : les deux secrétaires particuliers ne le sont pas. Ils sont toutefois âgés de trente ans et possèdent une expérience et une fiabilité éprouvées.
Au plus haut niveau, le Pape souhaite toutefois rétablir une hiérarchie claire. La Préfecture de la Maison pontificale constituera un organe central. Il reste à voir comment le Saint-Père réorientera le Secrétariat d'État, et l'on peut s'attendre à des changements au sommet après le Consistoire.
Le Secrétariat d'État est actuellement privé de deux postes essentiels à son fonctionnement : celui d'évaluateur et celui de sous-secrétaire d'État pour les relations avec les États. Le rôle de l'évaluateur est d'autant plus crucial qu'il assiste le substitut pour les affaires générales dans la gestion du Secrétariat d'État. Il reste à voir si le Pape décidera d'apporter une réforme plus profonde au Secrétariat d'État, en nommant de nouveaux supérieurs pour l'évaluateur et le sous-secrétaire d'État. La question sera tranchée après le Jubilé.
Parallèlement, Léon XIV poursuit la correction des carences institutionnelles. Suite au rescrit autorisant à nouveau les entités vaticanes à s'abstenir d'investir par l'intermédiaire de l'Institut pour les Œuvres de Religion, le pape a institué, le 13 novembre, un organe de coordination pour l'Apostolat de la Mer, appelé Stella Maris. Avec la réforme de la Curie, l'Apostolat de la Mer avait été marginalisé par le Dicastère pour le Service du Développement Humain Intégral, qui avait certes assumé ses responsabilités, mais sans mettre en place de structure. Cette structure est en cours de déploiement, bien que des étapes supplémentaires soient nécessaires pour garantir son efficacité. Elle s'inscrit dans le cadre d'une adaptation plus large des réformes inachevées du pape François.
Peut-être n'approchons-nous que très lentement du début du nouveau pontificat, ou du moins du nouveau gouvernement papal. Le pape semble déterminé à établir une institution et une organisation solides, sans renoncer à plus que le strict minimum des éléments qui ont caractérisé le pontificat de François. Il faudra beaucoup d'équilibre pour que cet effort porte ses fruits.