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Quand un député socialiste explique la doctrine catholique sur les embryons

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Embryon.jpgLes débats parlementaires sur la révision des lois françaises sur la bioéthique sont en cours, pas toujours très éclairés. Pour preuve, le Salon beige rapporte cette intervention du député socialiste Philippe Tourtelier qui, hier 9 février à l’assemblée nationale française, a prétendu jouer les interprètes de la pensée catholique en la matière:

« La position de l’Église considérant l’embryon comme une personne est assez récente, elle date de la fin du XIXe siècle . Notons que l’Église n’a jamais exigé de baptême ou d’enterrement en cas de fausse couche. [...] Considérant l’embryon comme une personne, l’Église remet d’abord en cause les embryons surnuméraires, dont on admet facilement, puisqu’ils sont de toute façon voués à la destruction, qu’on puisse faire des recherches sur eux. [...] Quant aux recherches sur la naprotechnologie, qui font appel, entre autres, aux courbes de température comme la célèbre méthode Ogino, ne sont-elles pas, comme cette dernière pour la contraception, un moyen d’éviter le débat sur le statut de l’embryon ? Rappelons que la méthode Ogino est, avec l’abstinence, la seule réponse proposée par l’Église à la demande de contraception, et que ce statu quo se traduit par la naissance en Afrique de milliers de bébés atteints du sida. »

Sur son blog  Osservatore Vaticano , Vini Ganimara lui donne la réplique que voici :  

« (…) Où ce monsieur a-t-il pris que la « thèse » de l’Eglise sur la personnalité de l’embryon datait du XIXe siècle? Ca m’a l’air aussi solide historiquement que ce faux célèbre qui prétendait que, pendant des siècles, l’Eglise avait cru que les femmes n’avaient pas d’âme!
Il est vrai que nous savons aujourd’hui considérablement plus de choses sur l’embryon (mais ce n’est pas vraiment spécifique à l’Eglise) qu’au Moyen Age. Mais, déjà, les Pères de l’Eglise (et même, avant eux, les docteurs du judaïsme) considéraient l’avortement comme un crime affreux. S’il s’agissait simplement d’un amas de cellules, on voit mal où pourrait être le crime. A contrario, il faut bien supposer que les Pères de l’Eglise estimaient qu’un bébé à naître n’était pas une chose, ni une tumeur, mais bien ce que nous appelons aujourd’hui une personne…Je sais bien que les Pères de l’Eglise comme les scolastiques se posent parfois la question de la date de « l’inanimation », c’est-à-dire du moment où l’embryon reçoit son âme. Mais de là à dire que saint Thomas d’Aquin aurait voté la loi Veil, il y a quand même une marge! Car ce que ne semble pas remarquer cet excellent député, c’est que, même avant l’inanimation, l’avortement est considéré comme un péché très grave. Manifestement, dans les écoles des cadres du PS, on ne lit pas beaucoup Aristote. En particulier sur la notion de puissance et d’acte
: dire que l’embryon est une « personne en puissance » (expression que beaucoup prêtent à st Thomas, mais sans jamais donner les références) ne signifierait nullement, comme on fait semblant de le croire, que l’embryon serait exterminable à volonté. Mais bien plutôt que l’embryon ne peut donner naissance qu’à une personne humaine (de fait, si quelqu’un a déjà vu un embryon humain se transformer en machine à coudre, il est vivement prié de nous en informer!!!) et que, par conséquent, bien que l’on ne connaisse pas la date de l’inanimation (qui a toutes les chances de se produire au moment de la fécondation), éliminer un embryon à quelque stade qu’il en soit, est ce que l’on appelle en français courant un assassinat.

J’ajoute que son « argument » sur le baptême des enfants morts dans des fausses couches est absurde. Un enfant mort-né n’est pas davantage baptisé (sauf s’il y a un doute sur sa mort, auquel on le baptise sous condition) et je n’imagine pas que les socialistes nous proposent l’infanticide « légalisé » jusqu’au jour de la naissance. L’Eglise n’a jamais demandé le baptême de tels foetus, non pas parce qu’elle aurait toujours cru (jusqu’aux dérives « intégristes » du XIXe siècle) que l’embryon n’était pas un être humain, mais parce qu’elle n’a jamais baptisé les morts!

Quant à ce qu’il dit sur les embryons surnuméraires, cela glace le sang. Il parle d’abord un sabir approximatif: l’Eglise ne remet pas en cause les embryons surnuméraires. L’Eglise remet en cause l’utilisation de méthodes qui produisent des embryons monstrueusement nommés surnuméraires et voués à l’extermination. Chose qui n’a pas l’air de traumatiser le bon député socialiste. Mais se rend-il compte qu’à ce compte-là, c’est toutes les tortures, toutes les abominations, qui sont justifiées. Si le fait que quelqu’un soit voué à la mort justifie qu’on le torture et qu’on l’assassine, on voit mal comment on pourrait s’indigner des horreurs national-socialistes ou des pratiques du NKVD!

Le sommet est atteint avec le couplet sur les « naprotecthnologies » (terme dérivé de « Natural Procreative Technology », qui désigne donc les méthodes naturelles d’augmentation de la fertilité, comme il existe des méthodes naturelles de régulation des naissances).
A propos de régulation naturelle des naissances, M. Tourtelier parle de la méthode Ogino, qui date d’au moins 30 ans, comme si les connaissances du corps humain n’avaient pas progressé depuis. Il semble aussi ignorer que les méthodes NaPro connaissent des taux de succès identiques aux PMA. Mais ça ne l’empêche pas de pérorer. Et d’ajouter le n’importe quoi au n’importe quoi en parlant du sida, comme si la méthode Ogino ou la NaPro technologies étaient pour quoi que ce soit dans l’épidémie du sida. Est-il besoin de faire remarquer à ce brillant esprit que, si tous les êtres humains se conformaient à la loi morale de l’Eglise, le sida ne toucherait pas grand monde?

Mais ce que je trouve encore le plus savoureux, c’est qu’il prétend que le soutien apporté par l’Eglise affreusement obscurantiste, à ces méthodes vise à éviter un débat sur le statut de l’embryon. Mais qui a peur de ce débat? N’est-ce pas lui et ses semblables? Notre doctrine à nous est simple et claire: oui, l’embryon est une personne, dont nous savons que, même dans l’hypothèse (simple hypothèse, qui semble de plus en plus invraisemblable à mesure que nos connaissances sur le développement embryonnaire avancent, mais qui reste du domaine du possible) où il n’a pas encore reçu son âme rationnelle, il la recevra sans le moindre doute possible dans les semaines à venir. Je le défie de nous prouver que l’embryon n’est pas une personne et qu’on peut le tuer sans risque de tuer une personne humaine. Qu’il nous dise donc ce qu’est selon lui un embryon et nous verrons bien si c’est nous qui avons peur du débat! »

Commentaires

  • Lors d'une toute récente émission sur les "bébés-médicaments" (C dans l'air, France 5), plusieurs intervenants ont exprimé plus que de nettes réserves au sujet d'une pareille terminologie. Néanmoins, même Christine Boutin, qui combat âprement toute réification de l'embryon, n'a sans doute pas osé soulever la question fondamentale, ontologique : "L'embryon est-il, oui ou non, un être humain?" Poser la question, c'est pourtant y répondre! La référence à saint Thomas est tout à fait abusive, et JAMAIS, l'Église catholique n'a soutenu que supprimer un embryon était licite. La FIV conduit à la destruction de PERSONNES (je suis un ancien embryon!), et les "disputationes" sur l'animation (médiate ou immédiate) n'ont JAMAIS mis en cause, chez les théologiens du M. A., le caractère absolu du respect dû à l'embryon humain. Cf. mon récent ouvrage "À contretemps. Regards politiquement incorrects", préface de Mgr Dangoisse, Éd. Mols, Coll. "Autres regards", 2010, pp. 55-106.

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