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  • Célibat des prêtres : stop ou encore ?

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     unnamed.jpgFace à la pénurie des vocations sacerdotales, l’idée de permettre l’ordination d’hommes mariés  fait son chemin dans l’Eglise. La question d’un changement ou du moins d’une inflexion de la discipline de l’Eglise catholique sur le célibat sacerdotal est aujourd’hui posée ouvertement  par des évêques et par le pape François lui-même. Le célibat sacerdotal passe pour être un caillou dans la chaussure de l’Eglise, un archaïsme cruel responsable de la crise des vocations et des scandales pédophiles. Des lieux communs qu’explore et démonte une passionnante enquête de Jean Mercier

    Journaliste, rédacteur en chef adjoint à l’hebdomadaire La Vie, en charge des questions religieuses, Jean Mercier ne se satisfait pas des lieux communs et des idées toutes faites. Lu sur le site « aleteia », cette interview de l’auteur par Ph. Oswald (extraits) :

    Questions à Jean Mercier : 

    (…)

    -On présente « le mariage des prêtres » comme « la » solution à la crise des vocations et « la » réponse aux scandales sexuels qui secouent l’Eglise. Double illusion ?

    -Oui. Le “mariage” des prêtres n’a jamais existé, sauf en France au moment de la Révolution ! C’est très différent de l’ordination d’hommes mariés. La crise des vocations est complexe…Le problème est d’abord la crise de la masculinité vis à vis du don de soi. On ne trouve que très peu d’hommes prêts à devenir enseignants, par exemple, bien que mariés.
    Par ailleurs, le sacerdoce est dévalorisé chez les catholiques. Ils n’ont pas envie que leur fils, ayant fait de belles études, se fasse curé. Là est le nœud.
    Quand à imaginer que l’existence de prêtres mariés pourrait éviter les scandales sexuels des clercs, on rêve… La pédophilie est une perversion qui concerne majoritairement des hommes mariés.

    -Pressés de se prononcer sur l’«ouverture» de l’Eglise à un assouplissement de la règle du célibat, de nombreux évêques et le pape François lui-même commencent par répondre que celui-ci est une mesure disciplinaire et non dogmatique. Mais vous semblez les contredire en répondant : « quasi dogmatique » !

    -Oui, parce que nous sommes dans une zone grise entre le dogme et la discipline. Dire que le célibat n’est qu’une règle disciplinaire est vrai sur la forme, mais pas sur le fond. Le célibat est une tradition profondément enracinée dans la culture du catholicisme, et aussi dans la tête des non-catholiques. Le célibat est au cœur de l’identité du prêtre. Ce n’est pas en bousculant celle-ci qu’on remplirait les séminaires. Au contraire !
      
    -Votre enquête croise les aspects historiques, sociologiques, psychologiques, théologiques, mais finalement, n’est-ce pas l’aspect mystique qui justifie ultimement le célibat : le prêtre configuré au Christ ?

    -Le prêtre n’est pas seulement, comme tout baptisé, un “autre Christ”. Il est Jésus “lui-même” quand il célèbre la messe et qu’il pardonne les péchés. Il assume totalement le “je” de Jésus. Le célibat n’a de sens que dans l’étroite identification qui existe entre le prêtre et Jésus. Le prêtre partage, de façon mystique, l’union conjugale qui existe entre le Christ et l’Eglise. Ce n’est pas qu’une définition théologique mais une réalité existentielle, que les prêtres vivent selon des modalités diverses.

    -Votre pronostic sur la probabilité que l’Eglise décide d’ordonner prêtres des « viri probati », c’est-à-dire des hommes mariés ayant fait leurs preuves, parallèlement à des célibataires ?

    -Si j’en crois ce que semble penser le Pape, cette évolution se ferait à partir des Eglises locales, et ne serait pas décidée d’en haut. La sagesse voudrait que Rome maintienne la règle du célibat, quitte à étendre le champ des dérogations pour ordonner des hommes mariés, en reconnaissant des vocations très ciblées, discernées avec grand soin. Rien ne serait plus grave que de transformer, à tour de bras, d’excellents laïcs en médiocres curés. L’enjeu de fond de la pénurie de prêtres est la foi, c’est-à-dire la confiance que Dieu donne un vrai bonheur à ceux qui s’engagent dans la prêtrise, et donc le célibat.

    Célibat des prêtres. La discipline de l’Eglise doit-elle changer ?  Jean Mercier, éditions DDB Desclée de Brouwer, 350 pages, 19,90 €

    Réf. Célibat des prêtres : stop ou encore ?

    Les grasses sont de notre fait. JPSC 

  • La question du célibat des prêtres...

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    ...est abordée sur le site d'aleteia.org. Présentation :

    "L'Occident assiste désormais à une crise croissante et généralisée des vocations sacerdotales, ainsi qu’à l’abandon de leur ministère par des prêtres qui se marient, sans parler des scandales provoqués par les abus sexuels perpétrés sur des mineurs par quelques membres du clergé. L’Eglise ne devrait-elle pas renoncer à l‘obligation de célibat pour ses ministres ?"

    Voir les réponses sur aleteia

  • ”Vive le célibat des prêtres!”

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    Une opinion de Christophe Doat, Norman Ishimwe Sinamenye, Annie Torres, Calixte des Lauriers et Benoit Gary publiée sur le site de La Libre :

    Vive le célibat des prêtres!

    Nous, jeunes catholiques, nous souhaitons prendre la plume pour remercier tous les prêtres que nous avons croisés sur notre route et qui vivent le célibat dans ses difficultés et ses joies.

    Régulièrement, les uns et les autres se positionnent quant à l’opportunité ou non d’ordonner dans l'Eglise catholique, des hommes mariés. Mercredi dans ces pages, le Père Charles Delhez s.j. appelait de ses voeux à ce que le Pape François l’autorise. Monseigneur Kockerols, à l’occasion du synode sur les jeunes, la foi et le discernement vocationnel convoqué à Rome en octobre dernier, s’était lui-même prononcé sur le sujet, au nom de la conférence des évêques de Belgique, indiquant que “certains jeunes, qui ont puisé dans la vocation baptismale leur appel à s’engager par les liens du mariage, répondraient volontiers 'me voici' si l’Église devait les appeler au ministère presbytéral”.

    À son retour de Panama, où les JMJ ont rassemblé des 600000 jeunes du monde entier à l’appel de leur foi, le pape François lui-même a par ailleurs réaffirmé son souhait de conserver la formule actuelle du célibat sans recourir à l’ordination d’hommes mariés. Il a toutefois souligné la nécessité de se pencher sur les solutions pastorales pouvant être apportées pour permettre aux chrétiens vivant dans des régions fortement reculées de pratiquer les sacrements.

    De belles initiatives

    Si nous ne vivons pas personnellement le célibat des prêtres, nous imaginons la solitude de certains, et constatons avec joie que dans certaines paroisses, l’église a su répondre positivement en évitant que les prêtres n’y vivent trop seuls. Oui, il est parfois difficile d’espérer, et d’imaginer l’Église de Belgique que verront nos enfants mais nous ne pouvons pas non plus nous empêcher de nous réjouir de tant de belles initiatives de l’Eglise où déborde la joie de l’Evangile et où prêtres et laïcs collaborent en communion.

    Au pied de la croix, la plupart pensaient que le rêve d’un projet fou finissait. Et pourtant, la résurrection a tout transformé et résonne encore aujourd’hui dans le cœur de milliards d’êtres humains. Aussi, plutôt que de regarder la croix en cherchant diverses solutions, dont l’ordination d’hommes mariés qui ne semble pas avoir fait ses preuves (1), nous espérons que puissent être remises en avant la beauté et le signe prophétique qu’est le sacerdoce. Nous ne pensons pas qu’une prêtrise à deux vitesses, qui se partagerait entre des prêtres mariés qui officieraient à mi-temps, et d’autres, célibataires, à temps plein, conserve à la fois le sens et la profondeur que revêt aujourd’hui le célibat. Cette solution risque plutôt de confondre et d’abîmer deux vocations (celle d’époux et celle de prêtre) qui sont complémentaires, mais pas identiques. "Le fondement du célibat, écrivait en octobre dernier dans La Croix le père Cédric Burgun, directeur au séminaire des Carmes à Paris, c’est la consécration de toute une vie au Christ. Or, un homme marié fait un don différent. Saint Paul le disait déjà : les époux sont attentifs aux affaires de leur conjoint. D’ailleurs, dans le sacrement de mariage, c’est la femme ou le mari qui est un des moyens de se donner au Christ. Dans le sacerdoce, c’est le ministère lui-même qui a ce rôle, par le célibat. Ce sont donc deux vocations distinctes. Je crains qu’en 'mariant le prêtre' on fasse du ministre ordonné un homme comme tout le monde. Or, la consécration de son corps est déjà une signification de la présence de Dieu dans le monde, indépendamment de ce qu’il dit ou fait."

    Nous cherchons une espérance

    Certains se diront sans doute que nous recherchons des principes auxquels nous raccrocher. Nous recherchons plutôt une espérance et le témoignage que Dieu peut combler, aujourd’hui comme hier, le coeur du prêtre. Et que ce prêtre, au nom de l’amour et non contre lui, peut pleinement consacrer sa vie à Dieu et à ceux qu’il est amené à servir.

    Alors bien sûr, il y a une urgence : les vocations sacerdotales manquent en Belgique. Mais nous pensons aussi qu’il est dans le rôle de nos évêques et de l’église belge de travailler à encourager les vocations, à soutenir nos prêtres en offrant aux catholiques de Belgique une Eglise inspirante, décomplexée, prête à assumer pleinement le message de l’évangile dans sa vérité et ses exigences. Certains diocèses et communautés en Europe continuent d’attirer les vocations, inspirons-nous. De plus, de même qu’il est faux de laisser entendre que célibat et pédophilie sont liés, il est tout aussi faux de penser que l’abondance des vocations est liée à la question du célibat. "L’abondance des vocations vient de communautés qui sont vraiment dynamiques et rayonnantes. Le manque de vocations n’est donc pas d’abord une crise du sacerdoce, c’est une crise du croyant. Ce n’est pas en ordonnant quelques hommes mariés supplémentaires que l’on résoudra la crise" (2).

    Si nous souhaitons lancer un appel, c’est justement celui de redire à nos évêques et à nos prêtres combien nous avons besoin de l’espérance qui habite nos aînés. Partagez avec nous le souffle de votre foi, de ce qui vous fait vivre et de ce qui est beau dans votre vocation. Nous aurons alors des églises plus vivantes et plus missionnaires. Bien sûr l’Église institutionnelle de demain ne sera plus celle de nos grands-parents. Nous souhaitons que l’Eglise d’aujourd’hui et de demain vive davantage de l’héritage de Vatican II qui redonnait une plus grande place à la communion des états de vie, une agilité missionnaire associant mariés et célibataires, laïcs, diacres et prêtres. Les lieux, au rayonnement prophétique, qui existent déjà, seront des foyers de joie et se multiplieront. Nous ne voulons pas confier notre énergie ni aux larmes ni aux solutions tièdes, nous souhaitons investir notre vie dans le monde, dans la réalité de nos contemporains, dans les souffrances liées à l’injustice, le témoignage de notre foi, et le magnifique message, plein et entier, qu'elle porte et fait fructifier. Nous voulons une Eglise missionnaire, joyeuse, en communion.

    (1) Cfr Jean Mercier. Célibat des prêtres. La discipline de l’Église doit-elle changer?

    (2) https://www.la-croix.com/Debats/Forum-et-debats/Ordination-hommes-maries-Il-faut-pas-tout-remettre-cause-2018-10-11-1200975350

     
  • Célibat des prêtres et abus sexuels sur mineurs

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    Les médias ne ménagent guère l'Eglise catholique; on peut même évoquer une entreprise qui vise à discréditer systématiquement le pape, les évêques, les prêtres. On ne peut que constater que ces campagnes médiatiques ont un impact assez évident sur l'opinion publique, en particulier sur les gens plus simples qui se laissent impressionner et finissent par perdre confiance. Il suffit de voir comment de très nombreuses personnes réagissent à l'égard des soeurs clarisses de Malonne qui ne font qu'obéir à leur vocation en pratiquant l'accueil, en particulier celui de la "brebis égarée". Parmi les thèmes les plus exploités et que l'ont remet régulièrement sur le feu, il y a bien sûr le drame de la pédophilie ecclésiastique qui a connu des sommets dans notre pays, en particulier avec le cas de l'ancien évêque de Bruges. Les dégâts sont immenses et on n'a pas fini de voir exploiter ce filon pour fragiliser la position de l'Eglise de Belgique.

    Nous avons découvert un site sur lequel les thèmes - associés par les journalistes et autres commentateurs - du célibat ecclésiastique et des abus sexuels sur mineurs sont développés de façon très approfondie. Nous vous suggérons de les consulter :

  • Le célibat des prêtres est incompréhensible, bien sûr !

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    Lu sur le site web « didoc » cet article de Jean de Saint-Chéron publié le 30 novembre 2021 :

    « Lors de la publication du rapport Sauvé, le célibat des prêtres a parfois été présenté comme une des causes des actes pédocriminels. Jean de Saint-Chéron (*) réfute avec force cette accusation et réaffirme le sens du célibat sacerdotal.

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    Le christianisme est une histoire de fou. Que voulez-vous. C’est la religion de tous les excès. On le sait depuis le début. « Nous proclamons un Messie crucifié, scandale pour les Juifs, folie pour les nations païennes », comme disait saint Paul (1 Co 1, 23). Le célibat « pour le Royaume », selon la formule consacrée, c’est-à-dire pour l’amour de Dieu et des hommes, qu’il concerne les religieux, les laïcs consacrés ou encore les prêtres, manifeste un peu de cette folie. « Mais, ajoute Paul, pour ceux que Dieu appelle, qu’ils soient Juifs ou Grecs, ce Messie, ce Christ, est puissance de Dieu et sagesse de Dieu » (1 Co 1, 24). Pour les chrétiens, la « folie » du christianisme est une image de la sagesse de Dieu. Or c’est toujours à cette dernière que se heurte notre bon sens bien terre à terre, quand nous essayons de comprendre la religion.

    S’agissant du célibat des prêtres dans l’Église catholique latine — où l’on n’ordonne prêtres que des hommes célibataires, tandis qu’en Orient, y compris dans l’Église catholique, il est possible d’ordonner des hommes mariés —, le débat n’est pas neuf, bien sûr. Au IVe siècle, saint Jean Chrysostome, évêque de Constantinople, rappelait à l’occasion de débats sur les mœurs sacerdotales : « Tout le monde juge le prêtre, et on le juge comme s’il n’était plus dans sa chair, comme s’il n’était pas pétri du limon commun, comme s’il était un ange affranchi de toutes les faiblesses de l’homme ». Or nous savons bien que c’est plus compliqué que ça. Mais pourquoi alors l’Église s’obstine-t-elle à prendre ses prêtres parmi des célibataires qu’elle appelle à garder cet état ?

    En 1967, en ce temps où la continence sexuelle n’était pas franchement dans l’air du temps, le pape Paul VI s’était fendu d’une encyclique sobrement intitulée Sacerdotalis caelibatus. Il y présentait en détail la triple signification du célibat sacerdotal : correspondance au Christ célibataire ; don radical de soi-même au peuple de Dieu ; témoignage de la vie éternelle. Loin de tout angélisme, le texte était non seulement bien incarné — et n’éludait pas l’épreuve que constitue le célibat, même choisi librement et par amour, dans la vie d’un homme — mais faisait droit aux grandes objections du monde et du « pragmatisme ». La lettre ouvrait en effet sur un exposé de ces objections (complexité historique de la question du célibat ; pénurie de prêtres ; « violence faite à la nature » ; risque d’infidélité au célibat et donc de défroquage, etc.). Cette liste demeure tout à fait actuelle en 2021, et les détracteurs du célibat sacerdotal en manque d’idées seraient bien inspirés d’aller y puiser de nouveaux arguments pour leurs dîners en ville.

    Avant d’essayer d’éclairer, par un très parcellaire rappel de ce qu’est au fond le christianisme, le sens du célibat sacerdotal, il est une objection contemporaine que l’on entend, que l’on lit, et qui se fraie aujourd’hui un chemin dans les méandres de certaines consciences visiblement très éclairées : il y aurait une causalité entre le célibat sacerdotal et les crimes abominables révélés par le rapport Sauvé. Il m’est extrêmement pénible d’avoir à rappeler ici que l’immense majorité des crimes pédophiles sont commis par des hommes qui n’ont pas voué le célibat, et qui ont d’ores et déjà une, un, ou plusieurs partenaires sexuels appartenant à la catégorie des adultes consentants. Il est pénible de le rappeler, mais sans doute faut-il que quelqu’un s’en charge. Qu’on établisse un lien entre la discipline du célibat et les prêtres qui partent avec une paroissienne ou, plus tragique, qui mènent une double vie dans l’ombre, soit. Mais avec la pédocriminalité !... Une telle suspicion de causalité repose d’ailleurs sur une étrange conception des penchants naturels de l’homme. Et ce serait une bien piètre vision du mariage que d’y voir un remède aux pires turpitudes sexuelles.

    Passée la mention de cette absurdité, il faut rappeler que le sens du célibat ne saurait en aucun cas se limiter à une discipline ecclésiastique, comme un « fardeau obligé » imposé à tous ceux qui auraient le désir de devenir prêtres. Au contraire, il faut comprendre que l’Église catholique latine n’appelle ses prêtres que parmi ceux qui choisissent d’être célibataires. Et si l’on est un catholique romain de rite latin, le fait de ne pas se sentir « appelé » au célibat est un excellent indice que l’on n’est tout simplement pas appelé à être prêtre. (Encore une folie que seule la foi permet de reconnaître comme une sagesse).

    Une fois que l’on a dit cela, n’esquivons pas la question du combat qui reste à vivre pour ceux qui sont appelés au célibat. Il ne s’agit pas de faire l’innocent, le désincarné ou le naïf, comme si de rien n’était. Mais de reconnaître l’épreuve pour en découvrir le sens profond, la grandeur, la joie mystérieuse d’une vie donnée et prophétique, selon le témoignage de tant de prêtres à la vie belle et féconde, aujourd’hui et au cours de l’histoire. Cette joie échappe à qui refuse d’entendre que dans le christianisme, « ce qui est folie de Dieu est plus sage que les hommes » (1 Co 1, 25). Mais comprenons au moins que la « folie de Dieu » est toujours ordonnée à l’amour, et nulle radicalité chrétienne ne saurait aboutir à un fanatisme violent — qui est bien plutôt la marque d’une absence de dieu.

    Le Père Albert Chapelle, grand théologien jésuite, écrivait en 1977 dans Sexualité et sainteté que « qui n’accepte pas de ressentir le célibat de manière douloureuse ne sait pas ce qu’est le célibat. Le célibat appauvrit au niveau pulsionnel ; le célibat est renoncement au complément d’humanité qu’un partenaire de vie peut apporter ». Or seul le mystère de l’Évangile, ainsi que le mystère d’une vocation propre, peuvent faire entrer dans l’intelligence d’un acte aussi élevé que celui du renoncement volontaire à la vocation naturelle de l’homme (le mariage), qui est chose bonne et archi-bonne. Écartons tout de suite que dans la spiritualité chrétienne le mariage ne serait pas vu comme un choix radical, un don de sa vie par amour. Le célibat des prêtres est incompréhensible, bien sûr ! Mais le Christ lui-même proclame au sujet de ceux qui renoncent à se marier « à cause du royaume des cieux », que peut seul le comprendre « celui qui peut le comprendre » (Mt 19, 12). Or ceux qui à la fois « peuvent comprendre » et sont appelés à embrasser cette vie ne forment qu’une infime partie de la population (sinon le taux de natalité en prendrait un coup).

    Nous autres laïcs, croyants ou non, que pouvons-nous comprendre ? Certains prêtres eux-mêmes confient n’avoir compris que bien tard le sens du célibat auquel ils s’étaient sentis appelés des années plus tôt, en discernant sans doute la grandeur amoureuse radicale, sans bien la saisir. Tel est le cas de Mgr Gobilliard, évêque auxiliaire du diocèse de Lyon, qui évoque la « croix » du célibat et la « souffrance » du renoncement à être père selon la chair, tout en disant la joie très haute de ce sacrifice : « Je me souviens très bien du jour où j’ai à la fois compris et accepté mon célibat, écrit-il. J’étais déjà prêtre. C’était à l’hôpital Spallanzani, hôpital de phase terminale des maladies infectieuses où j’étais aumônier. Mario, auprès de qui je me trouvais, était en train de mourir du S.I.D.A. Un jour, me regardant bien dans les yeux, il m’a dit : “Je crois avoir compris le célibat des prêtres !” Du tac au tac, je lui ai répondu : “Eh bien explique-moi parce que moi, je n’ai pas tout compris !” Il a réfléchi et paisiblement il m’a dit : “Quand tu es là, je me repose dans ton cœur ! […] Il n’y a personne dans ton cœur que tu dois aimer plus que moi lorsque tu es à côté de moi. Ton cœur est libre d’être pour moi tout seul, et c’est cela qui me repose. […] Si tu étais marié, alors je saurais qu’il y a dans ton cœur quelqu’un de plus important que moi et ce serait normal. Pareil si tu avais des enfants. […]” Il avait raison, le célibat que vit le prêtre diocésain, c’est le célibat même du Christ. Tout cela nous dépasse et, bien sûr nous ne sommes jamais à la hauteur de l’exigence que ce célibat implique ». C’est en découvrant qu’il avait choisi d’être un pauvre parmi les pauvres que celui qui était alors un prêtre mûr a compris le sens de ce qu’il vivait depuis quinze ans.

    La question surnaturelle, quand il s’agit de christianisme, ne peut être éludée. C’est toujours à ça qu’il faut revenir. Car rien n’est plus concret que le célibat d’un prêtre, ni plus mystérieux. C’est une réalité physique, visible, difficile, dont le sens redit par le pape Paul VI il y a plus de cinquante ans révèle la haute dignité de l’homme, capable d’aimer au-delà de ses forces, et ainsi de parler de l’invisible. Si la sagesse de ce monde est folie devant Dieu, le christianisme a l’audace d’enseigner que c’est parce que la sagesse du monde ne regarde pas assez loin. « Tes pensées ne sont pas celles de Dieu mais celle des hommes » (Mt 16, 23), dira le Christ à Pierre effrayé à l’idée de la croix.

    Le célibat consacré ne rabaisse ni la dignité de l’acte sexuel ni la splendeur du mariage. Il dit autrement, de façon plus surnaturelle, de façon incompréhensible peut-être à nos esprits trop inquiets de ne plus jouir, que l’amour est un don total de soi, et que les chrétiens vivent déjà d’une autre vie, éternellement joyeuse. Les prêtres qui vouent le célibat sont des témoins de l’invisible, comme des sentinelles de l’espérance. Ils témoignent que, selon le mot de Thérèse d’Avila, Dieu seul suffit à remplir une vie humaine. Ils nous disent que nous sommes faits pour nous donner entièrement et pour vivre éternellement.

    Devant une signification si haute, on perçoit mieux la blessure que fait à toute l’Église l’infidélité à ce célibat. On perçoit aussi combien — par-delà tous les arguments fallacieux calqués sur l’esprit du monde — l’Église catholique de rite latin perdrait de son prophétisme, même incompris ou mal compris, en revenant sur cette discipline qui veut qu’elle n’ordonne prêtres que des célibataires. Jamais on ne pourra comprendre le christianisme et son ahurissante folie si l’on cesse de considérer qu’un chrétien est quelqu’un qui croit vraiment à la résurrection du Christ, dans sa chair. Et qui affirme que la vie est éternelle.

    Ref. Le célibat des prêtres est incompréhensible, bien sûr !

     

    (*) Jean de Saint-Chéron est essayiste et a publié « Les bons chrétiens » en 2021 (Salvator), un essai sur le sens du christianisme dans le monde contemporain. Source : https://www.lefigaro.fr/vox/religion/les-pretres-qui-vouent-le-celibat-sont-des-temoins-de-l-invisible-des-sentinelles-de-l-esperance-20211124.

  • Quand sainte Brigitte défendait le célibat des prêtres

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    Du Père Simon Noël sur son blog :

    Sainte Brigitte et le célibat des prêtres

    Les controverses sur le célibat des prêtres ne datent pas d'aujourd'hui. Elles avaient déjà cours au Moyen-Âge. Devant la triste réalité de la dépravation de certains clercs, concubinaires ou sodomites, certaines personnes de bonne volonté émettaient l'idée qu'il eût été préférable que les prêtres puissent être mariés. J'ai donc trouvé intéressant de vous offrir ce qu'écrit sur le sujet sainte Brigitte de Suède, co-patronne de l'Europe, dans le livre des Révélations, livre qui rapporte les extases et les locutions de cette grande mystique, livre approuvé par le concile de Bâle et par trois papes. Il s'agit du chapitre 10, du livre 7, dans la traduction de la comtesse de Flavigny :

    Défense que les prêtres soient mariés.

    Réjouissez-vous éternellement, ô précieux corps de Dieu, en un honneur perpétuel, en continuelle victoire, en éternelle puissance, avec votre Père et le Saint-Esprit, avec la Vierge Marie, votre très-digne Mère, et avec toute la cour céleste! Louange vous soit, ô Dieu éternel, et actions de grâces infinies, parce qu’il vous a plu de vous faire homme, et avez voulu que le pain fût transubstantié en votre corps, par vos saintes paroles, et l’avez donné en viande comme par un excès d’amour pour le salut de nos âmes!

    Il arriva une fois à une personne qui était profondément plongée en l’oraison, qu’elle ouït une voix qui lui disait : O vous à qui sont faites les faveurs d’ouïr et de voir les choses spirituelles, écoutez maintenant ce que je vous veux manifester de cet archevêque qui a dit que, s’il était pape, il donnerait licence à tous les prêtres de se marier, croyant et pensant que cela serait plus agréable à Dieu que de voir les prêtres vivre avec tant de dissolution; il disait encore que, par ce mariage, s’éviteraient tant de péchés charnels; et bien qu’en cela il n’entendît pas la volonté de Dieu, néanmoins il était ami de Dieu. Or, maintenant, je vous déclarerai la volonté de Dieu sur cela, car j’ai engendré le Dieu même, et vous signifierez cela à cet archevêque, lui parlant en ces termes : A Abraham fut donnée la circoncision longtemps avant que la loi fût donnée à Moïse, et au temps d’Abraham, les hommes étaient gouvernés selon qu’ils entendaient et selon qu’ils voulaient, et néanmoins plusieurs étaient lors amis de Dieu.

    Mais après que la loi fut donnée à Moïse, lors il plut plus à Dieu que les hommes vécussent selon la loi que selon leur volonté. Il en fut de même du précieux corps de mon Fils, car quand il eut institué le saint Sacrement de l’autel, qu’il fut monté au ciel, lors cette loi ancienne était encore gardée, savoir, les prêtres de Jésus-Christ vivaient en un mariage charnel, et néanmoins plusieurs d’iceux étaient amis de Dieu, d'autant qu’ils croyaient en simplicité que cela était agréable à Dieu, comme il lui fut agréable au temps des Juifs, et cela fut observé plusieurs années par les apôtres chrétiens. Mais cette coutume et observance était abominable et odieuse à toute la cour céleste, et à moi, qui ai engendré le corps de mon Fils, de voir que des mariés touchassent de leurs mains le corps précieux de mon Fils au saint Sacrement, car les Juifs, en leur ancienne loi, n’avaient que l’ombre et la figure de ce sacrement; mais les chrétiens ont maintenant la vérité même, savoir, Jésus-Christ, vrai Dieu et vrai homme en ce sacrement sacro-saint.

    Mais après quelque temps que les prêtres anciens observaient cela, Dieu, par l’infusion de son Esprit, le versa au cœur du pape, pour qu’il ordonnât que désormais les prêtres qui consacreraient le corps précieux de Jésus-Christ ne seraient point mariés ni ne jouiraient des délices infâmes de la chair. Et partant, par l’ordonnance divine et par son juste jugement, il a été justement ordonné que les prêtres vivraient en la chasteté et continence de la chair, autrement qu’ils seraient maudits et excommuniés devant Dieu, et dignes d’être privés de l’office de prêtres, néanmoins que ceux qui s’amenderaient véritablement avec résolution de ne plus pécher, obtiendraient miséricorde de Dieu.

    Sachez aussi que si quelque pape donne aux prêtres licence de se marier charnellement, lui-même sera damné de Dieu par la même sentence, comme celui qui aurait grandement péché, à qui on devrait, selon le droit, arracher les yeux couper les lèvres, le nez et les oreilles, les pieds et les mains, et le corps duquel devrait être tout ensanglanté et congelé de froid; et d’ailleurs qu’on devrait donner ce corps mort aux oiseaux et aux bêtes sauvages : il en arriverait de même à ce pape qui voudrait donner licence aux prêtres de se marier, contre la susdite ordonnance divine, car ce pape serait soudain privé de la vue et ouïe spirituelle, de la parole, des œuvres spirituelles, et toute sa sapience spirituelle défaudrait spirituellement; et d’ailleurs, son âme descendrait en enfer pour y être éternellement tourmentée et être la proie des démons. Voire si saint Grégoire le pape eût établi cette loi, il n’eût jamais obtenu miséricorde de Dieu, s’il n’eût révoqué une telle sentence.

    Les papes ont toujours défendu le célibat sacerdotal. Le pape François a lui aussi récemment manifesté sa haute estime pour ce trésor de l’Église latine, en citant Paul VI : « Je voudrais donner ma vie pour le célibat des prêtres ! ». S'il y a des exceptions, il s'agit toujours d'hommes déjà mariés au moment de leur ordination, comme les prêtres catholiques-orientaux ou les prêtres anglicans devenus catholiques. Tout au plus, le pape envisagerait d'autres exceptions de ce type pour des régions manquant cruellement de prêtres, par exemple en appelant au sacerdoce des diacres mariés. Mais rien n'est encore décidé. Prions pour le Saint-Père afin que Dieu l'éclaire et qu'il discerne ce que Dieu veut, dans la ligne de la Tradition multiséculaire de l’Église romaine. Gageons cependant que l’Église, si elle adopte ces exceptions, prendra aussi toutes les mesures pour que le niveau spirituel du clergé ne soit pas menacé. Enfin, j'aimerais citer le cas d'un grand saint russe orthodoxe, Jean de Kronstadt, un prêtre marié, qui dans son évolution spirituelle vers la sainteté, en vint à la fois à célébrer quotidiennement la divine liturgie et à choisir une stricte continence dans sa vie conjugale. Cet exemple est à méditer dans le contexte actuel.

  • Encore le célibat des prêtres et l’ordination sacerdotale des femmes

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    00_queston.jpgDans la  livraison en ligne, (à paraître le 27 février) de « Dimanche », le journal hebdomadaire des paroisses francophones de Belgique,  son directeur, le P. Charles Delhez, s.j.  enfourche à nouveau l’un de ses canassons favoris : le célibat des prêtres et l’ordination des femmes. Voici un extrait de sa prose obsessionnelle :

    « (…) Il faut bien distinguer les deux dossiers. L’un est disciplinaire, l’autre théologique.

    «  À propos de l’obligation du célibat, il y a déjà une diversité reconnue à l’intérieur de l’Église catholique. Les églises catholiques orientales – non latines, mais en communion avec Rome – n’ont jamais adopté cette règle. Un homme marié peut donc devenir prêtre, mais un prêtre célibataire ne peut plus se marier. Telle est la règle. Dans l’Église latine, on n’ordonne prêtre que ceux qui font la promesse de rester célibataires. Ne pourrait-on cependant pas imaginer, dans l’Église latine, la même diversité qu’à l’intérieur de l’Église catholique dans son ensemble ? C’est que les Églises locales évoluent bien différemment aujourd’hui. Des réponses adaptées à la situation de chaque pays ou de chaque région du monde serait sans doute heureuses.

    « Tout autre est la question posée par l’ordination des femmes. Elle est théologique. L’Église est-elle tenue par le fait que Jésus n’a choisi comme apôtres – les Douze – que des hommes, alors qu’il était entouré également de femmes ? Elles ont d’ailleurs joué un rôle très important, comme premiers témoins de sa résurrection, par exemple. S’agirait-il d’une donnée culturelle ou d’une volonté divine ?(…) ».

    C’est trop peu dire aux chers paroissiens de « Dimanche » que l’obligation du célibat sacerdotal est simplement disciplinaire. La raison est aussi théologique. Mgr Cabello, Vicaire Régional de la Prélature de l’Opus Dei en Belgique en avait fait la démonstration au Père Delhez, dans la Libre Belgique du 2 décembre dernier :

    « Quels sont les raisons théologiques pour le célibat ?

    Le sacerdoce ministériel est plus qu’un office sacré exercé au service de la communauté. C’est une transformation sacramentelle de la personne du prêtre en celle du Christ. Dans le sacerdoce, la personne est assumée par Dieu au point de pouvoir dire : ce n’est plus moi qui vis, c’est le Christ qui vit en moi (Ga 2, 20). On comprend ainsi que le prêtre accepte avec joie de vivre ce célibat dont le Christ est prototype et exemple.

    Benoît XVI a précisé cette idée en rappelant que le centre de la vie des prêtres est la célébration de l’eucharistie. Les paroles de la consécration sont ici centrales : "ceci est mon corps, ceci est mon sang". Le prêtre parle donc in persona Christi. Le Christ l’unit à son "moi". C’est une union au Christ ressuscité, avec la plénitude de vie qui est propre à la résurrection et dont Jésus parle aux Sadducéens (cf. Mt 22). C’est une vie nouvelle dans laquelle le prêtre est déjà au-delà du mariage. Le célibat est donc une anticipation du monde de la résurrection (cf. Osservatore Romano éd. fr., 15-6-10, p. 6).

    En outre, le célibat manifeste de façon excellente la charité pastorale du bon pasteur qui se livre sans réserves au service de son troupeau. Et dans sa tâche pastorale et paternelle, son cœur s’élargit et sa virginité sacerdotale devient féconde.

    Voilà donc, brièvement évoquées, des raisons historiques et théologiques en faveur du célibat sacerdotal. En conclusion : l’ordination d’hommes mûrs mariés (viri probati) ne serait pas contraire à la tradition, mais elle comporterait son lot de graves difficultés pratiques, dont la création de deux classes de prêtres ne serait pas la moindre. Elle rendrait moins transparente l’identification du prêtre avec le Christ et l’empêcherait de vivre une disponibilité totale pour ses fidèles. Et pour vraiment être conforme à la vie de l’Eglise telle que nous l’ont léguée les apôtres, elle exigerait de ces hommes et de leurs épouses une continence totale et perpétuelle. »

    Lors du colloque tenu  sur ce même sujet à Ars du 24 au 26 janvier derniers, le cardinal Mauro Piacenza, nouveau préfet nommé à la tête de la Congrégation romaine pour le Clergé par Benoît XVI, a redit la même chose en d’autres termes  « Il faut dépasser la réduction, si diffuse en certains milieux, du célibat à une simple loi ecclésiastique. C’est une loi pour la seule raison qu’il s’agit d’une exigence du Sacerdoce et de la configuration au Christ opérée par le Sacrement. En ce sens la formation au célibat, en plus de tous les aspects humains et spirituels, doit comporter une solide dimension doctrinale, car on ne peut pas vivre ce dont on n’en comprend pas le motif ! » et il a ajouté plus sévèrement : «  le « débat » sur le célibat qui réapparaît périodiquement au cours des siècles, ne favorise pas la compréhension sereine de la part des jeunes générations à propos d’une donnée aussi déterminante de la vie sacerdotale ».

    S’agissant, en second lieu, des interrogations théologiques du P. Delhez sur la possibilité d’un sacerdoce féminin, ne lui faisons pas l’injure  de le renvoyer  aux motifs exposés dans la Lettre Apostolique «Ordinatio Sacerdotalis  » de Jean-Paul II, laquelle se conclut solennellement comme suit « Afin qu'il ne subsiste aucun doute sur une question de grande importance qui concerne la constitution divine elle-même de l'Église, je déclare, en vertu de ma mission de confirmer mes frères (cf. Lc 22,32), que l'Église n'a en aucune manière le pouvoir de conférer l'ordination sacerdotale à des femmes et que cette position doit être définitivement tenue par tous les fidèles de l'Église (…) » ni à l’article 1378 du code de droit canonique qui précise : «  tant celui qui attente la collation de l’ordre sacré que la femme qui attente la réception de l’ordre sacré, encourent l’excommunication latae sententiae réservée au Siège Apostolique ».

    Sur ce point le débat théologique doit être considéré comme clos dans l’Eglise catholique.
    Il est regrettable que des médias d’Eglise, sauf erreur, y reviennent sans cesse. L’article se trouve ici : Célibat des hommes et ordination des femmes, par P. Charles Delhez

  • Que dit vraiment le pape à propos du célibat des prêtres ?

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    De Bénédicte Lutaud sur le site de l'hebdomadaire "La Vie" :

    Célibat des prêtres : ce qu'a vraiment dit le pape François

    Dans l’avion qui le ramenait des JMJ au Panama, le pape a réitéré son opposition au « célibat optionnel » pour les prêtres, tout en rouvrant le débat sur l’ordination de « viri probati », des hommes mariés ayant fait leurs preuves au plan humain et pastoral.

    C’est à rien n’y comprendre. « Le pape François inflexible sur le célibat des prêtres »,titre L’Express« Le pape François repose la question du célibat des prêtres », souligne quant à lui le site de France bleu. Mais qu’a vraiment voulu dire l’évêque de Rome, dans l’avion qui le ramenait des Journées mondiales de la jeunesse (JMJ) au Panama ?

    Lors de la traditionnelle conférence de presse à bord du vol papal, interrogé par la journaliste française de Paris Match Caroline Pigozzi sur le célibat des prêtres, le pape a formulé une réponse toute en nuances – certains diront « jésuite ». Et, comme souvent, chacun tend à interpréter ses propos dans le sens qui lui semble le plus favorable.

    « Le célibat optionnel, non », « je ne le ferai pas »

    « Est-il possible de penser que, dans l’Église catholique, en suivant le rite oriental, vous permettrez à des hommes mariés de devenir prêtres ? », a demandé Caroline Pigozzi. La question portait donc sur l’ordination d’hommes déjà mariés, et non sur la possibilité, pour des prêtres déjà ordonnés, de se marier ; le vrai débat au sein de l’Église se situant sur la première hypothèse, la seconde étant écartée de façon beaucoup plus ferme. « Dans l’Église catholique, dans le rite oriental, ils peuvent le faire, et on fait l’option, célibataire ou marié – avant le diaconat » , s’est tout d’abord contenté de répondre François. Dans l’Église catholique orientale, il est en effet possible d’ordonner prêtres des hommes déjà mariés, mais il n’est pas question que des hommes ordonnés puissent convoler. « Mais maintenant, avec l’Église catholique de rite latin, peut-on penser que vous prendrez cette décision ? » , a alors insisté la journaliste.

    À cet instant, François a formulé une réponse beaucoup plus complète : « Il me vient à l’esprit cette phrase de saint Paul VI : “Je préfère donner ma vie avant de changer la loi sur le célibat.” (…) Personnellement, je pense que le célibat est un don pour l’Église. Deuxièmement, moi je ne suis pas d’accord pour permettre le célibat optionnel, non. »

    Jusqu’alors, le pape s’était exprimé de façon plus ambigüe sur cette question. Sa première déclaration sur le sujet date du 25 mai 2014, lors d’une conférence de presse dans l’avion qui le ramenait de Terre sainte : « Le célibat est une règle de vie que j’apprécie beaucoup, et je crois que c’est un don pour l’Église. Comme ce n’est pas un dogme de foi, la porte est toujours ouverte. » Désormais, le message est clair : le célibat optionnel dans l’Église catholique de rite latin, c’est non.

    Le pape François veut-il des prêtres mariés ?

    Mais le pape ne s’est pas arrêté là, rouvrant alors le débat sur une autre solution possible : « Il resterait seulement quelques possibilités dans les lieux les plus éloignés – je pense aux îles du Pacifique… Mais c’est une chose à penser quand il y a une nécessité pastorale, là, le pasteur doit penser aux fidèles. » François a alors cité le livre de l’évêque allemand Fritz Lobinger (évêque missionnaire catholique d’Aliwal en Afrique du Sud de 1987 à 2005), Prêtres pour demain, avant d’insister, prudent : « C’est une chose en discussion entre théologiens, ce n’est pas ma décision. Ma décision c’est : le célibat optionnel avant le diaconat, non. Cela m’appartient, c’est personnel, je ne le ferai pas, que cela reste clair. Je suis “fermé” ? Peut-être. Mais je ne me sens pas de paraître devant Dieu avec cette décision. »

    Les viri probati en question

    Le pape est alors revenu sur la thèse de Fritz Lobinger : « Il a dit : “L’Église fait l’eucharistie et l’eucharistie fait l’Église”, mais là où il n’y a pas d’eucharistie, dans les communauté – pensez aux îles du Pacifique... » « – En Amazonie aussi », observe alors la journaliste française. « Peut-être là… dans de nombreux endroits, reprend le pape François. Lobinger dit : qui fait l’eucharistie ? Dans ces communautés les “directeurs”, disons, les organisateurs de ces communautés sont les diacres, ou les sœurs ou les laïcs, directement. Et Lobinger dit : on peut ordonner un ancien, marié – c’est sa thèse – on pourrait ordonner un ancien marié, mais qui exerce seulement lemunus sanctificandi , c’est-à-ire qui célèbre la messe, qui administre le sacrement de la réconciliation et donne le sacrement des malades. » Et le Saint-Père d’expliquer : « L’ordination sacerdotale donne les trois munera (charges liées au sacrement de l’ordre, ndlr) :regendi – gouverner, le pasteur – docendi – enseigner – et sanctificandi.Cela vient avec l’ordination. L’évêque ne donnerait que la faculté pour le munus sanctificandi : c’est la thèse. Le livre est intéressant. Peut-être que cela peut aider à penser le problème. »

    Et François de conclure, toujours aussi prudent « je crois que le problème doit être ouvert dans ce sens, là où il y a un problème pastoral de manque de prêtres. Je ne dis pas que cela doit se faire, parce que je n’ai pas réfléchi, je n’ai pas prié suffisamment sur cela. Mais les théologiens doivent étudier. »

    Sans les nommer, le pape fait ici référence aux viri probati – des hommes mariés ayant fait leurs preuves au plan humain et pastoral. La question de l’ordination des viri probati au sacerdoce – et pas seulement au diaconat permanent comme cela se fait depuis 50 ans – dans certains endroits reculés en pénurie de prêtres, est un serpent de mer depuis les années 1970. Jusqu’alors, elle a été rejetée par Jean Paul II puis Benoît XVI.

    Des solutions locales

    La question des viri probati revient régulièrement sur le devant de la scène depuis le début du pontificat du pape François, et surtout à l’approche du synode des évêques sur l’Amazonie, prévu en octobre 2019. L’Amazonie est en effet un territoire brésilien immense, où le nombre de prêtres est insuffisant pour assurer une présence régulière auprès des autochtones. Ce sujet avait déjà fait l’objet d’une conversation privée entre Mgr Erwin Kräutler, évêque de Xingu, en Amazonie, et le pape, comme le soulignait Jean Mercier, auteur du livre Célibat des prêtres. La discipline de l’Église doit-elle changer ? . Le 4 avril 2014, Kraütler avait confié que, lors de cette conversation avec le pape, ce dernier lui avait répondu que, face à la pénurie de prêtres, c’était aux évêques, et donc aux Églises locales de faire des propositions.

    Ordination d'hommes mariés : la méthode François

    En mars 2017, dans une interview au journal allemand Die Zeit, le pape avait par ailleurs assuré qu’une réflexion sur l’ordination des viri probati devrait être examinée pour déterminer si cela pouvait être une chance pour l’Église, et étudier quelles fonctions ils pourraient remplir, notamment au sein de communautés isolées (comme celles évoquées avec Mgr Kraütler au Brésil).

    Un « type de ministère » pour les femmes

    À l’approche du synode sur l’Amazonie, la question s’est à nouveau invitée dans les débats. Dans le document préparatoire du synode rendu public le 8 juin 2018, toutefois, une seule phrase, elliptique, semblait faire référence aux viri probati, sans jamais les nommer : « Il faut repenser de nouveaux chemins pour que le peuple de Dieu ait plus fréquemment un meilleur accès à l’eucharistie, centre de la vie chrétienne. » Le document encourageait davantage à faire appel aux laïcs, et notamment aux femmes, invitant à « discerner le type de ministère officiel qui peut être conféré aux femmes » , en tenant compte de leur « rôle central joué aujourd’hui (…) dans l’Église amazonienne ».

    Synode sur l'Amazonie : le Vatican envisage un "type de ministère" pour les femmes

    Sans aller jusqu’à l’ordination de femmes diacres, cette piste d’un « type de ministère officiel » féminin montrait un changement culturel notable dans la réflexion de certains évêques : penser la crise des vocations non plus uniquement à partir des prêtres, mais aussi des laïcs. Une « décléricalisation » que n’a de cesse de demander le pape François.

    Différentes solutions semblent ainsi envisagées pour remédier à la pénurie de prêtres. François a été clair sur la célibat optionnel pour les prêtres, comme il l’a été sur l’ordination de femmes prêtres : c’est non. En revanche, il invite à discerner d’autres formes de ministères pour les laïcs, dont les femmes. Fidèle à sa volonté de décentraliser l’Église, il invite les théologiens à s’emparer de la question et les Églises locales à faire des propositions. Une manière, quelque-part, de se « déresponsabiliser du sujet » : la décision ne sera peut-être pas prise sous son propre pontificat. En revanche, l’idée est semée…

  • « Sept prêtres flamands sur dix contre le célibat, pour des femmes prêtres »

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    1676054805.jpgTel est le titre d’une dépêche de l’AFP, rendant compte d’une enquête réalisée par le journal De Standaard.

    Le blog d'Yves Daoudal observe que c’est un exemple, bien massif, de désinformation car, explique-t-il, « le journal avait adressé un questionnaire aux 724 curés de la Flandre ‘belge’. Ils ont été 248 à répondre. Il ne s’agit donc pas du « panel représentatif » d’un sondage. C’est 73,3% des 248 qui ont répondu  favorablement à l’abolition du célibat sacerdotal, et 68,7% des 248 qui ont répondu qui pensent que les femmes devraient pouvoir être prêtres. Sur 724, ils sont bien évidemment minoritaires (même si ça fait quand même près d’un quart des curés à être pour l’ordination des femmes…).On rappellera qu’en novembre dernier, une étude d’un politologue de l’université de Louvain montrait que si le déclin de la pratique religieuse se poursuit au même rythme que ces dernières années, il n’y aura plus de pratiquants en 2016. Ce qui règlera le problème… »

    Quoi qu’il en soit, ces chiffres sont de toute façon symptomatiques, car ceux qui sont restés aux abris n’ont le courage d’aucune conviction. On croit revivre l’histoire du schisme anglican, avec l’apostasie séculière en prime. La Belgique est vraiment une terre à régénérer. Puisse-t-elle un jour être assainie pour accueillir la bonne semence des  missionnaires de la nouvelle évangélisation. Saint François de Sales, priez pour nous.

  • Amorce d'une nouvelle campagne médiatique contre le célibat des prêtres

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    En septembre prochain, le pape doit effectuer une visite pastorale en Allemagne. Certains médias sont déjà occupés à miner le terrain sur lequel Benoît XVI sera amené à poser ses pas. C'est ainsi que le Suddeutsche Zeitung exhume une pétition qui a circulé en Allemagne, en 1970, en faveur de la modification de la règle du célibat sacerdotal et que l'abbé Ratzinger aurait signée. Cette information, aussitôt reprise par le Figaro et Europe I, le sera, n'en doutons pas, par les médias de notre petite terre d'héroïsme. En Allemagne, les journalistes appuient ainsi les politiciens, dont la chancelière, qui s'immiscent dans cette question de discipline ecclésiastique et qui voient dans le mariage des prêtres une réponse adéquate aux problèmes de pédophilie.

    Nous avons déjà posté sur ce blog une note qui dénonçait le simplisme d'une telle vision.

    Il ne s'agit pas d'une question dogmatique mais bien d'une question de discipline ecclésiastique qui diffère de la perception qu'en ont d'autres églises. Il faut cependant rappeler que dans les églises d'orient (mêmes catholiques), si on ordonne des hommes mariés, il n'est pas question d'ouvrir le mariage à des prêtres célibataires.

    On lit beaucoup d'âneries dans la presse et dans les réactions des lecteurs influencés par le battage médiatique à ce propos. Certains n'hésitent pas à dénoncer le caractère tardif de l'introduction de la discipline du célibat alors que le Père Cochini, dans une étude scientifique consacrée aux origines apostoliques du célibat sacerdotal tord le cou à ces inepties. Interrogé en 2006, lors de la publication de son ouvrage, il déclarait :

    "L’ouvrage publié aujourd’hui aux éditions Ad Solem est la réédition, augmentée d’une préface du cardinal Castrillon Hoyos, de mon livre sur Les Origines apostoliques du célibat ecclésiastique, publié pour la première fois en 1981 chez Lethielleux. Il a été jugé utile de le republier parce que la question des origines, c’est-à-dire la question historique, est aujourd’hui au centre du débat. Il est frappant, en effet, de voir la quantité de livres ou d’articles qui contestent la discipline de l’Eglise latine concernant le célibat obligatoire des clercs en arguant de l’origine tardive de la loi. Certains, comme vous le dites, y voient une invention médiévale, en se référant au 2ème concile du Latran de 1139, mais ils sont de moins en moins nombreux, car l’argument ne résiste pas à une simple lecture du texte conciliaire : le document du Latran n’établit pas l’obligation du célibat, mais frappe de nullité tout mariage contracté par un clerc déjà ordonné. En revanche, la critique basée sur le concile d’Elvire des années 300, le premier en date des synodes faisant état d’une obligation de continence parfaite pour les membres du clergé supérieur, ainsi que sur l’existence de nombreux évêques, prêtres et diacres mariés au cours des premiers siècles de l’Eglise, est certainement à prendre en compte."

    On le voit, tant sur le fond de la question où il est simpliste de croire que le mariage résoudrait le problème de la pédophilie (alors que tant d'hommes mariés sont pédophiles), que sur sa dimension historique, il y a une véritable entreprise de désinformation qui est à l'oeuvre. Quant à Joseph Ratzinger, on peut imaginer qu'il a évolué et qu'ayant souscrit à certaines positions qui étaient dans l'air du temps conciliaire et post-conciliaire, il a eu le temps et l'accès à d'autres données qui lui ont permis de rectifier certaines de ses positions.

  • Le cardinal Kasper n’a jamais voulu abolir le célibat des prêtres

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    « Les temps ont changé » depuis la signature de la pétition en 1970

    Mercredi 9 février. Le cardinal Walter Kasper, président émérite du Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens, déclare que « les temps ont changé » depuis sa participation à la signature d'une pétition en faveur de l'ouverture d'une étude sur la nécessité du célibat obligatoire pour les prêtres, en 1970, et réaffirme ne jamais avoir demandé l'abolition de cette pratique de l'Eglise.

    Le cardinal et le pape actuel, alors simple théologien, signèrent avec d'autres théologiens dont Karl Rahner, Otto Semmelroth et Karl Lehmann (ils étaient 9 en tout), un mémorandum aux évêques allemands, demandant à ces derniers d'ouvrir un débat sur le caractère obligatoire du célibat.

    Dans des déclarations à l'agence portugaise Ecclesia, le cardinal a précisé que l'intention était de « discuter » de la question, mais sans aucune proposition d' « abolir » cette discipline de l'Eglise.

    « Depuis on a beaucoup discuté, il y a eu trois Synodes internationaux qui ont parlé du célibat et on a décidé de maintenir cette discipline, et moi-même je pense que le célibat est un bien pour l'Eglise », a déclaré le cardinal Kasper.

    Les semaines passées, plus de 140 théologiens catholiques d'universités catholiques allemandes, suisses et autrichiennes ont signé une pétition « Eglise 2011 : un renouvellement indispensable », demandant une réforme de fond de l'Eglise et affrontant, entre autres questions, la fin du célibat obligatoire pour les prêtres.

    Le document a été diffusé le 4 février par le quotidien allemand « Süddeutsche Zeitung ».

    Le cardinal Kasper a reconnu que la discussion « n'est jamais close », mais a souligné que la décision de l'Eglise sur la question « est prise » et que le pape actuel ne pense pas « changer cette discipline » du célibat obligatoire.

    Le cardinal Kasper, nommé par Jean Paul II, a été président du Conseil pontifical pour la promotion de l'unité des chrétiens de 2001 à 2010. Il était ces jours-ci à Lisbonne pour recevoir le titre de docteur honoris causa que lui conférait l'université catholique portugaise (UCP). Zenit

  • Le célibat des prêtres n'est pas le problème mais bien la réponse

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    Le Célibat des prêtres est la réponse et non le problème

    Article rédigé par La Nouvelle République, le 14 mars 2019 (via Liberté politique)

    Le Célibat des prêtres est la réponse et non le problème

    Source [La Nouvelle République] Monseigneur Pascal Wintzer a ouvert le débat sur RCF (Radio chrétienne francophone) en évoquant la possibilité de faire entrer dans l’Église des hommes qui ont une vie familiale. « Je suis pour l’ordination des hommes mariés », confirme-t-il en s’empressant de préciser : « Je suis contre le mariage des prêtres et pour la fidélité dans les engagements. » Pas question de revenir sur sa parole.

    "La sexualité n’est pas mauvaise en soi ”L’Église ne semble pas prête à rompre ce qui constitue le socle de la disponibilité des hommes d’Église, le célibat. « Elle n’appellera jamais à revenir sur un engagement, au contraire, elle engage à la fidélité », a relayé l’ecclésiastique.

    L’archevêque de Poitiers est le premier en France à se prononcer publiquement, dans les médias, pour accueillir des hommes mariés.

    Pour retrouver l'intégralité de l'article, cliquer ici :

    https://www.lanouvellerepublique.fr/niort/mgr-wintzer-je-suis-pour-l-ordination-des-hommes-maries

    Mgr Wintzer sombre dans une illusion bien classique et terriblement répandue : pour répondre aux problèmes d'abus sexuels, de pédophilie (mais surtout pas d'homosexualité, le mot est tabou) dans l'Eglise, permettons aux prêtres d'avoir une vie sexuelle, en ordonnant des hommes mariés. Cette proposition qui se drape dans une rhétorique apparemment mesurée, fait partie d'une stratégie plus globale, une simple étape vers le mariage des prêtres et pourquoi pas l'ordination des femmes. Faut-il rappeler que la proposition de Mgr Wintzer sonne comme une fausse solution à un problème bien mal identifié ?

    Pour répondre à l'argumentaire de Mgr Wintzer, nous vous livrons cette belle réflexion du Père Carter Griffin publiée par France Catholique : "Le Célibat est la réponse et non le problème" :

    "De nombreux catholiques, même parmi les plus croyants, semblent avoir renoncé au célibat des prêtres. A notre époque post révolution sexuelle, beaucoup voient le célibat comme un refoulement malsain des pulsions sexuelles, encourageant l’épidémie d’abus sexuels dans le clergé actuel. Selon cette ligne de pensée, si nous voulons nous débarrasser des abus sexuels commis par des prêtres, nous devons nous débarrasser du célibat.

    C’est une solution qui, selon les mots d’un critique littéraire, est « géniale, plausible et complètement fausse ».

    Le célibat n’est pas le problème. Les abus sexuels commis par des membres du clergé ne sont pas plus causés par le célibat que les adultères ne sont causés par le mariage. Il y a violation de promesses sacrées dans les deux cas, promesses que le Seigneur s’est engagé à aider à vivre fidèlement. Pour le dire autrement, autoriser les prêtres à se marier ne protégerait pas des transgressions sexuelles. Le mariage n’est malheureusement pas exempt de scandales et d’abus sexuels.

    Le problème n’est pas le célibat mais un célibat mal vécu. C’est le fait de prêtres ne vivant pas chastement. La réponse appropriée n’est pas de supprimer le célibat mais d’exiger que les prêtres, tout comme les gens mariés, soient à la hauteur de leur vocation.

    En fait, le célibat lui-même est un don précieux et irremplaçable pour l’Eglise. Il est généralement défini de manière négative comme « absence de mariage ». Mais c’est un choix positif, une puissante façon d’aimer avec une unicité d’objectif et une ouverture de cœur sans égale. Il permet au prêtre de vivre sa paternité spirituelle avec force et efficacité.

    Les bénéfices spirituels du célibat sacerdotal ont enrichi l’Eglise et même la culture en général depuis des siècles. On abolirait ce célibat dans ce moment d’exaspération qu’on ne résoudrait pas le problème des abus sexuels mais en plus on priverait les générations futures des innombrables grâces de la paternité spirituelle qui nous parviennent par le célibat sacerdotal.

    Alors, comment expliquer l’actuelle tempête de scandales ? L’histoire n’est pas bien jolie, mais il y a de bonnes nouvelles à la fin.

    Tout d’abord, depuis des décennies, l’examen des candidats à la prêtrise a été incroyablement léger. Etre doué pour les études et être recommandé par un prêtre étaient généralement suffisants. Pas d’investigation poussée sur le caractère moral, la maturité spirituelle, pas de références exigées, pas d’examen psychologique.

    L’Eglise a insisté à plusieurs reprises sur le fait que les hommes ayant des inclinations homosexuelles installées ne devaient pas être admis au séminaire (à ce propos, le dernier document à le rappeler a été approuvé par le pape François en 2016). Néanmoins, de tels hommes ont été admis en grand nombre.

    Bien sûr, de nombreux prêtres ayant des tendances homosexuelles ne sont pas coupables d’agressions sexuelles et vivent saintement. Cependant, la grande majorité des abus sexuels commis par des prêtres consiste en abus homosexuels sur des garçons et de jeunes hommes. Aussi controversée qu’elle ait été, la sagesse de la détermination de l’Eglise est devenue, avec le recul, claire comme de l’eau de roche. Ne pas l’avoir respectée a eu des conséquences désastreuses dans les vies de milliers de jeunes hommes durant plusieurs décennies.

    Deuxièmement, depuis des années, les séminaristes ont reçu une formation terriblement inadéquate pour vivre un célibat chaste. Selon le témoignage de prêtres formés durant ces années de bouleversement, principalement les années 70 et 80, les pratiques ascétiques et de vie intérieure nécessaires pour soutenir une chasteté saine n’étaient pas sérieusement inculquées.Beaucoup d’hommes ont même été ordonnés alors qu’ils avaient l’impression – fausse mais renforcée par des professeurs de séminaire – que l’obligation du célibat serait rapidement supprimée.

    Dans certains séminaires, une culture dépravée de licence sexuelle parmi les séminaristes et même parmi les enseignants a corrompu des jeunes gens vulnérables ou a chassé de dégoût ceux qui cherchaient la vertu. Pour rendre les choses pires encore, dans plusieurs séminaires, la dissidence théologique et l’expérimentation liturgique étaient endémiques, conduisant à un double standard hypocrite que les hommes ont emporté avec eux dans la prêtrise.

    L’infidélité intellectuelle nourrit invariablement l’infidélité morale. Si je peux tordre les enseignements de l’Eglise pour qu’ils collent avec mes propres opinions, préférences et lubies, pourquoi cette arrogance se limiterait-elle aux propositions dogmatiques et aux normes liturgiques ? Pourquoi ne s’attaquerait-elle pas aussi aux préceptes moraux ? La dissidence qui suppurait depuis des décennies dans les facultés de théologie a eu un prix à payer dévastateur pour l’Eglise, pas uniquement en confusion doctrinale et liturgique mais également, je l’affirme, en abus sexuels.

    Finalement, une fois ordonnés, certains prêtres qui avaient grandi dans ce climat de duplicité laxiste ont été, sans surprise, infidèles. Et leurs supérieurs les ont rarement réprimandés de façon significative. Certains ont été à plusieurs reprises réaffectés mais quasiment aucun n’a été révoqué. Beaucoup d’évêques ont perdu courage et confiance en soi. L’extension de la corruption cléricale était un embarras douloureux pour les évêques et il en est résulté une culture du secret qui arrive maintenant en lumière.

    Dieu merci, ce n’est pas la fin de l’histoire. De nombreux prêtres et évêques, contre toute attente, sont demeurés fidèles durant ces années lugubres, et aujourd’hui nous honorons leur témoignage héroïque. Alors est arrivé le document marquant de 1992, « Pastores Dabo Vobis », dans lequel Saint Jean-Paul II proposait un portrait tonique de la prêtrise et de la formation en séminaire.

    Dans les années qui ont suivi, il a été mis en pratique de façon inégale de par le monde, mais la tendance à l’amélioration dans la qualité de la formation était manifeste. Les critères d’admission dans de nombreux diocèses se sont durcis et la qualité de formation dans la plupart des séminaires s’est améliorée de façon spectaculaire. Bien que beaucoup n’en aient pas pris conscience, la réforme du clergé a commencé il y a plus de vingt ans.

    Il reste encore à faire. Puisque le célibat sacerdotal est un moyen privilégié de vivre la paternité spirituelle, nous devons continuer à améliorer la sélection et la formation des futurs prêtres à la lumière de cette paternité. Ils doivent avoir une identité masculine affirmée et un désir du mariage et de la paternité normal et sain, la capacité mûrie de renoncer à ces grands dons en vue de se consacrer à la paternité surnaturelle et posséder ou montrer des aptitudes pour les qualités humaines et les vertus qui font les meilleurs pères selon la nature."

    Une fois ordonnés, les prêtres devraient être tenus aux plus hauts critères de chasteté. Les violations devraient être abordées systématiquement, rapidement et honnêtement, avec le sérieux qui convient à un important abus de confiance aux dépens de sa propre famille spirituelle. La chasteté – sereine, profonde et joyeuse – au service de la paternité sacerdotale est sans aucun doute la voie d’une authentique réforme de la prêtrise.

    Les médecins médiévaux, avec les meilleures intentions, ont souvent traité des maladies en soutirant du sang à leurs patients, les privant à leur insu des nutriments mêmes dont ils avaient besoin pour aller bien. Ceux qui cherchent à soigner la maladie des abus sexuels dans l’Eglise en lui soutirant la grâce du célibat feront peu pour soigner la maladie et priveront cependant le Corps du Christ des nutriments spirituels nécessaires pour recouvrer la santé.

    Si nous souhaitons régler le problème d’abus sexuels commis par des membres du clergé, nous devrions commencer par attendre de nos prêtres la même fidélité que celle que nous attendons de n’importe qui d’autre, et les appeler à embrasser, par le don du célibat, les bénédictions de la paternité spirituelle dont nous avons besoin aujourd’hui plus que jamais.


    Le père Carter Griffin est un prêtre de l’archidiocèse de Washington. Depuis 2011, il est chargé de la sélection et de la formation des séminaristes au séminaire Saint Jean-Paul II du district de Washington. Il est diplômé de Princeton et est un ancien agent de ligne de la US Navy.