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Rechercher : scalfari

  • Quand Scalfari écrit n'importe quoi

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    Précisions du Saint-Siège après un nouvel éditorial de Scalfari (source : radio vatican)

    En cette fin d’année, la presse italienne a accordé une large place à un éditorial du fondateur du quotidien italien La Repubblica, Eugenio Scalfari. Au mois d’octobre, ce journaliste (qui se proclame athée) avait publié une longue interview du Pape François qui avait défrayé la chronique. Dimanche, il a voulu commenter dans les colonnes du journal le magistère du pape François. Il y affirme entre autres que dans sa récente exhortation apostolique Evangelii Gaudium (La joie de l’Evangile), le Pape François entend abolir le péché. Interrogé sur notre antenne, le Père Lombardi, directeur du Bureau de presse du Saint-Siège et de Radio Vatican, se félicite de l’intérêt du monde laïc vis-à-vis de ce Pape. Mais le contenu de cet éditorial mérite, selon lui, quelques mises au point. 

    Tout d’abord, ceux qui suivent jour après jour les prises de parole du Pape François savent l’importance qu’il attache au péché. François est un jésuite et les Exercices spirituels de saint Ignace, qui constituent pour lui une école de spiritualité et de vie chrétienne, commencent par la méditation des péchés et s’achèvent par un colloque avec Jésus qui est venu mourir pour nos péchés. C’est justement par rapport au péché qu’on peut mesurer l’étendue de la miséricorde divine sur laquelle insiste le Pape François. 

    Des malentendus à dissiper

    Le Père Federico Lombardi note par ailleurs que le journaliste italien a mal interprété une réponse du Pape François concernant la fin du monde. Le Pape a cité un célèbre verset de la première Epitre aux Corinthiens : « Quand le Fils se mettra lui-même sous le pouvoir du Père, Dieu sera tout en tous ». Il n’a pas dit, comme l’affirme Eugenio Scalfari, que « la divinité sera dans toutes les âmes et que tout sera en tous ». 

    Autre inexactitude signalée par le père Lombardi dans cet éditorial : le Pape François n’a pas canonisé saint Ignace de Loyola, qui était déjà saint depuis des siècles. Il a canonisé Pierre Favre, le premier compagnon de saint Ignace. Le directeur du Bureau de presse du Saint-Siège estime donc qu’il faut certes continuer le dialogue, mais qu’il faut l’approfondir pour éviter les malentendus. 

  • Pape François : Scalfari en remet une couche

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    Dans un nouvel article publié le 5 janvier 2014 par le grand quotidien italien « La Reppublica » (dont il est le fondateur),  Eugenio Scalfari persiste et signe. Extrait de la traduction parue sur le site web « Benoît et moi » :

    « (...) Une polémique sur la question du péché a vu le jour explique Scalfari,  et, selon certains de mes détracteurs, j'aurais soutenu que le pape l'a effectivement aboli. Je n'ai pas dit cela: un Pape catholique ne peut pas abolir le péché, il peut étendre à toutes les âmes la miséricorde divine jusqu'à la dernière minute d'une vie de péchés graves et répétés; mais à ce moment ultime, le pécheur se repent et il sera pardonné. Donc, le péché existe et exige le repentir. Jusqu'à présent, nous sommes en pleine conformité avec la doctrine, le canon et aussi le Dieu mosaïque des commandements.

    « Mais, ajoute Scalfari, - c'est la nouveauté de François (ndt: bien entendu, ce n'est pas du tout une nouveauté de François, Benoît XVI n'a rien dit d'autre et, j'imagine, ses prédécesseurs, et c'est à travers ce mensonge flagrant que Scalfari doit être recadré par les décrypteurs du pape qui oeuvrent laborieusement à sa communication) - le Pape nous rappelle que l'homme a été créé libre. C'est lui qui décide de son comportement et c'est Dieu qui a l'a créé de cette façon. Quelle est la vérité révolutionnaire de cette reconnaissance? Non pas que l'homme choisit le mal parce que dans ce cas, il meurt damné, mais que l'homme choisit le bien tel qu'il se le représente (ndt: il n'y a donc plus de mal, mais l'interprétation de chaque individu!). Il y a donc un canon de l'éthique dans ce choix. L'éthique occupe la première place dans toutes les religions, dans toutes les cultures, à toutes les époques, mais l'éthique est l'exigence la plus changeante d'homme à homme, de société à société, de temps et de lieu. Si la conscience est libre, et si l'homme ne choisit pas le mal, mais choisit le bien comme il l'entend, alors le péché de fait disparaît, et avec lui la punition.

    Ce n'est pas une révolution? Comment voulez-vous l’appeler? (…) » 

    Tout le texte ici : Le Dieu qui afflige et celui qui console

    www.repubblica.it/politica/2014/01/05/news/il_dio_che_affanna_e_che_consola_di_eugenio_scalfari

    Scalfari croit avoir trouvé un bon filon dans une réponse fort elliptique que lui a faite le pape François. Il se trompe et je n’oserais pas ajouter « de bonne foi ( « Qui suis-je pour juger » ? )

    Il m’étonnerait tout de même que le fondateur de la « Reppublica » ignore la doctrine catholique relative à la liberté de conscience : pour être dans la vérité (et pas seulement dans la sincérité) et faire effectivement le bien, je dois éclairer ma conscience et l’éduquer afin que mon jugement personnel se rapproche autant que possible du jugement idéal de la raison droite et se soumette à la loi morale naturelle et, de la sorte, se conforme à la volonté de Dieu. À cette condition seulement, je puis dire que j’agis bien si je me décide à l’action selon ma conscience.

    JPSC

  • Les colloques singuliers du pape François avec Eugenio Scalfari

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    A maintes reprises déjà, sur des thèmes sensibles de la discipline, de la morale ou de la foi même de l’Eglise, le pape actuel s’est entretenu avec le fondateur du quotidien La Reppublica, Eugenio Scalfari. Celui-ci en a chaque fois publié dans son journal à grand tirage des comptes rendus hétérodoxes qui ont été  inlassablement contestés  par des responsables de la communication du Saint-Siège.

    Vendredi dernier  nous avons fait écho ici : Existence de l'enfer : quand l'interviewer favori du pape déforme ses propos à la dernière récidive du genre concernant la réalité de l’enfer.

    Le bon sens pose alors la question de savoir pourquoi le pape régnant s’obstine à confier sa pensée à un interlocuteur qui n’aurait apparemment rien de mieux à faire qu’à la déformer en s’adressant à un vaste public. Les plus indulgents attribueront cette manière de faire à la naïveté du pape et les plus sceptiques à une forme de duplicité, de double langage : la parole de Scalfari contre celle des services d’information du Vatican .   

    Au sujet des propos du  pape sur l'enfer rapportés par Scalfari, un religieux de nos amis lecteurs se demande s’il ne serait pas opportun « que le pape, lors d'une prochaine catéchèse du mercredi, nous fasse connaître son enseignement sur ce mystère. Il aurait sans doute, en tant que familier des exercices de saint Ignace, des choses intéressantes à dire. Et surtout, une parole prononcée en public, ferait disparaître toutes les perplexités suscitées par un journaliste qui rapporte à sa manière ce que le pape lui a dit en privé »

    A propos de l'enfer, dans l’encyclique « Spe Salvi » (30 novembre 2007), son prédécesseur Benoît XVI écrivait ceci : « Il peut y avoir des personnes qui ont détruit totalement en elles le désir de la vérité et la disponibilité à l'amour. Des personnes en qui tout est devenu mensonge; des personnes qui ont vécu pour la haine et qui en elles-mêmes ont piétiné l'amour. C'est une perspective terrible, mais certains personnages de notre histoire laissent entrevoir de façon effroyable des profils de ce genre. Dans de semblables individus, il n'y aurait plus rien de remédiable et la destruction du bien serait irrévocable: c'est cela qu'on indique par le mot « enfer ».

    Sans entrer dans des questions un peu vaines de savoir si l’enfer est un lieu ou un état, le pontife régnant pourrait toujours remettre au diapason du grand public les développements que le pape Ratzinger consacrait à cette grave question du mystère de la grâce et de la justice divines. Voici un extrait significatif de cette pensée audacieuse qui ne conteste cependant pas la possibilité de la damnation éternelle ni l'éternité de l'âme :

    « 43. […] La grâce n'exclut pas la justice. Elle ne change pas le tort en droit. Ce n'est pas une éponge qui efface tout, de sorte que tout ce qui s'est fait sur la terre finisse par avoir toujours la même valeur. Par exemple, dans son roman « Les frères Karamazov », Dostoïevski a protesté avec raison contre une telle typologie du ciel et de la grâce. À la fin, au banquet éternel, les méchants ne siégeront pas indistinctement à table à côté des victimes, comme si rien ne s'était passé. Je voudrais sur ce point citer un texte de Platon qui exprime un pressentiment du juste jugement qui, en grande partie, demeure vrai et salutaire, pour le chrétien aussi. Même avec des images mythologiques, qui cependant rendent la vérité avec une claire évidence, il dit qu'à la fin les âmes seront nues devant le juge. Alors ce qu'elles étaient dans l'histoire ne comptera plus, mais seulement ce qu'elles sont en vérité. « Souvent, mettant la main sur le Grand Roi ou sur quelque autre prince ou dynaste, il constate qu'il n'y a pas une seule partie de saine dans son âme, qu'elle est toute lacérée et ulcérée par les parjures et les injustices [...], que tout est déformé par les mensonges et la vanité, et que rien n'y est droit parce qu'elle a vécu hors de la vérité, que la licence enfin, la mollesse, l'orgueil, l'intempérance de sa conduite l'ont rempli de désordre et de laideur: à cette vue, Rhadamante l'envoie aussitôt déchue de ses droits, dans la prison, pour y subir les peines appropriées [...]; quelquefois, il voit une autre âme, qu'il reconnaît comme ayant vécu saintement dans le commerce de la vérité. [...] Il en admire la beauté et l'envoie aux îles des Bienheureux ». Dans la parabole du riche bon vivant et du pauvre Lazare (cf. Lc 16, 19-31), Jésus nous a présenté en avertissement l'image d'une telle âme ravagée par l'arrogance et par l'opulence, qui a créé elle-même un fossé infranchissable entre elle et le pauvre; le fossé de l'enfermement dans les plaisirs matériels; le fossé de l'oubli de l'autre, de l'incapacité d’aimer, qui se transforme maintenant en une soif ardente et désormais irrémédiable. Nous devons relever ici que Jésus dans cette parabole ne parle pas du destin définitif après le Jugement universel, mais il reprend une conception qui se trouve, entre autre, dans le judaïsme ancien, à savoir la conception d'une condition intermédiaire entre mort et résurrection, un état dans lequel la sentence dernière manque encore.

    44.Cette idée vétéro-juive de la condition intermédiaire inclut l'idée que les âmes ne se trouvent pas simplement dans une sorte de détention provisoire, mais subissent déjà une punition, comme le montre la parabole du riche bon vivant, ou au contraire jouissent déjà de formes provisoires de béatitude. Et enfin il y a aussi l'idée que, dans cet état, sont possibles des purifications et des guérisons qui rendent l'âme mûre pour la communion avec Dieu. L'Église primitive a repris ces conceptions, à partir desquelles ensuite, dans l'Église occidentale, s'est développée petit à petit la doctrine du purgatoire. Nous n'avons pas besoin de faire ici un examen des chemins historiques compliqués de ce développement; demandons-nous seulement de quoi il s'agit réellement. Avec la mort, le choix de vie fait par l'homme devient définitif – sa vie est devant le Juge. Son choix, qui au cours de toute sa vie a pris forme, peut avoir diverses caractéristiques. Il peut y avoir des personnes qui ont détruit totalement en elles le désir de la vérité et la disponibilité à l'amour. Des personnes en qui tout est devenu mensonge; des personnes qui ont vécu pour la haine et qui en elles-mêmes ont piétiné l'amour. C'est une perspective terrible, mais certains personnages de notre histoire laissent entrevoir de façon effroyable des profils de ce genre. Dans de semblables individus, il n'y aurait plus rien de remédiable et la destruction du bien serait irrévocable: c'est cela qu'on indique par le mot « enfer ». D'autre part, il peut y avoir des personnes très pures, qui se sont laissées entièrement pénétrer par Dieu et qui, par conséquent, sont totalement ouvertes au prochain – personnes dont la communion avec Dieu oriente dès maintenant l'être tout entier et dont le fait d'aller vers Dieu conduit seulement à l'accomplissement de ce qu'elles sont désormais.

    45. Selon nos expériences, cependant, ni un cas ni l'autre ne sont la normalité dans l'existence humaine. Chez la plupart des hommes – comme nous pouvons le penser – demeure présente au plus profond de leur être une ultime ouverture intérieure pour la vérité, pour l'amour, pour Dieu. Mais, dans les choix concrets de vie, elle est recouverte depuis toujours de nouveaux compromis avec le mal – beaucoup de saleté recouvre la pureté, dont cependant la soif demeure et qui, malgré cela, émerge toujours de nouveau de toute la bassesse et demeure présente dans l'âme. Qu'advient-il de tels individus lorsqu'ils comparaissent devant le juge? Toutes les choses sales qu'ils ont accumulées dans leur vie deviendront-elles d'un coup insignifiantes ? Ou qu'arrivera-t-il d'autre? Dans la Première lettre aux Corinthiens, saint Paul nous donne une idée de l'impact différent du jugement de Dieu sur l'homme selon son état. Il le fait avec des images qui veulent en quelque sorte exprimer l'invisible, sans que nous puissions transformer ces images en concepts – simplement parce que nous ne pouvons pas jeter un regard dans le monde d’au delà de la mort et parce que nous n'en avons aucune expérience. Paul dit avant tout de l'expérience chrétienne qu'elle est construite sur un fondement commun: Jésus Christ. Ce fondement résiste. Si nous sommes demeurés fermes sur ce fondement et que nous avons construit sur lui notre vie, nous savons que ce fondement ne peut plus être enlevé, pas même dans la mort. Puis Paul continue: « On peut poursuivre la construction avec de l'or, de l'argent ou de la belle pierre, avec du bois, de l'herbe ou du chaume, mais l'ouvrage de chacun sera mis en pleine lumière au jour du jugement. Car cette révélation se fera par le feu, et c'est le feu qui permettra d'apprécier la qualité de l'ouvrage de chacun. Si l'ouvrage construit par quelqu'un résiste, celui-là recevra un salaire; s'il est détruit par le feu, il perdra son salaire. Et lui-même sera sauvé, mais comme s'il était passé à travers un feu » (3, 12-15). Dans ce texte, en tout cas, il devient évident que le sauvetage des hommes peut avoir des formes diverses; que certaines choses édifiées peuvent brûler totalement; que pour se sauver il faut traverser soi-même le « feu » afin de devenir définitivement capable de Dieu et de pouvoir prendre place à la table du banquet nuptial éternel.

    46. Certains théologiens récents sont de l'avis que le feu qui brûle et en même temps sauve est le Christ lui-même, le Juge et Sauveur. La rencontre avec Lui est l'acte décisif du Jugement. Devant son regard s'évanouit toute fausseté. C'est la rencontre avec Lui qui, en nous brûlant, nous transforme et nous libère pour nous faire devenir vraiment nous-mêmes. Les choses édifiées durant la vie peuvent alors se révéler paille sèche, vantardise vide et s'écrouler. Mais dans la souffrance de cette rencontre, où l'impur et le malsain de notre être nous apparaissent évidents, se trouve le salut. Le regard du Christ, le battement de son cœur nous guérissent grâce à une transformation assurément douloureuse, comme « par le feu ». Cependant, c'est une heureuse souffrance, dans laquelle le saint pouvoir de son amour nous pénètre comme une flamme, nous permettant à la fin d'être totalement nous-mêmes et par là totalement de Dieu. Ainsi se rend évidente aussi la compénétration de la justice et de la grâce: notre façon de vivre n'est pas insignifiante, mais notre saleté ne nous tache pas éternellement, si du moins nous sommes demeurés tendus vers le Christ, vers la vérité et vers l'amour. En fin de compte, cette saleté a déjà été brûlée dans la Passion du Christ. Au moment du Jugement, nous expérimentons et nous accueillons cette domination de son amour sur tout le mal dans le monde et en nous. La souffrance de l'amour devient notre salut et notre joie. Il est clair que la « durée » de cette brûlure qui transforme, nous ne pouvons la calculer avec les mesures chronométriques de ce monde. Le « moment » transformant de cette rencontre échappe au chronométrage terrestre – c'est le temps du cœur, le temps du « passage » à la communion avec Dieu dans le Corps du Christ. Le Jugement de Dieu est espérance, aussi bien parce qu'il est justice que parce qu'il est grâce. S'il était seulement grâce qui rend insignifiant tout ce qui est terrestre, Dieu resterait pour nous un débiteur de la réponse à la question concernant la justice – question décisive pour nous face à l'histoire et face à Dieu lui-même. S'il était pure justice, il ne pourrait être à la fin pour nous tous qu’un motif de peur. L'incarnation de Dieu dans le Christ a tellement lié l'une à l'autre – justice et grâce – que la justice est établie avec fermeté: nous attendons tous notre salut « dans la crainte de Dieu et en tremblant » (Ph 2, 12). Malgré cela, la grâce nous permet à tous d'espérer et d'aller pleins de confiance à la rencontre du Juge que nous connaissons comme notre « avocat » (parakletos) (cf. 1 Jn 2, 1)[…].

    JPSC

  • Scalfari /Pera : deux monstres sacrés face au pape François

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    Sur le site de « Monde et Vie » le 22 juillet :

     « Début juillet s’est tenue la dernière réunion du G20 et à cette occasion’ La Repubblica’ a publié un entretien avec le pape François par l’inénarrable Eugenio Scalfari. Eugenio Scalfari, âgé de 93 ans est une figure du journalisme italien. Fondateur de La Repubblica. revendiquant son athéisme, il fut de tous les combats de la gauche italienne depuis la Seconde Guerre mondiale. En 2013 ses interviews-fleuve du pape François dans lesquelles celui-ci exprimait des positions souvent aventurées sur Dieu, le Bien et le Mal, ont fait grand bruit et provoqué un certain embarras de la part du Saint-Siège : présentées sur le site du Vatican, elles en ont été retirées précipitamment quand Scalfari lui-même confessa sa pratique d’un journalisme “artistique” et sa retranscription « de mémoire » de ses entretiens avec le pape, sans notes ni magnétophone. Il avait alors 89 ans. Entretiens néanmoins publiés par la Librairie Éditrice Vaticane. Cette amitié « presque parfaite et insolite » entre le chef de l’Église et un non croyant est née ainsi : « le pape sait naturellement que je ne suis pas croyant, mais il sait aussi que j’apprécie énormément la prédication de Jésus de Nazareth que je considère comme un homme et non un Dieu. Le pape du reste sait que Jésus s’est incarné réellement, est devenu homme jusqu’à ce qu’il soit crucifié. La “Resurrectio” est en effet la preuve qu’un Dieu devenu homme redevient Dieu seulement après sa mort. Ces choses, nous nous les sommes dites de nombreuses fois ». Fasciste puis de gauche. On remarquera la ligne théologique horizontale à laquelle Scalfari associe (nolens volens ?) le pape. Tout l’entretien est de la même eau, le pape demandant à Scalfari pourquoi il devrait lever l’excommunication de Spinoza, ou canoniser Pascal… On croit rêver enfin quand le pape sollicite les lumières du journaliste sur la déontologie dans les médias. Mais le clou de l’entretien, la vraie raison pour laquelle il a convoqué Scalfari au Vatican est sa vision géopolitique de la question migratoire « Je crains, explique François, des alliances assez dangereuses entre des puissances qui ont une vision déformée du monde : Amérique et Russie, Chine et Corée du Nord, Poutine et Assad dans la guerre en Syrie. (…) Le danger concerne l’immigration. Notre problème principal (…) est celui des pauvres, des faibles, des exclus dont les immigrés font partie. (…) Certains pays qui ont peu de pauvres craignent l’invasion des migrants. Voilà pourquoi le G20 m’inquiète : il touche surtout les pays du tiers-monde. (…). Les peuples pauvres sont attirés par les continents et les pays d’ancienne richesse. Le colonialisme partit d’Europe. Il y eut des aspects positifs dans le colonialisme, mais aussi négatifs. En tout état de cause, l’Europe devint plus riche et sera donc l’objectif premier des peuples migrants. » Et le pape de conclure : « Les pays (occidentaux) redeviendront actifs s’ils acceptent une vérité : ou bien l’Europe devient une communauté fédérale, ou elle ne comptera plus pour rien dans le monde ». Et Scalfari de donner au final sa vision de l’entretien : « j’ai souvent écrit que François est un révolutionnaire. Il pense à béatifier Pascal, il pense aux pauvres et aux immigrés, il appelle de ses vœux une Europe fédérale. Nous n’avons jamais eu un pape comme celui-ci ».

    Dès le lendemain paraissait dans le quotidien Il Mattino une réponse magistrale du philosophe et ancien président du Sénat Marcello Pera, ami de longue date du pape Benoit XVI.Du socialisme au catholicisme. Magistrale, car Marcello Pera est un homme politique et un philosophe italien d’envergure. Tandis que Scalfari flirtait avec le fascisme dans les années quarante, avant de se tourner résolument vers la gauche idéologiquement la plus radicale, l’évolution politique de Marcello Pera fut bien différente. Philosophe de renommée internationale, spécialiste de la philosophie des sciences, il évolua du socialisme au catholicisme libéral. Dans les années 2000 il commence à se rapprocher du christianisme, suivant l’injonction pascalienne de vivre comme si Dieu existait. De 2001 à 2006 il fut président du Sénat, et c’est à cette période qu’il se lie d’amitié avec le cardinal Ratzinger, avec lequel il publie en 2004 un ouvrage écrit à quatre mains : Sans racines. L’Europe, le relativisme, le christianisme, l’Islam. Sénateur de centre droit de 2006 à 2013, il poursuit ses travaux apologétiques, alimentés par son activité politique. Il publie en 2008 Pourquoi nous devons nous dire chrétiens, Le libéralisme, l’Europe et l’éthique, vivant plaidoyer en faveur des racines chrétiennes de l‘Europe. Prônant un catholicisme qui se vit dans toutes les sphères de la vie sociale, il pointe les dangers d’une Europe sans mémoire, d’une société où les droits et désirs individuels deviennent la mesure de l’action politique. C’est dire si ce face-à face entre deux monstres sacrés de la vie intellectuelle italienne, à propos de la question migratoire, est crucial.Dans l’entretien d’Il Mattino, les critiques de Marcello Pera envers les prises de position politiques du pape François sont extrêmement dures. Fustigeant ses appels répétés à l’accueil inconditionnel et massif par l’Europe des immigrés, « au-delà de toute compréhension rationnelle », il demande : « quel est l’objectif de tout cela ? (…) Le pape fait cela parce qu’il déteste l’Occident, il aspire à le détruire, comme il veut détruire la tradition chrétienne, le christianisme tel qu’il s’est réalisé dans l’histoire ». Et de poursuivre : « il n’y a pas non plus de justifications évangéliques qui justifieraient ce que dit le pape. C’est un pape qui fait seulement de la politique (…). Il a une vision sud-américaine d’un justicialisme péroniste qui n’a rien à voir avec la tradition occidentale des libertés politiques ni avec sa matrice chrétienne ». Évoquant l’absolue nouveauté de ce pontificat – « Bergoglio n’est intéressé en rien par le christianisme en tant que doctrine, par l’aspect théologique » – il affirme que le pape « n’est pas préoccupé par le salut des âmes mais seulement par la sécurité et le bien-être social », provoquant une crise politique et religieuse de plus en plus incontrôlable, aux conséquences majeures. Le pape « suggère à nos Etats de se suicider, il demande à l’Europe de ne plus être elle-même ». Après cette critique politique vient le diagnostic religieux : « Un schisme caché est présent dans le monde catholique, produit avec obstination et détermination par Bergoglio, et de la part de ses collaborateurs, avec malveillance ». Le 8 juillet, le pape twittait : « Les migrants sont nos frères et sœurs qui cherchent une vie meilleure loin de la pauvreté, de la faim et de la guerre », et le 11 « L’Europe a un patrimoine idéal et spirituel unique au monde qui mérite d’être reproposé avec passion et une fraicheur renouvelée ». Que doit-on comprendre ? Que les immigrés clandestins vont faire vivre l’Europe avec une fraicheur renouvelée ? Ou que l’Europe, si elle veut revivre, doit régler les flux migratoires à ses frontières, comme le Catéchisme catholique en reconnaît le droit et le devoir à tout pays souverain ?    

    Marie d’Armagnac »

    Ref. deux monstres sacrés face au pape François

    Et si la papauté reprenait un peu de hauteur ?

    JPSC

     

  • Quand Eugenio Scalfari dit tout au sujet de son interview du pape

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    De Jean-Marie Guénois sur le Figaro.fr

    Les dessous de la vraie fausse interview du Pape

    Eugenio Scalfari, ancien directeur de La Repubblica, a finalement reconnu avoir prêté au pape François des propos que ce dernier n'a jamais tenus dans une interview pourtant publiée en Italie le 1er octobre dernier.

    L'imbroglio de la vraie fausse interview du pape François, le 1er octobre dernier, dans La Repubblica, quotidien de gauche italien, continue de faire des vagues. Le site officiel du Vatican vient de la retirer pour éviter toute confusion entre des «propos journalistiques» et «le magistère du pape». Quant à l'auteur de l'interview, Eugenio Scalfari, 89 ans, fondateur de ce journal, il a reconnu, jeudi, avoir «mis entre guillemets» des phrases qui n'ont jamais été prononcées par le pape tout en affirmant qu'il avait reporté fidèlement l'essentiel de ce que lui avait dit François dans une conversation à bâtons rompus. Et, surtout, qu'il avait reçu le feu vert, avant la publication, de l'un des deux secrétaires personnels du pape.

    Mais il apparaît désormais clairement que le rendez-vous accordé par François à ce journaliste était d'ordre personnel et qu'il n'avait jamais été prévu pour une interview en bonne et due forme. Sans note et sans enregistrement, Eugenio Scalfari a donc reconstruit une interview, comme il l'a reconnu jeudi à Rome, affirmant qu'il a toujours travaillé comme cela au long de sa brillante carrière.

    Lire la suite sur Le Figaro

  • Ce que le pape François a vraiment dit à Scalfari : texte intégral

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    Repubblica.it: il quotidiano online con tutte le notizie in tempo reale.

    Enfin la traduction complète de l’interview telle que l’a  rapportée Eugenio Scalfari lui-même ! L’accès aux sources est tout de même plus éclairant que les « compendiums » et autres « raccourcis » qui circulent, fussent-ils d’origine vaticane. JPSC

    Lo leggo dopo

    Le Pape François me dit ceci :"Les maux les plus graves qui affligent le monde aujourd'hui sont le chômage des jeunes et la solitude dans laquelle sont abandonnés les vieillards. Les personnes âgées ont besoin de soins et de compagnie ; les jeunes de travail et d'espérance, mais ils n'ont ni l'un ni l'autre et, hélas, ils ne les recherchent même plus. Ils ont été écrasés par le présent. Dites-moi : peut-on vivre écrasé par le présent ? Sans mémoire du passé et sans désir de se projeter dans l'avenir en construisant un projet, un avenir, une famille ? Peut-on continuer ainsi ? Voilà, selon moi, le problème le plus urgent auquel l'Église est confrontée."

    Votre Sainteté, lui dis-je, c'est avant tout un problème politique et économique qui concerne les États, les gouvernements, les partis, les associations syndicales.

    "Oui, vous avez raison, mais ce problème concerne aussi l'Église, je dirai même surtout l'Église car cette situation ne blesse pas seulement les corps, mais aussi les âmes. L'Église doit se sentir responsable des âmes, comme des corps."

    Votre Sainteté, vous dites que l'Église doit se sentir responsable. Dois-je en déduire que l'Église n'est pas consciente de ce problème et que vous souhaitez la sensibiliser ?

    "Dans une large mesure, cette conscience existe mais ce n'est pas encore suffisant. Je désire qu'elle soit plus forte. Ce n'est pas le seul problème auquel nous soyons confrontés, mais c'est sûrement le plus urgent et le plus dramatique"  

    La rencontre avec le Pape François a eu lieu mardi dernier chez lui, a' la résidence Santa-Marta, dans une pièce minuscule meublée d'une table et de cinq ou six chaises, avec pour tout ornement un tableau accroché au mur. L'entretien avait été précédé d'un appel téléphonique que, de ma vie, je n'oublierai jamais. Il était deux heures et demie de l'après-midi. Mon téléphone sonne et la voix de ma secrétaire, au comble de l'agitation, me dit :"J'ai le Pape en ligne, je vous le passe tout de suite."

    Je demeure sans voix tandis que celle de Sa Votre Sainteté, a' l'autre bout du fil dit :"Bonjour, je suis le Pape François."Bonjour, Votre Sainteté  -  dis-je  -  en ajoutant aussitôt : Je suis bouleversé, je ne m'attendais pas a' ce que vous m'appeliez."Pourquoi bouleversé ? Vous m'avez écrit une lettre en demandant a' faire ma connaissance. Ce désir étant réciproque, je vous appelle pour fixer un rendez-vous. Voyons mon agenda: mercredi, je suis pris, lundi aussi, seriez vous libre mardi ?". Je lui réponds : c'est parfait.

    "L'horaire n'est pas des plus pratiques, a' 15 heures, cela vous va ? Sans cela, je vous propose une autre date. "Votre Sainteté, l'heure me convient."Alors, nous sommes d'accord : mardi 24 a' 15 heures. A Santa-Marta. Il vous faudra rentrer par la porte du Saint-Office. "Je ne sais comment clore l'appel et me hasarde a' lui demander : puis-je vous donner une accolade par téléphone."Mais oui, certainement, et je fais de même, en attendant de pouvoir nous saluer ainsi personnellement. A bientôt"

    Me voici arrivé. Le Pape entre et me serre la main, nous nous asseyons. Le Pape sourit et me dit :"Certains de mes collaborateurs qui vous connaissent m'ont averti que vous allez essayer de me convertir." A ce trait d'esprit, je réponds : mes amis vous prêtent la même intention a' mon endroit.

    Il sourit et répond :"Le prosélytisme est une pompeuse absurdité, cela n'a aucun sens. Il faut savoir se connaître, s'écouter les uns les autres et faire grandir la connaissance du monde qui nous entoure. Il m'arrive qu'après une rencontre j'ai envie d'en avoir un autre car de nouvelles idées ont vu le jour et de nouveaux besoins s'imposent. C'est cela qui est important : se connaître, s'écouter, élargir le cercle des pensée. Le monde est parcouru de routes qui rapprochent et éloignent, mais l'important c'est qu'elles conduisent vers le Bien"

    Votre Sainteté, existe-t-il une vision unique du Bien ? Et qui en décide ?

    "Tout être humain possède sa propre vision du Bien, mais aussi du Mal. Notre tâche est de l'inciter a' suivre la voie tracée par ce qu'il estime être le Bien."

    Votre Sainteté, vous-même l'aviez écrit dans une lettre que vous m'avez adressée. La conscience est autonome, disiez-vous, et chacun doit obéir a' sa conscience. A mon avis, c'est l'une des paroles les plus courageuses qu'un Pape ait prononcée.

    "Et je suis prêt a' la répéter. Chacun a' sa propre conception du Bien et du Mal et chacun doit choisir et suivre le Bien et combattre le Mal selon l'idée qu'il s'en fait. Il suffirait de cela pour vivre dans un monde meilleur."

    L'Église s'emploie-t-elle à cela?

    "Oui, nos missions poursuivent ce but : repérer les besoins matériels et immatériels des personnes et chercher a' les satisfaire comme nous le pouvons. Vous savez ce qu'est l''agapé' ?".

    Oui, je le sais.

    "C'est l'amour pour les autres, tel que Notre Seigneur l'a enseigné. Ce n'est pas du prosélytisme, c'est de l'amour. L'amour pour autrui, qui est le levain du bien commun".

    Aime ton prochain comme toi-même.

    "Oui, c'est exactement cela."

    Jésus prêchait que l'agapé, l'amour pour les autres, est la seule façon d'aimer Dieu. Corrigez-moi si je me trompe. 

    "Non, c'est bien cela. Le Fils de Dieu s'est incarné pour faire pénétrer  dans l'âme des hommes le sentiment de la fraternité. Tous les frères et tous les enfants de Dieu. Abbà, ainsi qu'il appelait le Père. Je suis  la Voie, disait-il. Suivez-moi et vous trouverez le Père et vous serez tous ses enfants et il se complaira en vous. L'agapé, l'amour de chacun de nous pour tous les autres, des plus proches aux plus lointains, est justement la seule manière que Jésus nous a indiquée pour trouver la voie du salut et des Béatitudes."

    Toutefois, l'exhortation de Jésus, nous le rappelions tout a' l'heure, est que l'amour pour le prochain doit être égal  à celui que nous avons pour nous-mêmes. Par conséquent, ce que l'on a coutume d'appeler le narcissisme est reconnu comme valable, positif, au même titre que l'autre. Nous avons longuement discuté de cette question.

    "Je n'aime pas   -   dit le Pape   -  le mot narcissisme, qui indique un amour sans bornes pour soi-même qui ne convient pas parce qu'il peut produire de très graves dommages non seulement dans l'âme de celui qui en est atteint, mais aussi dans la relation avec les autres et avec la société. Le vrai problème c'est que ceux sont touchés par cette affection, qui est en quelque sorte un trouble mental, sont généralement les personnes qui détiennent le plus de pouvoir. Les dirigeants sont bien souvent des Narcisses."
       
    Maints dirigeants au sein de l'Église l'ont été eux aussi.

    "Vous savez ce que j'en pense ? Les dirigeants de l'Église ont été souvent des narcisses en proie aux flatteries et aux coups d'aiguillons de leurs propres courtisans. L'esprit de cour est la lèpre de la papauté."

    La lèpre de la papauté, c'est bien l'expression utilisée par vous. Mais quelle est cette cour ? Faites-vous allusion à la Curie ? ai-je demandé.

    "Non, il peut y avoir parfois des courtisans dans la Curie, mais la Curie dans son ensemble, ce n'est pas cela. Elle correspond a' ce que l'on a coutume d'appeler l'intendance dans une armée. En tant que telle, elle gère les services dont le  Saint-Siège a besoin, mais elle a un défaut : elle est 'vaticano-centrée'. Elle voit et suit les intérêts du Vatican, qui sont encore en majorité des intérêts temporels. Cette vision axée sur le Vatican néglige le monde qui nous entoure. Je ne partage pas cette vision et je ferai tout ce qui est en mon pouvoir pour la modifier. L'Église est ou doit redevenir une communauté du peuple de Dieu et les religieux, les curés, les Évêques ayant charge d'âmes sont au service du peuple de Dieu. L'Église c'est cela. Il ne faut pas confondre l'appellation avec celle du Saint-Siège, dont la fonction est importante, certes, mais qui est au service de l'Église. Je n'aurais pu avoir pleinement foi en Dieu et en son Fils si je n'avais pas été formé au sein de l'Église et j'ai eu la chance de me trouver, en Argentine, au sein d'une communauté sans laquelle je n'aurais jamais pris conscience de ce que j'étais et de ma foi."

    Votre vocation est-elle née en vous lorsque vous étiez jeune ?

    "Non, pas très jeune. Ma famille me destinait a' un métier, pour travailler et gagner un peu d'argent. J'allai à l'Université. J'eus à cette époque une enseignante pour laquelle j'éprouvai du respect et de l'amitié. C'était une fervente communiste. Souvent, elle me lisait ou me donnait a' lire des textes du Parti communiste. C'est ainsi que je me familiarisai également avec cette conception très matérialiste. Je me souviens qu'elle me procura aussi le communiqué des communistes américains en faveur des époux Rosenberg, après leur condamnation à mort. La femme dont je viens de vous parler a été arrêtée, torturée et assassinée par la dictature qui était alors au pouvoir en Argentine."

    Le communisme vous avait-il séduit ?

    "Son matérialisme n'eut pas prise sur moi. Mais l'avoir abordé par l'intermédiaire d'une personne courageuse et honnête m'a été utile et j'ai compris certaines choses, notamment une dimension sociale que je retrouvai par ailleurs dans la doctrine sociale de l'Église."

    La théologie de la libération, qui a été excommuniée par le Pape Wojtyla, était assez répandue en Amérique latine.

    "Oui, bon nombre de ses représentants étaient des Argentins."

    Estimez-vous que le Pape ait eu raison de les combattre ?

    "Il est certain qu'ils prolongeaient la théologie qu'ils professaient dans la sphère politique, mais nombre d'entre eux étaient des croyants qui avaient une haute idée de la notion d'humanité."

    Votre Sainteté ; me permettez-vous de vous dire a' mon tour quelque chose de ma formation culturelle ? J'ai été élevé par une mère très catholique. A 12 ans, j'ai même gagné un concours de catéchisme entre toutes les paroisses de Rome et a' cette occasion le Vicariat m'a remis un prix. Je communiais chaque premier vendredi du mois, bref, j'étais croyant et pratiquant. Mais tout a changé pendant mes études secondaires. Au lycée, je lus entre autres textes de philosophie qui étaient au programme, le "Discours de la méthode" de Descartes et je fus frappé par la phrase que nous connaissons bien "Je pense, donc je suis." Le"je"devint ainsi la base de l'existence humaine, le siège autonome de la pensée.

     "Descartes n'a cependant jamais renié la foi du Dieu transcendant"

    C'est vrai, mais il avait jeté le fondement d'une vision complètement différente. J'empruntai ce parcours et, corroboré par d'autres lectures, parvins dans les contrées où je me trouve aujourd'hui.

    "Cependant, si j'ai bien compris, vous êtes non-croyant mais pas anticlérical. Ce sont deux choses bien différentes."

    C'est vrai, je ne suis pas anticlérical, mais je le deviens quand je rencontre un tenant du cléricalisme.

    Il me sourit et me répond :"Cela m'arrive aussi, lorsque j'en ai un devant moi et je deviens soudain anticlérical. Le cléricalisme ne devrait rien avoir a' faire avec le christianisme. Saint Paul fut le premier à s'adresser aux Gentils, aux païens, aux croyants d'autres religions ; il fut le premier a' nous enseigner cela."


    Puis-je vous demander, Votre Sainteté, quels sont les saints que vous ressentez comme les plus proches de votre âme, ceux sur lesquels s'est formée votre expérience religieuse ?

    "Saint-Paul est celui qui a précisé les fondements de notre religion et de notre crédo. Sans lui, nous ne saurions être des chrétiens conscients. Il a traduit la prédication du Christ en une structure doctrinaire qui, même après les mises a' jour successives des penseurs, théologiens et pasteurs d'âmes, a résisté et résiste toujours, depuis deux mille ans. Et puis Augustin, Benoît et Thomas et Ignace. Et naturellement François. AI-je besoin d'expliquer pourquoi ?."  

    François   -  qu'il me soit permis d'appeler ainsi le Pape puisque lui-même semble nous y inviter, par sa façon de parler, de sourire, par ses exclamations de surprise ou d'assentiment  -  me regarde comme pour m'encourager à poser enfin des questions plus audacieuses et embarrassantes pour celui qui dirige l'Église. De sorte que je l'interroge :  

    De Paul, vous avez expliqué l'importance et le rôle, mais de tous les saints que vous avez nommés, j'aimerais connaître celui qui est le plus proche de votre âme ?

    "Vous me demandez un classement mais les classements sont faciles a' faire si l'on parle de sport ou d'affaires similaires. Je pourrais tout au plus vous énumérer les meilleurs footballers argentins. Mais pour les saints...."

    Vous connaissez le proverbe "Scherza coi fanti ma lascia stare i santi" qui invite à ne pas plaisanter sur des choses sérieuses ? 

    "Justement. Je ne veux toutefois éluder votre question, car vous ne m'avez pas demandé un classement sur leur importance culturelle et religieuse, mais sur la proximité avec mon âme. Alors, je dis : Augustin et François."

    Pas Ignace, qui est le fondateur de l'Ordre auquel vous appartenez?

    "Ignace, pour des raisons évidentes, est celui que je connais le mieux. Il a fondé notre Ordre. Je vous rappelle que Carlo Maria Martini, que vous et moi apprécions beaucoup,  en provenait lui aussi. Les jésuites ont été et demeurent le levain  -  pas le seul, mais sans doute le plus efficace  -  de la catholicité : culture, enseignement, témoignage missionnaire, fidélité au Saint-Pontife. Mais Ignace, fondateur de la Compagnie de Jésus, était aussi un réformateur et un mystique. Surtout un mystique."

    Et  vous pensez que les mystiques ont joué un rôle important pour l'Église ?

    "Un rôle fondamental. Une religion sans mystiques est une philosophie."

    Avez-vous une vocation mystique ?

    "Quel est votre avis sur la question."

    Il me semble que non.

    "Et vous avez probablement raison. J'adore les mystiques ; Saint François lui-même, dans bien des aspects de sa vie, en fut un mais je ne crois pas avoir personnellement cette vocation. Encore faut-il s'entendre sur la signification profonde du terme. Le mystique réussit a' se dévêtir du faire, des faits, des objectifs et même de la pastorale missionnaire pour s'élever, jusqu'à atteindre la communion avec les Béatitudes. De brefs moments qui cependant remplissent toute une vie."

    Cela vous est-il jamais arrivé ?

    "Rarement. Par exemple, quand le Conclave m'a élu Pape. Avant d'accepter, je demandai la permission de me retirer quelques minutes dans la pièce adjacente a' celle du balcon qui donne sur la place. Ma tête était totalement vide et j'étais envahi par l'angoisse. Pour la dissiper et me détendre, je fermai les yeux et je demeurai sans aucune pensée, pas même celle de refuser la charge, comme le permettrait la procédure liturgique. A un certain moment, une grande lumière m'envahit, qui dura un bref instant, mais me parut infiniment long. Puis la lumière disparut et je me levai d'un bond pour me diriger vers la pièce où m'attendaient les cardinaux et la table sur laquelle rep

  • Mais pourquoi le pape François s’obstine-t-il à téléphoner à Scalfari ?

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    Lu sur le blog de Jeanne Smits :

    « Au lendemain de la publication par La Repubblica de la « bombe » sur les divorcés, qui finiraient « tous » par accéder à la communion s’ils le désirent aux dires du pape François, le P. Federico Lombardi a déclaré à Edward Pentin duNew Catholic Register que l’article d’Eugenio Scalfari ne reflète pas la pensée du pape. Le démenti est donc arrivé, Scalfari est dénoncé comme « non fiable », et… il faudrait qu’on tourne la page.

    « Les informations selon lequelles le pape François a dit au journaliste italien Eugenio Scalfari, que les divorcés remariés “seront admis” aux sacrements par le biais du confessionnal ne sont “d’aucune manière fiables” et “ne peuvent être considérées comme reflétant la manière de penser du pape”, dit le porte-parole du Vatican, le P. Federico Lombardi », écrit Edward Pentin.

    Le P. Lombardi a déclaré à Edward Pentin : « Ainsi que cela s’est déjà produit par le passé, Scalfari rapporte entre guillemets ce que le pape lui a supposément dit, mais souvent cela ne correspond pas à la réalité, puisqu’il n’enregistre ni ne transcrit les paroles exactes du pape, ainsi qu’il l’a lui-même souvent déclaré. Ainsi il est clair que ce qu’il rapporte dans le dernier article sur les divorcés remariés n’est d’aucune manière fiable et ne peut être considéré comme la pensée du pape. »

    Le P. Lombardi a précisé qu’il ne publierait pas de communiqué à ce sujet puisque ceux qui ont suivi les événements antérieurs et qui travaillent en Italie connaissent la manière d’écrire de Scalfari et sont bien au courant de ces choses. »

    Ce démenti appelle plusieurs commentaires, et des questions qu'Edward Pentin soulève rapidement en fin d'article. Ce n’est pas le premier : une précédente interview publiée par Scalfari en 2013, prêtant au pape des propos hétérodoxes, notamment sur la conscience, a été dans un premier temps publié sur le site du Vatican, puis enlevé. Malgré cela, Scalfari continue d’être reçu par le pape : notamment en juillet 2014, avec la publication d’un nouvel entretien à la clef – celle où le pape est supposé avoir suggéré qu’on puisse en finir avec le célibat sacerdotal. Nouveau scandale. Nouveau démenti de Lombardi. Mais il semblerait qu’un recueil d’entretiens de divers journalistesavec le pape François publié en 2014 contienne ces entretiens « controversés » avec Scalfari (je n’ai pas pu vérifier par moi-même) et le site du Vatican a laissé en ligne le PDF de l’Osservatore Romano qui contient celui de 2013, republié délibérément après sa sortie dansLa Repubblica (c’est par là). Alors ?

    Et voilà que le pape continue. Il décroche son téléphone pour discuter avec un journaliste dénigré par la Salle de presse du Vatican et aborder avec lui les questions les plus sensibles du moment. Il sait que ses propos seront utilisés. Déformés ? Il le sait aussi : Scalfari saura soit les exploiter, soit mentir, sans que l’on sache très bien où commence et où s’arrête la manipulation […] » 

    Lire les deux articles ici :

    Le pape François veut la communion pour tous les divorcés : la nouvelle bombe Scalfari 

    Et voilà le démenti ! Le P. Lombardi estime que Scalfari n’a pas rapporté les propos du pape François sur les divorcés de manière « fiable » 

    Mais pourquoi le pape François s’obstine-t-il à téléphoner à Scalfari ?

    JPSC

  • Selon Eugenio Scalfari, le pape François ne croit pas à l’immortalité de toutes les âmes…

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    La question n’est pas d’accorder foi à la relation que le fondateur du grand journal italien la « Repubblica » fait de ses entrevues avec le pape actuel mais de savoir pourquoi ce dernier s’obstine à lui accorder des interviews.

    Du vaticaniste Sandro Magister traduit par notre confrère « Diakonos.be » on peut lire cette note :

    « Dans le grand quotidien « la Repubblica » fondé par Eugenio Scalfari, autorité incontestée de la pensée laïque italienne, ce dernier est revenu le 9 octobre dernier sur ce qu’il considère comme une « révolution » de ce pontificat, recueilli de la bouche même de François au cours de l’un des fréquents entretiens qu’il a eu avec lui :

    « Le Pape François a aboli les lieux où les âmes sont censées aller après la mort : enfer, purgatoire et paradis.  La thèse qu’il soutient, c’est que les âmes dominées par le mal et impénitentes cessent d’exister tandis que celles qui ont été rachetées du mal seront admises dans la béatitude de la contemplation de Dieu ».

    Et d’ajouter immédiatement :

    « Le jugement universel qui se trouve dans la tradition de l’Eglise devient donc privé de sens.  Il se réduit à un simple prétexte qui a donné lieu à de splendides tableaux dans l’histoire de l’art.  Rien de plus ».

    On peut sérieusement douter que le pape François veuille liquider les « choses dernières » comme le décrit Scalfari.

    Il y a cependant dans sa prédication des éléments qui tendent effectivement à éclipser le Jugement final et les destinées opposées des bienheureux et des damnés.

    *

    Mercredi 11 octobre, au cours de l’audience générale place Saint-Pierre, François a déclaré qu’il ne fallait pas craindre un tel jugement parce qu’ « au terme de notre histoire il y a Jésus miséricordieux.  Tout sera sauvé.  Tout. ».

    Ce dernier mot, « tout », était imprimé en caractères gras dans le texte distribué aux journalistes accrédités auprès de la salle de presse du Vatican.

    *

    Dans une autre audience générale remontant à il y a quelques mois, celle du mercredi 23 août, François a dépeint une image totalement et uniquement consolatrice de la fin de l’histoire, évoquant une « demeure immense, où Dieu accueillera tous les hommes pour habiter définitivement avec eux ».

    Une image qui n’est pas de lui mais qui est tirée du chapitre 21 de l’Apocalypse mais dont François s’est bien gardé de citer les déclarations du Christ qui suivent ce passage :

    « Tel sera l’héritage du vainqueur ; je serai son Dieu, et lui sera mon fils.  Quant aux lâches, perfides, êtres abominables, meurtriers, débauchés, sorciers, idolâtres et tous les menteurs, la part qui leur revient, c’est l’étang embrasé de feu et de soufre, qui est la seconde mort. »

     

    *

    Et à nouveau, en commentant la parabole de l’invité aux noces (Mt 22, 1-14) lu ce jour-là dans toutes les messes, au cours de l’Angelus du dimanche 15 octobre, François a soigneusement évité d’en citer les passages les plus inquiétants.

    Notamment celui où « Le roi se mit en colère, il envoya ses troupes, fit périr les meurtriers et incendia leur ville ».

    Mais aussi le passage dans lequel, voyant « un homme qui portait pas le vêtement de noce », le roi ordonna à ses serviteurs : « Jetez-le, pieds et poings liés, dans les ténèbres du dehors ; là, il y aura des pleurs et des grincements de dents. »

    *

    Le dimanche précédent, le 8 octobre, c’est une autre parabole, celle des vignerons homicides (Mt 21, 33-43), qui avait subi le même traitement sélectif.

    Au cours de l’Angelus, dans son commentaire de la parabole, le pape a omis de mentionner le sort réservé par le Seigneur de la vigne aux vignerons qui ont tué ses serviteurs avant de tuer son fils : « Ces misérables, il les fera mourir misérablement ».  Tout comme il a évité de citer les mots de conclusion de Jésus, qui se désigne lui-même comme « la pierre d’angle » : « tout homme qui tombera sur cette pierre s’y brisera ; celui sur qui elle tombera, elle le réduira en poussière ».

    Le Pape François a préféré défendre avec insistance Dieu de l’accusation qu’il puisse être vindicatif, allant presque jusqu’à tempérer les excès de « justice » décrits dans la parabole :

    « Telle est la grande nouveauté du christianisme: un Dieu qui, même déçu par nos erreurs et par nos péchés, ne manque pas à sa parole, ne se ferme pas, et surtout ne se venge pas!  Frères et sœurs, Dieu ne se venge pas! Dieu aime, il ne se venge pas, il nous attend pour nous pardonner, nous embrasser. »

    *

    Dans son homélie pour la fête de la Pentecôte, le 4 juin dernier, François a pointé du doigt, comme à son habitude, « ceux qui jugent ».  et, citant les paroles de Jésus ressuscité à ses apôtres et implicitement à leurs successeurs dans l’Eglise (Jn 20, 22-23), il en a volontairement tronqué la moitié :

    « Recevez l’Esprit Saint.  À qui vous remettrez ses péchés, ils seront remis ».

    Passant sous silence la suite du texte :

    « à qui vous maintiendrez ses péchés, ils seront maintenus. »

    Le fait que ce n’est pas la première fois que François agit de la sorte prouve que cette censure est bel et bien intentionnelle.  En effet, il avait tronqué de la même manière ces paroles de Jésus le 23 avril précédent, au cours du Regina Cæli du premier dimanche après Pâques.

    *

    Le 12 mai dernier, en visite à Fátima, François avait montré vouloir enlever à Jésus cette réputation de juge inflexible, à la fin des temps.  Et pour ce faire, il a fait cette mise en garde illustrée par cette fausse image de Marie :

    « Une Marie esquissée par des sensibilités subjectives qui la voit tenir ferme le bras justicier de Dieu prêt à punir : une Marie meilleure que le Christ, vu comme un juge impitoyable ; plus miséricordieuse que l’Agneau immolé pour nous. »

    *

    Il faut ajouter que la liberté avec laquelle François taille et raccommode les passages de l’Ecriture sainte ne concernent pas que le jugement dernier.  Silence radio total, par exemple, sur la condamnation que Jésus fait de l’adultère (Mt 19, 2-11 et passages correspondants).

    Coïncidence étonnante, cette condamnation figurait pourtant dans le passage de l’Evangile qu’on lisait dans les églises du monde entier précisément le dimanche d’ouverture de la seconde session du synode des évêques sur la famille, le 4 octobre 2015.  Mais ce jour-là, le Pape François n’y a pas fait la moindre allusion ni dans son homélie ni pendant l’Angelus.

    Tout comme il n’y a fait aucune allusion à l’Angelus du dimanche 12 février 2017, quand cette condamnation a de nouveau résonné dans toutes les églises.

    Et ce n’est pas tout.  Les paroles de Jésus contre l’adultère ne figurent nulle part dans les deux cent pages de l’exhortation post-synodale Amoris laetitia.

    Tout comme n’apparaissent pas non plus les terribles paroles de condamnation de l’homosexualité rédigées par l’apôtre Paul dans le premier chapitre de la Lettre aux Romains.

    Un premier chapitre lui aussi lu – autre coïncidence – aux messes de semaine de la seconde semaine du synode de 2015 (tout comme aux messes d’il y a quelques semaines).  A vrai dire, sans que ces paroles ne figurent au missel mais en tout cas sans que le pape ou d’autres ne les citent jamais pendant qu’on discutait au synode du changement des paradigmes de jugement sur l’homosexualité :

    « C’est pourquoi Dieu les a livrés à des passions déshonorantes. Chez eux, les femmes ont échangé les rapports naturels pour des rapports contre nature.  De même, les hommes ont abandonné les rapports naturels avec les femmes pour brûler de désir les uns pour les autres ; les hommes font avec les hommes des choses infâmes, et ils reçoivent en retour dans leur propre personne le salaire dû à leur égarement.  Et comme ils n’ont pas jugé bon de garder la vraie connaissance de Dieu, Dieu les a livrés à une façon de penser dépourvue de jugement. Ils font ce qui est inconvenant ; ils sont remplis de toutes sortes d’injustice, de perversité, de soif de posséder, de méchanceté, ne respirant que jalousie, meurtre, rivalité, ruse, dépravation ; ils sont détracteurs, médisants, ennemis de Dieu, insolents, orgueilleux, fanfarons, ingénieux à faire le mal, révoltés contre leurs parents ; ils sont sans intelligence, sans loyauté, sans affection, sans pitié.  Ils savent bien que, d’après le juste décret de Dieu, ceux qui font de telles choses méritent la mort ; et eux, non seulement ils les font, mais encore ils approuvent ceux qui les font. » (Rm 1, 26-32).

    *

    En outre, le Pape François prend parfois également la liberté de réécrire à sa manière les paroles de l’Ecriture sainte.

    Par exemple, pendant l’homélie matinale à Sainte-Marthe le 4 septembre 2014, à un certain moment, le pape met textuellement les paroles suivantes dans la bouche de Saint Paul : « qui scandalisent » : « Je ne me vante que de mes péchés ».  Avant de conclure en invitant également les fidèles présents à « se vanter » de leurs propres péchés, puisqu’ils sont pardonnés par la croix de Jésus.

    Mais on aura du mal à trouver une telle expression dans aucune des lettres de Saint Paul.  Par contre, l’apôtre dit de lui-même : « S’il faut se vanter, je me vanterai de ce qui fait ma faiblesse. » (2 Co 11, 30), après avoir énuméré toutes les épreuves de sa vie, des incarcérations aux coups de fouet en passant par les naufrages.

    On encore : « D’un tel homme, je peux me vanter, mais pour moi-même, je ne me vanterai que de mes faiblesses. » (2 Co 12, 5).  Et aussi « Mais il m’a déclaré : ‘Ma grâce te suffit, car ma puissance donne toute sa mesure dans la faiblesse.’  C’est donc très volontiers que je mettrai plutôt ma fierté dans mes faiblesses, afin que la puissance du Christ fasse en moi sa demeure. » (2 Co 12, 9), en faisant encore une fois référence aux outrages, aux persécutions et aux angoisses qu’il avait soufferts.

    *

    En revenant au jugement final, même le Pape Benoît XVI reconnaissait qu’ « à l’époque moderne, la préoccupation du Jugement final s’estompe ».

    Mais dans l’encyclique « Spe salvi », entièrement écrite de sa main, il réaffirmait avec force que le Jugement final est « l’image décisive de l’espérance », une image qui « appelle à notre responsabilité » parce que « la grâce n’exclut pas la justice ».  Au contraire, « la question de la justice constitue l’argument essentiel, en tout cas l’argument le plus fort, en faveur de la foi dans la vie éternelle » du fait « qu’il est impossible que l’injustice de l’histoire soit la parole ultime, la nécessité du retour du Christ et de la vie nouvelle devient totalement convaincante ».

    Et encore:

    « La grâce ne change pas le tort en droit. Ce n’est pas une éponge qui efface tout, de sorte que tout ce qui s’est fait sur la terre finisse par avoir toujours la même valeur. Par exemple, dans son roman ‘Les frères Karamazov’, Dostoïevski a protesté avec raison contre une telle typologie du ciel et de la grâce.  À la fin, au banquet éternel, les méchants ne siégeront pas indistinctement à table à côté des victimes, comme si rien ne s’était passé. »

    Un article de Sandro Magister, vaticaniste à L’Espresso. »

    Ref. De la fin du monde. Les « choses dernières » selon François

    Les évangiles sont extrêmement clairs sur la réalité du jugement et de la damnation possible. Pour le reste, méditant sur l’essence même de la révélation, à savoir que Dieu est amour, Benoît XVI dans l’encyclique « Spe Salvi » nous invite à méditer aussi ces lignes écrites de sa propre main :  

    « […] Il peut y avoir des personnes qui ont détruit totalement en elles le désir de la vérité et la disponibilité à l'amour. Des personnes en qui tout est devenu mensonge; des personnes qui ont vécu pour la haine et qui en elles-mêmes ont piétiné l'amour. C'est une perspective terrible, mais certains personnages de notre histoire laissent entrevoir de façon effroyable des profils de ce genre. Dans de semblables individus, il n'y aurait plus rien de remédiable et la destruction du bien serait irrévocable: c'est cela qu'on indique par le mot « enfer ». D'autre part, il peut y avoir des personnes très pures, qui se sont laissées entièrement pénétrer par Dieu et qui, par conséquent, sont totalement ouvertes au prochain – personnes dont la communion avec Dieu oriente dès maintenant l'être tout entier et dont le fait d'aller vers Dieu conduit seulement à l'accomplissement de ce qu'elles sont désormais.

    Selon nos expériences, cependant, ni un cas ni l'autre ne sont la normalité dans l'existence humaine. Chez la plupart des hommes – comme nous pouvons le penser – demeure présente au plus profond de leur être une ultime ouverture intérieure pour la vérité, pour l'amour, pour Dieu. Mais, dans les choix concrets de vie, elle est recouverte depuis toujours de nouveaux compromis avec le mal – beaucoup de saleté recouvre la pureté, dont cependant la soif demeure et qui, malgré cela, émerge toujours de nouveau de toute la bassesse et demeure présente dans l'âme. Qu'advient-il de tels individus lorsqu'ils comparaissent devant le juge? Toutes les choses sales qu'ils ont accumulées dans leur vie deviendront-elles d'un coup insignifiantes ? Ou qu'arrivera-t-il d'autre? […]

    « Certains théologiens récents sont de l'avis que le feu qui brûle et en même temps sauve est le Christ lui-même, le Juge et Sauveur. La rencontre avec Lui est l'acte décisif du Jugement. Devant son regard s'évanouit toute fausseté. C'est la rencontre avec Lui qui, en nous brûlant, nous transforme et nous libère pour nous faire devenir vraiment nous-mêmes. Les choses édifiées durant la vie peuvent alors se révéler paille sèche, vantardise vide et s'écrouler. Mais dans la souffrance de cette rencontre, où l'impur et le malsain de notre être nous apparaissent évidents, se trouve le salut. Le regard du Christ, le battement de son cœur nous guérissent grâce à une transformation assurément douloureuse, comme « par le feu ». Cependant, c'est une heureuse souffrance, dans laquelle le saint pouvoir de son amour nous pénètre comme une flamme, nous permettant à la fin d'être totalement nous-mêmes et par là totalement de Dieu. Ainsi se rend évidente aussi la compénétration de la justice et de la grâce: notre façon de vivre n'est pas insignifiante, mais notre saleté ne nous tache pas éternellement, si du moins nous sommes demeurés tendus vers le Christ, vers la vérité et vers l'amour. En fin de compte, cette saleté a déjà été brûlée dans la Passion du Christ. Au moment du Jugement, nous expérimentons et nous accueillons cette domination de son amour sur tout le mal dans le monde et en nous. La souffrance de l'amour devient notre salut et notre joie. Il est clair que la « durée » de cette brûlure qui transforme, nous ne pouvons la calculer avec les mesures chronométriques de ce monde. Le « moment » transformant de cette rencontre échappe au chronométrage terrestre – c'est le temps du cœur, le temps

  • Le pape n’a jamais dit ce qu’a écrit le Dr Scalfari...

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    D'Anita Bourdin sur zenit.org :

    Fake news italiennes : le Vatican rétablit la vérité

    Les risques du dialogue et de la rencontre

    Eugenio Scalfari, 95 ans, interprète à sa façon les paroles du pape François et le Vatican désavoue le journaliste italien régulièrement dans les communiqués des directeurs de la salle de presse du Saint-Siège successifs: le p. Federico Lombardi, Greg Burke, et, le 9 octobre 2019, Matteo Bruni.

    Le préfet du Dicastère romain pour la communication, Paolo Ruffini, s’est senti le devoir de réaffirmer lui aussi devant la presse internationale présente au synode, jeudi, 10 octobre, en italien, que « le pape n’a jamais dit ce qu’a écrit le Dr Scalfari»: ce n’est pas un « compte rendu fidèle » , même lors que Scalfari met ces propos sur les lèvres du pape, « entre guillemets », que ce soit des propos sur « l’Eglise » ou sur « Jésus, vrai Dieu et vrai homme ». Nous l’avons “twitté live” lors du point presse quotidien pour le synode.

    Autrement dit, une « fake news » n’est pas moins « fake » si elle est reprise des dizaines ou des centaines de fois en ligne.

    En réponse aux questions des journalistes, le directeur du bureau de presse du Saint-Siège, Matteo Bruni, a déclaré en italien ce qui suit, après la publication de La Repubblica du 9 octobre: « Comme cela a déjà été dit à d’autres occasions, les paroles que le Dr. Eugenio Scalfari attribue au Saint-Père, entre guillemets, à l’occasion de ses entretiens avec lui, ne peuvent être considérés comme un compte rendu fidèle de ce qui a été réellement dit, mais elles représentent plutôt une interprétation personnelle et libre de ce qu’il a entendu, comme cela est évident d’après ce qu’il a écrit aujourd’hui quant à la divinité de Jésus-Christ. »

    Certains s’étonneront de ce que le pape François continue de recevoir Eugenio Scalfari, on pourrait aussi s’étonner que Scalfari continue à vouloir rencontrer le pape. Et c’est probablement, dans la ligne de miséricorde et du dialogue qui sont la marque de tout le pontificat, que le pape ne renonce pas à poursuivre ces échanges avec quelqu’un qui n’a pas les mêmes options que lui et qu’il ne renonce pas annoncer le Christ à un vieil ami qui se dit agnostique, et qui est son aîné de plus de 12 ans: né le 6 avril 1924 à Civitavecchia, il a fêté cette année ses 95 printemps.

    Le Vatican met cette fois en garde deux fois plutôt qu’une contre la tentation de prendre les paroles de Scalfari pour parole d’Evangile.

    Ancien député radical socialiste, fondateur en 1976 du quotidien italien La Repubblica, il est aussi un co-fondateur, en 1955, du Parti Radical italien, « anticlérical ».

    Mais ce n’est pas une exception que le dialogue des papes avec les non-croyants: Benoît XVI a lui-même voulu qu’on ajoute aux rencontres interreligieuses d’Assise avec les autres religions pour la paix – initiées par saint Jean-Paul II -, un dialogue avec les non-croyants pour la paix, y invitant des intellectuels français. Le pape émérite est lui-même un modèle de capacité de dialogue et de rencontre avec qui – notamment des théologiens – ne pensent pas comme lui.

    On se souviendra aussi du dialogue du nonce apostolique à Paris, Angelo Roncalli – futur saint Jean XXIII que nous fêtons ce 11 octobre -, avec des politiciens anticléricaux de France, n’hésitant pas à plaisanter avec l’un d’eux en disant quelque chose comme: « Nous n’avons pas la même paroisse, mais nous avons le même ‘arrondissement’ ». Une allusion non pas à leur adresse dans Paris, mais à leur … embonpoint.

    Ne pas avoir « la même paroisse » n’a jamais empêché un chrétien de dialoguer – à temps et à contretemps dit saint Paul – avec qui ne pense pas comme lui… c’est même un devoir que lui impose son baptême que de partager la Bonne Nouvelle.

    Cette fois, la double intervention de la communication du Vatican lance un signal à des lecteurs trop crédules.

    Scalfari a du mal à comprendre, l’intelligence regimbe face au mystère impensable d’un Dieu qui se fait petit enfant et demeure au milieu de son peuple dans l’Eucharistie.

    Il s’agit donc de ne pas avaler cul sec les « fake news », même si elles viennent d’un interlocuteur que le pape François continue d’entourer d’égards et d’amitié, montrant ainsi le chemin d’un dialogue délicat, risqué, mais persévérant.

  • Jésus de Nazareth serait-il un homme et seulement un homme ? Qu'a dit le pape à Eugenio Scalfari ?

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    De Kath.net :

    Jésus ne serait pas Dieu?

    Une nouvelle "interview" du pape François avec l'athée Eugenio Scalfari a été publiée dans la Repubblica - Encore une fois, le département des médias du Vatican a dû nier...

    Vatican (kath.net)

    Au Vatican, la nouvelle "interview du pape" du pape François accordée au journaliste de gauche Eugenio Scalfari fait trembler les responsables du département des médias au Vatican. Après avoir rendu une nouvelle visite au pape François, Scalfari a publié une prétendue "interview" avec François dans le quotidien italien La Repubblica, affirmant que François aurait dit que Jésus de Nazareth était un être humain, mais pas Dieu. Une affirmation qui - clairement - serait naturellement opposée à l'enseignement de l'Église.

    Quelques heures seulement après la publication, le service de presse du Vatican a dû envoyer une déclaration indiquant que les citations que Scalfari avait mises dans la bouche du pape ne pouvaient pas être considérées comme un "rapport crédible" de ce que François a réellement dit. Le reportage du journaliste serait constitué beaucoup plus par "une interprétation personnelle et libre" de ce qu'il a entendu. Scalfari, athée déclaré, a été reçu à plusieurs reprises par François. Avec une certaine régularité, des "interviews" dans La Repubblica sont parues qui devaient peu après être démenties par le Vatican avec la même régularité. Cependant, il est difficile de savoir si Scalfari a vraiment été reçu par François cette fois-ci ou si "l'interview" n'a pas été le fruit d'une rencontre antérieure.

    Scalfari est le fondateur de "La Repubblica", il a provoqué à plusieurs reprises des scandales à grande échelle avec ses "interviews" du pape. En 2013, il avait publié un "Entretien" avec le pape François, dont il a cité "littéralement" les propos. Cependant, il a reconnu par la suite que, même s'il avait déjà 89 ans, il n'avait pris aucune note, mais avait cité de mémoire ces propos échangés pendant près d'une heure et demie.

    L'interview, qui avait même été publiée sur la page d'accueil du Vatican, y a été supprimée. Scalfari a maintenant 95 ans.

    Lire le commentaire de Riccardo Cascioli sur la Nuova Bussola Quotidiana (trad. de "Benoît et moi")

  • Vatican : quand la communication trébuche

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    Le moins qu'on puisse dire, c'est que les interviews accordées à Scalfari provoquent une confusion dont on aurait pu faire l'économie. Est-il vraiment indispensable que la communication, au sommet de l'Eglise, se décline au travers d'interviews accordées à des journalistes? Surtout lorsqu'il s'agit de remettre le couvert avec quelqu'un qui avait déjà été épinglé en raison de son sens assez approximatif de la rigueur journalistique... Sur son blog "Le Suisse Rom@in", l'abbé Rimaz insiste sur le fait :

    Scalfari de la Repubblica avec le Pape François: ces interviews qui créent la confusion

    Enième tentative d'explication sur ce second entretien du Pape avec Scalfari de la Repubblica. 

    Une chose est certaine, la confusion est belle et bien présente. Pour un communicateur comme notre Pape, c'est assez dommageable. 

    De source romaine, il y avait un accord formel non écrit entre le Pape et Scalfari: entretien privé, sans publication, et qui n'a pas été respecté. Le Pape n'a pas revu la copie et ses paroles, bien que pas totalement fausses, ne sont pas précises du tout. 

    Quant à l'aimable réaction du Père Lombardi, elle tient certainement à la bonté même du Pape qui n'a pas voulu trop froisser son ami. 

    Lien

    Sur le site "Benoît-et-moi", les analyses et commentaires vont bon train, non sans une certaine sévérité... :
  • D'Eugène et de François : lequel était le pape ?

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    Sur Vatican News, on apprend que le Pape François est "affecté par le décès d’un grand ami journaliste"; "Le Saint-Père a exprimé jeudi 14 juillet sa douleur, suite au décès à Rome du journaliste italien Eugenio Scalfari, a rapporté la direction du Bureau de presse du Vatican. Fondateur et directeur pendant 20 ans du journal La Repubblica, cet homme de médias était un ami du Pape François."

    Il a souvent été question, sur belgicatho, de ce journaliste influent.

    Stefano Fontana, sur la Nuova Bussola Quotidiana, pose cette étrange question :

    Eugène et François : lequel était le pape ?

    16-07-2022

    Eugenio Scalfari a été le pontife grand public auquel tout le monde a fini par s'aligner, y compris le monde catholique : d'abord, malgré Jean-Paul II et Benoît XVI, puis avec la collaboration de François. Le pape pensait dialoguer avec un laïc, sans se rendre compte que c'était ce dernier qui lui mettait sa doctrine dans la bouche.

    Eugenio Scalfari, décédé il y a deux jours, n'était pas seulement un journaliste. Il était bien plus. C'était un Pape. Son journal - La Repubblica - est devenue le nouvel évangile qu'il inspire, qu'il guide, et dont il est l'interprète officiel et le garant de la doctrine. 'La Repubblica' était la référence du radicalisme bourgeois irréligieux de la post-modernité italienne. Dès le début, il s'est imposé comme un quotidien militant, religieux dans sa laïcité dogmatique, en avance sur le 'Manifesto' ou 'L'Unità', parce qu'il était complètement post-idéologique. Scalfari et Repubblica ont confirmé et développé les instances du modernisme nihiliste de la modernité italienne, ont semé l'ère des " nouveaux droits " et ont exercé un pouvoir idéologique d'interdiction, d'excommunication et d'extradition contre les intellectuels qui ne s'alignaient pas sur l'autoritarisme du nouveau.

    Scalfari était le pape de l'anti-Église, rigide dans ses hypothèses, pas du tout tolérant avec les dissidents, inquisitorial, actif dans la proscription de ceux qui ne s'alignaient pas. Repubblica était le nouvel évangile lu par les prêtres et les religieuses post-conciliaires, auquel les séminaires de toute l'Italie se sont abonnés, puis copié par 'Avvenire' (le journal "catholique" italien), qui a fini par devenir lui aussi une petite Repubblica. Aujourd'hui, tous les journaux italiens, à l'exception de quelques réprouvés vitupérés par le système de pouvoir médiatique, sont la Repubblica. La Repubblica avait également rallié le 'Corriere' à son idéologie, mais 'Il Giornale', qui est né de cette prise de conscience, a fini par devenir lui aussi une sorte de Repubblica.

    Pannella, Bonino, les radicaux, les Verts, la gauche catholique, le Parti démocrate issu de la transformation de l'ancien PCI, Renzi, les Cinq étoiles, tous ceux qui veulent désormais occuper le " centre ", le président Mattarella... rien n'exprime autre chose que l'idéologie de la Repubblica et de Scalfari : laïcité, subjectivisme radical, nouveaux droits, pure culture bourgeoise, procéduralisme institutionnel.

    Scalfari a dicté l'horizon de compréhension de l'Italie d'aujourd'hui, l'Italie du divorce et de l'avortement, de la loi Cirinnà et du Zan ddl, l'Italie anti-famille et anti-vie, l'Italie ralliée aux puissances internationales, l'Italie qui veut + d'Europe et - d'Italie, l'Italie qui revendique les 'transitions' en les présentant comme le salut. Scalfari était un Pape, il était le chef d'une religion et il annonçait le salut. Le monde catholique a été pris en otage par lui. La Repubblica est entrée dans les paroisses. Je me souviens que Giovanni Reale avait appelé Scalfari à prendre la parole à l'Université catholique de Milan pour dire que nous, les hommes, sommes comme des petites fourmis perdues dans l'univers, sans sens, sans chef, sans fin. Le catholique qui ne lisait pas la Repubblica était considéré comme hors du temps et de son époque. Aucun journal n'a jamais pensé, comme Repubblica, à être une nouvelle Bible. Aucun journaliste n'a jamais pensé, comme Scalfari, à être un nouvel évangéliste.

    Avec Jean-Paul II et Benoît XVI, Repubblica et Scalfari ont fait un tabac parmi les catholiques, mais il est clair que c'était en dépit de ces Pontifes. 'Communion et Libération' n'a pas lu Repubblica, la Communauté de Sant'Egidio, l'Action catholique et les Scouts ont lu Repubblica.

    Avec François, c'est comme si tous les catholiques ne lisaient plus que la Repubblica. Tout le monde est maintenant aligné sur le nouveau credo. Aujourd'hui, ce sont les catholiques qui demandent le divorce et l'avortement, ce sont les évêques catholiques qui veulent la loi Cirinnà et le suicide assisté. Dans le Nouveau Testament de la Repubblica, les croyances de Cappato et d'Avvenire se rencontrent.

    Dès qu'il a été élu pape, François a commencé à rencontrer Eugenio Scalfari. François était censé être le Pape, et Scalfari le laïc. Au lieu de cela, François était le laïc et Scalfari le Pape. La religion de Scalfari était définie, complète, avec des dogmes précis, intolérante et capable d'inquisition, il voulait convertir et faire du prosélytisme même au-delà du Tibre, il voulait affirmer sa supériorité argumentative, provoquer, profaner. Dans ses conversations avec François, Scalfari interprétait même le rôle de François, qui ne rectifiait pas, alors qu'il mettait dans sa bouche ses propres mots que son interlocuteur était censé prononcer, lui faisant contredire les vérités de la foi catholique, et l'autre obtempérait (1). Scalfari était le pape qui enseignait, exposant son magistère de pape, sans crainte et sans le moindre sens œcuménique. Pour lui - athée, nihiliste et désespéré - il n'y avait qu'une seule vérité. François a joué la déférence, il n'a pas précisé quand l'autre, le pape, lui faisait dire des choses qui n'étaient pas papales, il s'est intéressé au dialogue même s'il était unilatéral, il s'est réjoui de scandaliser avec les mots qu'Eugène lui a suggérés. Il voulait être un laïc, il pensait avoir un laïc devant lui, mais il avait un pape, le pape de la nouvelle religion de l'irréligion.

    L'histoire de François et Eugenio Scalfari est l'histoire d'une Église qui fait tout pour être laïque et ne plus être une religion et qui ne se rend pas compte que la laïcité est la nouvelle religion et qu'elle n'est pas laïque du tout. Pendant que le pape joue à ne plus être le pape, d'autres papes occupent le rôle. Alors que l'Église catholique tolère et dialogue, les nouvelles Églises du sécularisme postmoderne pontifient.

    (1) "J'essaie de comprendre la personne que j'interviewe, et après cela, j'écris ses réponses avec mes propres mots", a expliqué Scalfari. Il a concédé qu'il est donc possible que "certaines des paroles du pape que j'ai rapportées, n'aient pas été partagées par le pape François."