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Trois évêques veulent verrouiller tout débat sur les traductions liturgiques

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C’est ce que relève  ici  notre confrère « summorum pontificum » :

« Il y a de nombreux des prêtres qui nient une partie des dogmes de l’Eglise, d’autres qui militent pour le mariage des prêtres, il y a des associations qui militent pour l’ordination des femmes, et qui ont pignon sur rue dans les diocèses, des prêtres qui inventent des « liturgies », d’autres qui dansent dans l’église (comme ici dans le diocèse de Langres). Et aucun évêque de France -ou presque- n’y trouve rien à redire. Mais quand L’Homme nouveau publie une tribune libre d’un prêtre, l’abbé Bernard Pellabeuf, consacrée aux douteuses traductions des textes liturgiques, alors 3 évêques -ni plus ni moins- publient un « droit de réponse » :

Mgr Robert Le Gall, président de la Commission épiscopale francophone pour les traductions liturgiques (qui publie un bien étrange Missel des dimanches), archevêque de Toulouse

Mgr Bernard-Nicolas Aubertin, président de la Commission épiscopale pour la liturgie et la pastorale sacramentelle, archevêque de Tours

Mgr Philippe Gueneley, président de l’Association épiscopale liturgique pour les pays francophones (laquelle AELF ignore la forme extraordinaire), évêque de Langres

Leur réaction est critiquable tant sur la forme que sur le fond:

Sur la forme, Philippe Maxence, rédacteur en chef de L’Homme nouveau indique :

« je ne peux m’empêcher de trouver étonnant cet appel au « droit de réponse », lequel laisserait entendre à nos lecteurs que tous les autres moyens ont été épuisés, sans résultat probant. La vocation de l’évêque est, certes, de ramener la brebis égarée dans le troupeau. Mais il est dit nulle part qu’il doive pour cela faire appel à la loi civile. Nous ne publions d’ailleurs pas ce long texte au titre du droit de réponse. Au moins pour une raison technique, sans même parler des considérations juridiques. Pour cela, en effet, il aurait fallu que cette réponse occupe une place équivalente à la longueur de l’article incriminé et qu’il soit publié au même emplacement. Or, elle fait nettement plus du double : 17 850 signes (espaces compris) contre 4 720… Même si nous avions répondu à l’injonction épiscopale, nous n’aurions pu matériellement l’insérer dans le cadre de notre « Tribune libre » en page 32. C’est donc au titre du débat et de la confrontation des idées que nous avons décidé de la proposer au jugement de nos lecteurs. [...] Plus largement, nous pensons que cette réaction épiscopale par l’intermédiaire du droit de réponse envoyé à un journal catholique pose la question du dialogue entre catholiques et des conditions du débat sur des points de désaccord. Encore une fois, le procédé du « droit de réponse » ne me semble pas le plus adéquat. Je serais donc heureux d’ouvrir nos colonnes à ceux qui de droit pourront apporter un éclairage sur ce véritable problème. »

Vous pouvez aussi vous abonner à L’Homme Nouveau pour lire l’ensemble du dossier. L’abbé Pellabeuf leur répond sur le fond. Ce prêtre a aussi un blogue que chacun peut aller consulter. Il y a publie son premier article paru en décembre 2011 dans L’Homme nouveau puis sa réponse aux 3 évêques sous le titre « Je ne me rétracte pas« . Suivent des textes de Jacques Maritain, du cardinal de Lubac du cardinal Arinze sur ce sujet. Ce dernier, alors préfet de la Congrégation pour le culte divin et la discipline des sacrements, déclarait en 2003 :

« Regardez donc comment vous traduisez l’Orate frates…en français : « Prions ensemble au moment d’offrir le sacrifice de toute l’Eglise ». C’est tout. Ce n’est pas une traduction, c’est une belle phrase, une très belle phrase, mais ce n’est pas une traduction du texte latin. La réponse à l’invitation du prêtre est dans le missel latin : Suscipiat Dominus sacrificium de manibus tuis ad laudem et gloriam nominis sui, ad utilitatem quoque nostram, totiusque Ecclesiae suae sanctae . Et que dites-vous en français ? « Pour la gloire de Dieu et le salut du monde ». Ce n’est pas une traduction. »

Il faut évoquer les sommes que rapportent à la CEF les droits de traduction liturgique. Les anciens se souviendront de l’affaire du Missel « Ephata » qui a été l’occasion d’un différent entre la « clérocratie » française – dénoncée par Jean-Claude Didelot des éditions Fayard – et le Vatican. Plus récemment, il y eut la traduction du Compendium de la doctrine sociale de l’Eglise, vendu à 18€ par les éditions du Cerf. Alors que la même (ou presque) traduction française éditée par la Conférence épiscopale du Bénin revenait à seulement 8€ ! Lequel compendium vaut 6,5 euros en Allemagne, 8 en Italie et 7,5 en Espagne.

De son côté, Denis Crouan, président de Pro Liturgia, écrit :

« Il y a beaucoup de citations pertinentes dans le “droit de réponse” de NN.SS. Le Gall, Aubertin et Gueneley. Sauf une. Ce qui est normal puisqu’elle plaiderait très fort en faveur de l’abbé Pellabeuf… et non de l’épiscopat français ! Corrigeons donc cet oubli :

“Les Conférences épiscopales ont eu la lourde charge de préparer les traductions des livres liturgiques. Les nécessités du moment ont parfois conduit à utiliser des traductions provisoires, qui ont été approuvées ad interim. Mais le temps est venu de réfléchir à certaines difficultés éprouvées depuis, de remédier à certaines faiblesses ou inexactitudes, de compléter les traductions partielles, de créer ou d’approuver les chants à utiliser dans la liturgie, de veiller au respect des textes approuvés, de publier enfin des livres liturgiques dans un état qu’on peut considérer comme acquis durablement et dans une présentation qui soit digne des mystères célébrés. Pour le travail de traduction, mais aussi pour une concertation plus large à l’échelle du pays entier, les Conférences épiscopales devaient constituer une Commission nationale et s’assurer le concours de personnes expertes dans les différents secteurs de la science et de l’apostolat liturgique. Il convient de s’interroger sur le bilan, positif ou négatif, de cette Commission, sur les orientations et sur l’aide qu’elle a reçues de la Conférence des évêques dans sa composition ou son activité.” (Bx Jean-Paul II, Lettre apostolique Vicesimus quintus annus, n.20, 4 décembre 1988.)  

On lit bien : “on a utilisé des traductions approuvées ad interim… il faut remédier à certaines faiblesses ou inexactitudes”. L’abbé Bernard Pellabeuf ne dit rien d’autre que ce que disait le Bx Jean-Paul II. »

Mon confrère Christophe Saint-Placide évoque cette étrange réaction épiscopale en se demandant la raison de cette réaction. Il faut dire que cela fait déjà 15 ans que nos évêques planchent sur les nouvelles traductions liturgiques. Leurs confrères anglo-saxons ont été plus rapides puisque leurs nouvelles traductions ont été approuvées par Rome est sont entrées en vigueur avec la nouvelle année liturgique, le 1er dimanche de l’Avent 2011. 15 années de travaux, de corrections mais aussi de débats. Si ces 3 évêques réagissent c’est peut-être par volonté de verrouiller ce débat. On se souvient de l’affaire du Youcat, édité avec des traductions déficientes. Certains évêques français avaient demandé -et obtenu- sa mise au pilon et sa réédition dans une version plus conforme, lors de l’Assemblée plénière de la CEF. On imagine déjà ces mêmes évêques exiger la même chose des futures traductions si elles s’avéraient déficientes…

Pour ceux qui désirent aller plus loin, et aussi pour aider nos évêques dans ce travail de traduction, voici un site non officiel avec une traduction tout aussi non officielle de ce missel romain. » Référence :verrouiller tout débat

Sur ce même sujet, nous pourrions rappeler aussi l’ouvrage du regretté Monseigneur Michel Dangoisse, doyen du chapitre cathédral de Namur, publié deux mois après sa mort : « Les mots de la messe. La vraie beauté de la liturgie », Editions Ad Solem, octobre 2010, 23 €.  Ce livre fait des propositions de révision qui entrent encore bien plus dans le détail que l'abbé Pellabeuf. L'ouvrage du chanoine Dangoisse est préfacé par l' "autre Michel": Mgr Michel Schooyans.

Commentaires

  • L'usage du latin avait d'immenses avantages.

    Comme celui de ne pas se créer tous ces problèmes et différends de traductions.

    Ou celui de permettre une participation active des fidèles quel que soit leur pays d'origine et leur langue maternelle.

    Ou encore, l'avantage d'être une langue 'morte', donc de ne favoriser aucun pays ou aucune langue au détriment d'autres.

    Ou enfin, d'être une langue très belle, structurée et cohérente.

    Mais surtout, une langue transmettant, sans la trahir ou la travestir, toute la tradition doctrinale et liturgique de l'Église.

    Bref, c'était vraiment une langue qui concrétisait et symbolisait très bien l'unité de tous les catholiques dans le monde, unité voulue par le Christ.

    Mais si certains considèrent que, malgré tous ces avantages, le latin doit être éliminé (pour quelles raisons objectives ?) qu'au moins ils fassent alors l'effort de conserver 'au mieux' cette unité catholique, universelle, des célébrations liturgiques.

    Faudra-t-il aller jusqu'à leur chanter Brassens, pour leur faire comprendre :
    « Ils ne savent pas ce qu'ils perdent,
    Tous ces fichus calotins,
    Sans le latin, sans le latin,
    La messe nous emm... » ?

  • Choisir l'abandon du latin, c'est choisir la tour de Babel, c'est choisir les conflits de traduction et d'interprétation incessants.

    Toutes les multiples langues maternelles doivent être bien sûr respectées, mais toutes n'ont pas les mêmes qualités que le latin pour exprimer correctement les plus difficiles concepts théologiques. Il faut noter aussi que les homélies dans la langue maternelle (de la majorité des fidèles présents) existent depuis toujours.

    Mais les textes liturgiques et prières poseraient nettement moins de problèmes de conflits ou divisions entre catholiques, s'ils étaient formulés en latin. Rechercher l'unité et l'union doit être une priorité pour tout catholique qui veut être fidèle au Christ. Le latin est un des moyens pratiques de réaliser cette unité.

    Remarquons aussi que, depuis l'abandon progressive du latin comme langue de transmission de la connaissance (et pas seulement religieuse), certains ont jugé utile de nous fabriquer un latin artificiel, baptisé esperanto. Cela montre bien que la tour de Babel n'intéresse personne.

    Mais alors, pourquoi ne pas reprendre le latin comme 'esperanto' ayant fait largement ses preuves sur deux millénaires ?

  • Tout à fait d'accord avec vous, pauvre Job! Et merci à Belgicatho pour cet article très intéressant.
    Malheureusement, je crains que dans nos paroisses, nous n'arrivions même plus à ce genre de discussion. La Semaine Sainte approche avec son lot de dérives : qui sera le plus original dans la célébration du Jeudi Saint? Si nous pouvions en rire, un concours serait à mettre en place...Malheureusement....

  • L'article de l'abbé Pellabeuf frappait par sa justesse. Et, comme le fait remarquer l'Homme nouveau, il était bien plus modéré que l'analyse minutieuses de Mgr Dangoisse dans son livre.

    Ma question est simple : "Comment ces évêques osent-ils nier l'évidence?" Mgr Schneider, lors de son intervention de janvier à Versailles, a montré du doigt le banal rite "de présentation des dons" qui a remplacé la grandeur des prières de l'offertoire. Le Père Bouyer appelle le recours au "fruit de la terre et du travail des hommes" une triste formule au relent de lutte ouvriériste. Cette formule amoindrit le caractère sacrificiel de la célébration. Par ailleurs, la manière dont a été "traduit", en français, l'Orate fratres, crie vengeance au ciel. On passe du sacrifice du prêtre au nom du peuple à celui du peuple entier, sans mention spécifique du sacerdoce.

    Je m'étonne de voir ici le nom de Mgr Guéneley qui, depuis son entrée en fonction, a conduit son diocèse à la faillite de la foi, de la pratique, des vocations, et qui ne s'est rendu célèbre qu'en disant publiquement des méchancetés sur ses confrères évêques. Le bon sens wallon l'exprime très clairement "on est toujours noirci par plus noir que soi".

    Merci à l'abbé Bernard Pellabeuf pour son article lucide et vrai. Seul la vérité blesse!

  • Avez-vous regardé la vidéo du diocèse de Langres ? C'est à pleurer: si le clergé local croit attirer les jeunes avec de tels spectacles...Non seulement les chanteurs/danseurs sont à contretemps sur la musique qui est jouée à côté d'eux mais ils sont aussi à contretemps avec leur époque musicale. Et leurs chansons sont toujours aussi pauvres que celles que la nouvelle liturgie nous a asséné dans les années septante.

  • L'Eglise catholique "universelle" est en train de se transformer en nouvelle "tour de Babel"! Le diable doit se frotter les mains!

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