
La prière, plus que le rire peut-être, est le propre de l’homme. Sans doute faut-il apprendre à prier, mais un homme qui n’a jamais prié cela n’existe pas ! D’abord parce que la prière se rencontre dans les simples relations humaines : « Mon ami, prête-moi trois pains, je te prie : un de mes amis arrive de voyage, et je n’ai rien à lui offrir »… Mais, bien sûr, dans sa forme la plus haute la prière s’adresse à Dieu pour lui demander de produire ce que nous désirons, pour obtenir ce que nous estimons nécessaire pour nous-même ou pour autrui selon la parole même de Jésus : « Demandez et vous recevrez, cherchez et vous trouverez, frappez et l’on vous ouvrira ». Il semble donc que la prière, si elle peut prendre des formes diverses et variées (contemplation, louange, action de grâce) désigne surtout la prière de demande, la prière qui nous paraît la plus naturelle.... en tout cas la plus facile ! Or, nous en avons tous fait l’expérience, souvent, après avoir beaucoup prié, beaucoup demandé, longtemps frappé à la porte, nous n’avons rien obtenu, rien reçu, personne ne nous a ouvert, Dieu n’a pas répondu à nos demandes. Et cela a quelque chose de dramatique parce que pour beaucoup de gens, si le ciel ne répond pas, c’est qu’il est vide, c’est que Dieu n’existe pas, que la prière est inutile, qu’il ne sert à rien de prier. Les maîtres de la prière, les « grands priants » (P. Loew) eux nous apprennent que si nous ne sommes pas exaucés, c’est essentiellement pour deux raisons : soit parce que nous ne demandons pas ce qu’il faut ; soit parce que nous ne demandons pas comme il faut. Nous demandons mal, ou nous demandons des choses mauvaises, selon le mot de saint Augustin.
Pourquoi Dieu veut-il ainsi nous associer à la réalisation de son dessein de salut alors qu’il pourrait agir seul, pourquoi faut-il prier pour obtenir ce qu’il veut déjà nous donner ? Saint Thomas avance ici deux raisons ; la première est d’ordre moral : la prière, spécialement la prière d’intercession, relie les hommes entre eux, elle créée des liens de solidarité entre les personnes, elle contribue à l’unité du genre humain et il est bon, en effet, que nous prenions soin les uns des autres dans la prière, que nous nous sentions, de ce point de vue, responsable d’autrui ; la deuxième raison est d’ordre psychologique : la prière est nécessaire et bénéfique pour celui qui prie ; elle lui fait prendre conscience de ses propres manques, de ses limites, et finalement de ces vrais désirs et par là le dispose à être exaucé.
Que la prière nous éveille aux vrais désirs que Dieu suscite en nos cœurs ! Ne quittons pas les puits profonds des vrais désirs pour les puits desséchés qui ne gardent pas l’eau.
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