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Spiritualité

  • L'Angelus du pape Léon XIV pour la fête de la Sainte Famille

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    FÊTE DE LA SAINTE FAMILLE DE NAZARETH

    PAPE LÉON XIV

    ANGÉLUS

    Place Saint-Pierre
    Dimanche 28 décembre 2025

     
    Chers frères et sœurs, bon dimanche !

    Aujourd’hui, nous célébrons la Fête de la Sainte Famille et la liturgie nous propose le récit de la “fuite en Égypte” (cf. Mt 2, 13-15.19-23).

    C’est un moment d’épreuve pour Jésus, Marie et Joseph. En effet, sur le tableau lumineux de Noël se projette, presque soudainement, l’ombre inquiétante d’une menace mortelle, qui trouve son origine dans la vie tourmentée d’Hérode, un homme cruel et sanguinaire, redouté pour sa cruauté, mais précisément pour cette raison profondément seul et obsédé par la peur d’être détrôné. Quand il apprend par les mages que le “roi des Juifs” est né (cf. Mt 2, 2), se sentant menacé dans son pouvoir, il décrète la mise à mort de tous les enfants de l’âge correspondant à celui de Jésus. Dans son royaume, Dieu accomplit le plus grand miracle de l’histoire, dans lequel s’accomplissent toutes les anciennes promesses de salut, mais il ne parvient pas à le voir, aveuglé par la crainte de perdre son trône, ses richesses, ses privilèges. À Bethléem, il y a de la lumière, il y a de la joie : certains bergers ont reçu l’annonce céleste et, devant la crèche, ils ont glorifié Dieu (cf. Lc 2, 8-20), mais rien de tout cela ne parvient à pénétrer les défenses blindées du palais royal, si ce n’est comme l’écho déformé d’une menace, à étouffer dans une violence aveugle.

    Mais c’est précisément cette dureté de cœur qui met encore plus en évidence la valeur de la présence et de la mission de la Sainte Famille qui, dans le monde despotique et avide que représente le tyran, est le nid et le berceau de la seule réponse de salut possible : celle de Dieu qui, dans une gratuité totale, se donne aux hommes sans réserve et sans prétention. Et le geste de Joseph qui, obéissant à la voix du Seigneur, met en sécurité l’Épouse et l’Enfant, se manifeste ici dans toute sa signification rédemptrice. En Égypte, en effet, la flamme de l’amour domestique à laquelle le Seigneur a confié sa présence dans le monde grandit et prend de la vigueur pour apporter la lumière au monde entier.

    Alors que nous contemplons ce mystère avec émerveillement et gratitude, pensons à nos familles et à la lumière qu’elles peuvent apporter à la société dans laquelle nous vivons. Malheureusement, le monde a toujours ses “Hérodes”, ses mythes du succès à tout prix, du pouvoir sans scrupules, du bien-être vide et superficiel, et il en paie souvent les conséquences dans la solitude, le désespoir, les divisions et les conflits. Ne laissons pas ces mirages étouffer la flamme de l’amour dans les familles chrétiennes. Au contraire, gardons en elles les valeurs de l’Évangile : la prière, la fréquentation des sacrements – en particulier la confession et la communion –, les affections saines, le dialogue sincère, la fidélité, la simplicité et la beauté des paroles et des gestes bons de chaque jour. Cela les rendra lumière d’espérance pour les milieux dans lesquels nous vivons, école d’amour et instrument de salut entre les mains de Dieu (cf. François, Homélie lors de la messe pour la Xe Rencontre mondiale des familles, 25 juin 2022).

    Demandons donc au Père céleste, par l’intercession de Marie et de saint Joseph, de bénir nos familles et toutes les familles du monde, afin qu’elles grandissent à l’image de celle de son Fils fait homme et soient pour tous un signe efficace de sa présence et de son infinie charité.

  • Imiter la Sainte Famille

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    Du sur The Catholic Thing :

    Imiter la Sainte Famille

    Dimanche 28 décembre 2025

    L'oraison d'aujourd'hui pour la fête dit : « Ô Dieu, qui avez daigné nous donner l'exemple de la Sainte Famille, accordez-nous la grâce de l'imiter. » Voilà qui est exigeant. Car la Sainte Famille était exceptionnelle. Inimitable, pourrait-on dire. Joseph et Marie étaient certes mariés. Mais leur mariage était unique en son genre. Jésus était bien leur Fils… mais pas au sens habituel du terme.

    Pourtant, cette collecte et l'intuition des fidèles à travers l'histoire indiquent qu'il y a, en effet, quelque chose à imiter ici. Et quelque chose d'imitable. Cela ne signifie pas pour autant rabaisser la Sainte Famille à notre niveau. Au contraire, ce que nous rencontrons de manière unique et irremplaçable au sein de la Sainte Famille révèle une vérité valable pour chaque famille.

    Tout d'abord, la Sainte Famille commence par l'amour de Joseph et Marie. Nombre de chrétiens pourraient considérer leur mariage comme une sorte de fiction. Marie allait avoir un enfant et il fallait bien un mari/père. D'où les représentations du vieux Joseph, sénile et chancelant, peinant à suivre Jésus et Marie.

    Mais Dieu ne s'adonne pas à l'illusion. Joseph et Marie s'aimaient d'un amour conjugal authentique, même s'il s'est exprimé d'une manière singulière. Elle s'est confiée à sa protection, ainsi que sa virginité promise. Il s'est donné par amour comme son époux et son protecteur. Ce que chacun désirait pour l'autre, c'était la sainteté à laquelle Dieu les appelait. Sa sainteté a inspiré sa générosité envers Dieu, et sa protection a rendu la sienne possible.

    De même, la sainteté d'une famille prend racine dans l'amour des époux. Il ne s'agit pas ici de la théorie romantique de l'« âme sœur », qui, paradoxalement, conduit à l'infidélité et à la rupture des familles. Non, il s'agit du simple amour conjugal que les mariés perçoivent et qui les pousse à s'engager pour la permanence, la fidélité et la volonté d'avoir des enfants. C'est le choix quotidien de s'aimer l'un l'autre qui non seulement préserve ces vœux, mais les approfondit également.

    Deuxièmement , bien que Joseph et Marie n'aient jamais eu de relations conjugales, ils étaient néanmoins ouverts à la vie – d'une manière exceptionnelle, assurément. L'Enfant né de Marie est le fruit de leur union. Leur mariage existait déjà au moment de la conception du Christ. C'est au sein de leur mariage qu'il a été conçu. C'est grâce non seulement à sa foi en Dieu, mais aussi à sa confiance en Joseph, que Marie a pu dire oui à l'ange. Cette ouverture singulière à la vie a donné naissance au Seigneur de la Vie.

    La Sainte Famille avec sainte Élisabeth, saint Jean et une colombe par Pierre Paul Rubens, vers 1608-1609 [The MET, New York]

    « Soyez féconds et multipliez-vous. » Tel est le premier commandement de Dieu, et donc le plus fondamental. Comme tous ses commandements, il est pour notre bien, et le transgresser ne nous apporte que tristesse. L’ouverture d’un couple à l’égard des enfants – et, plus encore, leur générosité à  les accueillir – témoigne de leur confiance en la providence divine et de leur volonté de se dépasser dans le don de soi. Cette ouverture et cette générosité deviennent à leur tour un chemin de sanctification, un moyen de grandir dans la confiance et le don de soi. Les sacrifices ordinaires des mères et des pères sont intrinsèquement liés à la sainteté chrétienne.

    Troisièmement , la Sainte Famille avait un but précis, une véritable mission . Le Christ avait été confié au mariage de Joseph et Marie. Leur amour mutuel avait fondé le foyer où il fut accueilli et où il « croissait en sagesse, en âge et en grâce devant Dieu et devant les hommes » (Luc 2, 52). En bref, leur raison d’être était Jésus. Tout, dans leur amour et dans leur foyer, était orienté vers lui et sa mission.

    Chaque famille a une mission et un but. Naturellement, la famille apporte de nombreux bienfaits à la société (et, hélas, à mesure qu'elle se désagrège, nous constatons combien de ces bienfaits seront perdus). Mais le but ultime de la famille transcende ce monde. En effet, à l'instar de la Sainte Famille, le but de chaque famille est Jésus-Christ. Lui offrir une place au sein du foyer, parmi ses membres. Croître dans la connaissance et l'amour de lui, développer la capacité de l'imiter.

    Enfin, la Sainte Famille pria. Compte tenu de la présence du Verbe incarné et de l'Immaculée Conception dans leur foyer, leur prière était sans doute unique. Mais, d'un autre côté, elle était ordinaire. Ils priaient comme leur peuple. Ils se reconnaissaient comme membres du peuple de Dieu et priaient selon les temps, les saisons, les textes et les rites qui leur avaient été transmis. Leur prière était ordinaire aussi parce qu'elle s'intégrait naturellement à leur vie quotidienne. Parler à Dieu était aussi naturel que respirer.

    Chaque famille est appelée à la prière. Le célèbre adage du père Peyton reste d'actualité : « La famille qui prie ensemble reste unie. » Mais la prière apporte bien plus que le simple fait de rester unis. La prière au foyer, à commencer par les époux, conduit à la sanctification. Elle rend la famille plus attentive à la présence de Dieu et lui donne davantage d'espace pour agir dans leurs vies.

    À l’image de la Sainte Famille, la prière de chaque famille devrait être ordinaire. En ce premier sens, elle doit être faite selon les temps liturgiques, les textes et les rites de l’Église. L’Église domestique doit être le lieu où s’enracinent les doctrines et la liturgie de l’Église. La prière familiale doit aussi être ordinaire en ce second sens : elle ne doit rien avoir d’inhabituel ni d’étrange. C’est au sein de la famille ordinaire qu’il faut être conscient de la présence de Dieu, s’incliner en prière, rendre grâce et louer Celui de qui toute famille au ciel et sur la terre tire son nom. (Éphésiens 3, 15)

  • "La famille est le berceau naturel de l’enfant" (Benoît XVI)

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    Festa della Santa Famiglia - Santo Spirito Perugia

    FÊTE DE LA SAINTE FAMILLE

    BENOÎT XVI

    ANGÉLUS

    Place Saint-Pierre
    Dimanche 30 décembre 2012
     

    Chers frères et sœurs,

    C’est aujourd’hui la fête de la Sainte Famille de Nazareth. Dans la liturgie, le passage de l’Évangile de Luc nous présente la Vierge Marie et saint Joseph qui, fidèles à la tradition, montent à Jérusalem pour la Pâque accompagnés de Jésus âgé de douze ans. La première fois que Jésus était entré dans le Temple du Seigneur avait été quarante jours après sa naissance, quand ses parents avaient offert pour lui « un couple de tourterelles ou deux petites colombes » (Lc 2, 24), c’est-à-dire le sacrifice des pauvres. « Luc, dont l’Évangile tout entier est empreint d’une théologie des pauvres et de la pauvreté, nous fait comprendre... que la famille de Jésus était comptée parmi les pauvres d’Israël ; il nous fait entendre que c’était justement parmi eux que pouvait mûrir l’accomplissement de la promesse » (L’enfance de Jésus, p. 117). Aujourd’hui, Jésus est de nouveau dans le Temple, mais cette fois il joue un rôle différent, qui le concerne en première personne. Il accomplit, avec Marie et Joseph, le pèlerinage à Jérusalem selon ce que prescrit la Loi (cf. Ex 23, 17 ; 34, 23sq.), même s’il n’avait pas encore atteint l’âge de treize ans : un signe de la profonde religiosité de la Sainte Famille. Mais quand ses parents repartent pour Nazareth, il se passe quelque chose d’inattendu : sans rien dire, Il reste dans la ville. Pendant trois jours Marie et Joseph le cherchent et le retrouvent dans le Temple, s’entretenant avec les maîtres de la Loi (cf. Lc 2, 46-47) ; et quand ils lui demandent des explications, Jésus répond qu’ils ne doivent pas s’étonner, car sa place est là, sa maison est là, auprès du Père, qui est Dieu (cf. L’enfance de Jésus). « Il professe — écrit Origène — qu’il est dans le Temple de son Père, ce Père qu’il nous a révélé et dont il a dit être le Fils » (Homélie sur l’Évangile de Luc, 18, 5).

    La préoccupation de Marie et de Joseph pour Jésus est la même que celle de chaque parent qui éduque un enfant, qui l’introduit dans la vie et dans la compréhension de la réalité. Aujourd’hui, il est donc de notre devoir d’élever une prière spéciale au Seigneur pour toutes les familles du monde. En imitant la Sainte Famille de Nazareth, que les parents se préoccupent sérieusement de la croissance et de l’éducation de leurs enfants, afin qu’ils mûrissent comme des hommes responsables et d’honnêtes citoyens, sans jamais oublier que la foi est un don précieux qu’il faut alimenter chez ses propres enfants, également à travers l’exemple personnel. Dans le même temps, prions pour que chaque enfant soit accueilli comme don de Dieu, soit soutenu par l’amour de son père et de sa mère, pour pouvoir grandir comme le Seigneur Jésus « en sagesse, en taille et en grâce, sous le regard de Dieu et des hommes » (Lc 2, 52). Que l’amour, la fidélité et le dévouement de Marie et Joseph soient un exemple pour tous les époux chrétiens, qui ne sont pas les amis ou les maîtres de la vie de leurs enfants, mais les gardiens de ce don incomparable de Dieu.

    Que le silence de Joseph, homme juste (cf. Mt 1, 19), et l’exemple de Marie, qui gardait chaque chose dans son cœur (cf. Lc 2, 51), nous fassent entrer dans le mystère plein de foi et d’humanité de la Sainte Famille. Je souhaite à toutes les familles chrétiennes de vivre en présence de Dieu avec le même amour et avec la même joie que la famille de Jésus, Marie et Joseph.

    À l'issue de l'Angélus

    Chers pèlerins francophones, nous célébrons aujourd’hui la Sainte Famille que Dieu a donnée à l’humanité pour modèle des valeurs humaines et familiales. Le Fils de Dieu a voulu naître dans une famille, lui donnant ainsi sa noble signification et sa place irremplaçable pour la personne et pour la société. La famille est le berceau naturel de l’enfant. Elle est le terreau premier et indispensable où s’enracinent et se construisent la personne et les liens humains. Que la Vierge Marie et saint Joseph aident les parents à éduquer leurs enfants et à leur transmettre la foi ! Je vous bénis tous de grand cœur ainsi que vos familles !

  • Prière à la Sainte Famille (pape François)

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    sagrada-familia.jpgLors de la messe du pèlerinage des familles, le 27 octobre 2013, le pape François a récité une prière dont voici la traduction (zenit.org) :

     

    Prière à la Sainte Famille

     

    Jésus, Marie et Joseph,
    vers vous, Sainte Famille de Nazareth,
    aujourd'hui nous tournons le regard
    avec admiration et confiance;
    en vous nous contemplons
    la beauté de la communion dans l'amour véritable;
    à vous nous confions toutes nos familles,
    afin que se renouvellent en elles les merveilles de la grâce.
    Sainte Famille de Nazareth,
    école séduisante du saint Évangile:
    apprends-nous à imiter tes vertus
    avec une sage discipline spirituelle,
    donne-nous un regard limpide
    qui sache reconnaître l'oeuvre de la Providence 
    dans les réalités quotidiennes de la vie.

    Sainte Famille de Nazareth,
    gardienne fidèle du mystère du salut:
    fais renaître en nous l'estime du silence,
    rends nos familles cénacles de prière,
    et transforme-les en de petites églises domestiques,
    renouvelle le désir de la sainteté,
    soutiens la noble peine du travail, de l'éducation,
    de l'écoute, de la compréhension réciproque et du pardon.

    Sainte Famille de Nazareth,
    réveille dans notre société la conscience
    du caractère sacré et inviolable de la famille,
    bien inestimable et irremplaçable.
    Que chaque famille soit une demeure accueillante de bonté et de paix 
    pour les enfants et pour les personnes âgées
    pour qui est malade et seul,
    pour qui est pauvre et dans le besoin.
    Jésus, Marie et Joseph,
    nous vous prions avec confiance, nous nous remettons à vous avec joie.

  • La famille, cellule de base de la société (homélie pour le dimanche de la Sainte famille)

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    La famille, cellule de base de la société

    homélie de l'abbé Christophe Cossement pour la fête de la Sainte Famille (archive 2013):

    Dans l’exhortation apostolique du pape François, Evangelium gaudium, on lit que la famille est importante pour l’Église car « il s’agit de la cellule fondamentale de la société, du lieu où l’on apprend à vivre ensemble dans la différence et à appartenir aux autres et où les parents transmettent la foi aux enfants ».

    En cette fête de la Sainte Famille nous voulons fêter toutes les familles, avec une tendresse particulière pour celles qui vivent des épreuves, en les regardant comme les cellules fondamentales nécessaires à la société. Il y a une forme de famille qui a été avalisée par le parlement mais à laquelle les Églises s’opposent, c’est la famille fondée sur le mariage homosexuel. Cette opposition ne vient pas d’une attitude rigide tournée vers le passé, mais de cette constatation toute simple  : pour donner la vie à un enfant il faut d’une façon ou d’une autre toujours un homme et une femme. La stérilité de la relation homosexuelle n’est pas une maladie, elle est dans l’ordre des choses, elle est normale, et il ne faut pas nier la réalité en imaginant des stratagèmes pour imiter la famille fondée sur l’union de l’homme et de la femme. Ce qui ne veut pas dire que nous les chrétiens devons approuver le fait qu’une société rendrait difficile la vie des personnes homosexuelles. Au contraire, c’est aussi avec amitié que nous devons entourer les familles qui existent déjà, quelles que soient leurs blessures.

    La famille est le lieu où l’on apprend « à appartenir aux autres ». Ce point me semble fondamental dans la société d’aujourd’hui toujours tentée par plus d’individualisme et donc de repli sur soi. Cette appartenance mutuelle se réalise en vivant dans le don de soi aux autres. La maman, le papa se donnent pour leur enfant, et qui pourra rendre à ses parents tout ce qu’ils lui ont donné, à commencer par le précieux don de la vie — qui n’appartient à personne ? À leur tour les enfants sont invités à se donner eux-mêmes dans la famille, par toutes sortes de services rendus gratuitement. Heureuses les familles où l’on entretient cette dimension du don gratuit en résistant à la marchandisation des tâches ! C’est le seul moyen de préparer l’avenir que d’apprendre aux jeunes à vivre comme des êtres capables de se donner eux-mêmes et de le faire dans la fidélité, durablement, au-delà de ce qui peut rapporter quelque chose.

    Ce que vit la Sainte Famille dans l’évangile de ce jour (Mt 2,13) nous fait accueillir dans cette célébration la situation de tant de familles qui vivent dans des camps de réfugiés, au Sud-Soudan, en Centrafrique, au Liban et dans les pays voisins de la Syrie, à l’est du Congo, aux Philippines, et encore maintenant en Haïti ou en Inde. Et la situation de ces familles chrétiennes qui vivent dans la menace perpétuelle d’un attentat. Nous pensons aussi à toutes les familles éprouvées parce qu’un des membres est gravement malade ou disparu trop tôt, et à toutes les familles blessées parce qu’on ne sait pas s’y aimer ou parce qu’il y a de la méchanceté, de la perversité ou de l’esprit de vengeance. Tant de famille que Dieu nous invite à porter dans notre cœur, pour que par la rencontre entre ces situations et l’Esprit Saint dans notre cœur puisse naître l’ébauche d’un monde nouveau, d’un geste, d’une prière qui commence à changer le monde.

    Comment surmonter tout ce qui blesse les personnes et les familles ? Le pape propose dans sa lettre de tisser à nouveau des liens, d’intensifier la proximité avec ceux qui nous entourent et qui nous sont présentés par le Seigneur. C’est le sens des lectures que nous avons entendues  : honorer son père, glorifier sa mère (Si 3), non pas qu’ils soient irréprochables mais parce que ce qui est digne de l’homme, ce qui le fait grandir et qui peut guérir même les péchés c’est l’amour, c’est la main tendue, c’est le cœur ouvert, c’est la présence affectueuse — et ils sont rares les cas où il faut se protéger en coupant les ponts, cela doit rester l’exception des exceptions. Intensifier les liens, nous devons le faire aussi avec ceux qui sont dans notre quartier, avec ceux qui arrivent de loin et qui sont éprouvés par une vie difficile — ceux que l’on appelle les sans-papiers. C’est à une nouvelle communion de la famille humaine que nous sommes appelés.

    Que le Seigneur nous aide à construire le monde de demain, par notre vigilance au service du renouveau des familles, cellules de base de la société !

  • Comment fut ce premier Noël du point de vue de saint Joseph et que peut nous apprendre son attitude ?

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    De Luke Coppen sur le Pillar :

    L'évêque Varden : « Saint Joseph est le saint patron de l'altruisme »

    Comment fut ce premier Noël du point de vue de saint Joseph et que peut nous apprendre son attitude ?

    Regardez les cartes de Noël que vous avez reçues jusqu'à présent en décembre. Pouvez-vous voir la figure de saint Joseph ?

    Détail de « Saint Joseph avec un plan et une équerre », par Jusepe de Ribera (1591-1652). Crédit : Domaine public.

    Il est fort probable qu'il soit présent quelque part, mais sans doute pas au premier plan. Malgré son rôle essentiel dans la Nativité du Christ, saint Joseph est généralement un personnage secondaire, une présence douce et attentive en marge.

    Mais comment saint Joseph a-t-il vécu ce premier Noël ? Comment a-t-il réagi face à l’Incarnation ? Que peuvent nous apprendre son attitude et ses actions ?

    Le magazine The Pillar a posé ces questions à Mgr Erik Varden, moine trappiste et auteur spirituel qui dirige la prélature territoriale de Trondheim (Norvège) depuis 2020.

    Peu après avoir reçu les questions, l'évêque s'est rendu à la prélature territoriale voisine de Tromsø, où il exerce les fonctions d'administrateur apostolique depuis 2023. La ville insulaire de Tromsø est en pleine nuit polaire, période durant laquelle le soleil reste sous l'horizon toute la journée. Cependant, la ville n'est pas plongée dans une obscurité perpétuelle. En début d'après-midi, la lumière est suffisante pour baigner les fjords et les montagnes environnants d'un bleu profond .

    Coïncidence ou non, le dernier livre de l'évêque Varden, un recueil d'essais sur l'espoir, s'intitule « Vers l'aube ». Son prochain ouvrage, dont la publication est prévue en 2026, sera basé sur sa série « Pères du désert en un an » .

    Serait-il juste de dire que le premier Noël — la naissance du Sauveur — survint à une période de profonds bouleversements dans la vie de saint Joseph ?

    C’est ce que nous disent les Écritures. Dans l’Évangile selon Matthieu, nous lisons que Joseph, apprenant la grossesse de Marie, résolut de la répudier. Il le ferait « discrètement », par bonté, mais romprait tout de même les liens du mariage. Cette grossesse lui faisait penser que celle qui devait être son épouse l’avait soit trahi, soit était compromise au point de ne pouvoir en parler ; dans les deux cas, la perspective d’un avenir commun lui paraissait impossible.

    C’est alors que l’ange intervient et révèle à Joseph la situation : la vie conçue en Marie vient du Saint-Esprit ; le Fils qu’elle portera est l’accomplissement d’une prophétie ; il sauvera son peuple de ses péchés ; c’est pourquoi Joseph ne doit pas avoir peur. Cette exhortation à l’absence de crainte, qui traverse tout le Nouveau Testament, est présente dès le début : dans l’Annonciation à Marie, puis dans les paroles rassurantes de l’ange à Joseph.

    Face à l'intervention divine dans l'histoire, les êtres humains, même les plus vertueux, réagissent avec trouble et angoisse. Il est déstabilisant de voir sa vie bouleversée par la grâce ; il faut du temps pour adopter une perspective divine sur les affaires humaines.

    En iconographie, certaines représentations de la Nativité du Christ intègrent un détail facile à négliger : la tentation de saint Joseph. Assis légèrement à l’écart de la grotte où se trouvent la Vierge et l’Enfant, et ressemblant étrangement au Penseur de Rodin , Joseph est approché par un démon (rappelons que le mot grec diabolos signifie « celui qui déchire ») déguisé en berger inoffensif.

    On peut imaginer le genre de choses que cet homme aurait chuchotées à l'oreille de Joseph : « Tu ne crois pas sérieusement à ce rêve absurde ? Tu penses que Dieu intervient comme ça ? Fuis tant que tu le peux ! »

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  • « Le plus grand défi de l’homme contemporain est de croire vraiment qu’il est aimé » (Mgr Varden)

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    De didoc.be :

    Erik Varden : « Le plus grand défi de l’homme contemporain est de croire vraiment qu’il est aimé »

    24 décembre 2025

    Erik Varden est l’évêque de Trondheim (Norvège) depuis 2019. Il est moine cistercien et s’est converti dans son adolescence. Il est un observateur attentif de la culture contemporaine. Mgr Varden est l’auteur de plusieurs livres, dont « Chasteté. Une réconciliation des sens ».

    — Vivons-nous déjà dans une ère post-séculière ?

    Je pense que oui. Je l’ai dit à plusieurs reprises au cours de l’année dernière. Et je pense que cela est assez évident en Europe du Nord.

    Nous vivons manifestement à une époque où les tendances culturelles changent extrêmement rapidement. Et les catholiques aiment être rassurés. Nous sommes donc tous très intéressés à pouvoir dire : « Oh, tout ce que nous avons vécu ces dernières années n’était qu’un accident de parcours ». Eh bien, espérons que ce soit le cas. Mais je pense que tout dépend de la façon dont nous accueillons maintenant ce moment providentiel, du type de témoignage que nous donnons, du type d’enseignement que nous proclamons.

    — À quoi attribuez-vous le regain d’intérêt pour le catholicisme ?

    Eh bien, je pense que les gens sont attirés par le catholicisme parce qu’il est vrai. C’est une raison fondamentale. Et je pense que de plus en plus de gens sont déçus par beaucoup d’autres options. Avec tant d’effondrements, en termes d’anciennes certitudes et d’anciennes institutions, avec la grande fragilité de notre vie politique, culturelle, écologique et financière, les gens recherchent des repères qui promettent de résister au déluge.

    — On pourrait donc penser que cette nouvelle curiosité pour la religion n’est qu’une bouée de sauvetage à laquelle s’accrocher, mais qu’elle ne produit pas de véritables conversions.

    Non, non. Je veux dire, je rencontre ces conversions presque quotidiennement. Je dois donc simplement dire qu’une telle affirmation ne correspond pas à la réalité empirique.

    — Nous assistons également au sein de l’Église catholique à un certain essor de ce qu’on appelle le mouvement traditionaliste, très lié à la liturgie et aux jeunes, et qui provoque certaines tensions générationnelles. Qu’en pensez-vous ?

    Eh bien, ce phénomène se produit dans certains endroits, mais pas partout. Je pense à la Pologne, par exemple. Je pense à notre propre pays. Je ne dirais pas que cela provoque beaucoup de tensions. Je pense plutôt que cela est lié à une recherche de repères, d’une certaine beauté. Et l’Église offre cela.

    Tant que nous célébrons bien les mystères… Il existe un principe très simple qui dit que, lorsque vous célébrez la liturgie, « faites ce qui est écrit en rouge et dites ce qui est écrit en noir » [dans le missel catholique, les instructions que le prêtre doit suivre sont écrites en rouge, et les prières qu’il doit prononcer, en noir]. En d’autres termes, faites simplement ce que disent les rubriques et laissez résonner les paroles de l’Église, pas seulement vos propres petites paroles. Je pense que tant que nous nous en tenons à cela, c’est convaincant.

    — On interprète parfois cela comme un phénomène rétrograde, un rejet du Concile Vatican II…

    Je pense qu’il est temps d’être un peu plus souples par rapport à ces paramètres, qui la plupart du temps ne correspondent pas à la réalité.

    Écoutez, on a beaucoup écrit sur le pèlerinage de Chartres. C’est un grand pèlerinage à pied qui se fait chaque Pentecôte, de Paris à Chartres. Et cela a un aspect traditionnel, voire traditionaliste. L’année dernière, il y a eu plus de participants que jamais et les jeunes qui y ont participé étaient tout simplement impossibles à catégoriser, car ils n’étaient pas tous des traditionalistes acharnés portant des cravates ou des jupes longues. Certains d’entre eux, vous savez, pourraient aller à un service charismatique le samedi, assister à la messe en latin le dimanche, et aller travailler avec Caritas et nourrir les pauvres le lundi.

    Ce que je veux dire, c’est que tant que nous continuerons à vouloir classer les gens dans ces catégories étroites, nous ne comprendrons tout simplement pas ce qui se passe.

    — Pensez-vous que le discours progressistes contre conservateurs s’infiltre dans l’Église ?

    Il s’y est infiltré depuis longtemps. Mais je pense que nous devons le renverser doucement, gentiment et peut-être même avec humour.

    Je pense à un érudit bénédictin allemand. C’est un moine de Gerlew qui s’appelle Elmar Salman. Il a enseigné à Saint-Anselme pendant de nombreuses années, et j’ai assisté à sa conférence d’adieu à Rome. Il y a déclaré, avec sa lucidité caractéristique : « Depuis des décennies, les gens essaient de me classer comme conservatore ou liberale ». Puis il a ajouté en italien : « Io preferisco pensarmi classico e liberante » (Je préfère me considérer comme classique et libérateur). Je pense que c’est un excellent exemple de la manière dont nous pouvons approfondir cette conversation et la rendre beaucoup plus fructueuse.

    — Mais ne pensez-vous pas que le christianisme est en train d’émerger comme une identité politique ?

    Il y a certainement des acteurs qui veulent le revendiquer comme tel.

    Nous devons être très prudents face à l’instrumentalisation des symboles et du vocabulaire chrétiens, et face à toute cette rhétorique de choc des civilisations.

    Je pense que nous devons continuer à insister sur le fait qu’il n’est pas légitime d’instrumentaliser la foi à des fins séculières. La foi est censée éclairer, enrichir et approfondir la sphère séculière, mais elle ne peut être prise en otage par celle-ci.

    — Alors, quelle est selon vous la responsabilité d’un chrétien aujourd’hui ?

    Je voudrais citer ce conseil de saint Antoine : « Laisse le Christ être l’air que tu respires ». Il faut essayer de mener une vie chrétienne cohérente et crédible pour témoigner de l’espérance, pratiquer l’hospitalité, témoigner de ce que signifie être un être humain, être attentif à la fois à la douleur et à la joie de la condition humaine, et cultiver une fascination humble pour le mystère de Dieu.

    — Dans votre récente conférence pour First Things, vous parlez de la découverte « linguistique » que l’être humain peut faire lorsqu’il se rend compte qu’« il y a plus à dire et d’autres façons de le dire ». Comment l’Église catholique, qui a déçu beaucoup de gens à cause des cas d’abus, peut-elle convaincre qu’elle est dépositaire de vérités éternelles ?

    Tout d’abord, en étant sincères et en poursuivant ce travail de réparation dans la justice et les larmes. Et peut-être que cette expérience peut aussi nous apprendre à être plus humbles, et donc plus accueillants.

    Pour poursuivre la métaphore du langage, il y a quelque chose qui représente un défi important, mais aussi joyeux, pour l’Église : comment retrouver et renouer avec son langage spécifique. Au cours des dernières décennies, l’Église catholique a eu le sentiment que le monde lui échappait. Et elle n’a cessé de courir pour le rattraper, en apprenant à parler comme lui, à utiliser les signes qu’il utilise et à se mettre sur TikTok et Instagram. Tant que nous continuerons ainsi, nous nous condamnerons simplement à l’insignifiance, car nous aurons toujours au moins dix longueurs de retard sur tous les autres. Mais si nous parlons notre propre langage, si nous parlons le langage des Écritures, le langage de la liturgie, le langage de notre rituel, le langage des sacrements, nous pouvons dire des choses étonnamment fraîches, originales et belles. Et les gens les écoutent.

    — Vous avez écrit, entre autres, sur la chasteté et la souffrance rédemptrice. Ce ne sont pas exactement les thèmes qui viennent immédiatement à l’esprit quand on pense à ce que les gens veulent entendre aujourd’hui… Est-ce que c’est vraiment ce qu’ils veulent ?

    Je suis toujours étonné de l’accueil réservé au livre sur la chasteté. Cela fait trois ans qu’il a été publié et pendant longtemps, il ne s’est pas passé un jour sans que je reçoive des lettres et des courriels, ou même que des gens viennent me voir.

    J’ai été profondément ému de me retrouver devant des publics de jeunes à Oslo, aux États-Unis, au Portugal, en Espagne… Et je constate une grande ouverture d’esprit et un réel désir d’aborder ces questions.

    — Quel est selon vous le rapport avec la recherche du sens du corps aujourd’hui ?

    Je pense que cela a tout à voir. Au Portugal, Quand craque la solitude et Chasteté ont été publiés dans un seul livre, ce qui est tout à fait logique car ils traitent en réalité du même sujet, à savoir ce qu’est un être humain. Le premier parle de la mémoire et des aspirations de l’esprit. Le second, de la manière de gérer la faim, les désirs et les espoirs du corps.

    — Dans votre dernier livre, vous parlez du poème de Gilgamesh et dites que le protagoniste pourrait être un de nos contemporains. Vous le décrivez ainsi : « Un mégalomane amoureux de son habileté mais incertain de son but, obsédé par la mort, perplexe face au désir de son cœur, courageux face à l’absurde mais accablé par la tristesse ». Ces afflictions sont-elles propres à notre époque ? Les hommes et les femmes contemporains sont-ils ainsi ?

    Oui. J’utilise délibérément l’épopée de Gilgamesh car c’est l’une des premières manifestations littéraires que nous connaissons.

    Il y a aussi une petite note d’ironie dans mon choix, car un autre thème que j’essaie d’exprimer de temps en temps est que je ne suis pas du tout convaincu par la doctrine de l’exceptionnalisme culturel qui présuppose que nous sommes très différents aujourd’hui, que personne ne peut nous comprendre, que nous fonctionnons de manière très différente et que nous n’avons rien à apprendre de ce que quelqu’un a dit ou vécu auparavant.

    C’est tout simplement merveilleux de pouvoir pointer du doigt ce texte, vieux de près de 3 000 ans, et de dire : « Eh bien, regarde ce type. Il est exactement comme toi. »

    — Est-ce ce que vous voulez dire quand vous dites que la littérature peut sauver des vies ?

    En partie, oui. Cette capacité tient principalement au simple fait que la littérature (quand elle mérite ce nom, car tous les livres ne sont pas de la littérature) est une tentative d’exprimer ce qu’est réellement la vie.

    Je pense qu’elle peut sauver des vies dans le sens où elle peut m’aider à comprendre que je ne suis pas seul, que quelqu’un d’autre a déjà vécu cela avant moi, que même si dans mon entourage immédiat personne ne peut me comprendre, ou si je pense que personne ne comprend ce qui se passe en moi, je peux tomber sur un roman contemporain, ou un poème du XVIIIe siècle, ou une page des Métamorphoses d’Ovide, et me dire : « Ah ! Mais c’est moi ! ».

    — Et qu’en est-il de la musique ?

    Je pense que la musique nous rapproche autant que possible de l’éternité dans cette vie. Elle a une capacité merveilleuse, celle d’exprimer l’inexprimable. Ce qui dépasse le pouvoir des mots peut, d’une certaine manière, être transmis par la musique.

    — En parlant de culture, vous avez choisi de faire une série sur la sagesse des Pères du désert. Et là encore, je dirais que ce n’est pas la première chose qui vient à l’esprit quand on pense à la culture contemporaine. Que peuvent-ils nous offrir aujourd’hui ?

    Oh, tant de choses. Du réalisme, de la sagesse, un esprit de foi inébranlable, très souvent une délicieuse autodérision, et le sens des proportions.

    — Quel est le plus grand défi qui empêche l’homme contemporain de rencontrer Dieu ?

    Je pense que le plus grand défi est de croire vraiment que nous sommes aimés.

    — Que souhaitez-vous que l’être humain comprenne davantage sur lui-même en ce moment ?

    Son potentiel pour la vie éternelle.

    Source : https://www.aceprensa.com/religion/erik-varden-el-mayor-desafio-del-hombre-contemporaneo-es-creerse-de-verdad-que-es-amado/. Ce texte a été traduit de l’espagnol par Stéphane Seminckx.

  • Saint Jean, apôtre et évangéliste (27 décembre)

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    Saint-Jean-lévangéliste-300x246.jpgNous publions ci-dessous le texte intégral de la catéchèse que le pape Benoît XVI a prononcée au cours de l’audience générale du mercredi 5 juillet 2006. (source)

    Chers frères et sœurs,

    Nous consacrons notre rencontre d’aujourd’hui au souvenir d’un autre membre très important du collège apostolique: Jean, fils de Zébédée et frère de Jacques. Son nom, typiquement juif, signifie «le Seigneur a fait grâce ». Il était en train de réparer les filets sur la rive du lac de Tibériade, quand Jésus l’appela avec son frère (cf. Mt 4, 21; Mc 1, 19). Jean appartient lui aussi au petit groupe que Jésus emmène avec lui en des occasions particulières. Il se trouve avec Pierre et Jacques quand Jésus, à Capharnaüm, entre dans la maison de Pierre pour guérir sa belle-mère (cf. Mc 1, 29); avec les deux autres, il suit le Maître dans la maison du chef de la synagogue Jaïre, dont la fille sera rendue à la vie (cf. Mc 5, 37); il le suit lorsqu’il gravit la montagne pour être transfiguré (cf. Mc 9, 2); il est à ses côtés sur le Mont des Oliviers lorsque, devant l’aspect imposant du Temple de Jérusalem, Jésus prononce le discours sur la fin de la ville et du monde (cf. Mc 13, 3); et, enfin, il est proche de lui quand, dans le jardin de Gethsémani, il s’isole pour prier le Père avant la Passion (cf. Mc 14, 33). Peu avant Pâques, lorsque Jésus choisit deux disciples pour les envoyer préparer la salle pour la Cène, c’est à lui et à Pierre qu’il confie cette tâche (cf. 22, 8).

    Cette position importante dans le groupe des Douze rend d’une certaine façon compréhensible l’initiative prise un jour par sa mère: elle s’approcha de Jésus pour lui demander que ses deux fils, Jean précisément et Jacques, puissent s’asseoir l’un à sa droite et l’autre à sa gauche dans le Royaume (cf. Mt 20, 20-21). Comme nous le savons, Jésus répondit en posant à son tour une question: il demanda s’ils étaient disposés à boire la coupe qu’il allait lui-même boire (cf. Mt 20, 22). L’intention qui se trouvait derrière ces paroles était d’ouvrir les yeux des deux disciples, les introduire à la connaissance du mystère de sa personne et leur laisser entrevoir l’appel futur à être ses témoins jusqu’à l’épreuve suprême du sang. Peu après, en effet, Jésus précisa qu’il n’était pas venu pour être servi, mais pour servir et donner sa propre vie en rançon pour une multitude (cf. Mt 20, 28). Les jours qui suivent la résurrection, nous retrouvons « les fils de Zébédée » travaillant avec Pierre et plusieurs autres disciples au cours d’une nuit infructueuse, qui sera suivie, grâce à l’intervention du Ressuscité, de la pêche miraculeuse: c’est « le disciple que Jésus aimait » qui reconnaîtra en premier « le Seigneur » et l’indiquera à Pierre (cf. Jn 21, 1-13).

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  • Intende qui regis Israël : le plus ancien hymne de Noël attribué à saint Ambroise de Milan

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    « Intende, qui regis Israel ». Bien que cet hymne ne soit pas attribué à Ambroise lorsqu'Augustin le cite, des sources du Ve siècle nous apprennent que cet hymne est de l'évêque de Milan. Walsh confirme la probabilité qu'Ambroise ait institué le 25 décembre la fête de la Nativité à Milan, une pratique déjà en vigueur à Rome à cette époque.

    Prête l'oreille, ô roi d'Israël, toi
    qui sièges au-dessus des Chérubins,
    présente-toi devant Éphraïm,
    déploie ta puissance et viens.

    Rédempteur des Gentils, viens ;
    manifeste la naissance issue du sein de la vierge ;
    que chaque génération soit émerveillée ;
    une telle naissance est digne de notre Dieu.

    Non pas issue de la semence de l'époux,
    mais du souffle mystique de l'Esprit,
    la Parole de Dieu s'est faite chair
    et a prospéré comme fruit du sein de Marie.

    Le ventre de la vierge commence à se gonfler ;
    sa virginité reste intacte :
    l'étendard de ses vertus brille ;
    Dieu, dans son temple, vit et s'anime.

    Qu'il sorte de sa chambre,
    cour royale de chasteté,
    tel un géant de sa double nature,
    impatient de se hâter en chemin.

    Il part d'abord du Père,
    puis retourne à son Père ;
    il descend dans les royaumes d'en bas,
    puis remonte vers la demeure de Dieu.

    Tu es l'égal du Père éternel ;
    revêts-toi de ton trophée de chair
    et fortifie par ta puissance constante
    les faiblesses de notre corps.

    Ta crèche resplendit désormais,
    la nuit exhale une lumière inconnue ;
    une lumière que jamais la nuit ne pourra obscurcir,
    et qui brillera d'une foi inébranlable.

    Pour en savoir plus sur Ambroise, l'auteur de cantiques, consultez les articles ici et ici

  • Le pape Léon XIV renoue avec la tradition lors du premier Noël de son pontificat

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    De Victoria Cardiel sur CNA :

    Le pape Léon XIV renoue avec la tradition lors du premier Noël de son pontificatemail sharing buttonsharethis sharing button

    24 décembre 2025

    Le pape Léon XIV a célébré son premier Noël au Vatican en renouant avec la tradition de la messe de Noël célébrée le 25 décembre en la basilique Saint-Pierre, une tradition qu'aucun pape n'a perpétuée depuis 1994.

    Les célébrations de Noël — qui seront marquées par la fermeture des Portes Saintes — ont débuté le soir du 24 décembre, lorsque le pape a célébré la messe de la veille de Noël à 22 heures, heure locale, en la basilique Saint-Pierre.

    Cet horaire marque un changement par rapport aux dernières années, où, pendant la pandémie de COVID-19, la messe de la veillée de Noël avait été déplacée à 19 heures. Avant 2009, elle avait lieu à minuit, jusqu'à ce que Benoît XVI décide de l'avancer.

    La tradition de la messe de Noël rétablie

    Le 25 décembre à 10 heures, Léon XIV a célébré également la messe de Noël dans la basilique Saint-Pierre, une coutume qui n'a pas été observée depuis le pontificat de saint Jean-Paul II. Ensuite, à midi, il a donné la traditionnelle bénédiction « urbi et orbi » (« à la ville et au monde ») depuis le balcon central.

    Le 31 décembre, le pape présidera à 17 h, en la basilique Saint-Pierre, les premières vêpres et le Te Deum en action de grâce pour l'année qui s'achève. Le 1er janvier 2026, solennité de Marie, Mère de Dieu, et 59e Journée mondiale de la paix, il célébrera la messe à 10 h.

    Le message de cette Journée mondiale de la paix, intitulé « Que la paix soit avec vous tous : vers une paix désarmée et désarmante », propose une vision qui rejette la peur, les menaces, la violence et les armes, et plaide pour une paix capable de générer la confiance, l'empathie et l'espoir.

    L'un des moments les plus importants du temps de Noël aura lieu le 6 janvier, jour de la solennité de l'Épiphanie. À 9 h 30, le pape Léon XIV fermera la Porte Sainte de la basilique Saint-Pierre et célébrera la messe de clôture du Jubilé ordinaire de 2025. Les jours précédents, les Portes Saintes des autres basiliques papales – Sainte-Marie-Majeure, Saint-Jean-de-Latran et Saint-Paul-hors-les-Murs – auront également été fermées.

    Ce sera la deuxième fois dans l'histoire qu'une année jubilaire est clôturée par un pape différent de celui qui l'a inaugurée, comme ce fut le cas en 1700, lorsque Innocent XII a ouvert l'année sainte et Clément XI l'a clôturée.

    Les célébrations de Noël s'achèveront liturgiquement le 11 janvier, fête du Baptême du Seigneur. Ce jour-là, le pape célébrera la messe et baptisera plusieurs enfants d'employés du Vatican dans la chapelle Sixtine à 9 h 30, perpétuant ainsi une tradition instituée par saint Jean-Paul II.

    Une crèche pro-vie

    L'esprit de Noël est déjà palpable au Vatican depuis l'illumination du sapin et l'inauguration de la crèche place Saint-Pierre le 15 décembre, événements présidés par sœur Raffaella Petrini, présidente du Gouvernorat de l'État de la Cité du Vatican. Le même jour, Léon XIII a reçu les donateurs du sapin et des crèches, également installées dans la salle d'audience Paul VI.

    La crèche installée dans cet espace, intitulée « Nacimiento Gaudium » (« La naissance qui apporte la joie ») et provenant du Costa Rica, a suscité un intérêt particulier. Jusqu’au 25 décembre, elle représente la Vierge Marie enceinte, symbolisant l’attente et l’espoir.

    Les figurines reposent sur 28 000 rubans blancs portant les noms ou pseudonymes d'enfants sauvés de l'avortement, tandis que dans la crèche, 420 rubans jaunes affichent des messages d'enfants malades hospitalisés.

    Pause à Castel Gandolfo

    Après Noël, le pape se rendra à Castel Gandolfo le 26 décembre pour quelques jours de repos, sans pour autant renoncer à présider les principaux événements liturgiques ni à rencontrer les fidèles lors des grandes fêtes. Par ailleurs, les 7 et 8 janvier, il réunira à Rome tous les cardinaux du monde pour son premier consistoire ordinaire depuis le conclave qui l'a élu.

  • Le message urbi et orbi du pape Léon XIV pour le jour de Noël 2025

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    MESSAGE URBI ET ORBI
    DU PAPE LÉON XIV

    NOËL 2025

    Loggia centrale de la basilique Saint-Pierre
    Jeudi 25 décembre 2025

    Chers frères et sœurs !

    « Tous ensemble, réjouissons-nous dans le Seigneur : notre Sauveur est né sur terre ! Aujourd’hui, pour nous, descend du ciel la paix véritable » (Antienne d’ouverture de la messe de la nuit de Noël). Ainsi chante la liturgie dans la nuit de Noël, et ainsi résonne dans l’Église l’annonce de Bethléem : l’Enfant né de la Vierge Marie est le Christ Seigneur, envoyé par le Père pour nous sauver du péché et de la mort. Il est notre paix, Celui qui a vaincu la haine et l’inimitié par l’amour miséricordieux de Dieu. C’est pourquoi « la Nativité du Seigneur est une Nativité de paix » (Saint Léon le Grand, Sermon 26).

    Jésus est né dans une étable, car il n’y avait pas de place pour Lui dans le logement. À sa naissance, sa mère Marie « l’emmaillota et le coucha dans une mangeoire » (cf. Lc 2, 7). Le Fils de Dieu, par qui tout a été créé, n’est pas accueilli et son berceau est une pauvre mangeoire d’animaux.

    Le Verbe éternel du Père, que les cieux ne peuvent contenir, a choisi de venir au monde ainsi. Par amour, il a voulu naître d’une femme, afin de partager notre humanité ; par amour, il a accepté la pauvreté et le rejet et il s’est identifié à ceux qui sont mis au rebut et exclus.

    Dans la Nativité de Jésus se profile déjà le choix fondamental qui guidera toute la vie du Fils de Dieu, jusqu’à sa mort sur la croix : le choix de ne pas nous faire porter le poids du péché, mais de le porter Lui-même pour nous, d’en assumer la charge. Lui seul pouvait le faire. Mais Il a montré en même temps ce que nous seuls pouvons faire, c’est-à-dire assumer chacun notre part de responsabilité. Oui, car Dieu, qui nous a créés sans nous, ne peut nous sauver sans nous (cf. saint Augustin, Discours 169, 11. 13), sans notre libre volonté d’aimer. Celui qui n’aime pas n’est pas sauvé, il est perdu. Et celui qui n’aime pas son frère qu’il voit, ne peut aimer Dieu qu’il ne voit pas (cf. 1 Jn 4, 20).

    Sœurs et frères, voici le chemin de la paix : la responsabilité. Si chacun – à tous les niveaux –, au lieu d’accuser les autres, reconnaissait d’abord ses propres fautes et demandait pardon à Dieu, et en même temps se mettait à la place de ceux qui souffrent, se montrait solidaire des plus faibles et des opprimés, alors le monde changerait.

    Jésus-Christ est notre paix avant tout parce qu’Il nous libère du péché, ensuite parce qu’Il nous montre la voie à suivre pour surmonter les conflits, tous les conflits, des conflits interpersonnels aux conflits internationaux. Sans un cœur libéré du péché, un cœur pardonné, on ne peut être un homme ou une femme pacifique, artisan de paix. C’est pour cela que Jésus est né à Bethléem et qu’il est mort sur la croix : pour nous libérer du péché. Il est le Sauveur. Avec sa grâce, nous pouvons et devons tous faire notre part pour rejeter la haine, la violence, la confrontation et pratiquer le dialogue, la paix, la réconciliation.

    En ce jour de fête, je souhaite adresser un salut chaleureux et paternel à tous les chrétiens, en particulier à ceux qui vivent au Moyen-Orient que j’ai voulu rencontrer récemment lors de mon premier Voyage apostolique. J’ai écouté leurs craintes et je connais bien leur sentiment d’impuissance face à des dynamiques de pouvoir qui les dépassent. L’Enfant qui naît aujourd’hui à Bethléem est le même Jésus qui dit : « Ayez la paix en moi. Dans le monde, vous avez à souffrir, mais courage ! Moi, je suis vainqueur du monde ! » (Jn 16, 33).

    Nous L’invoquons, pour la justice, la paix et la stabilité pour au Liban, en Palestine, en Israël et en Syrie, confiants dans ces paroles divines : « L’œuvre de la justice sera la paix, et la pratique de la justice, le calme et la sécurité pour toujours » (Is 32, 17).

    Nous confions au Prince de la Paix tout le continent européen, en Lui demandant de continuer d’y inspirer un esprit communautaire et de collaboration, fidèle à ses racines chrétiennes et à son histoire, un esprit solidaire et accueillant envers ceux qui sont dans le besoin. Nous prions tout particulièrement pour le peuple ukrainien meurtri : que le bruit des armes cesse et que les parties impliquées, soutenues par l’engagement de la communauté internationale, trouvent le courage de dialoguer de manière sincère, directe et respectueuse.

    Nous supplions l’Enfant de Bethléem d’accorder la paix et la consolation aux les victimes de toutes les guerres en cours dans le monde, en particulier celles qui sont oubliées, et pour tous ceux qui souffrent à cause de l’injustice, de l’instabilité politique, de la persécution religieuse et du terrorisme. Je pense en particulier à nos frères et sœurs du Soudan, du Soudan du Sud, du Mali, du Burkina Faso et de la République Démocratique du Congo.

    En ces derniers jours du Jubilé de l’Espérance, prions le Dieu-fait-homme pour le cher peuple d’Haïti, afin que cesse toute forme de violence dans le pays et qu’il puisse progresser sur la voie de la paix et de la réconciliation.

    Que l’Enfant Jésus inspire tous ceux qui, en Amérique latine, ont des responsabilités politiques afin que, face aux nombreux défis, la place soit donnée au dialogue pour le bien commun et non pas aux préjugés idéologiques et partisans.

    Nous demandons au Prince de la Paix d’éclairer le Myanmar de la lumière d’un avenir de réconciliation. Qu’Il redonne espérance aux jeunes générations, qu’Il guide le peuple birman sur les chemins de la paix et qu’Il accompagne ceux qui sont privés de logement, de sécurité ou de confiance en l’avenir.

    Nous Lui demandons de rétablir l’ancienne amitié entre la Thaïlande et le Cambodge et que les parties concernées continuent à œuvrer pour la réconciliation et la paix.

    Nous Lui confions également les populations d’Asie du Sud et d’Océanie, durement éprouvées par de récentes et dévastatrices catastrophes naturelles qui ont frappé durement des populations entières. Face à ces épreuves, j’invite chacun à renouveler avec conviction l’engagement commun à venir en aide à ceux qui souffrent.

    Chers frères et sœurs,

    dans l’obscurité de la nuit, « la vraie Lumière qui éclaire tout homme » est venue au monde (Jn 1, 9), mais « les siens ne l’ont pas reçue » (Jn 1, 11). Ne nous laissons pas gagner par l’indifférence envers ceux qui souffrent, car Dieu n’est pas indifférent à nos misères.

    En se faisant homme, Jésus prend sur Lui notre fragilité, Il s’identifie à chacun de nous : à ceux qui n’ont plus rien et ont tout perdu, comme les habitants de Gaza ; à ceux qui sont en proie à la faim et à la pauvreté, comme le peuple yéménite ; à ceux qui fuient leur terre pour chercher un avenir ailleurs, comme les nombreux réfugiés et migrants qui traversent la Méditerranée ou parcourent le continent américain ; à ceux qui ont perdu leur emploi et ceux qui en cherchent un, comme tant de jeunes qui peinent à trouver un travail ; à ceux qui sont exploités, comme les trop nombreux travailleurs sous-payés ; à ceux qui sont en prison et vivent souvent dans des conditions inhumaines.

    Au cœur de Dieu parvient l'invocation de paix qui monte de chaque terre, comme l'écrit un poète :

    « Non pas la paix d'un cessez-le-feu,
    ni même la vision du loup et de l'agneau,
    mais plutôt
    comme dans le cœur quand l'excitation est passée
    et qu'on ne peut parler que d'une grande fatigue.
    […]
    Qu'elle vienne
    comme les fleurs sauvages,
    à l'improviste, car le champ
    en a besoin : une paix sauvage ». [1]

    En ce jour saint, ouvrons notre cœur à nos frères et sœurs qui sont dans le besoin et dans la peine. Ce faisant, nous l’ouvrons à l’Enfant Jésus qui nous accueille à bras ouverts et nous révèle sa divinité : « Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 12).

    Dans quelques jours, l’année jubilaire prendra fin. Les portes saintes se fermeront, mais le Christ, notre espérance, restera toujours avec nous ! Il est la Porte toujours ouverte qui nous introduit dans la vie divine. Telle est la bonne nouvelle de ce jour : l’Enfant qui est né est Dieu –fait-homme ; Il ne vient pas pour condamner mais pour sauver ; son apparition n’est pas éphémère, Il vient pour rester et se donner Lui-même. En Lui, chaque blessure est guérie et chaque cœur trouve repos et paix. « La Nativité du Seigneur est une Nativité de paix ».

    Je souhaite de tout cœur à chacun un serein et saint Noël !


    [1] Y. Amichai, « Wildpeace », dans The Poetry of Yehuda Amichai, Farrar, Straus and Giroux, 2015.

  • Homélie du pape Léon XIV pour la messe du jour de Noël

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    SOLENNITÉ DU NOËL DU SEIGNEUR
    MESSE DU JOUR

    HOMÉLIE DU PAPE LÉON XIV

    Basilique Saint-Pierre
    Jeudi 25 décembre 2025

    Chères sœurs et chers frères !

    « Éclatez en cris de joie » (Is 52, 9), crie le messager de paix à ceux qui se trouvent parmi les ruines d’une ville à reconstruire entièrement. Même s’ils sont poussiéreux et blessés, ses pieds sont beaux – écrit le prophète (cf. Is 52, 7) – car, à travers des routes longues et accidentées, ils ont apporté une joyeuse nouvelle, dans laquelle tout renaît désormais. C’est un jour nouveau ! Nous participons nous aussi à ce tournant, auquel personne ne semble encore croire : la paix existe et elle est déjà parmi nous.

    « Je vous laisse la paix, je vous donne ma paix ; ce n’est pas à la manière du monde que je vous la donne » (Jn 14, 27). C’est ce que Jésus a dit à ses disciples, auxquels il venait de laver les pieds, messagers de paix qui, à partir de ce moment-là, devraient courir de par le monde, sans se lasser, pour révéler à tous « de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 12). Aujourd’hui, donc, non seulement nous sommes surpris par la paix qui est déjà là, mais nous célébrons comment ce don nous a été fait. En effet, c’est dans le comment que brille la différence divine qui nous fait éclater en chants de joie. Ainsi, dans le monde entier, Noël est par excellence une fête de musique et de chants.

    Le prologue du quatrième Évangile est également un hymne qui a pour protagoniste le Verbe de Dieu. Le “verbe” est un mot qui agit. C’est une caractéristique de la Parole de Dieu : elle n’est jamais sans effet. À bien y regarder, beaucoup de nos paroles produisent elles aussi des effets, parfois indésirables. Oui, les mots agissent. Mais voici la surprise que nous réserve la liturgie de Noël : le Verbe de Dieu apparaît et ne sait pas parler, il vient à nous comme un nouveau-né qui ne fait que pleurer et vagir. Il « s’est fait chair » (Jn 1, 14) et, même s'il grandira et apprendra un jour la langue de son peuple, pour l'instant, seule sa présence simple et fragile parle. La « chair », c’est la nudité radicale qui, à Bethléem et au Calvaire, manque aussi de mots ; tout comme n’ont pas non plus de paroles beaucoup de nos frères et sœurs dépouillés de leur dignité et réduits au silence. La chair humaine demande des soins, invoque l’accueil et la reconnaissance, recherche des mains capables de tendresse et des esprits disposés à l’écoute, désire de bonnes paroles.

    « Il est venu chez lui, et les siens ne l’ont pas reçu. Mais à tous ceux qui l’ont reçu, il a donné de pouvoir devenir enfants de Dieu » (Jn 1, 11). Voici la manière paradoxale dont la paix est déjà parmi nous : le don de Dieu nous engage, il cherche à être accueilli et suscite le dévouement. Il nous surprend parce qu’il s’expose au rejet, il nous enchante parce qu’il nous arrache à l’indifférence. Devenir enfants de Dieu est un véritable pouvoir : un pouvoir qui reste enfoui tant que nous restons détachés des pleurs des enfants et de la fragilité des personnes âgées, du silence impuissant des victimes et de la mélancolie résignée de ceux qui font le mal qu’ils ne veulent pas.

    Comme l’a écrit le bien-aimé Pape François, pour nous ramener à la joie de l’Évangile : « Parfois, nous sommes tentés d’être des chrétiens qui se maintiennent à une prudente distance des plaies du Seigneur. Pourtant, Jésus veut que nous touchions la misère humaine, la chair souffrante des autres. Il attend que nous renoncions à chercher ces abris personnels ou communautaires qui nous permettent de nous garder distants du cœur des drames humains, afin d’accepter vraiment d’entrer en contact avec l’existence concrète des autres et de connaître la force de la tendresse » (Exhort. ap. Evangelii gaudium, n. 270).

    Chers frères et sœurs, puisque le Verbe s’est fait chair, c’est désormais la chair qui parle, qui crie le désir divin de nous rencontrer. Le Verbe a établi parmi nous sa fragile tente. Et comment ne pas penser aux tentes de Gaza, exposées depuis des semaines à la pluie, au vent et au froid, et à celles de tant d’autres réfugiés et déplacés sur chaque continent, ou aux abris de fortune de milliers de personnes sans-abri dans nos villes ? Fragile est la chair des populations vulnérables, éprouvées par tant de guerres en cours ou terminées, laissant derrière elles des ruines et des blessures ouvertes. Fragiles sont les esprits et les vies des jeunes contraints de prendre les armes, qui, sur le front, ressentent l’absurdité de ce qui leur est demandé et le mensonge dont sont imprégnés les discours grandiloquents de ceux qui les envoient mourir.

    Lorsque la fragilité d’autrui pénètre notre cœur, lorsque la douleur d’autrui brise nos certitudes granitiques, alors la paix commence déjà. La paix de Dieu naît d’un vagissement accueilli, d’un pleur entendu : elle naît parmi les ruines qui appellent une nouvelle solidarité, elle naît de rêves et de visions qui, comme des prophéties, inversent le cours de l’histoire. Oui, tout cela existe, car Jésus est le Logos, le sens à partir duquel tout a pris forme. « C’est par lui que tout est venu à l’existence, et rien de ce qui s’est fait ne s’est fait sans lui » (Jn 1, 3). Ce mystère nous interpelle depuis les crèches que nous avons construites, il nous ouvre les yeux sur un monde où la Parole résonne encore, “à maintes reprises et de bien des manières” (cf. He 1, 1), et nous appelle encore à la conversion.

    Certes, l’Évangile ne cache pas la résistance des ténèbres à la lumière, il décrit le chemin de la Parole de Dieu comme une route impraticable, semée d’embûches. Jusqu’à aujourd’hui, les authentiques messagers de paix suivent le Verbe sur cette voie, qui finit par atteindre les cœurs : des cœurs inquiets, qui désirent souvent précisément ce à quoi ils résistent. Ainsi, Noël motive de nouveau une Église missionnaire, la poussant sur les chemins que la Parole de Dieu lui a tracés. Nous ne servons pas une parole autoritaire – elles résonnent déjà partout – mais une présence qui suscite le bien, en connaît l’efficacité, n’en revendique pas le monopole.

    Voici le chemin de la mission : un chemin vers l’autre. En Dieu, chaque parole est une parole adressée, une invitation à la conversation, une parole qui n’est jamais la même. C’est le renouveau que le Concile Vatican II a promu et que nous ne verrons fleurir qu’en marchant ensemble avec l’humanité tout entière, sans jamais nous en séparer. Le contraire est mondain : avoir soi-même pour centre. Le mouvement de l’Incarnation est un dynamisme de conversation. Il y aura la paix lorsque nos monologues s’interrompront et que, fécondés par l’écoute, nous tomberons à genoux devant la chair nue de l’autre. La Vierge Marie est précisément en cela la Mère de l’Église, l’Étoile de l’évangélisation, la Reine de la paix. En elle, nous comprenons que rien ne naît de la démonstration de la force et que tout renaît de la puissance silencieuse de la vie accueillie.