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Benoît XVI dément des rumeurs sur sa renonciation

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VT-IT-ART-32340-senza_zucchetto_ansa_01.jpgDe Andrea Tornielli (Vatican Insider - La Stampa) (traduction par nos soins)

Ratzinger : ma renonciation est valide, il est absurde de faire des spéculations

« Il n'y a pas le moindre doute sur la validité de ma renonciation au ministère pétrinien » et « les spéculations » à ce propos sont « tout simplement absurdes ». Joseph Ratzinger n'a pas été contraint de démissionner, il ne l'a pas fait en raison de pressions ou de complots : sa renonciation est valable et aujourd'hui dans l'Eglise, il n'existe aucune « dyarchie », aucun gouvernement à deux têtes. Il y a un pape régnant dans le plein exercice de ses fonctions, François et un émérite dont « le but unique et définitif » de ses journées est de prier pour son successeur.

Du monastère « Mater Ecclesiae » dans l'enceinte du Vatican, le pape émérite Benoît XVI a pris sa plume et du papier pour tordre le cou aux interprétations concernant son geste historique d'il y a un an, relancées dans différents médias et sur le web à l'occasion du premier anniversaire de sa renonciation. Il l'a fait en réponse à une lettre avec quelques questions que nous lui avions envoyées ces derniers jours, après avoir lu quelques commentaires sur la presse italienne et internationale a propos de sa démission. Sur un mode concis mais très précis, Joseph Ratzinger a répondu, niant les secrets présumés dans les coulisses de la renonciation et invitant ne pas faire peser des interprétations inappropriées sur les choix qu'il a faits comme celui de garder l'habit blanc même après avoir quitté son ministère d'évêque de Rome.

Comme on s'en rappellera, par une annonce sensationnelle et inattendue, le 11 février 2013, Benoît XVI informait les cardinaux réunis en consistoire de sa libre décision de démissionner "ingravescente aetate", pour des raisons d'âge: « Je suis arrivé à la certitude que mes forces, à mon âge avancé, ne sont plus aptes à exercer de façon appropriée le ministère pétrinien. » Il avait annoncé également que le siège apostolique serait vacant à partir du soir du 28 février : les cardinaux se seraient réunis pour procéder à l'élection d'un successeur. Dans les jours suivants, Ratzinger faisait savoir qu'il garderait le nom de Benoît XVI (qui apparaît également au bas de la lettre), qu'il serait désormais défini comme "Pape émérite" (ainsi qu'il est attesté également par l'en-tête imprimée sur la même lettre) et continuerait à porter l'habit blanc, bien que simplifié par rapport à celui du pape, à savoir sans le mantelet et sans la ceinture.

Au cours de la dernière audience du mercredi 27 février 2013, sur une place Saint-Pierre inondée de soleil et grouillante de fidèles, Benoît XVI avait dit: « ces derniers mois, j'ai senti que mes forces avaient diminué, et j'ai demandé à Dieu avec insistance, dans la prière, de m'éclairer de sa lumière pour me faire prendre la décision la plus juste non seulement pour mon propre bien mais pour le bien de l'Eglise. J'ai franchi ce pas en étant pleinement conscient de sa gravité et aussi de sa nouveauté, mais avec une profonde tranquillité d'esprit. Aimer l'Eglise signifie aussi avoir le courage de faire des choix difficiles, assumés, en donnant toujours la priorité au bien de l'Eglise et non aux siens propres ».

Et il avait ajouté que sa retraite, "cachée du monde" , ne signifiait pas un retour au privé. "Ma décision d'abandonner l'exercice actif du ministère, avait-il dit, ne remet pas cela en question. Pas de retour à la vie privée, à une vie de voyages, de réunions, de réceptions, de conférences, etc.. Je n'abandonne pas la Croix, mais je reste de façon nouvelle auprès du Seigneur crucifié. Je ne porte plus le pouvoir du ministère pour le gouvernement de l'Eglise, mais je reste dans le service de la prière, pour ainsi dire, dans l'enceinte de Saint-Pierre ". Ce sont précisément ces mots au sujet de son désir de rester "dans l'enceinte de Saint Pierre » qui ont amené certains à construire des hypothèses selon lesquelles la renonciation n'avait pas été vraiment libre ni donc valide, quasiment comme si Ratzinger avait voulu se tailler un rôle de "pape de l'ombre", c'est-à-dire ce qu'on peut imaginer de plus éloigné de sa sensibilité.

Après l'élection de François, les nouveautés de son pontificat, le choc qu'il a fait subir à l'Eglise par sa parole et son témoignage personnel, il était naturel que certains, ce qui se produit toujours à l'occasion d'un changement de pontificat, l'opposent à son prédécesseur. Une opposition que Benoît XVI lui-même a toujours refusée. Ces dernières semaines, à l'approche du premier anniversaire de la renonciation, certaines personnes sont allées plus loin, en faisant même l'hypothèse de l'invalidité de la démission de Benoît et donc de son rôle toujours actif et institutionnel à côté du pape régnant.

Le 16 février dernier, l'auteur de ces lignes, a envoyé un message au pape émérite avec quelques questions spécifiques relatives à ces interprétations. Deux jours plus tard, la réponse est venue. "Il n'y a pas le moindre doute - écrit Ratzinger dans son message- sur la validité de ma renonciation au ministère pétrinien. La seule condition de validité est la pleine liberté de la décision. Les spéculations sur la nullité de la renonciation sont tout simplement absurdes". En outre, que la possibilité de démissionner ait été prise en considération depuis longtemps était bien connu des personnes les plus proches de Ratzinger, et il l'a confirmé lui-même dans une interview avec le journaliste allemand Peter Seewald (« Lumière du monde », 2010): « si un pape se rend clairement compte qu'il n'est plus capable, physiquement, psychologiquement et spirituellement, d'exercer les obligations de sa charge, alors il a le droit et, dans certaines circonstances, aussi l'obligation de démissionner. »

Il était inévitable, un an après l'annonce -jamais un pape, en deux mille ans d'histoire de l'Eglise, n'avait renoncé en raison de son âge avancé- que l'on fasse la connexion entre ce geste sensationnel et le climat maléfique du Vatileaks et des complots au sein de la Curie romaine. Tout le pontificat de Benoît XVI fut un chemin de croix, tout particulièrement ces dernières années : tout d'abord en raison du scandale de la pédophilie qu'il a affronté courageusement sans invoquer un lobby ou des ennemis à l'extérieur de l'Eglise, mais plutôt la « persécution », le mal qui vient de l'intérieur de l'Eglise elle-même. Et ensuite à cause de la fuite de documents prélevés dans le bureau pontifical par le majordome Paolo Gabriele. La renonciation, par conséquent, a été mise en connexion avec ces contextes. Mais Benoît XVI avait expliqué, toujours dans le livre-entretien avec Seewald, que l'on ne quitte pas le navire au moment où la mer est déchaînée. C'est pour cela qu'avant d'annoncer sa démission, décision prise depuis longtemps et confiée à ses collaborateurs les plus proches depuis des mois, Ratzinger a attendu que l'affaire Vatileaks, le procès de Gabriele et l'enquête confiée à trois cardinaux aient trouvé leur conclusion. Ce n'est qu'après qu'il est parti.

Dans la lettre qu'il nous a envoyée, le pape émérite répond également aux questions sur la signification de l'habit blanc et du nom du pape. « Le maintien de l'habit blanc et du nom de Benoît - nous a-t-il écrit - est une chose d'ordre simplement pratique. Au moment de la cession, il n'y avait pas d'autres vêtements disponibles. En outre, je porte l'habit blanc d'une façon clairement distincte de celui du pape. Ici aussi, il s'agit de spéculations sans le moindre fondement. »

Une preuve claire et très significative de cette déclaration, Benoît XVI l'a donnée samedi dernier, le jour du consistoire auquel il a été invité par François. Ratzinger n'a pas voulu une place à part ni spéciale, il s'est assis dans un fauteuil identique à celui des cardinaux, dans un coin, dans les rangs des cardinaux évêques. Lorsque François, au début puis à la fin de la cérémonie, s'est approché pour le saluer et l'embrasser, Benoît a retiré de sa tête la calotte blanche par révérence, et aussi pour témoigner publiquement qu'il n'y a qu'un seul pape.

Ces dernières semaines, le théologien suisse Hans Küng avait cité quelques mots d'une lettre reçue de Benoît XVI au sujet de François. Des mots, une fois encore sans ambiguïté: "je suis reconnaissant de pouvoir être lié par une grande identité de vue et par une amitié de coeur avec le pape François. Aujourd'hui, je considère comme mon unique et dernier devoir de soutenir son pontificat dans la prière". Quelqu'un, sur le web, a tenté de mettre en doute l'authenticité de cette citation, ou en a redouté l'instrumentalisation. Nous avons également demandé confirmation de cela au pape émérite: "Le professeur Küng a cité littéralement et correctement les mots de la lettre que je lui ai adressée", a-t-il précisé de façon succincte. Avant de conclure avec l'espoir d'avoir répondu clairement et suffisamment aux questions que nous avions posées.

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