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Aller aux «périphéries»? Quand le «centre» est lui-même incertain…

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Lu sur le « metablog » (extraits) :

 « Je ne sais pas si vous retenu le maître-mot du discours ecclésial actuel, mais ils sont intéressants sur les perspectives caressées par certains esprits. On parle ainsi de «périphéries», d’«aller aux périphéries», L’exhortation s’adresse évidemment à l’Eglise qui doit être «en sortie». Quand on parle de «périphérie», on fait nécessairement référence à un centre, faute de quoi l’expression n’aurait aucun sens […]

En 1958, en 1962 ou en 1965, il y avait une Église dont la liturgie était relativement fixe et codifiée, des enfants qui disposaient d’un bagage catéchétique, des couples qui se mariaient au terme d’une cérémonie brève à l’ Église et une hiérarchie qui adhéraient nominalement à la doctrine de l’Église ; en 1958, en 1962 ou en 1965, il y avait encore assez de fidèles à qui l’on apprenait que Jésus était bien dans l’hostie ou qu’il fallait distinguer le péché mortel du péché véniel ; en 1958, en 1962 ou en 1965, il y avait encore des prêtres en soutane, que l’on considérait, à défaut de suivre leurs «directives», dont on gardait l’idée qu’ils étaient des hommes séparés du monde, selon toute une lignée terminologique qui partait grosso modo de la réforme tridentine ; en 1958, en 1962 ou en 1965, on apprenait au petit Marcel ou à la petite Thérèse qu’il fallait éviter le mal et faire le bien sur terre si on voulait aller au Ciel ; en 1958, en 1962 ou en 1965, il y avait encore ces congrégations religieuses fleurissantes, dont les frères ou les sœurs enseignaient ou étaient cloîtrés. Enfin – et surtout -, il y avait encore des pourcentages consistants de pratique religieuse, se comptant en dizaines, non en unités. Quant à la périphérie, c’était les ouvriers, les incroyants, les cocos ou les syndiqués ; c’était aussi ceux qui ne croyaient pas au Ciel, mais qui se vouaient à un engagement militant, politique ou syndical ; c’était aussi les hommes de science qui reprochaient à l’Eglise son retard, tout en demeurant admiratifs de sa stabilité et de sa rigueur. Mais ça, comme on dit, c’était avant. 

Car en 2015, le centre est aussi incertain que la périphérie, elle-même. Car l’Occident n’est pas reluisant religieusement parlant. C’est bien le problème. Le fidèle se confesse peu ou pas, et cela varie selon les profils de catholiques. Vous avez dit «profils»? Il y a justement une Eglise à plusieurs visages – pardon: vitesses… -, regroupant toutes les sensibilités. Cela prend une forme liturgique, mais avec le récent processus synodal sur la famille, on peut se demander si la pluralité ne s’étend pas aux discours moraux et aux mœurs ; après tout, il peut y avoir une forme extraordinaire de la morale, pour les cathos identitaires, traditionnels au sens très large, et une forme ordinaire pour les cathos moins immergés et plus soumis à la dilution de la transmission de la foi. Simple question. Quant à la foi, il faut ramer pour trouver le fidèle, dans la messe, qui sait ce qu’est l’état de grâce, la présence réelle dans l’hostie consacrée ou le purgatoire. S’ouvrir aux périphéries? Mais c’est faire comme si le centre, lui-même, n’avait pas été secoué par des décennies de crise: départ de prêtres et de religieux, crise catéchétique, disparition de congrégations religieuses qui se traduit forcément par leur moindre visibilité en raison des nécessités de vendre le patrimoine immobilier… Aujourd’hui, la situation de dilution du catholique est telle que l’on a même forgé l’expression de «pratiquants non croyants» pour désigner ces catholiques qui continuent à aller à la messe tout en affirmant ne plus adhérer à une partie de l’enseignement de l’Église et ne plus suivre ses prescriptions morales. Ainsi, les divorcés remariés n’ont pas attendu le luxueux et élitiste chemin pénitentiel (sorte d’avatar de l’interminable casuistique qui a trouvé une nouvelle forme), ni même un «éclaircissement» sur leur situation: ils communient tout court, peu importe ce que pense le prêtre… Enfin, les statistiques démontrent un effondrement de la pratique religieuse, au point même que les années 1980 finissent par apparaître comme des années fastes par rapport aux années 2010! On peut tout simplement se demander si le centre n’a pas tout simplement implosé – pour devenir aussi «pluriel» que les périphéries qu’il veut rejoindre…

Quant aux «périphéries» actuelles, elles perdent aussi de leur consistance : l’incroyant d’aujourd’hui n’est plus ce scientiste ou cet existentialiste qui s’affirmait fièrement face à l’Eglise: il est devenu ce touche-à-tout consumériste, qui n’a ni attirance, ni hostilité pour la religion. L’engagement militant, lui, a été broyé par le carriérisme sur fond de crise des idéologies. Les formes d’engagement profane sont, elles-mêmes, en déclin, et il faut avoir du courage pour militer quotidiennement dans un syndicat ou un parti, sauf intérêt matériel et pécuniaire évident...

À moins que les périphéries ne soient ces nouvelles terres du catholicisme qui, elles, ne goûtent guère aux innovations occidentales, qui n’ont aucune envie d’apprécier des «valeurs positives» dans les concubinages, hétéro ou homosexuels ou de voir leur pasteur se transformer en psys pour couples qui se cherchent… Mais, dans ce cas, les cartes seraient rebattues. Au fond, comme dirait Pascal, le centre est partout, et la périphérie nulle part, à moins que cela ne soit l’inverse. Il y a autant de périphéries que de centres, de centres dans les périphéries que de périphéries dans les centres… On a souvent reproché à l’Eglise de se tromper d’époque. La grosse difficulté est qu’au moment même où elle veut tenir compte de ce reproche, elle l’illustre à plein. […]

Hector »

Ref. Aller aux «périphéries» ? Quand le «centre» est lui-même incertain…

JPSC

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