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Le portrait de Pierre Chaunu brossé par Philippe Levillain

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Dans notre civilisation caractérisée par un phénomène d'accélération vertigineux, on risque d'oublier des disparus dont l'oeuvre mériterait pourtant de rester en mémoire et de nourrir notre réflexion. Tel est le cas de celle de l'immense historien que fut Pierre Chaunu. Un hommage en forme de "notice" vient de lui être consacrée par Philippe Levillain à l'Académie des Sciences morales et politiques, le 18 mars 2013 :

... Avant de proposer une biographie historique d’un des « Monstres sacrés » de l’Histoire au XXe siècle- j’emprunte à Jean Cocteau l’expression qui désigne les grands acteurs de grandes rôles –, je voudrais esquisser un portrait de l’homme, de l’homme Pierre Chaunu, encore si proche pour sa famille, laquelle partage volontiers sa mémoire avec celle de ses contemporains, attristés encore par cette disparition qui s’appelle la mort. La mort qui fut au cœur vivant de Pierre Chaunu la voix permanente de l’Espérance, la mort qui fut pour lui au commencement. « À 40 ans - a dit Kipling - un homme est responsable de son visage ». A fortiori l’est- il ensuite, quelques effets trahissant le temps qui ne suspend pas son vol. On eût dit que la stature habitée par Pierre Chaunu était taillée dans le noir granit du Sidobre. Elle portait un visage impérial digne de figurer au Palazzo Altemps à Rome, éclairé, si l’on peut dire, par un regard inquisitorial, mystérieusement porteur d’une promesse de douceur. La bouche ne démentait pas une certaine distance, boudeuse parfois : celle d’une certitude acquise, inaccessible et peu discutable. Mais cette prise instantanée du visage fige un orateur immobile qui était dans la vie un acteur aux mains agiles, aux bras expressifs et aux yeux sévères, quelquefois ourlés par la lumière rase de larmes retenues.

Pierre Chaunu se défendait contre lui-même. Acteur, il l’était dans une étonnante harmonie entre la voix et le geste. Il savait utiliser son grand galop chromatique. Le regard ne démentait jamais ce que la voix affirmait, prétendait, contestait. Mais cette voix s’exprimait sur deux registres : celle de la conscience de l’âme, douce, mélodique, accueillante ; celle du corps, voix des passions irrépressibles, fulgurantes, proches de celle du devin transporté. ...

A lire sur le site de l'Académie

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