04/09/2019
Fridolin Ambongo Besungu, archevêque de Kinshasa, fait partie des 13 nouveaux cardinaux qui seront créés par le pape François le 5 octobre. Cette nomination vient renforcer le poids de l’Église dans un pays en pleine transition politique.
Ce dimanche 1er septembre, Fridolin Ambongo Besungu, archevêque de Kinshasa, est surpris par une avalanche de messages de félicitations. Et pour cause : après être arrivé en retard au traditionnel Angélus du dimanche midi en raison d’une panne d’ascenseur, le pape François annonce à l’étonnement général que 13 personnalités revêtiront bientôt la pourpre cardinalice. Parmi elles, le Congolais. « Je n’avais pas vu venir cette affaire-là !, s’exclame-t-il sur Radio Vatican. J’accueille cette nomination comme un encouragement de la part du saint-père à continuer à être une Église qui donne la voix à un peuple sans voix. »
« L’Église est aux côté du peuple »
Donner de la voix, l’évêque de 59 ans sait faire. Et il ne mâche pas ses mots. En mars 2019, alors que le président Félix Tshisekedi vient de prendre ses fonctions après 18 ans de règne de Joseph Kabila, il se montre critique. « Je redoute que le système Kabila perdure malgré un changement de président », confie-t-il à La Vie, qui le rencontre alors à Kinshasa. « Vu ses ressources, notre pays devrait être un paradis sur terre ! Mais nous sommes dirigés par une classe politique de prédateurs qui jette le peuple dans une misère extrême. C’est pour cela que l’Église est aux côtés du peuple. » En République démocratique du Congo, l’Église est un État dans l’État. Elle porte à bout de bras le pays miné par la corruption et les conflits, administrant 40 à 60% des écoles et services de santé, privés comme publics, accueillant des milliers d’orphelins dans ses structures, nourrissant les prisonniers, etc. Son maillage ecclésial et son réseau -Caritas couvrent tout le territoire. Certains diocèses sont entièrement enclavés et des « évêques courage » les sillonnent à moto sur des sentiers défoncés.
Fridolin Ambongo Besungu est l’un d’eux. Né en 1960 à Boto, dans le nord-ouest du pays, où son père travaille dans une plantation d’hévéas, il entre chez les Capucins en 1980. L’homme n’a déjà pas froid aux yeux. En 1984, simple étudiant, il fait un scandale dans un bureau de vote, déplorant l’absence de bulletin de vote contre l’élection de Mobutu, candidat unique à sa réélection, relate Jeune Afrique. Ordonné prêtre en 1988, il poursuit ses études à Kinshasa puis à Rome avant de rentrer en RDC où il enseigne la théologie morale. « Cette spécialité l’a rendu particulièrement sensible à la question de la justice sociale et à celle de la dignité de l’être humain »,explique un prêtre congolais qui le connaît bien. En 2004, il est nommé évêque du diocèse de -Bokungu-Ikela par Jean Paul II. Il prendra successivement la tête de plusieurs diocèses dont certains très isolés comme celui de Kole, enclavé en pleine forêt équatoriale.
En 2008, alors qu’il a 48 ans, il est nommé président de la commission Justice et paix, le bras « politique » de la Conférence épiscopale nationale du Congo (Cenco). Une mission qu’il exercera pendant huit ans et où sa fibre sociale pourra se déployer. Il devient peu à peu un personnage clé de l’épiscopat congolais comme le prouve sa nomination en tant que vice--président de la Cenco en février 2016. À ce titre, il est l’un des principaux artisans de la transition politique.