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Union européenne et monde arabe : une politique paradoxale et contradictoire

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Une opinion du Lieutenant Général (e.r.) F. BRIQUEMONT paraît aujourd'hui dans laLibre.be. Il y dénonce les faiblesses de la stratégie occidentale et particulièrement l'inconsistance de l'Union Européenne sur le plan international. On l'avait déjà observé lors du démembrement de l'ex-Yougoslavie, on le constate aujourd'hui face au séisme politique qui ébranle le monde arabe. Les intérêts économiques pèsent très lourd et malgré les pétitions de principes expliquent certaines discordances entre les pays européens. Une civilisation - mais en est-ce encore une? - peut-elle n'obéir qu'à la logique économique sans être portée par un projet et par des valeurs autres que celles du consumérisme? 

Extrait :

"Les révoltes qui agitent aujourd’hui le monde arabe sont une illustration de plus des paradoxes de la stratégie occidentale. Les démocraties occidentales n’ont jamais hésité, en fonction de leurs intérêts, à soutenir de nombreux dictateurs un peu partout dans le monde. Cet "amour" soudain pour "les peuples arabes en lutte" est quand même un peu hypocrite Tous les Occidentaux considéraient M. Moubarak comme un bon président parce qu’il jouait un rôle clé d’apaisement dans le conflit israélo-arabe. M. Kadhafi, qui n’est pas devenu "mégalomane" en 2011, était devenu un rempart contre les flux migratoires venant d’Afrique; S. Hussein en était jadis un autre contre l’islam chiite d’Iran et Pinochet contre le communisme en Amérique du Sud. Ben Ali et Gbagbo, comme membres de l’Internationale socialiste, devaient y être d’ardents défenseurs des pauvres et des opprimés !

Ce qui se passe dans tous ces pays, c’est d’abord une révolte contre la corruption absolue de pouvoirs absolus. Sur quoi déboucheront ces révoltes ? Difficile à prévoir. Elles se limiteront probablement à l’Afrique du Nord car, d’un point de vue géostratégique, personne (realpolitik) ne souhaite une déstabilisation qui se propagerait de l’Egypte à l’Irak en passant par la péninsule arabique. En Libye c’est un chaos de longue durée qui s’installe. En Egypte, l’armée est au pouvoir; elle n’acceptera certes pas le désordre; quelle sera l’attitude des religieux ? La Tunisie, parce qu’elle ne joue qu’un rôle mineur sur l’échiquier méditerranéen, a le cadre le plus propice pour "évoluer" vers un Etat démocratique. La question principale est de savoir si des responsables politiques "éclairés", respectueux des droits de tous les citoyens et surtout non corrompus, pourront assurer à l’avenir un pouvoir stable dans tous ces Etats.

L’UE pourrait jouer un rôle essentiel pour favoriser une évolution favorable des Etats d’Afrique du Nord pour autant qu’elle soit capable de définir "une" politique européenne en Méditerranée. Pour autant aussi qu’elle cesse d’être en permanence à la traîne stratégique des Etats-Unis - un autre paradoxe - engagés, eux, dans un bras de fer avec la Chine pour le leadership mondial et qui n’accordent plus d’ailleurs qu’une attention distraite au "Finistère de l’Eurasie" ! Quant à la realpolitik, elle a encore de beaux jours devant elle; il suffit de voir combien, dans la lutte contre le dérèglement climatique, les "égoïsmes sacrés" nationaux l’emportent encore sur les risques d’autodestruction de la planète."

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