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Idées

  • L'avortement ou la tyrannie du fort contre le faible

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    De Mgr Rob Mutsaerts sur LifeSiteNews :

    Mgr Mutsaerts : Chesterton a montré pourquoi l'avortement est la tyrannie du fort contre le faible

    Pour G.K. Chesterton, une civilisation juste protège ses membres les plus innocents et les plus démunis. L'avortement inverse la justice, accordant à l'enfant à naître une protection encore moindre que dans la Rome païenne.

    Image en vedetteGK Chesterton

    LifeSiteNews ) — Je suis un fervent admirateur de G.K. Chesterton. Chesterton (1874–1936) était un écrivain et penseur anglais connu pour sa défense acharnée de la morale traditionnelle et des valeurs chrétiennes. Bien que l'avortement à son époque n'était ni légal ni répandu comme aujourd'hui, il a clairement abordé des thèmes connexes dans ses essais et ses livres : la valeur de chaque vie humaine, le caractère sacré de la famille et les dangers des tendances modernes comme l'individualisme et le matérialisme.

    Dans cet essai, j'examine la réaction de Chesterton face aux lois modernes sur l'avortement, qui n'offrent aucune protection juridique à l'enfant à naître. Cette situation contraste fortement avec le principe juridique romain du curator ventris , selon lequel un tuteur était désigné pour protéger les intérêts de l'enfant à naître.

    Chesterton a toujours été convaincu que chaque vie humaine possède une valeur et une dignité intrinsèques, en tant que créature de Dieu. À son époque, il s'opposait fermement aux théories eugéniques et à toute philosophie considérant certains groupes comme moins humains. Il observait que de telles idées ne pouvaient atteindre leurs « avantages » qu'en niant l'humanité à une catégorie entière de personnes.

    Là où les eugénistes déshumanisaient les « inférieurs », l'avortement agit de la même manière avec un groupe encore plus vulnérable : « les personnes les plus faibles et les plus sans défense : les enfants à naître ». Chesterton insistait sur le fait que l'enfant à naître est un être humain à part entière, et il parlait sans équivoque de l'avortement comme d'un « massacre des enfants à naître ». Un langage aussi fort montre qu'il considérait l'avortement comme une atteinte directe à la dignité humaine et à la vie humaine elle-même.

    Profondément religieux, Chesterton considérait la vie – même in utero – comme sacrée et voulue par Dieu. Il soulignait qu'aucune personne ni institution n'a le droit de détruire délibérément une vie humaine innocente. Fidèle à la tradition, Chesterton croyait que le droit à la vie vient directement de Dieu pour chaque être humain, y compris l'enfant dans l'utérus, et qu'aucune raison matérielle (qu'elle soit médicale, sociale ou économique) ne peut justifier sa destruction.

    Son indignation morale contre l'avortement découle de ce principe. Il a ridiculisé un correspondant qui prônait l'avortement pour réduire la pauvreté, affirmant que cet homme était « optimiste » face au « massacre des enfants à naître », tout en se « désespérant » à l'idée d'une simple augmentation des salaires. Avec une ironie mordante, Chesterton a écrit à propos de ces réformateurs : « Il nourrit de l'espoir face à la dégradation féminine, de l'espoir face à la destruction humaine. » Cela montre que Chesterton considérait l'avortement non seulement comme un tort personnel, mais aussi comme une maladie sociale – une horreur permise seulement lorsque la société oublie la vérité fondamentale selon laquelle chaque vie humaine, aussi petite ou fragile soit-elle, est infiniment précieuse.

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  • La foi étrange des nouveaux puritains : le mouvement « woke » sous la lorgnette d’un philosophe des religions

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    De Sandro Magister sur Settimo Cielo, en française sur diakonos.be :

    La foi étrange des nouveaux puritains. Le mouvement « woke » sous la lorgnette d’un philosophe des religions.

    Le pontificat de Léon XIV se distingue par une caractéristique désormais évidente. Il s’agit de la distance critique avec laquelle il se démarque du mouvement « woke » et de sa volonté destructrice – la « cancel culture » – tant envers la civilisation occidentale qu’envers la religion chrétienne, accusée d’être désespérément colonialiste, raciste et oppressive.

    Sous le pontificat de François – comme Settimo Cielo l’avait mis en lumière – cette idéologie s’était infiltrée jusqu’au sommet de l’Église catholique, au nom de la défense des « innocentes » tribus d’Amazonie ou bien des enfants indigènes « rééduqués de force » dans les écoles chrétiennes du Canada.

    Aux États-Unis, l’idéologie « woke » a récemment suscité une réaction populaire de rejet, qui s’est exprimée entre autres lors de l’élection du président Donald Trump. Mais cette idéologie continue à peser au sein de l’intelligentsia américaine et européenne, notamment à travers le langage « politiquement correct », d’autant plus qu’elle a pris la forme d’une nouvelle religion sécularisée.

    « La religion woke » est le titre d’un livre du philosophe français Jean-François Braunstein, sorti en France en 2022. Et « Il wokismo : cosmovisione sostitutiva e religione secolare » est le titre d’un essai du philosophe des religions Gabriele Palasciano, sorti dans le dernier numéro de « La Rivista del Clero Italiano », éditée par l’Université catholique de Milan.

    Pour Braunstein, « le wokisme peut s’analyser comme un phénomène religieux possédant un canon littéraire composé de nombreux textes de référence, d’un système de croyances et d’une ritualité incluant des cérémonies publiques de ‘confession’ de la culpabilité historique envers les personnes discriminées et les minorités violées ».

    Un exemple emblématique de cette ritualité est la génuflexion (voir photo) en mémoire de George Floyd, cet afro-américain assassiné par des policiers le 25 mai 2020 à Minneapolis, entendu comme un acte symbolique d’expiation du racisme occidental.

    Mais quoi qu’il en soit, le wokisme est « dépouillé de toute référence à la réalité divine », écrit Palasciano, auteur de l’essai d’où sont tirées ces citations. « Il s’agit d’un engagement exclusivement intramondain, d’une démarche socio-politique ». Ce qui n’empêche pas ses activistes de « se percevoir eux-mêmes comme appartenant à une classe élue », appelée à une mission « prophétique » et dotée « d’une confiance indéfectible en sa propre supériorité morale ». Il n’est donc pas étonnant que le wokisme se soit répandu au sein des différentes dénominations protestantes américaines.

    C’est justement à cette dimension religieuse du wokisme que Palasciano consacre la partie la plus originale de son essai. Non sans en examiner dans un premier temps les « piliers théoriques » et la « philosophie ».

    Les piliers théoriques, écrit-il, sont au nombre de trois :

    • « La théorie du genre, qui fait passer la perception que l’individu possède de lui-même avant le donné sexuel biologique et objectif » ;
    • « La théorie de la race, qui critique le ‘privilège blanc’ d’où sont issus de nombreuses formes de discrimination ethnico-raciales et religieuses ».
    • « La théorie de la culpabilité, qui exige une compensation pour les injustices historiques subies à cause de la domination exercée sur le monde par les sociétés occidentales ».

    En ce qui concerne la philosophie, Palasciano identifie le « déconstructionnisme » de Jacques Derrida comme étant la principale matrice du mouvement « woke ».

    Mais c’est à la « religion » du wokisme qu’il consacre la plus grande partie de son analyse.

    Il faut avant tout remarque qu’ « à cause de la cancel culture, le wokisme est souvent associé au puritanisme, ou mouvement religieux apparu à la fin du XVIe siècle dans le monde anglo-saxon avant de s’exporter, à partir du XVIIe siècle, sur le sol nord-américain ».

    Mais cette comparaison est en réalité « plutôt grossière » parce que le puritanisme a été l’exact opposé de la cancel culture. « Les puritains ont été de grands pionniers de l’alphabétisation universelle, ainsi que des promoteurs infatigables de l’instruction gratuite et universelle, à travers l’institution de centres éducatifs, d’écoles et d’universités, dont lesquelles Harvard et Yale », celles-là même dans lesquelles, à travers un curieux renversement de l’histoire, le mouvement « woke » a pris racine.

    Selon Palasciano, il est plus intéressant en revanche de faire un rapprochement avec les « réveils » protestants qui ont eu lieu entre le XVIIIe et le XXe siècle dans un contexte d’abord européen, puis américain, avec l’objectif de faire sortir la conscience des croyants de ce qu’ils considéraient comme une léthargie spirituelle généralisée ».

    Il y a en effet une consonance entre le mot « réveil » et l’adjectif « woke », qui en « Black English », l’anglais vernaculaire afro-américain, signifie « éveillé », « alerte », « attentif ».

    Mais là encore, il y a une grande différence entre le wokisme, qui met l’accent sur les discriminations ethniques et raciales, religieuses et sexuelles, dans une perspective exclusivement intramondaine, et « les nombreux mouvement du réveil protestant, qui affirmait la centralité du texte biblique, en tant qu’Écriture Sainte, et la figure de Jésus de Nazareth, professé comme Christ et Fils de Dieu, avec une insistance sur la rédemption du péché qu’il a accomplie ».

    Il est plus pertinent, selon Palasciano, de rapprocher le wokisme d’un « contexte que l’on peut définir, tout en étant culturellement et théologiquement lié à la tradition protestante, en utilisant les concepts de ‘post-protestantisme’ et de ‘néo-protestantisme’ ».

    De ce point de vue, « le wokisme apparaît comme une forme de religion séculière, autrement dit une sorte de christianisme culturel, détaché de tout contenu théologique et plus particulièrement de tout contenu christologique. Bien qu’éthique et religion soient interconnectés, le péché n’est plus considéré comme une transgression personnelle nécessitant l’intervention divine, c’est-à-dire l’œuvre de rédemption de Dieu à travers le Christ, mais plutôt comme un phénomène collectif lié aux injustices sociales. Dans tout cela, les préoccupations spirituelles du protestantisme semblent se déplacer vers la sphère socio-politique, configurant ou transformant la politique elle-même en une sotériologie laïque ».

    Quoi qu’il en soit, le wokisme est une cosmovision excluant le divin et plus encore le Dieu chrétien. Le théologien catholique Paul F. Knitter, spécialiste des relations entre les religions abrahamiques, attribue à la vision « woke » cette « théologie du remplacement » — aujourd’hui désavouée par la doctrine catholique — qui prétendait justement que l’Ancienne Alliance aurait été « remplacée » par la Nouvelle, dans le passage du christianisme au judaïsme. Le wokisme prétend désormais se substituer à son tour à la tradition judéo-chrétienne, qui doit être annulée en bloc.

    Quant aux croyances dont le wokisme se fait le vecteur, Palasciano en identifie au moins quatre :

    La première est de nature anthropologique et soutient que « l’homme blanc, hétérosexuel et occidental, qui est la cause et l’origine d’une culture de machisme et de patriarcat, doit être déconstruit de toute urgence ». Avec pour conséquence de « promouvoir paradoxalement de la sorte un antiracisme ‘raciste’, basé sur la conviction que l’individu blanc et occidental est intrinsèquement raciste, sans possibilité de rédemption en dehors d’une déconstruction ».

    La seconde concerne la sexualité. « La ‘fluidité de genre’ devient un idéal défiant toute détermination corporelle, tandis que le changement de genre est présenté en des termes religieux comme une ‘nouvelle naissance’, c’est-à-dire une renaissance selon une perspective sécularisée ».

    La troisième à trait à l’histoire culturelle. « Le wokisme prétend que l’histoire occidentale n’est dominée que le colonialisme, le racisme et le sexisme, autant d’aspects qui annulent toute réalisation dans les domaines artistique, culturel et scientifique. La déconstruction de l’histoire occidentale vise donc à libérer le monde de l’oppression millénaire générée et exercée par l’Occident ».

    La quatrième concerne le savoir scientifique. « La science occidentale est considérée comme l’expression à la fois de l’androcentrisme et du colonialisme. Le ‘wokisme’ propose donc une ‘décolonisation’ du savoir, c’est-à-dire une opération qui inclut la remise en question de l’objectivité et de l’universalité de la science moderne, en promouvant des épistémologies alternatives, voire locales, remettant en question le discours scientifique traditionnel. »

    En bref, conclut Palasciano, le wokisme représente non seulement « une menace pour la civilisation occidentale et le pour christianisme », mais également « une sécularisation agressive à travers la promotion d’une religion du remplacement ». Sa cible est « le Dieu personnel et transcendant des trois religions monothéistes, mais principalement de la tradition judéo-chrétienne ».

    Mais « néanmoins, le wokisme représente, à tout le moins d’un certain point de vue, un défi positif pour cette même civilisation occidentale. ». Il offre l’occasion « d’un nouvel examen des structures du pouvoir politico-religieux » et d’un « dialogue constructif sur certaines questions fondamentales relatives à l’identité, à la mémoire et aux valeurs de l’Occident ».

    « Le christianisme est lui aussi appelé à contribuer à tout cela, parce qu’il peut apporter des réponses pertinentes aux crises actuelles en se référant constamment et de manière toujours nouvelle au message de l’Évangile. »

    — — —

    Sandro Magister est le vaticaniste émérite de l'hebdomadaire L'Espresso.
    Tous les articles de son blog Settimo Cielo sont disponibles sur diakonos.be en langue française.

    Ainsi que l'index complet de tous les articles français de www.chiesa, son blog précédent.

  • « Mais c'était aussi un provocateur »; à propos d'un argument récurrent concernant le meurtre de Charlie Kirk

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    Du Dr Johannes Hartl sur kath.net/news :

    « Mais c'était aussi un provocateur ». À propos d'un argument récurrent concernant le meurtre de Charlie Kirk

    16 septembre 2025

    « Nous constatons que des opinions qui étaient jusqu'à présent considérées comme « conservatrices » normales sont aujourd'hui présentées comme illégitimes... Je ne partage pas tout ce que Kirk a dit, ni la manière dont il l'a dit. Mais... » Commentaire de Johannes Hartl

    « Mais c'était aussi un agitateur ». À propos d'un argument récurrent concernant le meurtre de Charlie Kirk. 

    Mais il était aussi, selon ce que l'on peut lire :
    - d'extrême droite
    - homophobe
    - raciste
    - nationaliste
    - favorable aux armes
    - un incendiaire...
    Celui qui prend les armes ne doit donc pas s'étonner de périr par les armes, peut-on lire.

    Que penser de cette rhétorique ?

    Nous rencontrons ici au moins deux astuces rhétoriques et logiques :
    (1) l'inversion victime-bourreau
    (2) le faux équilibre

    L'inversion victime-bourreau est connue dans d'autres exemples extrêmes :
    - « le père a battu l'enfant, mais l'enfant était aussi très insolent »
    - « il a été victime d'un attentat à la bombe, mais il avait insulté le prophète »
    - « Elle a été violée, mais sa jupe était vraiment très courte. »

    >> L'injustice est relativisée par le contexte. La victime est présentée comme un complice secret.

    De plus, cela crée un faux équilibre. Dans le cas de Kirk : comme il a exprimé l'opinion XYZ, son meurtre est en quelque sorte plus compréhensible. (Personne ne le dit explicitement, mais c'est ce qui est suggéré.)

    Point important : cela suggère qu'exprimer une opinion est également un acte de violence. Or, ce n'est pas vrai. Défendre une opinion de manière argumentée est exactement le contraire de la violence, même si cette opinion est partiale, erronée, mal informée, etc. Car seul le dialogue sur les opinions peut nous sauver de la violence.

    « La haine n'est pas une opinion », dit-on alors, et l'argument devient un peu plus subtil. « Les propos misanthropes, d'extrême droite, homophobes, négationnistes du changement climatique, transphobes et racistes n'ont pas leur place dans une société libre. »

    Examinons cela de plus près. Le racisme, l'homophobie, etc. sont des choses graves. Cependant, le champ d'application de ces termes s'est récemment élargi de manière considérable. Un commentateur a qualifié Charlie Kirk d'« agitateur fascisant ».

    Question : que représentaient exactement les fascistes, par exemple en Allemagne pendant le Troisième Reich ?
    Réponse : des campagnes d'extermination contre d'autres États qui ont fait des millions de victimes, l'assassinat industriel de groupes ethniques entiers, la persécution politique cruelle des dissidents.
    OK : et Charlie Kirk était en quelque sorte similaire ?
    Sérieusement ?

    Nous constatons plutôt que des opinions qui, il y a quelques années encore, étaient considérées comme tout à fait « conservatrices », sont aujourd'hui présentées comme illégitimes.
    - « Le mariage est l'union d'un homme et d'une femme » : homophobe
    - « Un pays doit avant tout se préoccuper de ses propres intérêts » : nationaliste
    - « Il n'existe que deux sexes biologiques » : transphobe
    - « L'avortement est mal » : misogynie

    Kirk a tenu des propos très controversés. Je ne partage pas du tout (!) tout ce qu'il a dit, ni la manière (!) dont il l'a dit.

    Mais ce qu'il a dit peut être dit. Par exemple, même si l'on n'est pas d'accord :
    - « L'avortement devrait être illégal. »
    - « Les lois américaines sur les armes devraient être libérales. »
    - « Le changement climatique n'est pas uniquement causé par l'homme. »
    (Ou que la Terre est plate et que 2 + 2 = 7)

    Il est TOTALEMENT NORMAL de qualifier ces phrases de stupides, trompeuses, fausses, idiotes ou autre.
    Mais on ne devrait pas tirer sur quelqu'un pour les avoir exprimées.

    Même les déclarations trompeuses et fausses peuvent être exprimées publiquement dans une société libre ! (Car il n'y a souvent pas de consensus sur ce qui constitue une opinion fausse : vive le débat !)

    Des termes tels que « diviseur », « agitateur » ou « misanthrope » nous viennent aussi relativement facilement à l'esprit. Mais que signifient exactement ces termes ? Ne sont-ils pas aussi des étiquettes pour désigner quelqu'un dont nous n'aimons tout simplement pas l'opinion ?

    S'il existe des « agitateurs et diviseurs de droite », en existe-t-il également de gauche ? Greta Thunberg est-elle une agitateuse et une diviseuse ? Thilo Jung ? Heide Reichinnek ? Toutes ces personnes expriment à leur manière des opinions extrêmes. Je pense qu'elles en ont le droit. Sont-elles pour autant « misanthropes » ?

    Lorsqu'une personne est étiquetée comme semeuse de discorde et agitatrice, la suggestion est parfaite : d'une certaine manière, il est compréhensible qu'elle soit victime de violence. Et voilà : une légitimation subtile de la violence politique. Au nom du bien, car il s'agit de lutter contre les méchants.

    Tu remarques quelque chose ? Au final, on en revient à une vision très simple des choses : « Bien sûr que je suis pour la liberté d'expression. Mais seulement quand il s'agit de ma propre opinion. Car les autres sont mauvais. » Et nous revoilà au début de ce fil de discussion.

    Le Dr Johannes Hartl est fondateur de la maison de prière d'Augsbourg, auteur de plusieurs livres, conférencier et professeur à l'Institut de théologie spirituelle et de sciences religieuses de l'Université philosophique et théologique de Heiligenkreuz. Il a quatre enfants avec son épouse.

  • La démocratie comme religion, et la dissolution de nos nations (Pierre Manent)

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    Du site de La Nef :

    Pierre Manent : La démocratie comme religion, et la dissolution de nos nations

    La démocratie semble être un terme bien identifié. En réalité, elle peut s’entendre de deux manières différentes. Et le sens qu’on lui donne aujourd’hui, qui embarque avec lui l’idée d’une égalité liberté prise dans son acception la plus littérale, est en train de se retourner contre les nations européennes, d’achever de les « déconstruire« , jusqu’à les dissoudre dans une humanité indivise. Pierre Manent développe ici le raisonnement qui l’amène à cette conclusion.

    Presque tout ce qui se fait ou se dit aujourd’hui parmi nous se réclame de la démocratie. Les populistes comme leurs adversaires se présentent également en défenseurs de la démocratie. Cet état du discours public ne contribue pas peu au désordre des esprits et à l’atonie des volontés. Il tient d’abord à une équivoque de la notion qu’il importe d’éclaircir.

    Le même terme désigne deux réalités, deux perspectives politiques – et même deux directions de l’âme très différentes, mais où l’on peut discerner un patrimoine génétique partiellement commun.
    La démocratie appartient depuis l’expérience grecque au catalogue des régimes politiques, qui se distinguent d’abord par le nombre des gouvernants : un seul, le petit nombre, le grand nombre. Ce régime a pris deux grandes formes, la démocratie directe dans le cadre de la cité, la démocratie représentative dans le cadre de la nation – la taille de celle-ci rend impossible la démocratie directe et suscite l’invention de la représentation politique.

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  • Sur l’urgence de discerner et de rejeter le relativisme religieux

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    De sur le CWR :

    Sur l’urgence de discerner et de rejeter le relativisme religieux

    Au sein des diverses formes de relativisme religieux, il existe un totalitarisme doux, pas si caché, qui évolue rapidement vers des versions plus « dures », avec des conséquences dévastatrices dans la vie réelle pour quiconque ose y résister ouvertement.

    Autrefois, lorsque j’étais encore professeur de théologie, l’une des attitudes les plus répandues parmi les étudiants était que la religion pratiquée n’avait pas d’importance puisque « toutes les religions disent en réalité la même chose dans leur essence ».

    En effet, selon cette vision, la pratique d'une religion importe peu, puisqu'il est possible d'être une « bonne personne » et « spirituel » sans appartenance religieuse. De plus, ces opinions sont exprimées avec une assurance extrême, comme s'il n'était pas nécessaire de les étayer par des arguments, leur bien-fondé étant incontestable.

    Je renoncerai à une longue critique de ces points de vue, car leurs nombreux défauts sont difficiles à résumer. Il suffit de dire que l'on ignore dans tout cela le fait que l'idée selon laquelle « toutes les religions sont fondamentalement les mêmes » constitue elle-même, comme on le voit dans diverses spiritualités de substitution, une affirmation théologique très particulière et contestable concernant la prétendue réalité d'une « expérience religieuse intérieure » ​​universellement partagée, prélinguistique et ineffable.

    Le brouillard omniprésent du relativisme religieux

    Lorsqu'un étudiant évoquait ce point de vue relativiste, plutôt que de tenter de le contester directement, je lui demandais de m'expliquer – puisqu'il semblait si bien connaître la nature de la « religion » – les croyances fondamentales des différentes religions. Et bien sûr, il ne pouvait pas le faire. Invariablement, il éludait la question en insinuant qu'il était inutile de connaître les enseignements des différentes religions, car ces enseignements ne sont qu'une façade sur les vérités profondes de l'expérience religieuse. Mais, lorsqu'on les pressait d'expliquer davantage ce qu'ils entendaient par « expérience religieuse », ils restaient tout aussi vagues et ne proposaient que des interprétations philosophiques superficielles, essentiellement thérapeutiques, se réduisant à de simples panacées comme « être fidèle à soi-même ».

    Ma conclusion était que ceux qui soutiennent de telles opinions considèrent les différentes religions comme « égales », au sens où elles sont toutes aussi triviales les unes que les autres et ne méritent pas vraiment d'être étudiées en détail. Et l'affirmation de leur prétendue trivialité repose sur un engagement antérieur envers un ensemble différent de « dogmes » concernant la supériorité morale et intellectuelle d'un égalitarisme radical en matière de religion. Il existe également une hypothèse antérieure et non développée quant à ce qu'est une « religion » en premier lieu, ce qui, bien sûr, est difficile à définir.

    Ce que l'on découvre rapidement au cours de telles discussions en classe, c'est que cette vision relativiste de la religion ne peut être contredite par aucune argumentation, aussi convaincante soit-elle. En effet, cette vision erronée traduit un éthos culturel généralisé. C'est comme un brouillard envahissant dans un mauvais roman d'horreur, fruit de siècles de marginalisation puis de compartimentation du christianisme en particulier, mais aussi de toutes les autres religions. Ceci a conduit à son tour à faire de l'Église une réalité existentielle plutôt extrinsèque, un simple accessoire de vie parmi d'autres.

    Ainsi, tout comme dans un certain sens, tous ces accessoires sont interchangeables ou consommables en fonction de votre humeur du moment, il en va de même pour l’Église.

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  • Le numéro de septembre de la Nef est sorti : sommaire et articles en ligne

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    Sommaire du numéro de septembre

    ÉDITORIAL
    Léon XIV : le défi de l’unité, par Christophe Geffroy

    ACTUALITÉ
    Le style de Léon XIV, par le chanoine Christian Gouyaud

    Énergie : une politique suicidaire, par Pierre Vermeren
    France : la lente agonie d’une nation, par Witold Griot
    Israël-Iran : comprendre le conflit, par Annie Laurent

    CHRONIQUE 
    Le piège de la tentation marxiste, par Élisabeth Geffroy

    ENTRETIEN
    Saint-Wandrille : inlassables chercheurs de Dieu, entretien avec le TRP Jean-Charles Nault

    DOSSIER : LA DÉMOCRATIE MODERNE, UNE SOCIÉTÉ SANS DIEU ?
    Les principes viciés de la démocratie moderne, par Don Jean-Rémi Lanavère

    La démocratie comme religion, par Pierre Manent
    Laïcité française et religion, par Benoît Dumoulin
    La morale est devenue religion, par Chantal Delsol
    Deux erreurs opposées, par Joël Hautebert
    L’Église et la démocratie, par Christophe Geffroy
    Le dilemme catholique, par Grégor Puppinck

    VIE CHRÉTIENNE
    Ce qu’est la vraie liberté, par le père Thierry de Lesquen

    Question de foi : Occasion manquée…, par l’abbé Hervé Benoît

    CULTURE
    L’Inquisition au risque de l’histoire, par le père Cyrille, osb

    Notes de lecture
    Musique : Le roi d’Ys, par Hervé Pennven
    Cinéma : Une place pour Pierrot & Les Tourmentés, par François Maximin
    Un Livre, un auteur : L’homme démantelé, entretien avec Baptiste Detombe
    Sortir : Le Sacré-Cœur et l’art, par Constance de Vergennes
    À un clic d’ici, par Léonard Petitpierre
    Et pour les jeunes…, par Isabelle Le Tourneau
    Brèves
    Débats : Les derniers papes et Israël, par le père Olivier-Thomas Venard, op

    PARTENARIAT ECLJ Institutions internationales
    Les lobbys de l’avortement dans l’UE, par Louis-Marie Bonneau

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  • "Le malaise français" : un récit édifiant

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    De Jean-Paul Royal sur The Catholic Thing :

    Un récit édifiant : le « malaise français »

    La France, autrefois leader culturel reconnu de l'Occident, connaît ce que beaucoup de Français et de Françaises appellent « Le Malaise » : l'appréhension, le malaise et la désillusion sociétaux provoqués par un sentiment de déclin national et de stagnation économique. Pour les Américains désireux de comprendre cet état d'ennui et de mélancolie désormais omniprésent, le nouveau livre de Chantal Delsol, Prosperity and Torment in France, offre un diagnostic clair de ses racines idéologiques, intellectuelles et spirituelles.

    Delsol, éminente écrivaine et philosophe catholique française, membre de l'Académie des sciences morales et politiques de l'Institut de France, réfléchit aux paradoxes et aux pathologies persistants qui minent les idéaux républicains français de liberté, d'égalité et de fraternité. Son analyse convaincante s'inspire des critiques formulées par Alexis de Tocqueville dans L'Ancien Régime et la Révolution, qui détaillait les conditions qui ont conduit à la Révolution de 1789 en France, et les modernise. 

    Cette courte étude, publiée par l'University of Notre Dame Press et traduite par Andrew Kelley, soutient que malgré sa fortune enviable, la France est un pays déprimé en raison de ses espoirs irréalistes d'une utopie terrestre. La France possède « les richesses nationales de l'Allemagne, les dépenses sociales du Danemark et le bonheur du… Mexique ». Daniel J. Mahoney, chercheur principal au Claremont Institute et professeur émérite à l'Assumption University, auteur de nombreux écrits sur la pensée politique française, propose une préface éclairante qui replace les arguments riches et provocateurs de Delsol dans un contexte historique et philosophique plus large.

    Malgré son riche héritage culturel, son niveau de vie élevé et un État-providence généreux, Delsol soutient que la France craint d'être reléguée du statut de grande puissance nationale à celui de nation intermédiaire. Si la France considère sa langue, son mode de vie et son modèle social comme sans égal, nombreux sont ceux qui ressentent un sentiment d'humiliation face à l'inadéquation de son système de gouvernement socialiste et de son pacte social, et qui doivent s'adapter pour rivaliser avec le monde extérieur.

    Delsol retrace ces sentiments d'inadéquation et de « tourment » à travers de multiples paradoxes historiques et culturels. Elle aborde la primauté de la France en tant que « fille aînée de l'Église » depuis le baptême de Clovis, le roi barbare, en 496 apr. J.-C. Cette primauté a été détruite par l'anticléricalisme agressif et la laïcité, et remplacée par le statut de « fille aînée de la révolution ».

    Delsol décrit la petite communauté catholique fervente de jeunes familles françaises (souvent issues de l'élite, étonnamment), qui offre une lueur d'espoir pour l'avenir. Mais la France est aujourd'hui le pays le plus laïc d'Europe. Selon Delsol, cela a entraîné une recherche de religions de substitution, un renouveau du paganisme et, surtout, des adorateurs de Gaïa et de l'écologie. Les lois, les comportements et les mœurs inspirés par le christianisme ont pratiquement disparu en France.

    En revanche, l'auteur décrit le soutien « tortueux et hypocrite » apporté à l'islam par les médias et les intellectuels français, souvent même des immigrés arabo-musulmans radicaux. Ce soutien découle d'une culpabilité « colonialiste », qui sape les idées françaises d'unité et de fraternité et produit « une sorte d'autoflagellation rédemptrice ».

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  • La vision anthropologique subtile d'Edith Stein permet de comprendre comment l'idéologie transgenre porte gravement atteinte à l'unité profonde du corps et de l'âme de la personne humaine

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    De Richard A. Spinello sur The Catholic Thing :

    Edith Stein et l'âme de la femme

    9 août 2025

    Les controverses persistent quant à la nature et au rôle des femmes, alors que la société moderne se rapproche de plus en plus d'une anthropologie androgyne. Lors des derniers Jeux olympiques, les spectateurs ont pu assister à une démonstration surréaliste d'hommes biologiques frappant des boxeuses. Les protestataires ont été informés qu'il n'existe aucun moyen scientifique de différencier les hommes des femmes.

    La mentalité laïque a perdu de vue ce que signifie être femme. Les raisons de cette tragique sortie de la féminité sont multiples, mais la principale est la négation de la transcendance, qui obscurcit la lumière qui éclaire la vérité de notre humanité. Comme l'a souligné Carrie Gress, l'influence néfaste du féminisme antichrétien a conduit à la « fin de la femme », car nous n'avons aucune réponse à la question de savoir ce qui fait d'une femme une femme.

    En cette fête d'Édith Stein, sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix, il est opportun de consulter son œuvre sur ces questions, en raison de son ouverture réflexive aux profondeurs de l'existence humaine. Si nous souhaitons reconstruire l'idée de la féminité, son livre audacieux et intelligent, La Femme, constitue un point de départ idéal.

    Les détails de sa vie sont bien connus. Brillante athée juive, elle étudia la philosophie auprès du célèbre phénoménologue Edmund Husserl. Elle se convertit au catholicisme après avoir lu l'autobiographie de sainte Thérèse d'Avila. Quelques années plus tard, elle devint carmélite. Lorsque les nazis prirent pour cible les Juifs convertis aux Pays-Bas, elle fut envoyée à Auschwitz, où elle fut exécutée le 9 août 1942.

    Après sa conversion radicale, elle découvrit la métaphysique de saint Thomas d'Aquin, qui marqua profondément son développement philosophique. Elle n'était pas thomiste au sens strict, mais son œuvre maîtresse, L'Être fini et éternel, est assurément d'inspiration thomiste. Elle trouva une manière originale d'harmoniser la philosophie moderne de la phénoménologie avec la philosophie médiévale du thomisme.

    Stein s'inscrit dans la lignée de Thomas d'Aquin en adoptant une anthropologie hylémorphique, une idée ancienne d'origine aristotélicienne : la personne est une unité naturelle et indivisible, composée d'un corps matériel et d'une âme spirituelle. L'âme pénètre le corps en unifiant tous les aspects physiques et spirituels de chaque personne.

    Dans « La Femme », l'objectif principal de Stein est de démontrer la nature distinctive de la féminité, qui découle non seulement du corps, mais aussi de l'âme. Le sexe est déterminé par l'ordre donné au corps, influencé par l'âme, qui naît déjà en tant qu'homme ou femme. Les différences sexuelles représentent donc deux manières irréductibles d'être une substance vivante et personnelle.

    En affirmant qu'il existe une différence entre l'âme masculine et l'âme féminine, Stein se démarque de Thomas d'Aquin pour qui l'âme était la même pour tous les membres de l'espèce humaine. Pour Thomas d'Aquin, l'âme se différencie une fois unie à un corps sexué. Mais pour Stein, l'âme est différente avant de s'unir à un corps masculin ou féminin et de l'animer, de sorte qu'une personne est féminine non seulement par son corps, mais aussi par son âme.

    Ainsi, Stein parle d'une « double espèce » en raison des différences immuables entre l'homme et la femme. La vision anthropologique subtile de Stein permet de comprendre comment l'idéologie transgenre porte gravement atteinte à l'unité profonde du corps et de l'âme de la personne humaine.

    Le transgendérisme est une rébellion contre la finitude qui imprègne notre être. Comme le souligne Stein, nul n'est la source de sa propre existence, mais se découvre comme un être créé par Dieu, homme ou femme. Si Edith Stein a raison, le corps et l'âme imposent tous deux certaines contraintes naturelles à nos choix et à nos aspirations. De plus, les partisans du transgendérisme nous demanderaient de croire que Dieu a commis une erreur en insufflant une âme féminine dans un corps masculin.

    L'anthropologie de Stein sert de fondement à ses réflexions sur la nature de la femme. Possédant une âme différente, les femmes sont différentes des hommes, mais comment cette différence se manifeste-t-elle concrètement ?

    En termes simples, ce qui fait d'une femme une femme, c'est sa vocation maternelle. Ses qualités féminines, telles que l'empathie, la bienveillance et la sensibilité morale, en font une personne idéale pour la maternité et la vie conjugale. « Le corps et l'âme d'une femme sont moins faits pour lutter et conquérir que pour chérir, protéger et préserver. »

    Les femmes sont également mieux protégées d'une vision tronquée ou partiale des autres. Ceci est important, car la mission d'une femme implique de comprendre l'être entier dont elle prend soin. S'il est vrai que toutes les femmes ne donneront pas naissance à des enfants, chacune est naturellement capable de diverses formes de maternité psychologique ou spirituelle.

    Pourtant, cette différenciation sexuelle suppose une unité plus fondamentale. Hommes et femmes participent d'une nature humaine commune parce qu'ils possèdent la même structure ontologique : une substance personnelle composée d'un corps physique animé par une âme intellectuelle. Cette communauté, au sein de laquelle se révèle la distinction entre hommes et femmes, implique qu'ils partagent des dons et des talents créatifs similaires.

    Selon Stein, « Aucune femme n’est uniquement femme ; comme un homme, chacune a sa spécialité et son talent individuel, et ce talent lui donne la capacité d’accomplir un travail professionnel. »

    Ainsi, la vocation naturelle d'une femme à la vie conjugale et à la maternité ne devrait pas l'empêcher d'exercer d'autres professions, notamment celles comme la médecine et l'éducation, qui mettent en valeur ses dons féminins. Parallèlement, nous devons reconnaître la dignité et l'excellence suprêmes de la maternité et du mariage, qui élèvent cette vocation au rang des professions profanes.

    La thèse provocatrice d'Edith Stein sur l'âme féminine est-elle juste, ou sa réinterprétation créative de Thomas d'Aquin a-t-elle raté sa cible ? Les asymétries sexuelles vont-elles bien au-delà du corps sexué ?

    Quelle que soit la réponse que l’on donne à ces questions, nous pouvons convenir que sa voix devrait avoir une place spéciale dans le chœur féministe moderne, car c’est la voix claire d’une sainte et d’une philosophe fidèle qui peut libérer de l’obscurité le mystère séduisant de la féminité.

    Sainte Édith Stein par Neilson Carlin, 2023 [ Neilson Carlin Devotional Art & Design ]
  • Edith Stein : philosophie de la conversion

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    De Vincent Aucante sur aleteia.org :

    Édith Stein, philosophe de la conversion

    C’est après une longue maturation que l’intellectuelle juive Édith Stein se convertit au catholicisme. Auteur du livre « Édith Stein, la grâce devant soi », Vincent Aucante raconte la « philosophie de la conversion » de celle qui deviendra sainte Thérèse-Bénédicte de la Croix.

    Notre temps a plus que jamais besoin de conversion, que ce soit la conversion de l’Église à laquelle nous appelle le pape François, ou la conversion à l’amour du cœur des hommes. La vie et l’œuvre d’Édith Stein peuvent être pour chacun, chrétien ou non, un modèle de conversion.

    La conversion marque un passage, inscrit dans l’histoire d’une personne. Elle ouvre le cœur, et l’amène à rencontrer Dieu. La personne peut se convertir en redécouvrant ses propres racines, la foi de sa famille ou de sa communauté, ou en changeant de religion. Édith Stein a vécu les deux types de conversion. D’origine juive mais devenue agnostique, elle a choisi le catholicisme, et est entrée après quelques années au carmel. Elle y a redécouvert la profondeur du judaïsme, dans lequel ont grandi Marie, Jésus et les apôtres.

  • Une défense chrétienne de JK Rowling

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    De Samantha Smith sur le Catholic Herald :

    Une défense chrétienne de JK Rowling

    6 août 2025

    Il y a quelque chose de curieusement médiéval dans l'inquisition moderne contre JK Rowling.

    Une autrice autrefois louée pour sa représentation imaginative des sorcières, des sorciers et d'un monde magique dépassant l'entendement de la société « moldue », se tient aujourd'hui avec défi sur le bûcher de la culture populaire, sans brûler malgré les flammes furieuses qui l'entourent.

    Si elle avait essayé de publier Harry Potter et la pierre philosophale aujourd'hui, elle n'aurait probablement pas été acceptée par l'éditeur : une femme blanche cisgenre écrivant sur le courage, l'injustice et un monde où le bien et le mal ont réellement un sens ? Ce n'est pas vraiment à la mode.

    Même le héros éponyme de la série serait dénoncé comme un symbole de la masculinité toxique de droite. Pourquoi ? Parce que Harry Potter est un garçon anglais blanc et pauvre, bien sûr !

    L'ironie est palpable. Progressiste de longue date, J.K. Rowling a maintenant été exclue des annales du progressisme par les mêmes militants brandissant des piquets de grève qui auraient probablement protesté contre les procès des sorcières de Salem. Au lieu de fourches et de cordes, leurs armes de prédilection sont aujourd'hui les hashtags et les annulations.

    Une femme, autrefois célébrée pour avoir imaginé un monde empreint de mysticisme et de clarté morale, a été qualifiée d'hérétique par les grands prêtres de la politique du genre. Son crime ? Avoir défendu les droits et la protection dus aux femmes biologiques.

    En tant que chrétienne, je trouve déconcertant que ceux qui prétendent lutter contre l'oppression soient si prompts à dénoncer le concept même de liberté et de vérité. C'est précisément parce que je crois en la vérité (et en un débat nuancé) que j'offre une défense chrétienne à Mme Rowling.

    Le sexe biologique existe. C'est un fait irréfutable. Et les femmes méritent une dignité, un langage et des espaces qui reflètent ce fait. Elle n'a pas appelé à la haine. Elle n'a déshumanisé personne. Elle a simplement refusé de participer à la gymnastique métaphysique nécessaire pour prétendre que le sexe est un sentiment plutôt qu'un fait.

    En effet, dans ses premiers commentaires publiés sur le débat transgenre, JK n'a pratiquement pas fait référence à la communauté transgenre, et encore moins appelé à son éradication. Malgré ce qui est devenu la légende incontestable de la transphobie de JK Rowling, la cabale Internet s'est trompée.

    Ce qu'elle a fait, calmement, clairement et sans malveillance, c'est exprimer son inquiétude face à la disparition du langage autour du sexe biologique et aux implications que cela pourrait avoir pour les droits des femmes, en particulier pour les femmes vulnérables dans les espaces non mixtes.

    Il n'y avait ni insulte, ni calomnie, ni condamnation générale : juste une série d'arguments raisonnés et de réflexions personnelles, notamment son expérience en tant que survivante d'abus et ses décennies d'expertise à la tête d'associations caritatives axées sur les femmes, telles que Lumos et Beira's Place.

    Mais cela n'avait aucune importance. Aux yeux de la machine à scandales qu'est Internet, Rowling avait été vilipendée comme si elle était Voldemort en personne.

    Pour tout chrétien, il est profondément troublant de voir un tel brouillage délibéré entre réalité et fiction. Les mêmes progressistes qui prétendent s'opposer à l'oppression imposent désormais une nouvelle orthodoxie, qui nie la liberté de conscience, pénalise la dissidence et crucifie ceux qui osent dire ce qui était (jusqu'à récemment) du bon sens élémentaire.

    Ce n'est pas « l'acceptation » qui exaspère ces foules, mais une détermination dogmatique à redéfinir la réalité. Un nouveau dialogue a été bricolé à partir de déductions et d'omissions, un dialogue qui correspondait à l'antagoniste qu'ils voulaient qu'elle soit.

    Rowling n'est pas une sainte. Elle n'a pas toujours fait preuve de l'humilité ou de la cohérence que l'on pourrait attendre d'une militante morale. Mais il ne s'agit pas ici de la canoniser. Il s'agit du message essentiel qu'elle partage : le sexe biologique a de l'importance et est non seulement scientifiquement valable, mais aussi moralement nécessaire.

    La Genèse nous dit : « homme et femme, Il les créa ». Il ne s'agit pas ici d'un appel à des rôles sociaux rigides, mais d'une reconnaissance du fait que nos corps ne sont pas le fruit du hasard biologique, mais des dons imprégnés de sens. La liberté de l'homme – ou de la femme – d'agir en dehors des conventions culturelles étroites n'est pas un concept nouveau.

    Le christianisme n'a jamais exigé une expression uniforme du genre. De Jeanne d'Arc en armure aux hommes de la Renaissance en dentelle, les expressions de la variance de genre ont toujours fait partie de l'expérience humaine. Ce type d'expression de soi n'est pas un péché ; il peut être profondément humain, voire beau.

    Cependant, l'idée que les sentiments annulent les faits scientifiques est plutôt extrême. L'existence du sexe biologique n'enlève à personne le droit civil de s'habiller, de se comporter ou d'exister comme il le souhaite.

    Défendre le caractère sacré des espaces réservés aux femmes – que ce soit dans les prisons, les refuges, les vestiaires ou les installations sportives – n'est pas un rejet de l'humanité des personnes transgenres. C'est un refus de laisser une idéologie politique démanteler les protections durement acquises par un autre groupe.

    Une société qui ne sait pas faire la distinction entre compassion et capitulation a perdu ses repères moraux. Et le refus de Rowling de se rétracter est devenu quelque chose de rare et d'admirable : une prise de position publique en faveur de l'intégrité morale.

    Les chrétiens devraient être les premiers à dire que chaque personne est à l'image de Dieu. Mais reconnaître la valeur d'une personne ne signifie pas être d'accord avec tout ce qu'elle croit à son sujet.

    L'amour n'est pas synonyme de malhonnêteté, et il ne vous oblige pas à sacrifier vos propres connaissances sur l'autel de l'affirmation. Nos corps ne sont pas des enveloppes charnelles sans valeur dont il faut s'échapper ou qu'il faut renverser : ils font partie de l'intention divine de Dieu, et ne constituent pas un obstacle à celle-ci.

    C'est pourquoi la position de Rowling, bien que laïque, reflète un devoir que tous les chrétiens devraient reconnaître : dire la vérité, même lorsque le monde exige un mensonge. Et même si elle ne cite pas les Écritures, elle vit comme quelqu'un qui comprend le prix à payer pour défendre ceux qui sont réduits au silence.

    Malgré tous ses défauts, Rowling reste fidèle à ses convictions. Dans notre monde moderne, où la morale est floue, nous devrions être reconnaissants envers ceux qui sont prêts à sortir du rang (et à en payer le prix).

    Mieux vaut être censuré pour avoir dit la vérité que d'être loué pour n'avoir rien dit du tout.

  • « Pourquoi vivons-nous ? » Soljenitsyne et le véritable but de la liberté

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    De sur le CWR :

    « Pourquoi vivons-nous ? » Soljenitsyne et le véritable but de la liberté

    Une critique de Nous avons cessé de voir le but : les discours essentiels d'Alexandre Soljenitsyne , publié par Notre Dame Press.

    Alexandre Soljenitsyne regarde depuis un train à Vladivostok à l'été 1994, de retour en Russie après près de vingt ans d'exil. (Image : Wikipédia)

    « Admettons-le, même à voix basse, et seulement à nous-mêmes : dans cette agitation de la vie à une vitesse vertigineuse, pourquoi vivons-nous ? » – Alexandre Soljenitsyne, « Nous avons cessé de voir le but », Lichtenstein, 1993

    Comme le titre le laisse entendre, l'essai d'Alexandre Soljenitsyne « L'Épuisement de la liberté » ne s'attaque pas à la liberté en soi. En effet, en tant que lecteur de longue date de Soljenitsyne, ce critique peut témoigner que l'engagement du célèbre dissident anticommuniste en faveur de la liberté est, pour ainsi dire, bien plus marqué que celui de la plupart des auteurs occidentaux contemporains. Soljenitsyne voulait plutôt dire que la liberté est une abstraction et qu'elle doit donc être située dans un contexte réel et vécu. En pratique, compte tenu de l'extraordinaire diversité des cultures, des talents, des richesses et des personnalités, il est difficile d'imaginer comment deux êtres humains pourraient bénéficier de la même opportunité d'exercer leur liberté.

    Et lorsque les partisans de la démocratie libérale vantent la « liberté » du monde post-occidental du XXIe siècle, ils occultent généralement le fait que beaucoup peuvent être manipulés par la propagande, la publicité et la mode sans le moindre recours à la force. La pression psychique et le lavage de cerveau médiatique sont peut-être plus subtils que la coercition physique, mais cette subtilité ne les rend pas moins réels.

    De son côté, Soljenitsyne a explicitement soutenu que l'ère des médias a engendré une conception déformée et tronquée de la liberté. Dans le quatrième essai de « Nous avons cessé de voir le but : les discours essentiels d'Alexandre Soljenitsyne » , déjà mentionné, on le retrouve rejetant explicitement la conception « laisser-faire » de la liberté :

    Liberté ! – d'entasser des détritus commerciaux dans les boîtes aux lettres, dans les yeux, les oreilles et le cerveau des gens, dans les émissions de télévision (de sorte qu'il soit impossible d'en regarder une seule avec un sentiment de cohérence). Liberté ! – d'imposer l'information, sans tenir compte du droit des individus à ne pas la recevoir, de leur droit à la tranquillité d'esprit. Liberté ! – de cracher dans les yeux et dans l'âme des passants et des automobilistes avec de la publicité. Liberté ! Pour les éditeurs et les producteurs de films d'empoisonner la jeune génération avec des saletés dépravées.

    Le catalogue des abus de Soljenitsyne s'étend sur près d'une page. S'il était encore en vie et écrivait encore, bien sûr, il ajouterait sans aucun doute des remarques sur la liberté des magnats des réseaux sociaux d'attirer les adolescents avec leurs smartphones.

    Encore une fois, l'un des problèmes liés à la liberté réside dans le fait que ce mot est une abstraction, qui ne peut avoir de sens que dans le contexte d'une culture. Même si les mœurs libérales, le politiquement correct et les codes de la « haine » réduisent aujourd'hui la latitude des Occidentaux pour aborder ouvertement des questions comme l'immigration et la nationalité sur la place publique, il est indéniable que nous bénéficions désormais d'une liberté bien plus grande pour nous adonner aux extrêmes déviants de la sexualité.

    Il est également vain d'imputer ces changements à « la gauche », comme le prétend Conservatisme Inc. Si Soljenitsyne n'était certainement pas favorable aux sensibilités des États bleus, dans « L'Épuisement de la culture », il soutient explicitement que le socialisme n'est pas le seul responsable de l'affaiblissement des libertés.

    Plus profondément, ce qui étouffe la dignité de la personne humaine libre, c'est

    Les exigences utilitaires, qu'elles découlent de la contrainte socialiste-communiste ou du principe de l'achat et de la vente du marché. Jean-Paul II a récemment suggéré que, suivant les traces des deux totalitarismes que nous connaissons bien, un troisième totalitarisme se rapproche : le pouvoir absolu de l'argent, accompagné de la vénération passionnée que beaucoup lui vouent. Un appauvrissement de la culture s'est produit, à la fois en raison de la hâte fulgurante de ce processus mondial et des motivations financières qui le propulsent. […] Le confort omniprésent a conduit les personnes non préparées – et elles sont nombreuses – à un endurcissement de l'âme.

    Admettons que cette « vénération passionnée » de l'argent se retrouve même dans les cercles catholiques. Lorsqu'il s'agit des objectifs de l'éducation catholique, par exemple, les carrières prestigieuses et les maisons de rêve, les vêtements de marque et les voitures de sport qui les accompagnent priment généralement sur l'héritage de la civilisation occidentale. Ce culte de l'argent va de pair avec la superficialité (par exemple, le Bossu de Notre-Dame de Disney, 100 % américain , qui a « corrigé » l'histoire de Victor Hugo en lui donnant une fin heureuse). Dans la société de consommation, la tragédie n'a pas sa place , ce qui signifie que le consommateur est de plus en plus incapable d'affronter la réalité.

    Il convient de souligner que l'ouvrage en question porte bien son nom en incluant les discours les plus célèbres de Soljenitsyne. Il contient de nombreux éléments controversés, et les lecteurs du Catholic World Report ne manqueront pas de critiquer certains jugements politiques de l'homme. Les défenseurs de l'Ukraine seront rebutés par son affirmation de 1993 selon laquelle des conflits surviendraient parce que les anciennes nations soviétiques auraient adopté des « frontières fallacieuses tracées par Lénine ». Ce critique trouve les critiques de Soljenitsyne à l'égard du réaliste en politique étrangère George Kennan tout aussi peu convaincantes que son admiration pour Ronald Reagan est excessive.

    Pourtant, l'objectif de la lecture n'est pas d'adhérer à tout ce que dit un auteur, mais de susciter la réflexion, et une lecture attentive de ce recueil puissant y parviendra. Les thèmes sont aussi nombreux que les essais, et chacun d'eux se rapporte à une question récurrente liée aux défis de la postmodernité. Dans sa Conférence Templeton, Soljenitsyne attribue le totalitarisme soviétique à l'athéisme ; dans ses « Réflexions sur l'insurrection vendéenne », il compare les fanatiques égalitaires de la Révolution française aux bolcheviks ; dans son « Acceptation du prix Nobel », il explique comment l'art authentique nous offre un refuge dans le royaume intemporel du Vrai, du Bien et du Beau.

    Le discours le plus controversé de Soljenitsyne à Harvard en 1978 a scandalisé son auditoire de l'Ivy League en suggérant que des journalistes américains avaient parfois « induit l'opinion publique en erreur par des informations inexactes ou des conclusions erronées », voire « contribué à des erreurs au niveau de l'État ». Rétrospectivement, bien sûr, un commentaire du genre de celui prononcé par Soljenitsyne à Harvard ressemble à un croisement entre un euphémisme noir et une prophétie sophocléenne.

    Alors que l’Amérique est de plus en plus éclipsée par une nouvelle dystopie mondiale, nous pourrions consulter un poète qui a survécu à son prédécesseur.

    Nous avons cessé de voir le but : les discours essentiels d'Alexandre Soljenitsyne
    Par Alexandre Soljenitsyne

    Édité par Ignat Soljenitsyne
    Centre d'éthique et de culture Série Soljenitsyne
    Notre Dame Press, 2025
    Couverture rigide, 228 pages

  • Une conspiration universelle contre toute vie intérieure...

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    Lu sur le blog d'Emmanuel L. di Rossetti :

    L’écume des vies

    « On ne comprend absolument rien à la civilisation moderne si l’on n’admet pas d’abord qu’elle est une conspiration universelle contre toute espèce de vie intérieure », écrivait Georges Bernanos en 1946 dans son ouvrage culte, « La France contre les robots ». La formule a été tellement reprise qu’elle tient lieu d’antienne. 80 ans après la sortie du livre, elle n’a rien perdu de son acuité. Elle interroge, car si l’on voit les différentes formes de vie intérieure reculer, débordées par la technoscience qui s’arroge tous les droits sur toutes les vies, il s’avère difficile de savoir ce qui entraîne ce processus et le rend inéluctable. Alors ? Peut-on encore se réfugier dans la vie intérieure, se conduire en rebelle de ce monde qui n’aime rien que l’extériorité et son cortège d’émotions poussées à leur paroxysme et qui gondole les vies pour les rendre toutes similaires et fantomatiques.

    Lire la suite sur le blog d'Emmanuel L. di Rossetti