Le blog "Le soupirail et les vitraux" relève les propos du Professeur Picq à ce sujet dans "Le Monde" :
"Extraits d'une intéressante tribune du Pascal Picq dans Le Monde, paléoanthropologue, maître de conférences au Collège de France, auteur de nombreux ouvrages scientifiques sur la question "Qu'est-ce que l'humain ?"
[...] Dans l'évolution, c'est toujours l'homme qui pose problème, et les sciences humaines. [...] D'un point de vue biologique et évolutif, les espèces les plus sexuées sont les mammifères et les oiseaux ; les espèces les plus complexes physiologiquement, éthologiquement, cognitivement et, bien sûr, dans la diversité des sexualités. (Le sexe de la plupart des reptiles se fixe en fonction de la température d'incubation et 10 % des espèces de poissons changent naturellement de sexe au cours de leur vie.) - Le sexe biologique est fortement déterminé par les chromosomes, sachant que les femelles sont XX (homogamiques) chez les mammifères et XY chez les mâles (hétérogamiques), tandis que c'est l'inverse chez les oiseaux, avec des femelles ZW et des mâles ZZ.
Un très faible pourcentage d'individus naît avec différentes formes d'indéterminations sexuelles. - C'est là qu'une partie des sciences humaines pose problème. En raison d'un antibiologisme radical, elles refusent cette réalité biologique qui fait que nous sommes dans le groupe des espèces les plus déterminées biologiquement pour le sexe. C'est inepte d'un point de vue scientifique, stupide d'un point de vue philosophique et ouvert à toutes les idéologies. Par-delà le sexe (biologique), il y a la sexualité, c'est-à-dire la diversité et la plasticité des comportements qui amènent des individus à avoir des relations sexuelles. Heureusement, une partie des sciences humaines travaille avec l'anthropologie évolutionniste, notamment autour de la sexualité et de la construction sociale de l'identité sexuelle des individus. - Notre espèce se caractérise par une réceptivité sexuelle des femelles quasi permanente et un découplage entre l'acte sexuel et la reproduction, ce qu'on retrouve aussi chez les grands singes les plus proches de nous. La sexualité intervient dans les relations affectives, mais aussi dans les résolutions de conflits et dans des actes d'humiliation et de soumission. L'évolution nous a légué cette plasticité étho-cognitive et, par conséquent, l'éducation et les représentations sociales interviennent dans la construction de la sexualité, ce qu'on appelle le "genre" qui, contrairement au sexe biologique, n'est ni strictement féminin ni masculin. [...] Je m'oppose à toutes ces théories qui détournent les gender studies, avec pour seul argument imbécile d'affirmer qu'il n'y a pas de sexe biologique, et qui plient les observations faites dans la diversité des sociétés humaines et de grands singes pour dénaturer ou naturaliser - c'est selon - notre sexualité. Je comprends leurs revendications, mais elles ne sont pas du domaine des sciences. Pas plus que les créationnistes ou les conservatismes religieux, ces organisations et leurs motivations - aussi fondées soient-elles - n'ont leur légitimité en classe de sciences. Pour cela, il y a la politique, et j'invite tous les protagonistes à ne pas se tromper de terrain."