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Quand le "Tradiland" s'émiette

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L'abbé Guillaume de Tanoüarn, sur Métablog, analyse les divisions qui affectent la galaxie "tradi"

Diviseurs et divisions : la fatalité

L'Institut du Bon Pasteur se déchire publiquement depuis trois mois et demi. La Fraternité Saint Pie X a pris le même chemin, avec l'éviction programmée (non encore actée à ce jour) de Mgr Williamson et la fondation par l'abbé Chazal d'une "Fraternité Saint-Pie X" (bis) aux Etats unis. Mauvais temps sur le Tradiland. 

On peut évidemment se dire : ils sont fous ces tradis, mais quelle mouche les a piqués ? On peut aussi penser, comme moi, que les tradis ne sont pas pires que les autres et essayer d'expliquer le "syndrome Caïus Detritus" (pour ceux qui connaissent leurs classiques) qui a saisi le milieu. 

"Existe-t-il une communion sans transcendance ? " se demandait Malraux dans la préface qu'il a donnée à L'enfant du rire de Pierre Bockel. Il laissait la question pendante, comme pour répondre par la négative : non il n'existe pas de communion sans transcendance. Personnellement je répondrait par l'affirmative avec René Girard : lorsqu'il n'y a pas de transcendance positive et enthousiasmante qui puisse cimenter une unité, on peut avoir une unité négative, celle dans laquelle on découvre que si différents que l'on soit les uns des autres, on est tous contre. Contre quoi ? Peu importe. Il faut seulement que cette commune opposition relève d'une forme d'évidence. Ainsi à la FSSPX, on était tous contre le Concile. Et puis Benoît XVI nous explique que le Concile, c'est plus compliqué que cela, qu'il y a la lettre (positive) et l'esprit (négatif), que pour tout le reste c'est l'inverse, la lettre tue mais l'esprit vivifie, mais pour le Concile, il importe d'être conciliaire à la lettre et de vomir l'esprit (un faux esprit) du Concile. Bref ça devient très compliqué. Il y en a qui sont tout à fait d'accord avec lui, d'autre partiellement, d'autres encore pas du tout. Et voilà l'unité perdue. 

Dans le camp opposé, les progressistes ont toujours été contre, mais alors contre vent debout, ceux qu'ils appelaient les "intégristes". La définition d'intégristes, en 1950, quand on n'avait pas encore inventé Al Qaïda, était assez large. Dans un appendice célèbre à son énorme bouquin Vraie et fausse réforme, le Père Congar expliquait doctement : "Un intégriste est un catholique de droite". Ca permettait de faire d'une pierre deux coups : religion et politique, c'était le m^mee diable, les anciens de l'Algérie française, bref les catholiques de droite. Aujourd'hui les progressiste ont perdu à peu près toutes leurs certitudes, ils n'en finissent pas de se recentrer. Mais une chose demeure : l'antiintégrisme. C'est leur ciment. 

Les tradis, eux ne s'entendent plus sur ceux avec qui il faut être... CONTRE. Faut croire qu'ils ne sont pas si sectaires qu'on le dit. Ca leur coûte... leur unité. 

Chacun focalise en effet sur la plus petite différence, selon le célèbre complexe du porc épic. Et ainsi nous sommes tous contre... Mais au lieu d'être contre ceux qui sont pour, on est contre ceux qui sont contre parce qu'ils sont contre d'une manière qui est légèrement différente de la nôtre. Exemple ? Le plus grand ennemi de Fellay, celui à qui il ne fera pas de quartier, c'est Williamson. Un émiettement de la galaxie traditionaliste est à prévoir... tant que l'on en reste à l'unité contre et tant que l'on n'a pas efficacement désigné ce pour quoi l'on devrait s'unir. 

Mais dans "l'unité pour", il me semble qu'il faut encore distinguer deux cas de figure : l'unité d'un mouvement et l'unité d'une institution. 

L'unité d'un mouvement est très difficile à réaliser. Il faut avoir en commun les objectifs et la manière de les atteindre dans une véritable unité d'action. Raison pour laquelle la vie des mouvements est le plus souvent brève et traversée de scissions. 

L'unité d'une institution est juridique, elle repose donc sur une forme de coercition (ou au moins sur un calcul intéressé, celui qui tient compte du fait de se retrouver éventuellement en dehors du droit). Il y a deux grands type de droit associatif, le droit humain, qui est variable et jamais exclusif et le droit divin, qui est immuable et unique. L'Eglise est de droit divin. Le pape est de droit divin dans l'Eglise comme un père dans sa famille. L'évêque est de droit divin dans son diocèse. Par définition, aucun homme ne peut modifier le véritable droit divin (je ne parle pas de l'idéologie bourbonnienne, qui induisait un mixte entre Eglise et Etat, ce qu'on a appelé le gallicanisme). 

Si l'on prend les communautés traditionalistes, soit elles relèvent du droit divin de l'Eglise universelle, qu'elles reconnaissent et qu'elles font leur, auquel elles participent pour une part en le reconnaissant et dans la mesure où elles le reconnaissent (voilà le pb de l'IBP), soit pour des raisons de crise et d'opération survie, elles ne le reconnaissent pas comme contraignant. Elles relèvent alors du droit humain et des jeux d'appareil qui fatalement l'accompagnent. C'est ce que l'on est en train d'apercevoir à la FSSPX : gare aux dégâts. Candidus (voir son post sur tradinews) a raison de dire que, alors que  l'Eglise conciliaire' n'est plus vraiment l'ennemie, seule une autorité charismatique pourrait obvier à un éclatement qui est écrit dans la pâte humaine.

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