De Xavier Darcos (Chancelier de l'Institut de France) :
“Une leçon écoutée donne plus de profit que quatre étudiées par soi-même” écrivait vers 1300 Raoul Le Breton, maître en théologie de la Sorbonne. Cette citation, qui illustre bien la grande estime dans laquelle le monde médiéval tenait l’art oratoire, figure dans l’ouvrage que Nicole Bériou, membre de l’Académie des inscriptions et belles-lettres, a récemment consacré à la prédication au Moyen Âge (1).
Au fil de cette vaste étude, comme dans l’entretien qu’elle nous a accordé, l’auteur souligne la haute idée que les prédicateurs médiévaux se faisaient de leur mission et à quel point, dans un contexte marqué par un foisonnement de paroles concurrentes et potentiellement hérétiques, ils envisageaient leurs prises de parole comme un véritable art.
Parmi d’autres surprises, Nicole Bériou souligne ainsi que les prédicateurs n’hésitaient pas à innover en s’inspirant des techniques développées par leurs concurrents, jongleurs, poètes et musiciens, pour capter l’attention et mieux faire passer leur message, jusqu’à donner parfois à leurs prêches la forme de véritables saynètes de théâtre.
De la sorte, elle nous invite à porter “un autre regard sur la prédication au Moyen Âge”, mais aussi sur le monde médiéval lui-même. La programmation que nous vous proposons cette semaine s’inscrit dans ce mouvement de redécouverte d’une période longtemps caricaturée et injustement dévalorisée. Vous y reconnaîtrez notamment les voix de Jean Favier, Michel Pastoureau, André Vauchez et Michel Zink, ainsi que des évocations des travaux de Georges Duby et Émile Mâle.
(1) Religion et communication : un autre regard sur la prédication au Moyen Âge, par Nicole Bériou, Éditions Droz, juillet 2018, 563 p., 24€

Un autre regard sur la prédication au Moyen Âge