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L'Afrique est devenue un centre de gravité pour l'État islamique

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Extrait de l'article (en anglais) intitulé "Une stratégie mondiale pour lutter contre l'État islamique en Afrique" de Tricia Bacon, Austin C. Doctor, Jason Warner, publié sur le site de l'International Centre for Counter-Terrorism (ICCT) :

Aperçu de l'activité de l'État islamique en Afrique

À quoi ressemble au juste la présence de l'État islamique ? Depuis 2014, les groupes militants en Afrique ont plaidé leur allégeance, ou bay'ah, à l'État islamique central. Ces promesses ont donné naissance à huit - ou six selon la classification - provinces officielles, ou wilayat, de l'État islamique : Libye, Algérie, Égypte (péninsule du Sinaï), Afrique de l'Ouest (lac Tchad), Sahel, Somalie, Mozambique et République démocratique du Congo. Si les objectifs, les capacités et les relations de ces organisations avec l'État islamique central varient, elles sont toutes largement unies par leur mécontentement à l'égard des statu quo sociopolitiques dans leurs pays et par leur incorporation dans l'État islamique comme moyen de changer ces réalités.

Bien sûr, si aucune des provinces africaines de l'État islamique ne se rapproche de l'occupation par l'État islamique central de grandes parties de l'Irak et de la Syrie, l'existence de ces provinces n'est pas symbolique. En effet, l'essor de l'État islamique en Afrique a été l'un des principaux facteurs de l'augmentation générale de la violence djihadiste sur le continent au cours des dernières années. Les statistiques sont sombres : la prévalence de la violence liée au djihadisme en Afrique a été multipliée par 17 depuis 2009, un chiffre stupéfiant. En outre, au cours de l'été 2021, les Nations unies ont révélé une statistique tout aussi frappante : au cours des six mois précédents, "l'évolution la plus frappante de la période considérée" était que le continent africain - et non l'Asie du Sud ou le Moyen-Orient - était la région du monde la plus touchée par le terrorisme djihadiste, qui subit le plus grand nombre de pertes mondiales causées par les groupes djihadistes désignés par l'ONU. Depuis le début de l'année 2022, l'État islamique a mené la moitié de ses opérations mondiales revendiquées en Afrique. Au cours des quatre premiers mois de 2022, l'État islamique a revendiqué plus d'opérations au Nigeria qu'en Irak. En conséquence, l'Afrique est devenue un centre de gravité pour l'État islamique et, en fait, c'est précisément la montée en puissance et l'expansion significative de l'État islamique en Afrique qui a conduit l'Afrique à devenir le nouvel épicentre mondial de la terreur jihadiste.

Par conséquent, le travail de la Coalition mondiale pour lutter contre l'État islamique n'a jamais été aussi urgent.

Dans la Libre de ce 6 juillet, Hubert Leclercq alerte sur le danger de cette "Nouvelle poussée islamiste en Afrique de l’Est" où les djihadistes affiliés à l’État islamique progressent et sortent des frontières du Mozambique. (extraits)

"Une liste de noms qui ne cesse de s’allonger. Des chiffres de cases incendiées, de civils contraints de fuir et de militaires tombés au combat qui suivent inexorablement la même courbe. Les djihadistes d’Ansar Al-Sunnah au Mozambique sont clairement repartis à l’offensive ces derniers mois, soutenus par une véritable campagne de communication orchestrée par les médias de l’État islamique auquel ils ont fait allégeance en 2019. Depuis la fin du mois de mai, les attaques sont pratiquement quotidiennes et ne se cantonnent plus uniquement à la province du Cabo Delgado dans le nord du pays. Les islamistes, qui font désormais face non seulement à l’armée nationale, mais aussi à des renforts venus du Rwanda et d’autres envoyés par les pays de la SADC (Communauté d’Afrique australe) ont adapté leur stratégie. Ils se sont constitués en petites cellules mobiles. Le 28 juin dernier, ces islamistes n’ont pas hésité à attaquer par surprise une garnison à Nangade (Cabo Delgado). Le commandant de la garnison a été abattu et les rebelles sont repartis avec un stock d’armes et de munitions. Une "action d’éclat" mise en avant sur les réseaux sociaux de l’État islamique qui ont revendiqué l’action, photo à l’appui.

Ces derniers temps, l’EI a décidé de mettre en exergue ses branches africaines. Une vraie campagne de communication qui passe par des messages envoyés en vidéo par des combattants de l’EI en Syrie et en Irak, les deux principales "ailes" du mouvement, qui saluent et mettent en exergue le courage de "leurs frères africains" en pointant en premier lieu les combattants mozambicains puis les membres des ADF qui sévissent en RDC. Les combattants du Mali, du Nigeria et du Sahel sont aussi mis en évidence.

Il faut dire aussi que plus de la moitié des attaques revendiquées en 2022 par l’EI ont été commises sur le sol africain. Ce qui démontre aussi l’importance que le continent a pris dans la stratégie des islamistes radicaux. En 2022, sur les six premiers mois de l’année, ils ont ainsi revendiqué 58 attaques perpétrées par leurs affiliés mozambicains. Parmi ces dernières, certaines ont été orchestrées de l’autre côté de la frontière tanzanienne mais aussi plus au sud du Mozambique, dans la province de Gaza, par très loin de l’Eswatini (ex-Swaziland) et donc de l’Afrique du Sud. Une mobilité qui gêne l’armée mozambicaine, mais aussi les troupes de la Samim (mission de la SADC au Mozambique) ou les forces rwandaises, surtout engagées pour sécuriser le projet gazier dont le principal promoteur est le groupe français TotalEnergie. Aujourd’hui, face à cette instabilité et cette violence, le projet est suspendu. D’autres entrepreneurs ont décidé de mettre la clé sous le paillasson ou de suspendre leurs investissements.

Certains analystes pointent désormais le risque que font peser ces islamistes sur le canal du Mozambique par lequel passe 30 % de la production pétrolière mondiale. C’est sur cette côte que se situe Pemba, le chef-lieu de la province du Cabo Delgado où vient d’être instaurée l’interdiction de circuler à moto entre 18 heures et 5 heures, pour empêcher une "éventuelle offensive des islamistes"…

"Dangereuse cécité", explique sur Twitter une spécialiste sud-africaine du renseignement. "Le monde entier a le regard porté vers l’Ukraine et oublie le Mozambique"(...)

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