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Une nouvelle attaque contre l'héritage de Jean-Paul II

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De George Weigel sur First Things :

Une autre attaque contre Jean-Paul II

27 juillet 22

Le 13 mai 1981, le pape Jean-Paul II a déjeuné dans l'appartement papal avec le docteur Jérôme Lejeune, le pédiatre et généticien français renommé qui a identifié l'anomalie chromosomique à l'origine du syndrome de Down. 

Le Dr Lejeune était un éminent défenseur de la vie et les deux hommes ont discuté des initiatives que le Vatican pourrait prendre pour faire avancer la cause de la vie par le biais d'une théologie morale solide, éclairée par le meilleur de la science moderne, et par des politiques publiques soutenant une culture de la vie. Il n'est pas difficile d'imaginer que Jean-Paul et le Dr Lejeune ont également discuté de ce que le pape décrira dans l'encyclique Evangelium Vitae de 1995 comme une "culture de la mort" corrosive. L'ironie, bien sûr, c'est que, quelques heures après ce déjeuner, une forme de culture de la mort s'est manifestée lorsque Mehmet Ali Agca a abattu Jean-Paul II dans la cour du pape, place Saint-Pierre.  

Cette conversation de midi entre deux hommes de génie a influencé la création de deux nouvelles institutions à Rome : L'Institut Jean-Paul II d'études sur le mariage et la famille, situé à l'Université pontificale du Latran, et l'Académie pontificale de la vie. L'Académie devait être un groupe de réflexion interne au Vatican, au sein duquel des hommes et des femmes de bonne volonté du monde entier pourraient travailler ensemble à la construction de cultures capables de chérir la vie, en particulier celle des plus faibles et des plus vulnérables. L'Institut, quant à lui, devait être un centre intellectuel de haut niveau pour le renouvellement de la théologie morale catholique au XXIe siècle et au troisième millénaire. Ces deux initiatives ont été des cadeaux spéciaux de Jean-Paul II à l'Église universelle. 

L'Institut Jean-Paul II a prospéré pendant trois décennies, formant une génération de théologiens qui se sont attachés à réenraciner la théologie morale catholique dans un concept philosophique solide et contemporain de la personne humaine, tout en recentrant la réflexion morale catholique sur les vertus et les Béatitudes (la Magna Carta de la vie morale catholique). L'institut basé à Rome a rapidement donné naissance à des instituts affiliés dans le monde entier, le plus formidable d'entre eux étant basé à Washington, D.C. Visiter l'un de ces centres universitaires, c'était entrer dans un monde de grande aventure théologique, rempli d'hommes et de femmes engagés apostoliquement dans la conversion des cultures dans lesquelles ils vivaient.

Tout cela a provoqué la consternation au sein des factions théologiques catholiques dominantes de l'époque, prises comme elles l'étaient dans les sables mouvants d'un concept de théologie morale basé sur les années soixante, dans lequel il n'y a pas d'absolus moraux, rien n'est toujours mauvais, et la vie morale est considérée comme une négociation permanente impliquant des normes éthiques fluctuantes, la société et la conscience individuelle. Il ne fait aucun doute que ce projet théologique anorexique a été fortement influencé par la révolution sexuelle. Et il n'est pas trop dur de suggérer que le "proportionnalisme" (comme on a fini par appeler ce modèle de négociation de la vie morale) a évolué vers une forme de capitulation face à ce tsunami culturel.  

En 2021, l'Académie pontificale de la vie a parrainé une conférence dont les actes viennent d'être publiés par les Éditions du Vatican sous le titre Éthique théologique et vie : Scripture, Tradition, and Practical Challenges. Le livre propose rien de moins qu'un changement radical dans la manière dont l'Église enseigne la vie morale : un "changement de paradigme", comme le dit un auteur, qui consacrerait le proportionnalisme (et son refus d'admettre que certaines choses sont tout simplement mauvaises, un point c'est tout) comme méthode officielle de raisonnement moral de l'Église. Faire cela signifierait, bien sûr, répudier l'enseignement du pape saint Paul VI dans l'encyclique Humanae Vitae de 1968, et l'enseignement du pape saint Jean-Paul II dans l'encyclique Veritatis Splendor de 1993 et dans l'Evangelium Vitae susmentionné. Les discussions sur cette répudiation n'ont cependant pas manqué ces dernières années, à l'Institut Jean-Paul II reconstitué de Rome (qui n'est plus que l'ombre de lui-même) et à l'Université pontificale grégorienne de Rome, dirigée par des jésuites.

De leurs manières distinctes, Humanae Vitae, Veritatis Splendor et Evangelium Vitae ont toutes rejeté le proportionnalisme comme étant contraire à l'évangile et à une compréhension véritablement humaine de la vie morale. Ces trois encycliques ont suscité le mépris et la fureur des factions théologiques dominantes en Occident. Et selon de récents rapports médiatiques, ces factions font maintenant pression pour obtenir une nouvelle encyclique papale : une qui amènerait l'Église dans la terre promise du "discernement" moral, qui se trouve "au-delà" de ce que le langage de la tendance proportionnaliste caricature maintenant comme étant la "moralité en noir et blanc", le "rigorisme" et le "fondamentalisme" de Jean-Paul II. 

Assurément, une tentative d'assassinat contre le pape dont l'enseignement et l'exemple animent les parties vivantes de l'Église mondiale n'a pas suffi. 

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