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Les dessous de la destitution d’un évêque américain par le pape François

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Lu sur le site web il sismografo (13 novembre 2023) :

Publié par Jean-Marie Guénois, dans Le Figaro :

eveque-americain-revoque.jpg« Opposé à la ligne réformatrice de François, Mgr Strickland avait critiqué les évolutions envisagées par le synode sur l'avenir de l'Église. -- La réunion annuelle des 273 évêques américains à Baltimore (Maryland) s'ouvre ce lundi dans un contexte de crise inattendue: le pape François a «relevé», l'un d’eux, ce samedi 11 novembre. Il s’agit de Mgr Joseph Strickland, 65 ans, évêque de Tyler au Texas, connu pour être la voix épiscopale la plus critique du pontificat aux États-Unis. Un acte très rare. Il l'a remplacé, selon la procédure, par un administrateur apostolique provisoire, Mgr Joe Vasquez, l'évêque d'Austin. Mgr Strickland avait été nommé à ce poste il y a onze ans par Benoît XVI.

Cette décision romaine est la conséquence d'une visite apostolique qui avait été décidée par Rome en raison de prises de position récurrentes de cet évêque opposé à la ligne réformatrice du pape François. Le prélat publiait habituellement sur les réseaux sociaux, dont son compte X (ex-twitter) aux 160 560 abonnés, ou sur son blog, mais aussi sur ses nombreuses lettres pastorales, toujours disponibles sur le site du diocèse. Il s'exprimait aussi sur une radio catholique très populaire, Virgin Most Powerful Radio, qui vend par exemple des T-shirts «I stand with Strikland», «je suis avec Strickland».

Depuis longtemps sous la pression de Rome, Mgr Strickland avait dit refuser toute perspective de démission. Il a tenu parole. D'où le passage en force du pape François. La preuve tient dans le libellé du Vatican, samedi, de cette démission imposée. Il tenait en trois lignes, purement administratives, dans le bulletin quotidien de la salle de presse du Saint-Siège en évoquant un «relèvement de charge», ce qui est rarissime. Le terme habituel est celui d'une «acception par le pape de la renonciation» d'un évêque. L'usage veut que, même si ce dernier conteste la décision, et même si elle a été imposée de facto, il doit proposer sa démission au pape qui, alors, «l'accepte» formellement.

Critique sur le synode

Le Vatican n'a pas expliqué les raisons de cette mise hors course d'un évêque très classique, non traditionaliste, mais très rigoureux sur l'enseignement de l'Église tel qu'il est aujourd'hui. Des sources proches du dossier indiquent aussi des «problèmes de gestion» dans son diocèse, mais sans précision.

Mgr Strickland s'est effectivement montré publiquement très critique, comme une majorité de ses confrères américains, sur «le synode de l'avenir de l'Église» dont la première session s'est déroulée au Vatican en octobre dernier, en attendant une seconde assemblée en octobre 2024. Il a critiqué une série de décisions qui pourraient instituer une forme de diaconat féminin, l'ordination à la prêtrise d'hommes mariés, le contrôle par des laïcs du pouvoir épiscopal et la bénédiction de couples homosexuels, même si ce dernier point a été plus contesté que prévu en octobre.

Dans sa lettre du 22 août 2023 adressée aux catholiques de son diocèse du nord est du Texas, il récuse point par point ces évolutions en s'appuyant sur l'enseignement post-conciliaire de l'Église catholique, avec cette conclusion qui a dû lui coûter cher, puisqu'il a laissé entendre que le pape François serait schismatique: «Il est regrettable que ceux qui ne sont pas d'accord à ces changements [prévus par le synode, NDLR] soient étiquetés “schismatiques”. (…) Mais tenir ferme ne signifie pas que l'on cherche à quitter l'Église. Au contraire, ce sont ceux qui proposeraient des changements sur ce qui ne peut pas être changé selon les commandements du Christ, à son Église, ce sont eux qui sont les vrais schismatiques ». Sans doute l’évêque a-t-il signé son arrêt de mort le 31 octobre dernier, jour où il a cité publiquement une phrase extraite d'une lettre qu'il avait reçue, qualifiant le pape François «d'usurpateur» parce qu'il aurait «poussé le vrai pape dehors pour occuper sur un trône qui n'est pas le sien»…

Durcissement du pontificat

Sur son compte X, (ex Twitter ) Mgr Strikland a notamment commenté sa déposition par cette phrase : «Peu importe ce que le jour apporte, réjouissez-vous toujours. Jésus-Christ est la Voie, la Vérité et la Vie, hier, aujourd'hui, et toujours». Si beaucoup apprécient cette mise hors-jeu d'un évêque contestataire – recommandé par les membres de la visite apostolique, une sorte d'audit interne ecclésial - elle confirme un durcissement objectif du pontificat observé depuis la mort du pape émérite Benoit XVI. Son ancien secrétaire personnel, Mgr Georg Gänswein, n'a-t-il pas été renvoyé cet été en Allemagne, sans aucune affectation, après ses propos critiques contre le pontificat?

Le 21 septembre dernier, le cardinal Gerhard Ludwig Müller, ancien Préfet de la Congrégation pour la Doctrine de la Foi de Benoît XVI, avait pour sa part publiquement conseillé à Mgr Strickland, alors sous le coup de la visite apostolique dans son diocèse, de ne pas accepter la démission qu'on lui demanderait. Elle serait, selon lui, «une révocation arbitraire» qui finirait par porter «atteinte à l'autorité du pape». Car «un évêque ne peut être destitué par le pape, affirmait Müller, que s'il s'est rendu coupable de quelque chose de mauvais, hérésie, schisme, apostasie, crime ou comportement totalement non-sacerdotal».

Pour ce théologien en effet «Le pape n'a aucune autorité du Christ pour intimider les bons évêques qui vivent à l'image du Christ Bon Pasteur et qui sanctifient, enseignent et conduisent le troupeau de Dieu au nom du Christ, conformément à l'idéal épiscopal de Vatican II».

Un message aux évêques américains

Il est certain que le pape ne reviendra pas sur cette décision. Elle est un message clair aux évêques américains considérés comme les plus récalcitrants à son pontificat, et qui commencent donc leur assemblée plénière ce lundi pour trois jours à Baltimore. Pour particulière qu'elle soit – 5340 évêques catholiques sont en fonction dans le monde - , la révocation de Mgr Strickland sera toutefois considérée par beaucoup comme un nouvel acte «autoritariste» de François. D'autant, remarque-t-on dans certains milieux du Vatican, qu'elle n'est fondée sur aucun article du code de droit canonique, donc hors du droit en vigueur.

Un aspect indéniable de la gouvernance de François, où il est désormais ouvertement critiqué à sa droite comme à gauche. »

Commentaires

  • Au tout début de son pontificat, le pape François avait déclaré que l'Histoire gardera de lui le souvenir d'un pape qui aura initié des divisions au sein de l'Eglise. À l'époque, on pensait que François faisait de l'humour. Aujourd'hui on ne rit plus.

  • La Papauté est-elle devenue avec François, une espèce de dictature ecclésiastique ? Qu'attendent les cardinaux, les évêques pour réagir ? Ce qui se passe à Tyler aux Etats-Unis, pourrait bien se produire à Fréjus-Toulon en France; grâce à Dieu, l'évêque de ce lieu est très prudent. Prions pour l'Eglise. A Séez aucun séminariste, personne ne s'en émeut ... ! ? ....

  • La multiplication de décisions brutales, dans le sens infondées, prises au mépris des règles mais avec pour effet systématique la mise en péril de l’avenir et de la relève fidèle à la foi catholique pose question sur les intentions de Bergoglio.

    Il n’y a pas si longtemps, un autre évêque, Dominique Rey, s’est vu obligé de suspendre les ordinations, alors que là aussi le diocèse compte un beau réservoir de séminaristes. Où en est-on aujourd’hui? Et qu’on ne vienne pas encore nous sortir le refrain des rumeurs ou du complotisme.

    Personne n’a oublié non plus le seul fait d’armes de De Keysel, une fois parachuté à Malines.

    Les exemples peuvent.

  • Après un an d'attente, les pauvres séminaristes de Fréjus Toulon attendent toujours leur ordination. Sans savoir pourquoi ils doivent attendre, ni combien de temps cela durera.

  • Bonjour Etienne,
    La situation est encore pire que ce que vous décrivez, malheureusement. Selon Libération, Bergoglio serait sur le point de designer un coadjuteur à Mgr Rey, un certain Touvet, qui disposerait des pleins pouvoirs, comme cela s’est déjà fait à Alméria, lorsque Bergoglio avait nommé Antonio Gómez Cantero évêque coadjuteur. Il avait pris de facto le contrôle du diocèse d'Alméria, laissant Adolfo González Montes, évêque titulaire à l'époque, comme simple représentant diocésain jusqu'à ce que le pape accepte sa démission.

    L’info est reprise sur Infovaticana ce jeudi, d’où je la reprends.

  • 'Todos, todos, todos!' ont scandé mes enfants à la suite du pâpe François à Lisbonne cet été.

    Trop beau! Mais ce 'todos', cette inclusion, le dialogue, la miséricorde, ils sont réservés à qui finalement? Certainement pas aux fidèles qui ont eu l'audace de s'opposer à la piqûre miraculeuse, ni pour ceux qui osent fréquenter ou défendre la forme extraordinaire du rite romain, ni pour ceux qui osent reconnaître l'importance du depositum fidei (qui selon le nonce americain Christophe Pierre n'existe pas de toute façon).

    Dites moi, elle est où l'odeur des brebis, tellement exaltée? Je ne la sens nulle part dans l'exclusion pontificale de Mgr. Daniel Fernández Torres ou celle de Mgr. Strickland et son troupeau. Les cathos qui ont toujours été fidèles et qui le sont toujours, ont-ils perdu toute odeur, eux?

    Ne soyons pas naïfs, l'extermination de "ce qui était saint pour nos ancêtres" ne s'arrêtera pas à Puerto Rico, ni à Texas-Tyler ou au diocèse de Fréjus-Toulon. Déjà les Rédemptoristes transalpines peuvent, eux aussi, se réjouir d'une visitation apostolique. La suite? Le sort des frères franciscains de l'Immaculée ou celui de la Fraternité des Saints Apôtres en dit long. Demain ce sera vous, ce sera moi.

    Seigneur protège nous, protège nos familles, nos enfants.

  • Bonjour à tous,
    Les destitutions d'évêques légitimement institués, par simple motu proprio pontifical, sans que l'évêque ait commis de faute grave, sont théologiquement INVALIDES, comme le dit bien le Cal Müller.
    Mais qui se souvient encore que le pape Pie VII a destitué de cette façon parfaitement invalide les 82 évêques d'Ancien-Régime, lors du Concordat napoléonien ?
    C'est ce que j'expose dans cet article :
    https://eglise-la-crise.fr/index.php/fr/component/joomblog/post/coup-d-il-profond-sur-lactu-qui-buzze-et-le-buzz-de-lactu-invalidit-de-la-destitution-de-mgr-strickland-par-fran-ois-comme-de-celle-des-82-v-ques-fran-ais-par-pie-vii-lors-du-concordat-napol-onien-d-fense-des-v-ques-r-clamants-?Itemid=191
    Vincent Morlier,
    Écrivain catholique.
    http://www.eglise-la-crise.fr/

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