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Belgique : la laicité est confrontée à une perte d’intérêt pour ses activités

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De Vincent Delcorps sur Cathobel :

Le CAL, combien de pratiquants ? « La laicité est confrontée à une perte d’intérêt pour ses activités »

En Belgique, la laïcité organisée est une organisation philosophique non confessionnelle reconnue par les pouvoirs publics et subsidiée par ceux-ci. Etonnamment, il est très difficile de connaitre le nombre de personnes qui participent aux rituels qu'elle propose...

Depuis 2018, l'Eglise catholique en Belgique publie un rapport annuel. Particulièrement attendus, divers chiffres y sont communiqués, tels que le nombre de baptêmes, de mariages ou la participation à la messe dominicale. Si ces chiffres ne suffisent à évaluer le rayonnement de la religion catholique en Belgique, ils donnent une idée du nombre de personnes qui s'en sentent proches - et de l'évolution de ce nombre.

Du parrainage aux funérailles

Depuis 2002, la laïcité organisée bénéficie de subsides publics au même titre que les cultes confessionnels. Ces subsides lui sont attribués au titre de l'assistance morale qu'elle apporte. Cette assistance se traduit notamment par l'organisation d'ateliers ou de conférences, ainsi que par une présence au sein de services d'aumônerie (prison, hôpitaux...).

Elle se traduit aussi par l'organisation de cérémonies laïques. Très diversifiées, celles-ci concernent les différentes étapes de la vie: mariages, unions libres, parrainages, cérémonie d'accueil des enfants d'une famille recomposée, noces d'or, funérailles...

"Pas de statistiques"

Reste une question: combien de personnes décident ainsi de bénéficier de ces propositions? Très étonnamment, le Centre d'Action Laïque ne le dit pas. Dans son rapport annuel, il parle de son rayonnement dans les médias, fait état d'une série d'animations et de son travail politique. En revanche, il ne dit mot du nombre de cérémonies laïques qui se sont tenues. "Contrairement à l’Eglise catholique, le CAL ne publie pas de statistiques relatives à la 'pratique laïque', argumentant justement de sa différence par rapport à une Église centralisée", nous confirme Caroline Sägesser, chercheuse au CRISP, spécialiste des cultes et de la laïcité.

C'est en se plongeant dans les rapports annuels des régionales du CAL que le chercheur franco-canadien David Koussens, auteur d'un récent ouvrage sur la laïcité en Belgique, a tenté de trouver la parade. Sans grand succès: seuls quelques rapports donnent des chiffres, et pas de manière systématique. Les données obtenues lui ont toutefois permis de constater que les chiffres étaient... très bas. Ainsi, en 2004, seules 5 cérémonies laïques étaient organisées sur le territoire couvert par le CAL Luxembourg. En 2009, 35 cérémonies y furent comptabilisées. "Au cours de la décennie 2000, soit juste après l’accès au financement public, les rapports publics des régionales sont quasiment muets sur les rituels laïques, alors qu’à la même période, les responsables d’associations laïques s’alarment de la baisse du nombre de demandes de cérémonies", écrit-il dans son ouvrage.

Les subterfuges du CAL

Avec intérêt, David Koussens constate que "le nombre de cérémonies laïques étant parfois tellement faible""certains rapports annuels présentent les chiffres de façon à en euphémiser l’attrition. Ainsi, certaines régionales vont plutôt présenter le nombre de personnes qu’elles estiment avoir été 'touchées' par ces événements, c’est-à-dire le nombre de celles qui en étaient spectatrices sans être directement impliquées dans le rituel."

Autre subterfuge: certaines régionales assimilent n'importe quel rituel non religieux à un rituel laïque. "Le procédé permet de présenter comme performant un modèle 'laïque' de cérémonies, alternatif à celui des Eglises (principalement de l’Eglise catholique), y amalgamant toutes celles qui n’ont pas été organisées avec le concours d’associations laïques", souligne le chercheur. "Or, il n’est pourtant pas avéré que les personnes qui ont sollicité ces cérémonies aient adhéré, de près ou de loin, aux idéaux portés par la laïcité organisée."

Les effets de la sécularisation

Caroline Sägesser confirme le peu d'intérêt pour les cérémonies organisées par le CAL. "Je pense que la laïcité est confrontée à une perte de mobilisation voire de simple intérêt pour ses activités." Elle rejoint aussi la thèse défendue par Koussens, selon laquelle la sécularisation de la société n'affecte pas seulement les religions, mais aussi la laïcité organisée. "Il est en effet difficile de rester mobilisé quand l’adversaire face auquel on s’est construit a perdu autant de sa puissance."

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