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Pourquoi Tintin reste jeune...

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C'est Laurent Dandrieu, dans Valeurs Actuelles, qui met en lumière l'éternelle jeunesse de Tintin ("Tintin et le secret de jouvence", 20 octobre).

Insistant sur le "grand écart" qui a conduit le jeune reporter des pages du "Petit XXème" au grand écran, Laurent Dandrieu y voit

...quelque chose "d'assez symptomatique d’une oeuvre fédératrice sans être aucunement centriste, qui témoigne d’un art particulier à marier l’eau et le feu, la sagesse et la folie, le calme et la tempête, le souffle vibrant de l’aventure et la sérénité de la contemplation – bref à tenir, comme disait Bossuet, les deux bouts de la chaîne."

"Et si le secret de l’éternelle jouvence de Tintin était là, dans l’aptitude de son créateur à tenir ensemble ce qui paraît contraire, à concilier en un seul monde ce qui paraît inconciliable, à faire tenir dans ses pages toute la diversité, toutes les contradictions, tous les tiraillements et en même temps toute la profonde unité de l’existence ? Si Tintin parle aux gamins de 1929 comme à ceux de 2011, aux jeunes comme aux vieux, aux enfants sages comme aux casse-cou, aux contemplatifs comme aux histrions, n’est-ce pas d’abord parce que son univers renvoie chacun de nous à sa profonde dualité, à ces apparentes contradictions qui se fondent en chacun de nous pour forger notre unicité ? Je dirais même plus : pour forger notre unicité."

Dans cet article bien ficelé, l'auteur montre comment Hergé sait allier réalisme et fantaisie, sérieux et comique, positif et négatif, l'ancien et le nouveau, la clarté et la complexité, et comment il sait éviter aussi l'écueil d'un parti-pris idéologique : 

"Ni de droite ni de gauche, bien au contraire Dans ses aventures latino-américaines, Tintin sait bien qu’une dictature en remplace une autre sans que jamais rien ne change. Sans illusion sur la nature humaine, il ne rêve pas de lendemains qui chantent. Il fait juste ce qu’il peut pour éviter qu’ils déchantent de trop. Sans parti pris idéologique : d’un anticommunisme primaire dans Au Pays des Soviets, il n’est pas plus indulgent vis-à-vis du capitalisme technicien et corrompu et de sa dureté à l’égard des minorités dans Tintin en Amérique. Épousant sans mauvaise conscience le paternalisme colonialiste dans Tintin au Congo au nom du progrès matériel indéniable qu’il apporte aux populations locales, il combat résolument l’impérialisme nippon dans Le Lotus Bleu. Mettant en 1956 en échec dans l’Affaire Tournesol une Bordurie dominée par un régime moustachu d’allure stalinienne, il avait en 1938 empêché cette même Bordurie, alors fascisante, d’engloutir la paisible Syldavie, ce qu’Hergé lui-même décrivait comme un « Anschluss avorté » en référence à la mainmise nazie sur l’Autriche. Et ce faisant, désignait ce qui est sans doute l’idéal politique d’Hergé – et de Tintin : la Syldavie du roi MuskarXII, monarchie éclairée où le souverain agit comme père de ses sujets. Car, foncièrement indifférent à la politique moderne comme à tout ce qui divise, Tintin n’a qu’un souci, celui d’un humaniste : que chacun, qu’il soit petit vendeur d’oranges, tireur de pousse-pousse, romanichel ou indien d’Amérique, soit traité et respecté comme une personne à part entière. Ni droite ni gauche : monarchie populaire." 

Et pour conclure, Laurent Dandrieu, évoquant le goût de la "bourlingue et de l'amour des pénates", conclut :

Hergé a "compris que les véritables aventures sont intérieures, et qu’il est vain de vouloir chercher une quelconque vérité à l’autre bout de la Terre. Il nous l'a montré, à vrai dire, dès le Trésor de Rackham le Rouge, où le fameux trésor, que nos héros ont vainement cherché aux antipodes, était resté tout le temps sagement caché à Moulinsart. « Car c’est de la lumière que viendra la lumière », disait le parchemin laissé par François de Hadoque. Il aurait pu aussi paraphraser l’Évangile de Matthieu : « Là où est ton coeur, là sera ton trésor. »

Merci, Laurent Dandrieu, pour ce bel hommage à notre compatriote et à son héros!

Commentaires

  • On peut faire le parallèle avec ce passage tiré du récent ouvrage de Jean Madiran, "Chroniques sous Benoît XVI" (p. 311):

    En 1910, Saint Pie X avait donné une indication très nette, dont l'école maurrassienne fut à peu près la seule à comprendre pleinement la portée. Dans sa Lettre apostolique sur la démocratie chrétienne de Marc Sangnier, il résumait d'une manière un peu fracassante une pensée quue l'on perdait passablement de vue:

    "Non, la civilisation n'est plus à inventer ni la cité nouvelle à bâtir dans les nuées..."
    (...)
    "...Elle a été, elle est; c'est la civilisation chrétienne, c'est la cité catholique. Il ne s'agit que de l'instaurer et de la restaurer sans cesse sur ses fondements naturels et divins..."
    (...)
    "...Contre les attaques toujours renaissantes de l'utopie malsaine, de la révolte et de l'impiété."

  • Il est obvie que qu'il ne faut pas confondre Eglise et Règne de Dieu et Eglise et Monde...L'Eglise est le sacrement du règne de Dieu pour le monde...mais l'Eglise comme le monde est constituée aussi par des membres pécheurs qui sont, en ce sens, encore du monde par quelques aspects que ce soit...

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