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Un Pape au zénith, malgré tout...

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Notre consoeur du site Benoît et moi publie en traduction ce point de vue du « vaticaniste » John Allen (extraits):

rio-de-janeiro_720.jpg« Soyons clairs: le premier voyage intercontinental de François du 22 au 29 Juillet au Brésil pour les Journées Mondiales de la Jeunesse sera presque certainement perçu comme un succès retentissant. Il va probablement attirer de grandes foules enthousiastes, son style chaleureux, «en roue libre» devrait fonctionner aussi bien sur les routes qu'à Rome, et sa préoccupation palpable pour les pauvres devrait toucher des cordes profondes dans une société où la justice sociale est une idée fixe. » (…)

En termes de sécurité et de contrôle de la foule, les fonctionnaires au Brésil ont annoncé qu'ils répartissaient les événements sur l'itinéraire du pape en trois catégories, "verts", "oranges" ou "rouges", correspondant au niveau de menace qu'ils attribuent à chacun : risques «verts»: retour de flamme et protestation,  risques «orange»: sécurité et manipulation, risques «rouges»: Mission et œcuménisme. C’est en effet sur ce troisième point que l’on notera la capacité du nouveau pape à affronter le véritable enjeu : (…)

Risques «Rouges»: Mission et œcuménisme

Le risque le plus sérieux auquel François devra faire face, c'est probablement que son voyage sera un triomphe à court terme, mais sans les conséquences à long terme qu'il souhaiterait lui donner. Le Brésil est un bon baromètre pour les tendances plus larges qui touchent l'Eglise à travers le continent. Pour avoir une idée de ce qu'elles sont, voici le titre d'une nouvelle étude du Brésil publié par le Pew Forum jeudi: «Evolution du paysage religieux au Brésil: catholiques romains en déclin, protestants à la hausse».

Comme le souligne l'étude, le Brésil est le plus grand pays catholique du monde, avec une population catholique estimée à 123 millions. Le catholicisme a été la tradition religieuse dominante du pays, et pendant longtemps la seule, depuis l'époque de la colonisation portugaise au 16ème siècle.

Pourtant, la part de la population catholique a chuté de façon spectaculaire au cours des dernières décennies, et au cours des 10 dernières années, le nombre total de catholiques a dégringolé. Il y a un quart de siècle, plus de 90 pour cent du Brésil était catholique; il y a une dizaine d'années, ils étaient de 74 pour cent, et aujourd'hui, ils sont 65 pour cent. Il n'y a pas besoin d'un grand effort d'imagination pour envisager une situation dans laquelle les catholiques au Brésil représentent une minorité statistique.

Les grands gagnants de cette transition ont été les protestants, principalement les évangéliques et les pentecôtistes, qui sont maintenant 42 millions, ou 22 pour cent de la population. Gagnants également, les Brésiliens sans appartenance religieuse qu'en Occident, nous appellerions probablement «laïc(iste)s». Ils sont maintenant 15 millions, soit plus de 8 pour cent du total national.

L'étude Pew constate que l'immigration et la démographie n'ont pas d'impact sur la croissance du pentecôtisme au Brésil, entre autres parce que moins de 1 pour cent de la population est né à l'étranger. Le principal facteur, selon l'étude, est la «commutation religieuse» - et même s'ils sont trop poli pour le dire à haute voix, ce qu'ils veulent dire, c'est la défections au sein de l'église catholique.

Peut-être plus significatif pour l'avenir, les données de Pew suggèrent que le catholicisme vit un moment particulièrement difficile chez les jeunes et chez les citadins - en d'autres termes, précisément chez les cohortes démographiques destinées à donner le ton au Brésil. Selon l'étude Pew, 46 pour cent seulement de la population de Rio de Janeiro, la ville où François se rendra la semaine prochaine, s'identifient effectivement comme catholiques.

Ces tendances posent deux défis évidents. Il y a d'abord la situation œcuménique. Le Brésil est en train de passer d'une société religieusement homogène à un mélange éclectique de différentes affiliations, ce qui signifie que les dirigeants catholiques ont du rattrapage à faire en termes de dialogue et de sensibilisation. Les relations entre les évangéliques, les pentecôtistes et les catholiques au Brésil sont une mixture, certains s'entendent très bien et perçoivent une cause commune dans ce qui concerne la croissance du laïcisme, tandis que d'autres sont coincés dans des rivalités confessionnelles.

Dans le milieu des années 1990, par exemple, l'évêque Sergio von Helde de l'Eglise universelle du Royaume de Dieu au Brésil, l'une des plus grandes dénominations pentecôtistes en Amérique latine, est allé à la télévision pour la fête de Notre-Dame d'Aparecida, patronne nationale du Brésil , et a donné un coup de pied dans une icône de la Vierge, en déclarant: «Ce n'est pas un sainte!». Il s'ensuivit un tumulte où les catholiques outragés ont attaqué des églises pentecôtistes et von Helde a été reconnu coupable de manque de respect public pour un symbole religieux et condamné à deux ans de prison.

Pour illustrer le fait que ces tensions ne sont pas entièrement dissipées, considérons qu'il y a trois grands réseaux de télévision brésiliens qui ont des correspondants à bord de l'avion papal pour le voyage de François. Pourtant, le deuxième plus grand réseau du pays, Record, détenu par un milliardaire évangélique / pentecôtiste nommé Edir Macedo Bezerra, n'est pas représenté.

Dans le programme officiel de la visite papale, il n'y a pas de rencontre prévue entre François et les dirigeants d'autres confessions chrétiennes, bien que Benoît XVI ait tenu une telle session œcuménique lors de sa visite en 2007. Etant donnée cette omission, il n'est pas certain que le voyage engendrera un nouvel élan œcuménique. Sur le front missionnaire, à la fois au cours de ses 15 ans comme archevêque de Buenos Aires, en Argentine, et depuis qu'il est devenu pape, François a maintes fois énoncé sa vision d'une Église plus évangélique - une église qui, pour utiliser le langage du pape, «sort de la sacristie et va dans les rues». C'était le cœur de la vision du catholicisme en Amérique latine exprimée dans le document de 2007, adoptée par l'assemblée des évêques du continent à Aparecida, au Brésil, le célèbre sanctuaire marial où François se rendra le 24 Juillet.

S'il y a un endroit sur la carte catholique où une version plus missionnaire du catholicisme est à l'ordre du jour, c'est sans doute le Brésil. C'est là que réside le véritable enjeu du voyage: François pourra-t-il traduire sa popularité personnelle en un élan durable d'énergie missionnaire? Si oui, des historiens raisonnables, et pas seulement des journalistes et des experts excitables, diront peut-être que son premier retour dans un pays d'Amérique latine est un succès. Si non, alors le voyage peut finir par paraître un exercice «pour se sentir bien», avec des résultats mitigés.

Tout l'article ici:

Un Pape au zénith, malgré tout . Voir aussi : 46% de catholiques à Rio de Janeiro

De toutes parts nous viennent, en effet, les signaux donnés par la foi militante d’un pentecôtisme très hostile à l’Eglise catholique, affaiblie par l'image incertaine de son discours postconciliaire. JPSC

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